[sans titre]
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Deck Of Cards :: Hors Jeu :: Fictions
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Troisième chapitre (suite et fin) :
- Spoiler:
- Lorsque je quittais le bureau, j'avais hâte d'aller me coucher. Je craignais aussi qu'Edouard ne fut plus là et que j'espérais pour rien. Mais lorsque mes yeux distinguèrent sa silhouette près de ma voiture, je me sentis si légère et heureuse que j'en courus presque dans ses bras. Malheureusement, je dus me freiner car il était encore trop douloureux de m'approcher d'avantage. Moi qui avais craint qu'il est à m'éviter, voilà que c'était moi qui me voyais cantonner derrière un périmètre de sécurité ! C'était ridicule !
_ « Bonsoir ! » minaudai-je.
_ « Bonjour ! » corrigea-t-il avec un sourire adorable. « Je te reconduis ? » proposa-t-il. « Je te propose juste de conduire. » ajouta-t-il devant mon air peu rassuré.
_ « Oh ! Euh... oui, ce ne serait pas de refus ! » admis-je.
_ « Je ne devrais pas t'attendre ainsi, je ne peux pas m'empêcher de t'espionner. » marmotta-t-il.
_ « M'espionner ? »
_ « Tu sais, si tu veux, je peux m'arranger pour que tu es une chambre pour toi seule ? » proposa-t-il sur un ton très sérieux cependant que son sourire en coin me fit sourire à mon tourd de contentement.
_ « Parce que tu viens depuis longtemps me voir dormir ? »
_ « Depuis que tu es entrée à l'université. C'est très instructif pour moi... et mystérieux : tu es si silencieuse, si paisible... Mais comme la plupart du temps ta colocataire est là aussi je ne peux pas rester. En tout cas, pas lorsque ton ex-petit ami l'accompagne. »
_ « Comment sais-tu que je suis sortie avec Jack ? »
Je devais soit avoir l'air soit furieuse, soit consternée, en tout cas c'était assez évident pour qu'il ravale immédiatement son sourire.
_ « J'ai... Je l'ai entendu. Je suis désolé ! »
_ « C'est ça que tu entendais par « m'espionner » ? Tu parle de ma vie privée. C'est à moi de t'en parler. Et c'est à moi de décider quoi te dire et quand. On espionne pas les gens. Ce n'est pas honnête ! »
_ « Je suis désolé ! Je ne pouvais pas m'en empêcher. J'avais tellement envie de te connaître ! »
_ « Pendant que tu refusais de répondre à mes questions ? Comme si notre relation n'était pas assez inégalitaire comme ça ! J'ai besoin de pouvoir avoir confiance en toi, Edouard. Et toi, tu dois avoir confiance en moi également. Il faut que tu arrête de m'espionner, même si je veux bien croire que ça pouvait être très tentant. Mais, je t'assure que tu n'en auras plus besoin maintenant. Tu n'as plus besoin de te cacher. Si tu veux savoir quelque chose tu n'as qu'à me le demander. Je ne veux pas avoir de secret pour toi, et même si j'en avais je te demande de respecter mon intégrité, et donc mon intimité. »
_ « Tu as peur que je fasse comme Jack ? Lui aussi ne voulait pas te faire de mal. Mais malgré que ses intentions étaient bonnes, il t'en a qu'en même fait. »
_ « Le fond était bon mais pas la forme, je sais déjà ça. Je l'ai vécu. »
_ « Et j'use des mêmes méthodes. Je ne voulais pas te blesser, mais mon comportement ne va pas vraiment dans ce sens. Je sais que je n'ai pas d'excuse. Je le savais en agissant. Et j'avoue que je me justifiais en pensant que, de toute façon, tu ne le saurais jamais. Parce que, si un jour tu découvrais ce que j'étais, tu risquais de nous dénoncer et me forçais à partir, à renoncer à toi. Ou tu refuserais tout bonnement d'avoir encore à faire à nous. Dans les deux cas, je t'aurais perdu. Et je n'aurais jamais su qui tu étais. Je n'aurais jamais réussi à te comprendre et à te connaître. Je... Même maintenant, j'ai peur que tu m'échappe. Je n'arrive pas à te saisir. Tu reste un mystère pour moi, et je crois que c'est encore plus frustrant que de devoir respirer l'odeur de ta soeur ! »
_ « Je comprend. Notre amour n'a rien de comparable avec mon histoire avec Jack. La confiance que j'ai pour toi non plus. Je suis faite pour vivre avec toi. Je le sens. Je ne vais pas m'enfuir, Edouard ! »
_ «Je ne te quitterais pas, non plus. Je ne t'abandonnerai jamais. Je ne veux pas te faire de mal. Pardonne moi ! C'est tellement frustrant, tu ne peux pas imaginer ! Alors que je veux te connaître, tout savoir de toi, je n'arrive même pas à sentir ton odeur. Tu as l'air tellement blessé... »
_ « Disons que j'ai eu peur un moment. Ca a été un peu comme une douche froide, en vérité. J'ai guéris de Jack, tu vois, mais pas tout ce qu'il a révélé de la nature humaine. Parfois, j'idéalise les gens et je prend la réalité comme un claque. J'ai eu beaucoup de mal à admettre la vérité. J'essayais de trouver des excuses à Jack. Lorsqu'il est revenu la première fois, j'ai vraiment cru qu'il avait changer. J'étais prête à ne jamais l'abandonner. Et puis un jour, j'ai entendu les gens parlaient de moi. Jack avait écrit une sorte de petite « confession » sur moi. Il savait pratiquement tout de moi : Tout ce que j'avais pu lui avouer, ce qu'il était le seul à savoir, à avoir pu voir de moi. Je me suis sentie trahit et violée dans mon intimité, exposée. Il y avait des photos avec, comme si j'avais été espionnée. Je me suis enfuie. Je me suis cachée. Le lendemain, il a sonné chez moi. Mais ce n'était pas pour s'excuser, ou du moins s'expliquer. Il y avait du monde avec lui. Ils voulaient savoir ce que je pensais de notre histoire, de sa confession, et je n'ai rien trouvé à dire. Alors il m'a dit : « Finalement, t'es pas la plus bonne. ». Et il est parti. Il m'a ignoré pendant ce qui m'a semblé une éternité.
Je l'aimais encore. C'était le premier garçon avec qui je suis sortie. Ma première histoire d'amour et celui à qui j'ai donné ma virginité. Il n'a jamais admis qu'il m'avait fait du mal. Je crois que pour lui, cette confession c'était une façon d'exprimer ce qu'il ressentait. Il n'avait pas penser que ça pourrait me faire souffrir. Pour lui, c'était une sorte de déclaration d'amour. Il a très mal pris ma réaction. Il a cassé parce que je n'arrivais pas à le comprendre.
