Invasion - Alia. [CLOS]

Sakuranbo était une fois de plus en train de surprendre Alia. Après avoir pris la situation en main avec une poigne inattendue, voilà qu'il dévoilait une faiblesse insoupçonnée … Ne sachant comment réagir, la jeune femme resta muette, détournant le regard de l'homme en pleurs.

Tout de même, quelle malheureuse coïncidence ! Alia n'était pourtant pas un prénom extrêmement répandu, et il avait fallu que celui-ci parmi tous évoque de douloureux souvenirs à Sakuranbo !... Quelle misère que celle des Hommes, quand les Dieux se jouent de leurs vies … Qu'avait donc souhaité Mickaël à travers ce signe ? Était-ce un encouragement à se rapprocher, ou bien au contraire le présage d'un destin tragique ? Comment l'interpréter ? Comment le comprendre ? Mais peut-on seulement espérer comprendre ce que les Dieux tentent de nous dévoiler, à travers un langage mortel qui n'est pas celui de la Vérité, mais qui seul peut atteindre nos sens ?

Nul ne peut trancher.

Alia aurait aimé en savoir plus sur la vie de son homonyme, mais après une telle introduction elle n'osait demander. Aussi se pencha-t-elle en elle-même.

"Je n'ai rien vécu de comparable, commença-t-elle à voix basse, la preuve en est que je me tiens devant vous. Ma haine des Purs s'est construite sur des bases beaucoup moins solides que la vôtre …"

Les yeux dans le vague, elle s'adossa contre un mur.

"Ma mère était une prostituée, mon père le secrétaire d'un ambassadeur. Il n'a jamais su que ma mère était enceinte de lui, et d'ailleurs il n'en aurait sûrement rien eu à faire. Après tout, il l'avait payée pour avoir du plaisir, pas un enfant. Quand ma mère a compris que j'étais Métissée, retrouvant du même coup qui était le père, elle m'a mise dans un bateau pour le continent central. J'avais quoi, sept ans ? Moins ?"

Elle haussa les épaules.

"C'est quand même drôle qu'elle m'ait traitée comme si j'étais une souillure alors que c'est elle qui a couché avec un ennemi, non ?" conclut-elle sur un ton léger.

D’un geste lent et mélancolique, la Cerise s’approcha de la jeune Métissée et posa ses mains sur ses épaules, la fixant de son regard troublant. Ses yeux brillaient encore d’eaux passées et quelques mèches étaient encore collées contre son beau visage. Ses doigts serrèrent doucement la peau d’Alia tandis qu’il lui disait d’une voix douce :

« Je suis désolé, sincèrement… ».

Il laissa glisser ses paumes contre son dos, doucement, d’un geste naturel.

« Personne ne mérite autant de souffrances et pourtant chaque membre de notre peuple semble en accumuler douloureusement dans son sac… »

Peu importe ce qu’il disait, au fond : le principal devait passer par le ton de sa voix et par ses gestes. C’était un peu comme hypnotiser Alia, mais de manière beaucoup plus douce.

« J’ai eu la chance de connaître mes parents mais je peux m’imaginer ce que tu as vécu… ».

Ses bras appuyèrent doucement contre les reins de la demoiselle tendis que Cherry avança d’un pas, la serrant étroitement dans ses bras. Il appuya sa tête contre son épaule et lui murmura amoureusement à l’oreille :

« Alia… Voudrais-tu venir avec moi dans un autre monde… Là où nous ne seront plus des êtres souillés et impurs… Où nous pourrons vivre en paix pour l’éternité… ».

Ill allait beaucoup trop vite et le savait pertinemment; c’en était d’autant plus excitant. Soit Alia craquait, soit elle le repoussait. Ses promesses, aussi futiles soient-elles, pouvaient avoir un fond de vérité : en effet, dans le cas où Alia eut vraiment souhaité obtenir ce genre de paix, le Pape aurait pu l’emmener en toute impunité dans le Royaume des Atouts. Mais il n’avait aucunement l’intention de sacrifier son repas avant de l’avoir consommé…

Et pendant ce temps ?...

Mikado et Hanabi étaient restés seuls, assis par terre. Les deux autres étaient partis, sans même se présenter. Non que cela vexe Hanabi, mais bon, il se vexait un peu pour Mikado. C'était lui qui avait "appelé" l'homme ici, celui-ci pourrait tout de même lui témoigner un peu plus d'attention ! Enfin, vu que pour ce dernier, rien ne semblait plus compter que continuer à jouer au janken avec lui …

D'ailleurs, Hanabi n'avait vraiment pas de chance : il perdait tout le temps. À part une fois de temps en temps. Il en riait et le prenait bien. Mikado aussi riait beaucoup. Puis ce dernier désira arrêter ; et Hanabi demanda un break de défaite pour sa part, avec un soupir de perdant d'honneur outragé. Mikado posa sa tête sur l'épaule de son ami, et dit simplement :

"Je suis fatigué~ …"

Le jeune homme aux cheveux blonds le regarda avec surprise, et lui répondit d'un ton d'évidence :

"Eh bien, tu n'as qu'à t'endormir !"

La surprise avait été pour le *Il n'y a pas pensé tout seul ?...* d'Hanabi. Mais cette surprise se refléta dans les yeux de Mikado, étonnée à son tour de la répartie. Il remonta sa tête droite, posa sa main sur son menton et fit :

"C'est vrai. Tu as de bonnes idées !"

Le petit garçon sourit.

Et il s'endormit, sur ces bonnes paroles.

Et il disparut. Hanabi agita les bras avec un sourire de fausse résignation, et disparut à son tour … Là où il était, Cherry ne devait plus y être. Il devait être de retour avec sa princesse –si celle-ci n'était pas partie entre-temps, bien sûr …

***

Mikado ouvrit les yeux. Il était dans un lit –son lit. Il sourit, et murmura :

"Quel rêve étrange !"

Son sourire fut brisé par un bruit de tonnerre ; c'était la tempête dehors. Cela n'annonçait rien de bon … Mikado vint se pelotonner dans sa mer de peluches ; cela lui tenait autant –voire plus- chaud que son propre lit. Il ne retrouva pas le sommeil avant la nuit suivante …

[Je ne lâcherai pas >=D]

[En passant, je suis désolée mais Cherry s'est effctivement présenté... Vous croyez que ça sors d'où Sakuranbo? = . =]

Avant même qu'Alia ait pu déterminer si la déclaration de Cherry lui plaisait ou non, dans le petit espace d'incertitude entre le stimulus et le réflexe, là où même la personne concernée ne saurait dire comment elle allait agit la fraction de seconde suivante, pendant ce moment si court, Sakuranbo disparut. La jeune femme sursauta, et ne put s'empêcher de le chercher du regard, même si elle devinait que c'était peine perdue.

"Sakuranbo ?..."

Comme de bien entendu, personne ne répondit. Le Métissé s'était volatilisé comme il était apparu : sans crier gare et sans raison apparente. Bizarrement, cela mit Alia en colère. Difficile d'en analyser les raisons, mais cela l'énervait, sans aucun doute possible.

Elle fit quelques pas vers la sortie du bâtiment, puis se rappela qu'elle était désarmée. Elle retourna alors là où elle avait rencontré les deux Trèfles. Elle s'approcha subrepticement, ne voulant pas leur signaler sa présence s'ils étaient toujours là. Par chance, ils étaient partis, en laissant derrière eux la hache d'Alia. Elle la ramassa, et se sentit rassérénée par le poids familier de l'arme.

Les Piques l'interpellant dans la rue lui fournirent un bon prétexte pour passer sa colère.



[THE END]