Et ensuite, du jour au lendemain, il est revenu. Il m'a poursuivi, supplié, menacé. Mais je suis qu'en même revenu vers lui. Je lui ai donner une autre chance, et encore une autre. Mais ça ne s'arrêtait pas. Il me trompait, me mentait sans cesse. Il me laissait toute seule. C'était devenu une routine dans laquelle je disparaissais. J'ai compris qu'il ne pourrait pas se raisonner de lui-même. Alors j'ai décidé d'y mettre un terme moi-même. J'ai cru que jamais je n'y arriverai. Mais je l'ai fait ! Je crois que ma libido est de celles sensibles aux gens malheureux, en détresse. Et quand ils sont guéris ça ne colle plus.
Quand j'ai cessé de fuir, que j'ai accepté de le voir tel qu'il était, j'ai dit : « D'accord. L'homme n'est pas parfait. Il peut même parfois être monstrueux. Mais je continuerais à croire en la lumière qu'il porte en lui également. Et je lui ferais voir, je la lui rappellerais chaque jour. ». J'ai réussis à retrouver foi en ça. Et depuis que je t'ai rencontré, je sais que je ne me trompe pas. A moi, tu me sembles plus humain que beaucoup d'hommes. Tu es ma lumière, mon étoile. »
_ « Nous devons tous les deux nous évertuaient à ne pas nous cacher de l'autre. Toi, parce que tu n'as à avoir peur de souffrir. Moi parce que je n'ai plus à avoir peur que tu t'enfuis, sans que je ne sache jamais qui tu étais. » me sourit-il.
_ « Je suis désolée. A mon grand regret, ma clémence a des limites. » soupirai-je
_ « A ton grand regret ? » interrogea-t-il surpris.
_ « Oui, c'est une tendance chez moi. » avouai-je, penaude.
Il m'offrit son sourire en coin et me ramena jusqu'à la porte de ma chambre.
_ « Tu ne rentre pas ? » demandai-je.
_ « Non, ta colocataire est là. Et puis, ce ne serait pas très sage que je reste quand tu ne peux pas rester près de moi sans te transformer en glaçon. Et sans que je puisse te réchauffer. Une autre des frustrations que tu me fais subir. »
_ « Tu as sûrement raison. »
_ « Bonne nuit, Ella. » me murmura-t-il si près que nos lèvres auraient presque pu se toucher. Bien sûr, son haleine fraiche n'était rien comparée à la brûlure du froid intense qui me transperça. Léger, il fit mine d'embrasser ma paume, en s'éloignant sans bruit. Dans sa fuite, il murmura notre premier « Je t'aime. ». Et il n'y eu plus que le silence et la présence chaude et tendre du souvenir d'Edouard.
Inévitablement, nous n'échappâmes à aucun regard depuis la seconde où Edouard me rejoignit le matin sur le perron de la fac jusqu'à l'instant où nous claquions les portières respectives de Sa voiture pour me rendre au boulot. Le pire moment fut sans doute celui de la cantine où nous nous installâmes tous les deux sur une table vide, plutôt qu'il rejoigne celle de ses frères et soeurs en me laissant à la table de mes amis. Cela me fit drôle et un noeud vint tordre mon ventre tandis que nous traversions le réfectoire. J'étais si nerveuse que je pouffais, tant cette situation me paraissait comique et rocambolesque. On eu cru Roméo et Juliette entre leurs deux familles, à savoir les autres Summers et le reste du lycée. On était en plein cliché : une pauvre fille banale qui sortait avec un être extraordinaire et incroyablement beau qui pourrait bien la tuer.
_ « Nous sommes leur nouvelle attraction ! » ria Edouard.
Quelle veine !
_ « Je n'ai pas vu Jack aujourd'hui. » murmurai-je.
_ « Moi non plus. » avoua Edouard. Etrangement, je ne m'inquiétais pas des réactions des gens, pas même de celle de Jack. Etre avec Edouard me semblait si naturel. Je ne voyais pas ce qu'il y avait de s'y extraordinaire à notre relation. Bien sûr, je n'aurais jamais pensé pouvoir, moi, être sa petite amie. J'aurais cru qu'il fallait être meilleur, plus belle... Mais finalement, on ne jurait pas trop. En dehors du fait que c'était un vampire, mais cela personne n'en savait rien. Alors que regardaient-ils ?
_ « Il s'inquiètent pour toi. Et puis, n'oublie pas que personne d'autre n'avait réussi à approcher ma famille d'aussi prêt. Ils ne s'y risquaient pas non plus. Gagner leur confiance et nous mêler à eux ne faisait pas partit de nos intérêts. Ils auraient pu devenir trop vite des proies faciles, ce n'est pas drôle. Ils nous trouvent bizarres sans consciemment savoir pourquoi. C'est plutôt leur instinct de survie qui les alerte même s'ils essaient de le justifiaient par de fausses excuses. »
_ « Mais, si vous le vouliez, vous arriveriez sans problème à les mettre en confiance, à faire taire tous signaux de danger. »
_ « Perspective rassurante. »
_ « Tu serais vraiment un petit joueur si tu t'abaissais à ça ! »
_ « C'est aussi notre avis. »
_ « En revanche ta famille n'a pas l'air ravie de mon intrusion... »
_ « Je sais. Ils sont un peu effrayés. »
_ « Comme Jane l'autre nuit ? »
_ « Comme Jane, oui. On est arrivé. »
Finalement, ce fut avec le sourire que je rejoignis mon bureau. J'enserrais ma clef usb afin de charger certains plans retravaillés et d'autres dossiers sur mon ordinateur. Je les regardais un à un s'afficher, lorsque une des assistantes arriva devant le bureau en plastique qui me servait d'office.
_ « Je transmets c'est tout ! » rappela-t-elle par mesure de précaution.
_ « Quelque chose me dit que c'est de Joacquin Prince que vient le message ! » devinais-je en ôtant mes lunettes à monture noire. Tout le monde au bureau avait senti que le nouveau propriétaire du journal et moi-même avions du mal à coopérer, incompatibilité de tempérament mais aussi différent sur les méthodes employées par l'un comme par l'autre.
_ « Il dit qu'il veut que tu revois un peu les photos pour Lili. » transmit-elle en me tendant une enveloppe de carton dans laquelle il avait rangé les clichets que je lui avais remis tôt ce matin. J'ouvris la chemise, notant toutes les photos refusées. Au bout du compte, je me levais, bien décidée à lui soutirer des explications. Furibonde, j'entrais dans son bureau sans attendre qu'il réponde à mes trois coups.
_ « Il n'y a rien à redire sur ses photos ! » m'exclamai-je, tandis qu'il restait toujours de dos, lisant nonchalamment un dossier duquel il ne leva même pas la tête pour me répondre :
_ « Si. Vous avez du voir les ratures rouges. »
_ « Vous ne pouvez pas refuser toutes mes photos ! J'ai traité ce sujet de mon mieux ! »
_ « En êtes - vous sûre ? Parce que je vous ais demandé de la mettre en valeur, de la montrer, et je n'ai rien vu. »
_ « Alors qu'est-ce que vous vouliez ? Je ne peux pas changer ce que vous voyez – ou ne voyez pas ! Il fallait le dire si vous vouliez vous servir de son physique pour faire parler du journal ! Clairement, sans vous cachez derrière des tournures de phrases et des expressions commodes. Si vous voulez faire plus de ventes que cet espèce de macho qui, soit dit en passant, ne va pas lui voler ses lecteurs, trouvez-vous un autre photographe ! Je n'ai pas l'intention de bâtir ma carrière avec ce genre de méthodes. »
_ « Vous avez fini ? »
_ « Non ! Il y a encore un dernier point. Quand une femme parle avec quelqu'un, elle veut être regarder ! Coucou ! »
Monsieur se résigna enfin à se tourner vers moi.
_ « Je suis tout à fait conscient de la réputation de ce journal. Vos photos sont mauvaises. J'aurais autant fait de prendre une photo d'identité ou une photo de famille. C'est conventionnel, classique. »
_ « Ce n'est pas ma faute si ma vision des choses ne vous plait pas... »
_ « Aurai-je oublié de signaler que vous aviez plagié ? »
_ « Quoi ? Vous dites n'importe quoi ! Je n'ai jamais... » m'exclamai-je.
_ « Vous reconnaissez ceci ? » demanda-t-il en me tendant une de mes anciennes photographies.
_ « Oh non ! Je me suis copiée moi-même. » m'effondrai-je.
_ « Que vous ayez montré Lili comme une femme comme toutes les autres, on aurait pu en faire quelque chose, mais là il n'y a rien à faire. Ces photos ne montrent rien, aucune personnalité. Je voulais voir l'âme de Lili dans cette photo. Où est Ella Mars dans ce travail ? Où est l'auteur de ces photos ? Vous êtes beaucoup trop prudente. Certes, votre technique est impeccable, mais cela ne suffit pas. N'ayez pas peur de ce que vous montrez. »
_ « J'ai encore du temps ou pas ? Pour retravailler ce sujet. »
_ « Le bouclage sera terminer pour vingt heures. Et demain matin, Lili est invitée à une émission de radio. »
_ « Oui, je sais. Je l'écouterais. »
_ « Moi aussi. »
_ « Mes parents voudraient te rencontrer, tu es prête ? »
_ « Me rencontrer ? Là ? Tout de suite ? Mais euh... je ne sais pas si je vais leur plaire, et, c'est déjà une expérience houleuse pour un couple normal, alors pour nous ! Tu as vu la réaction de tes frères et soeurs quand tu es venu me chercher à la fac et qu'on s'est installé à une autre table à la cantine ? »
_ « Et c'est justement pour ça qu'il faudrait que tu vienne. Je suis sur que s'ils te rencontrent ça ira mieux. Ils seront rassurés. »
_ « D'accord. Je veux les rencontrer moi aussi. Je viens avec toi. Mais à une condition : on prend la voiture ! »
Edouard éclata de rire et m'ouvrit ma portière. Je commençais à me rassurer lorsqu'il conduisait car il roulait à très, très vive allure. Malheureusement pour lui, nous avions pris ma voiture et il ne pouvais pas aller aussi vite qu'avec la sienne. Nous arrivâmes tout de même bien assez rapidement chez lui. Les Summers habitaient un peu à l'écart de la ville. Toute fois, je notais qu'il n'y avait aucune tourd de quelque sorte que ce soit à l'horizon. Cependant, ce chemin me rappelait quelque chose :
_ « Edouard, ce n'est pas la route vers l'ancienne église ? Celle qui avait brûlé en 1939 ? »
_ « Si. C'est là que nous allons. »
La petite route que nous avions emprunté à travers les arbres nous amenait à une grande maison blanche, dont toutes les fenêtres étaient masquées pour ne pas laisser entrer le soleil. C'était une grande maison bleue et blanche. La maison était entourée d'arbres, de plantes rampantes et de fleurs. Le jardin me semblait immense, plus par ce que je ne voyais pas et devinais que par ce que j'étais capable de distinguer dans l'obscurité.
_ « Nous ne pouvons habiter que des lieux publics, à moins d'être invités. Vivre en ville avec tous les volets sans cesse fermés attireraient les voleurs. » m'expliqua-t-il.
_ « Mais personne ne signalerait la disparition d'un voleur, n'est ce pas ? » notai-je. Il l'admit d'un signe de tête.
_ « Des vampires habitent celle qui fut Maison de Dieu ! Ca sonne bien comme gros titre, non ? Edouard, c'est magnifique ! » Comme tout ce qui touchait aux Summers apparemment.
_ « Tu aime ? » s'étonna-t-il.
_ « Oui, beaucoup. C'est un peu la maison familiale de mes rêves. Ce n'est pas ce que j'avais pu redouté. Pourquoi ça t'étonne ? »
_ « Je ne pensais pas que tu avais tant de caractère. »
J'aurais très certainement pu glaner quelques cadeaux de réconciliations après pareille offense mais Edouard eu au moins la délicatesse de me prévenir que ça n'était pas le bon moment :
_ « Ils nous attendent. »
Attendent ? Entendent ? J'avais beau avoir l'impression de plus en plus nette d'être cryogénisée à mesure que je me rapprochais de la maison, je n'avais aucun moyen de savoir à partir de quand j'étais à portée d'oreille ou de vue des Summers, ni aucun moyen de savoir s'ils n'en profitaient pas. Edouard me l'avait déjà bien assez prouver. Or, que ce-dernier s'abstienne de m'espionner n'avait aucune incidence sur sa famille. En réalité, je doutais avoir assez d'assurance pour oser défendre mes positions. Je sentais même mon courage – ou, au moins, ma détermination – fondre comme neige au soleil à mesure que l'on se rapprochait de la porte d'entrée. Je devais même avoir l'air de me tasser sur moi-même au fur et à mesure.
D'autant plus que maintenant entourée de vampires, mes possibilités de révéler à autrui leur secret devenaient infimes : ils me tueraient sans aucun doute avant. Toutefois, même si personne n'était prévenu que je devais me rendre chez les Summers ce soir, me faire disparaître le jour- même où, pour la première fois, Edouard et moi étions apparus en public serait plutôt une erreur tactique. Tout les élèves avaient remarqué qu'Edouard avait quitté les siens pour rester avec moi à midi, ce qui constituait une première. Jamais depuis leur arrivée les Summers ne s'étaient séparés et c'était même quelque chose qui semblait impossible. Ils étaient trop unis et surtout trop semblables.
Lorsqu'Edouard ouvrit la porte, je fus accueilli par La Marche des Valkyries ! Brillante illustration de la situation ! C'était très diplômatique ! Edouard ne sembla pas inquiet de ma réaction et il eu raison car je préférais en rire. Le hall d'entrée était vaste, comme me semblait l'être toute la maison. Elle était très ouverte bien que toute les fenêtres soient calfeutrées.
_ « Je suis impressionnée ! C'est vraiment différent de ce que j'avais pu imaginé : pas de cercueil, de gargouilles ou de vieux château... Dommage que la lumière ne puisse jamais y entrer. »
_ « Parce qu'il n'y aurait plus de vampires pour faire de saletés ? Rassure toi, nous sommes très propres. Et, qui plus est, nous avons horreur du gaspillage. Aucune goutte ne doit se perdre ! » lâcha une voie cristalline derrière moi.
Je sursautais en faisant volte face.
_ « Je te comprend : le sang ce n'est pas évident à laver. Et les cadavres dans le placard peuvent parfois être difficiles à cacher. » continua la première arrivée.
La voix claire et légère appartenait à une toute aussi fluette jeune femme. De la même façon qu'Edouard avait des airs doux et tendre comme ceux d'un ange, nul ne pouvait voir cette jeune femme à l'apparence si fragile comme un assassin capable d'emboutir une voiture. Elle portait de courts cheveux noirs en vaguelettes autour d'un petit visage tout à fait ravissant, à ceci près que ses yeux étaient d'un rouge prononcé. Pas de doute possible : c'était l'heure du dîner !
_ « Sally, pourquoi fais-tu ça ? »
_ « Je fais quoi ? »
_ « Je ne révèlerai à personne votre secret. » Elle ne m'inquiétait pas autant qu'elle aurait du, ce qui était étonnant ! Ses boutades me plaisaient en réalité : elles m'amusaient. Même si je ne me serais pas risquée à le montrer.
_ « Sally le sait ! » intervint une voix que je reconnaissais sans peine. Une voix de femme, calme et chaude, plus grave que celle de Saly.
Effectivement, le docteur Jane Summers était apparue dans la pièce sans que je n'entende quoique se soit. A son côté se trouvait également son mari et mon professeur à la fac, Laurent.
Aux premières marches de l'escalier, de l'autre côté de la pièce, se tenaient la belle blonde, Désiré. Et à son côté, un autre ange brun.
Ne manquait plus que le troisième fils, la petite tête blonde, qui rejoignit ses parents. Au cas où ça n'était pas assez clair, j'étais complètement encerclée de vampires !
_ « Tu devrais y aller, Sally. » suggéra son père. La jeune femme ne se le fit pas dire de fois et s'en alla.
_ « Je suis désolée. Je ne pensais pas à mal. J'admirais votre maison et j'ai sorti une remarque déplacée. » m'excusai-je.
_ « Ne t'en fais pas, ma femme regrette aussi parfois de ne pas pouvoir profiter du soleil dans sa maison. » me rassura Laurent Summers.
Son mari était plutôt séduisant et devait avoir une trentaine d'année. Du moins, en apparence. Il avait toujours de fins cheveux cuivrés parfaitement coiffés et ses yeux brillants avaient néanmoins une couleur de terre sombre. Ce n'était donc pas la fin qui les faisaient luire. Bizarrement, je n'en étais pas spécialement rassurée.
Quand à sa femme, je n'osais pas la regardais trop directement. J'avais trop mauvaise conscience. S'il y avait bien un Summers en particulier à qui j'avais donné des raisons de vouloir me tordre le cou c'était bien elle. Elle était belle évidemment, mais elle avait du sûrement avoir du charme lorsqu'elle était humaine. Elle faisait un peu plus âgée que Laurent, bien qu'il reflétait l'intelligence. Ses cheveux châtains lui tombaient sur les épaules. Bien qu'elle ait un teint tout aussi parfait et une peau tout aussi fine et éclatante que les autres membres de sa famille, sa paleur avait une note différente. On percevait qu'elle avait eu le teint plus mat que les autres. Ses yeux sombres en amande n'avaient pas l'air dur ou en colère, mais plutôt accueillant. Ses lèvres formaient aussi un sourire timide. Mari et femme se tenaient la main et je notais qu'ils portaient bien leurs alliances.
Quand au fils à leur côté, il semblait me jauger sous ses boucles blondes. Je m'étonnais qu'il porte des lunettes en verre sombre à l'intérieur de cette maison. Il était vraiment très pâle, hormis ses lèvres fines. Leur rouge me parut trop prononcé pour un vampire mais c'était sans avoir remarqué qu'il s'agissait d'une dernière trace de sang. Qui disparut si vite que je me demandais si je ne l'avais pas rêvé.
_ « Nous sommes arrivés trop tôt ? » demandai-je, désolée, avec l'espoir que ce ne soit pas une simple piqure de rappel à mon attention de ce qu'ils étaient. Je pensais cette attitude indigne d'eux, ou du moins de la représentation que j'avais pu me faire d'eux.
_ « En fait, c'est nous qui avons pris plus de temps que prévu pour dîner. J'en suis désolé. » expliqua d'une voix très sereine le frère d'Edouard.
_ « Ella, voici Léonard. »
_ « Bonsoir. »
_ « Sally n'a pas voulu être méchante, seulement elle n'a pas eu le temps de chasser avant que tu n'arrive et la soif la rend très irritable. Elle était très pressée : ton arrivée a été impromptue. » continua ce dernier.
_ « Elle a un humour un peu... »
_ « Mordant ? » fini-je pour Edouard.
_ « Elle s'inquiète ! » renchérit la blonde.
_ « Je te présente ma soeur, Désiré, et mon « beau-frère », Gabriel. »
Gabriel était athlétique, cela ne faisait aucun doute, mais ce n'était pas un idiot. Il avait un oeil vif et un grand sourire. Ses cheveux bruns étaient en désordre, comme toujours, mais c'était la première fois que je le voyais avec des lunettes noires en montures d'écailles.
_ « C'est pour cela que nous l'avons invitée ! » rappela Jane. « Mais ne restons pas dans l'entrée, venez ! »
Nous suivîmes.
_ « Une cuisine ? » demandai-je, en désignant d'un coup d'oeil la pièce que nous traversions.
_ « Au cas où nous aurions des invités. » sourit Edouard.
_ « Mais ceux-là ne restent généralement pas pour dîner ! » ajouta Léonard.
_ « Moi qui aurai voulu te cuisiner de bons petits plats, je vais devoir me reporter sur autre chose ! »
_ « Si tu utilisais toute cette énergie pour que l'on puisse se rapprocher se rapprocher tous les deux ? » suggéra Edouard.
_ « Tu es le Mâle en personne ! » riais-je.
La cuisine donnait sur une vaste salle-à-manger-salon. Nous prîmes place autour de la table en verre.
_ « Veux-tu boire quelque chose ? » demanda aimablement Laurent.
_ « Non merci. »
_ « Nous connaissons les sentiments que notre fils éprouve pour toi. Nous voulons seulement nous assurer que vous êtes bien conscients de ce que vous faites. Tous les deux ! » commença-t-il.
_ « Pour l'instant, tu acceptes de garder le secret, mais se ne sera peut-être pas toujours le cas. » continua Gabriel.
_ « Je ne dirais jamais rien ! » me défendis-je.
_ « Nous ne pouvons en être assurer. Si l'un de nous s'attaquait à toi, que tu étais en danger, ou blessée par notre faute ? »
_ « Ca m'est égale ! Edouard le sait bien... »
_ « Et si c'était lui ? » coupa Désiré.
Edouard gronda. Sa vive réaction me figea sur place. Je ne voulais pas qu'ils se battent ou qu'ils se disputent à cause de moi. Je n'avais encore jamais entendu Edouard gronder. Et c'était terrifiant ! Désiré aurait réagi si sa mère ne l'avait pas retenu avant.
_ « Edouard, ne t'énerve pas. Nous sommes là simplement pour discuter. » le suppliai-je. Il me jeta un coup d'oeil et se détendit. Un peu. Je me doutais bien que je n'avais pas saisi toute l'importance de ce qu'elle venait de dire, mais sa réaction était un peu trop violente à mon goût.
_ « Je ne dirais rien. » assurai-je à nouveau.
_ « Pas même si nous nous attaquions à ta soeur ? » demanda Jane.
_ « Vous ne ferez rien à ma soeur ! Vous n'avez aucun droit, ni aucun besoin de vous approchez d'elle. » répondis-je de façon évidente.
_ « Mais c'est elle qui nous attire ! » insista Léonard.
_ « Elle n'en a pas conscience. Elle ne sait rien ni sur vous, ni sur le pouvoir qu'elle a sur les vôtres. Et ce n'est pas moi qui lui dirait. Elle n'a pas besoin de savoir. »
_ « C'est ta petite soeur. Tu pourrais être un jour tenter de lui parler. » renchérit-il encore.
_ « Je n'ai pas besoin de lui dire ce que vous êtes pour cela. »
_ « Mais un jour viendra où tu voudras lui présenter Edouard. Ou, elle pourrait très bien venir à l'improviste à l'université pour te voir. » fit remarquer Laurent, dont les yeux étaient toujours illuminés de curiosité.
_ « J'ai confiance en Edouard. Je sais qu'il se contrôlera. »
_ « Nous connaissons également notre fils. Mais on ne peut pas exclure la possibilité d'un accident avec ce genre de certitudes. » expliqua le père d'Edouard, accordant un regard inquiet à son jeune fils.
_ « Vous croyez que je ne le sais pas ? Que je vous ai attendu pour y réfléchir ? C'est moi sa soeur. C'est à moi de veiller sur ma petite soeur. Vous devez me faire confiance. Je ne lui présenterais pas Edouard s'il n'était pas prêt et si je n'étais pas sure que ma soeur ne risque rien. »
_ « Tu ne pourras jamais en être totalement sure. Il y aura toujours un risque, en es-tu consciente ? » s'assura Jane.
_ « Oui. »
_ « Ca ne nous avance pas beaucoup. Nous n'avons toujours aucune garantie. » remarqua Gabriel.
_ « Tout ce que tu as c'est ta parole. Ce n'est pas suffisant. Maintenant que l'on vous a vu ensemble, tout le monde pourrait nous relier à toi s'il t'arrivait quelque chose. » poursuivit une voix douce que j'avais déjà entendu. De toute évidence, Sally était revenue de chasse, assise tranquillement sur le bord de la table à ma gauche. Et elle était effectivement toujours aussi propre et aussi belle.
_ « Edouard m'a déjà prouver que je ne risquais rien. »
_ « Et si l'un de nous s'attaque à ta soeur ? On pourrait également remonter jusqu'à nous. Et peut-être même les aideras-tu ? »
Edouard aurait volontiers sorti ses crocs. Je sentais qu'il avait de plus en plus envie de mettre un terme à cette discussion.
_ « Si je parle, vous partirez et vous ne reviendrez jamais. Je ne pourrais plus jamais revoir Edouard. Il disparaîtra de ma vie comme s'il n'avait jamais existé, et ça je ne le veux pas ! Je ne le supporterais pas. »
_ « Nous le savons ! » me rassura Jane.
_ « L'aime-tu plus que ta propre soeur ? »
_ « Sally, ça suffit ! Sa soeur n'est pas en danger. » coupa sa mère. « Edouard et Ella savent ce qu'ils font. »
_ « Ne t'en fais pas, Ella, Sally a appris depuis longtemps à ne pas céder à toutes les tentations. Elle écoutera son instinct de préservation. » s'interposa Edouard.
Sally mit quelques secondes avant de détacher son regard du mien. Je ne me remis à respirer qu'une fois qu'elle ait rejoins Léonard de l'autre côté de la table. Edouard se leva également et je l'imitais. Son père me suivait toujours des yeux tandis que sa femme rejoignit Sally. J'interrogeai Edouard.
_ « Il est curieux. Il ne lui avait encore jamais été donné de rencontrer quelqu'un avec des capacités telles que les tiennes. Ou que celle de ta soeur. C'est un chercheur. Il l'a été durant toute sa vie d'Immortel. Il a appris énormément de choses. »
_ « Est-ce qu'il fait des recherches sur moi ? »
_ « Oui. Il a commencé à essayer de trouver une explication à vos cas, d'autres exemples similaires. Mais c'est compliqué. »
_ « Je m'en doute bien. Il faut également faire la part du vrai et du faux et... » Edouard n'eut pas à m'interrompre cette fois. L'intensification de la sensation de froid dans mon dos était suffisamment significative.
_ « Puis-je te l'emprunter ? » demanda Jane à Edouard.
_ « Ella ? » m'interrogea-t-il.
_ « Oui, bien sûr. » acceptai-je en la suivant un peu à l'écart des autres.
_ « Je tenais à m'excuser pour ma conduite envers toi la nuit dernière. Je voulais que tu sache que je regrette. »
_ « Vous n'avez pas à vous expliquez, je vous assure. C'est plutôt à moi, je crois, de m'excuser. Vous ne demandiez qu'une réponse et je ne vous l'ais même pas donné. Seulement, j'avais peur et j'ignorais ce que j'allais faire. Ca faisait trop d'un seul coup. »
_ « Ne t'en fais pas, je me doute bien que ça n'a pas du être évident. D'autant que j'ai du t'effrayer encore d'avantage. J'ai eu très peur cette nuit-là. Je me doutais que tu finirais pas découvrir la vérité. Tu n'avais aucune idée de ce qui t'attendait ! Il fallait que je t'empêche de poursuivre tes recherches. C'est pour ça que j'étais au journal : je voulais te parler. Malheureusement, quand je t'ai vu rentrer précipitamment, j'ai compris que tu venais de comprendre, de remettre tous les indices à leur place. Je n'ai pas compris ce qui l'avait déclenché mais je savais que tu avais trouvé. Si tu avais parlé tu aurais tout détruit ! J'étais quasiment certaine qu'Edouard ne viendrait pas avec nous. Je devais protéger ma famille, mon fils. Je ne t'aurais pas fait de mal, Edouard ne me l'aurait pas pardonné. Il m'aurait certainement tué. Je voulais seulement m'assurer que tu ne parlerais pas. »
_ « Je sais tout ça. Je comprend. Vous avez agis comme une mère, je ne peux pas vous en vouloir. »
_ « je sais que tu ne m'en veux pas. Et je sais aussi que tes sentiments pour mon fils sont aussi vrais et aussi forts que son amour pour toi. C'est pour cela que je sais que je peux avoir confiance en toi. Puisque tu es avec Edouard, tu fais partis de la famille maintenant. Seulement, tout le monde n'est pas aussi sûr de tes sentiments pour lui. Sally n'est pas la seule, mais elle plus que les autres doute et s'inquiète de notre sort. Elle ne nie pas que tu es amoureuse. Ce qu'elle met en doute, c'est la force de cet amour, l'importance qu'à la vie d'Edouard pour toi. Il se peut qu'un jour tu es à faire des choix et c'est ce qu'elle redoute. La vie d'Edouard vaut-elle celle de ta famille ? De ta petite soeur ? Es-tu réellement prête à mourir pour lui ? Sally sait bien que tu es sincère lorsque tu dis qu'il est toute ta vie. Mais elle sait aussi que lorsqu'on est en situation, les choses sont différentes. D'autre part, elle craint que le fait que tu ne puisse pas vivre sans lui t'empêche de voir que cela peut aussi le mettre en danger. »
_ « Elle a peur que je provoque la mort d'Edouard, en refusant de le quitter si un jour il le faut ? Que je l'entraîne avec moi dans ma chute ? »
Jane acquiesça.
_ « Ca n'arrivera pas ! »
_ « Ella, je ne te dis pas ça pour te blesser... »
_ « Je sais. Mais je ne ferais jamais ça à Edouard. Jamais ! Ce n'est pas de l'amour. »
_ « Quelle heure est-il ? » demandai-je à Edouard une fois en voiture.
_ « Dix-neuf heures quinze, pourquoi ? »
_ « Tu pourrais m'accompagner au bureau ? »
_ « Maintenant ? »
_ « Il faut que je retourne au bureau. Je dois rendre mes photos pour le tirage de demain. »
_ « Celle de la chroniqueuse du coeur ? »
_ « Oui. »
_ « Je croyais que tu l'avais fini hier soir. »
_ « Oui, je le croyais aussi. Mais mon patron, Joachin, a refusé toutes celles que je lui ais présenté... Et je dois avouer qu'il n'a pas tout à fait tord. Mes photos étaient assez nulles. »
_ « Pourquoi ? »
_ « J'ai laissé mon expérience personnelle m'influençait mais dans le mauvais sens. Je n'ai proposé à mon patron que les photos qui en montraient le moins. Les moins personnelles. Parce que j'avais peur de ce que je pouvais y voir, ou de ce que je pouvais montrer. J'avais peur d'avoir perdu la main, ou « l'oeil » plus exactement. Jusque là, je me protégeais parce que j'étais derrière l'objectif. J'essayais d'être réaliste, mais mes choix n'en restaient pas moins personnels, ne serait-ce qu'inconsciemment. Mais cette fois, je me suis cachée derrière la maîtrise technique. Je ne me suis pas fait confiance. »
_ « Pourtant tu viens de faire la couverture. Ca aurait du t'encourager. »
_ « ' Y avait pas de gens. Sur la photo. Le pouvoir de l'image est important, pas seulement dans la pub. Mon patron voulait des photos parlantes, qui mettent Lili en valeur, et moi j'ai eu peur de ce que je pouvais montrer d'elle. »
_ « Et maintenant, tu penses que la bonne photo est peut-être dans celles que ton patron n'a pas vu ? »
_ « Ben oui ! Finalement, je crois qu'il n'y a pas que les photos que j'ai jugé sans savoir. »
_ « Que veux-tu dire ? »
_ « Je t'expliquerais à mon retour. »
_ « Toc, toc ! »
Joaquin Prince leva les yeux vers moi, assis à son bureau.
_ « J'étais sûre que je vous trouverais là. »
_ « Je me demandais si vous n'aviez pas abandonné. »
_ « Pourquoi ? »
_ « Tout doit être bouclé à vingt heures, je vous ai prévenu. Et il est moins dix. »
_ « Oui, je sais. C'est désagréable, n'est-ce pas, de se retrouver au pied du mur ? De se sentir contraint et forcé ? »
_ « Vous êtes très subtile ! »
_ « J'ai revu mes positions, par rapport à mon sujet. Vous m'avez demandé des photos de Lili, les voilà ! »
_ « Mais ? »
_ « Vous aviez raison. La technique ne suffit pas. Et si je ne me suis concentrée que sur la technique sur les photos que je vous ai donné hier soir, c'était parce que je n'étais pas sûre de moi, ni du bien fondé de ce travail. »
_ « S'il vous plaît... »
_ « Je n'ai pas fini ! »
_ « Pardon ! »
_ « Que vous ayez des attentes et des exigences par rapport à mon travail, ou à mes sujets, je le comprend. Toutefois, je fais bien mon travail et pour se faire j'ai besoin de liberté, d'une marge de confiance. M. Kelman me l'accordait et je ne l'ai encore jamais déçu, ni vous d'ailleurs, sinon vous ne m'auriez jamais donné votre voix pour la couverture, je me trompe ? Laissez moi traiter mes sujets moi-même, personnellement. C'est moi et mes perspectives, mon travail, que vous avez engagé, pas celui d'un autre, pas le votre non plus. Je n'ai pas encore fini ! Que vous n'aimiez pas ce que je vous montre, ou que cela vous mettes mal à l'aise, ne signifie pas que ce n'est pas vrai et que ça n'est pas une réponse juste au sujet que vous m'avez donné. Vous êtes trop sûr de vous et de votre jugement. Vous devez accepter de vous tromper parfois. »
_ « Vous n'aimez pas mes méthodes... »
_ « Vous êtes persuadé de savoir ce qui est le mieux pour les autres. Alors que vous ne savez même pas ce que vous voulez. »
_ « Vous n'en savez rien ! »
_ « Que vous dites ! Ce que je dis a peut-être l'air caricaturale, mais Lili et moi en sommes la meilleure preuve. Vous admettez que notre travail est prometteur et que vous voulez lui donner l'occasion de prendre son envol. Vous nous le dites ! Mais lorsqu'on vous écoute, on se rend bien compte qu'en réalité vous nous obligez à rester dans un certain cadre. Alors qu'au départ vous étiez trop effrontés, que vous preniez même trop d'initiatives, la teneur de vos directives c'est d'édulcorer notre travail, de le rendre moins sujet à controverse et plus jouer sur la sécurité : ne pas se mouiller. »
_ « C'est bon ? Vous avez fini ? »
_ « Oui, je me tais ! »
_ « C'est la première fois qu'une de mes employée vient me recadrer ! Vous êtes une fille bien. Vous êtes intelligente. Et très belle quand vous êtes passionnée ! Dommage, que je ne sois pas doué pour la photographie. C'est vrai, vous avez raison, je me suis trompé. Et je m'en excuse. Pour vous dire la vérité, je ne sais pas qu'elle photo je dois publier. Ni si je dois vous garder. »
_ « Quoi ? Vous voulez me virer ? »
_ « Je n'ai pas fini ! »
_ « Ah oui ! Pardon ! »
_ « Je vous l'ai déjà dit, j'aime beaucoup ce que vous faites. Et je ne peux pas vous dire comment faire votre travail, je le reconnais. Cependant, j'ai le sentiment que ce ne sera pas la dernière fois où vous allez me placer devant un dilemme. Je n'aurais jamais ni la même forme d'intelligence que vous, ni le même oeil. Si je m'écoutais, je crois que je choisirais cette photo ! »
_ « Vous êtes sérieux ?!... Pardon, je me tais ! »
_ « Mais c'est aussi celle qui m'embête le plus. Aller vite empêche de réfléchir, mais à trop penser on risque de laisser passer notre chance. Votre travail, comme celui de Lili, n'a rien de conventionnel, j'en suis conscient. Et même si je ne peux pas vous laisser totalement vous disperser – ou je ne pourrais jamais boucler mes papiers à temps – je peux qu'en même vous laissez libre de traiter vos sujets comme vous l'entendez. C'est parce que vous êtes telle que vous êtes que votre travail sort du lot. Mais ne vous inquiétez pas, je continuerais à m'inquiéter de votre travail et à le critiquer. Vous êtes une professionnel maintenant et des gens, dont je fais parti, comptent sur vous et votre travail. C'est à vous de répondre de votre travail, il n'y a plus de filet. C'est pour ça que vous avez besoin de moi. Parce que je ferais tampon, parce que c'est mon travail de défendre le travail de mes employés, mais aussi de les recadrer si besoin est. »
_ « J'ai compris ! Je sais que ce n'est pas évident. Et je n'aimerais pas être à votre place ! »
_ « Oh ! J'ai fais mon choix ! Pour ce numéro en tout cas ! Ca va sûrement faire parler. »
_ « Oui, je crois que vous n'allez pas y couper ! »
_ « Tant pis ! Je suis trop jeune pour me plier au système ! Et vous aussi ! Continuez à dire ce que vous pensez et à être honnête envers vous-même ! »
_ « C'est promis. »
Lorsque je rejoignis Edouard, une sensation glacée m'arrêta.
_ « Ca ne va pas ? » s'inquiéta-t-il.
_ « Je ne sais pas. C'est comme si... comme si tu n'étais pas le seul vampire sur la place. »
Edouard eut soudain l'air réellement inquiet, tendu et immobile. Je le devinais en train de fouiller l'obscurité. Le temps me parut interminable, même si je me doutais qu'il ne s'agissait que de quelques secondes.
_ « Monte dans la voiture ! » ordonna-t-il soudain.
_ « Qu'est-ce qui se passe ? »
_ « Monte dans la voiture ! »
J'obéis sans mot dire. Je m'étais à peine assise qu'il était déjà à mon côté.
_ « Attache toi ! » me conseilla-t-il avant de démarrer.
_ « Edouard, dis moi ce qui se passe ? Qu'est ce que tu as vu ? Dis-le moi ? »
_ « J'ai bien cru vois quelqu'un ! »
_ « Tu n'en es pas sûr ? »
_ « Es-tu certaine de l'avoir senti ? »
_ « Oui. Le froid... ce n'est pas aussi fort lorsque tu es avec moi. »
_ « Tu pourrais dire s'ils étaient plusieurs ? »
_ « Non, mais ils ne devaient pas être bien nombreux. Il n'y en avait peut-être bien qu'un. »
_ « C'est déjà un de trop ! » maugréa-t-il, cependant qu'il composait un numéro sur son portable. Il parla si vite que j'eus du mal à suivre.
_ « On ne rentre pas à la fac ? »
_ « Non. On passe d'abord chez moi. Des questions ? »
_ « Pour l'instant ? Une ! Comment tue-t-on un vampire ? Avec de l'eau bénite et des crucifix ? » tentai-je de plaisanter.
_ « Non. Mais avec un pieu en bois dans le coeur ou par le soleil. »
_ « Evidemment ! »
_ « Une fois son coeur transpercé, il faut le dépecer et faire brûler les morceaux. »
_ « Génial ! Des humains ont-ils déjà réussi ? »
Lorsque nous arrivâmes chez lui, tous les Summers semblaient sur le qui-vive.
_ « Gabriel, Désiré et Léonard sont partis à la recherche d'autres vampires qui seraient arrivés en ville. » annonça Laurent
_ « Mais s'il y avait des vampires on aurait entendu parler de morts ou de disparitions, non ? » rappelai-je.
_ « Ce n'est pas certain. C'est une grande ville. »
_ « Je n'en ai vu qu'un sur le parking. »
_ « Vous observait-il ? A-t-il remarqué Ella ? » interrogea sa mère.
_ « Je n'en sais rien. » avoua Edouard en serrant dents et points. Il n'aimait pas ne serait-ce que l'hypothèse que je puisse être en danger.
_ « S'il a remarqué qu'elle n'avait pas d'odeur il risque peut-être de se montrer curieux. »
_ « Ca veut dire quoi concrètement pour moi ? Qu'il va me poursuivre ? »
_ « Non, je ne pense pas qu'il est remarqué. Il ne nous a pas suivi. »
Ca c'était vrai.
_ « On dirait que nous vous avons porté malheur avec cette discussion de famille ! » lâcha la voix cristalline de Sally. Elle ne me regardait pas. Elle avait plus l'air inquiéte pour son frère.
_ « Je suis désolée. » soufflai-je dans un murmure.
Edouard dut m'entendre car il se tourna vers moi. Je me sentais vide, avec l'impression que mes jambes allaient me lâcher. J'avais un énorme vide dans la poitrine et mon estomac se nouait. Je sentais les larmes me montaient aux yeux et m'efforçais de les ravaler. Malheureusement, je m'en voulais déjà et, plus encore, j'avais peur qu'il arrive quelque chose à Edouard. J'aurais voulu qu'il me serre dans ses bras. Edouard chercha à rencontrer mon regard et ses larges prunelles noires m'apaisèrent et m'angoissèrent en même temps. S'il lui arrivait quelque chose ?
_ « Viens ! » me murmura-t-il.
Il me guida en silence vers le premier étage. Nous suivîmes le couloir et nous entrâmes dans une vaste chambre aux grandes fenêtres. Cette fois, comme dans le reste de la maison, rideaux et volets étaient tirés et le ciel nocturne agrandissait encore la pièce. Il n'alluma pas la lumière. Des ribambelles de cds couraient le long des murs. Beaucoup de livres aussi. Des dvds par ci, par là.
_ « Une chambre de célibataire ! » plaisantai-je. « Pas de lit ? »
_ « Nous ne dormons pas. »
_ « Jamais ? Pas même le jour ? »
_ « Non,jamais. Si la légende populaire veut que nous dormions le jour dans nos cercueils, c'est tout simplement parce que nous ne pouvons pas sortir lorsqu'il y a du soleil. Et je suppose que tous les auteurs et cinéastes à vampires ne voyaient pas trop ce que l'on pouvait bien faire de nos journées. »
_ « Une seule et même journée qui peut durer pour l'éternité ! Ca doit qu'en même faire très, très long ! »
_ « Cela faisait également très longtemps que je te cherchais. Je suis patient. »
_ « On ne te l'a jamais dit, que l'amour n'est qu'une affaire de chance et de pur hasard ? »
Edouard sourit. Les prunelles humaines brillaient-elles de façon si belles dans l'obscurité ?
_ « Tu n'as pas idée combien tu rends les choses difficiles ! » murmura-t-il.
_ « Je m'en rends bien compte. » avouai-je. « Je trouverais bien un moyen, je te le promet ! »
Mais ce n'était pas pour tout de suite : Edouard ouvrait déjà la porte sur Sally. Cet homme était vraiment génial !
_ « Il y a du nouveau. » diagnostiqua-t-il pour moi.
_ « Des gens ont disparus. On a retrouvé l'un des cadavres, il s'agit bien de l'un des nôtres. » annonça Léonard quand nous arrivâmes en bas.
_ « Ils ont tué quelqu'un ? » demandai-je, inquiète. Question bête !
_ « Nous n'avons retrouvé que le corps de l'adolescente. » répondit Léonard.
_ « L'ont-ils enlevé chez elle ? » interrogea Laurent.
Chez elle ? Ils l'auraient convaincu de l'inviter à entrer ? De son plein gré ?
_ « Non. Ca devait être une fugueuse. Elle a été abandonnée là où elle a été tuée, dans une cabine téléphonique. C'est une petite rue déserte. La fille a du se perdre. Personne n'aurait trouvé son cadavre. » expliqua Désiré.
_ « A votre avis, combien de victimes ont-ils déjà fait ? »
_ « Pour l'instant, trois, en deux jours. » répondit elle.
_ « Combien sont-ils ? » demanda Edouard.
_ « Au moins deux. »
_ « Au moins ? »
_ « Ces deux là restent sûrement toujours ensemble. Mais d'après ce que l'on a entendu, ils seraient quatre, peut-être cinq. » continua Gabriel.
_ « Entendu ? » répétai-je.
_ « Les deux autres personnes qui ont disparu étaient une prostituée et un sdf. Des gens les ont vu avec des personnes d'une beauté merveilleuse sorties de nul part. Ils les ont même pris pour des anges. Apparemment, ils hantent les quais mais ils se rapprochent de la ville. »
_ « Naturellement. »
_ « S'ils s'enfoncent dans la ville, ça veut dire qu'ils se rapproche de ma soeur ? » demandai-je, inquiète cette fois-ci.
_ « Ils ne lui feront rien, je te le promet. » répondit aussitôt Edouard.
_ « Et comment comptes-tu les en empêcher ? »
_ « Nous ne pouvons pas la protéger Edouard ! » répliqua Laurent.
_ « Comment ça ? » demandai-je
_ « Nous pourrions être dangereux pour elle, nous aussi. »
_ « Vous pouvez veiller à distance sur elle ? Si ne serait-ce que l'un deux sent son odeur, elle ne survivra pas. »
_ « Nous ne pouvons pas. Ou c'est nous qui pourrions la tuer. » conclut Gabriel.
_ « Et qu'est-ce que vous suggérez alors ? »
_ « Nous devons les surveiller et les intercepter de toute façon. Ils doivent partir ou ils vont nous gêner. » décréta Jane.
_ « Oui, tu as raison. Léonard et Sally, partez à leur recherche. Nous vous rejoindrons plus tard. Nous devons prendre les devants. Ils ne partirons pas d'eux même et la ville est grande. De plus, ils ne cherchent pas à cacher leurs meurtres. Si l'un de leur dîner remonte à la police et qu'il y a enquête, cela pourrait nous créer des problèmes. » décida M. Summers.
_ « Ils n'ont pas prévenu la police pour le corps de la fille ? » demandai-je en murmurant à Edouard.
_ « Ils auraient ouvert une enquête. » murmura-t-il. « Nous ferons le nécessaire dès qu'ils seront partis. »
_ « Edouard, occupe-toi d'Ella. Ramène là. Nous t'appellerons dès que nous les aurons trouvé. »
_ « Etes-vous sûrs ? »
_ « Oui, allez-y ! »
_ « Et ma soeur ? »
_ « Nous les retrouverons avant qu'ils n'aient eu le temps de flairer son odeur, ne t'en fais pas. Nous avons des siècles d'expériences. »
_ « Je te ramène ! » me murmura Edouard, en m'ouvrant la porte d'entrée.
_ « Fais moi confiance ! » me demanda-t-il quand je fus dehors. J'acquiesçais sans pouvoir m'empêcher de jeter un dernier coup d'oeil à sa famille.
_ « Tu n'y es pour rien ! Ils seraient venus même si nous n'étions pas ensemble. »
_ « Je sais. J'espère seulement que tu ne leur manquera pas. »
Il sourit, comme chaque fois que je m'inquiétais un peu trop, et prit le risque de m'embrasser sur le front. Le frisson qui me déchira me fit me tordre et trembler en grimaçant et il rit de plus belle. Je ne pouvais pas imaginer ne plus entendre son rire et ne plus revoir son sourire et ses yeux brillants. Qui sait tout ce qui pouvait arriver en une nuit ?
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Re: [sans titre]
J'attend vos critiques et vos commentaires !
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Re: [sans titre]
Vu qu'apparemment ça coince dès le premier chapitre, je vais faire ce que j'aurais du faire depuis le début, c'est à dire ne pas le recopier bêtement d'après mon vieux paplart (commencé : 23 Octobre 2005; terminé : 15 Juin 2007 ^^") mais le retravailler (en particulier, fondre les chapitres 1 et 2 en un seul premier chapitre parce que je vais sûrement supprimer des choses) et ensuite trouver un forum qui apprécie d'avantage que vous ce genre de récit (C'est pas une critique !). (vais vraiment finir par mettre les contes du homard, ici. dès que Jack sera plus libre ^^).
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Re: [sans titre]
Contes du homard ? @_@
Jack- Joker Gris
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Deck Of Cards :: Hors Jeu :: Fictions
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