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Deck Of Cards :: Hors Jeu :: Fictions
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Vendredi 31 Juillet 2009
(Je suis désolée, je ne sais pas pourquoi mais les spoilers ne fonctionnent pas [et c'est pas faute d'avoir essayé])
Tu as été la première personne à me connaître (pauvre de toi !). Tu savais tout de moi et il m’arrivait de me demander
si je n’étais pas un livre ouvert pour toi ^^. Tu savais combien je pouvais détester ma façon d’écrire tellement impersonnelle et toujours brouillon à force de longueur et d’accumulations (qui sont beaucoup de maladresses chez moi), tout autant que j’admirais ceux qui arrivaient réellement à rendre leurs personnage vivants. Les auteurs qui réussissaient à réellement être leurs personnages sont un peu mes idôles. leurs personnages peuvent même diriger leurs créateurs (dixit quelques uns d’entre eux), ce que j’admire et comprend bien que la manière d'y arriver m'échappe... Leurs œuvres sont toujours vivantes, elles nous touchent d’une façon ou d’une autre. Certains auteurs arrivent à rendre des atmosphères, des tournures géniales, et leurs textes, leurs style, semblent, même courts, clairs et maitrisés et tellement intelligents.
Je suis sure que c’est pour ça que tu m’as demandé d’écrire une histoire – une belle histoire ! – plus personnelle et qui se termine bien (*sigh*) et (tu n’ignorais vraiment aucun de mes secrets !) que je la mette sur internet (à l’époque, je ne connaissais aucun forum). Or, la première idée que j’avais eu aurait finit – comme souvent- en mauvaise tragédie que tu aurais trouvé naïve et simpliste. Alors j’ai eu une autre idée – qui n’a rien avoir avec ce que j’écris ordinairement – que je vous soumets (et – qui sait ? – à toi aussi peut-être) :
Prologue
Le ciel. Le ciel d’un noir d’encre éblouissant, si profond qu’on avait l’impression qu’il nous aspirait.
Le ciel. Et le vent qui hurlait à la mort contre la tour.
Le ciel. Le vent. Et en bas, la terre qui s’ouvrait en un immense puits sans fond de lumière blanche. La plus belle lumière blanche que
l’on puisse imaginer, comme si tout devenait pur à l’intérieur. Comme un rayon de soleil éclatant.
Ça aurait pu être un cauchemar. Un cauchemar terrifiant dans lequel j’étais prise, piégée sans alternative. Je devais fuir, courir jusqu’à ce que mes poumons me brûlent comme s’ils étaient prêts à exploser. Mais je n’arrivais pas à courir assez vite et mes jambes paraissaient s’engourdir à mesure que je me frayais un chemin parmi la foule des gens inconscients, innocents tous autant qu’ils furent. Mais les aiguilles des horloges, elles, ne ralentissaient pas. Et le temps courait trop vite - trop vite pour moi. Et la menace des aiguilles qui continuaient à tourner vers ce moment que j’avais tellement redouté avançait toujours vers moi comme un torrent, m’écrasant de tout le poids de sa force implacable et calme, balayant tous les espoirs désespérés du petit insecte agité devant la fin imminente. Et les aiguilles allaient en finir. Elles allaient atteindre le moment fatidique. Elles approchaient de la fin - la fin de tout.
Ça aurait pu être un mauvais rêve, mais tout cela était d’une effrayante réalité. La réalité c’est que je ne courais plus. J’étais
incapable de bouger, comme vissée au toit de cette tour. Les fenêtres explosèrent. Le vent poussa un hurlement atrocement proche de celui d’une femme qu’on assassine. Le bâtiment trembla jusqu’aux tréfonds de ses sous-bassements. Des hurlements montèrent avec le même sentiment de catastrophe. Mes cheveux volaient, pris par la folie ambiante, se plaquant implacablement devant mes yeux comme pour m’empêcher de voir. Je les repoussais autant que je pouvais. Mon cœur battait à tout rompre dans ma poitrine. Je sentais des larmes me montaient aux yeux. Je savais ce qui allait arriver. Je ne pouvais pas l’empêcher. Tout était vain. Je dégageais lentement mes cheveux et enfin je vis. Mon cœur cessa de battre et je ne sentis même pas les larmes chaudes coulaient le long de mes joues.
C’était la fin du monde.
Chapitre I
Mon nom est Ella Mars. J’habitais une ville près de la mer, pas très éloignée de la frontière. Ici, les étés étaient très chauds et les hivers très rudes. Ici, avais-je ma vie.
A dix-huit ans, je venais d’entrer en fac. Je vivais avec ma mère et ma petite sœur de quinze ans. Nous habitions une belle maison avec un charmant jardin et une barrière blanche. C’était elle, en face, avec les géraniums rouges aux fenêtres, et le saule pleureur au fond à droite. Les cactus étaient magnifiques : Il faisait très chaud et le soleil dardait la terre de ses rayons. L’air tremblait doucement bien qu’il ne soit que dix heures et que nous soyons à la fin de l’été. Les murs blanchis à la chaux de la maison étaient éblouissant et le soleil dormait sur la porte en noisetier, d’un marron un peu plus prononcé que le miel. «324 » était accroché en chiffres de fer noir.
Je montai sur le perron d’un petit bond, ramassant le journal au passage. J’avais surpris ma mère dans la cuisine, derrière les rideaux de dentelles blanches, et savais donc que je n’avais pas besoin de chercher mes clefs dans mon sac. J’ouvris la porte, me délestai de ce-dernier sur le meuble de l’entrée, évitant de jeter un coup d’œil dans le miroir accroché au-dessus. L’acajou luisant du meuble me renvoyait la mosaïque de couleurs du vitrail de la porte d’entrée qui coulait sur le plancher et ma silhouette sombre transparaissait comme un fantôme au travers. La lumière joyeuse du soleil semblait baigner toute la maison.
_« C’est toi Ella ? » demanda la voix claire de ma mère depuis la pièce d’à côté.
Ça m’énervait toujours. Bien sûr que c’était moi ! Qui d’autre ? Un homme ?
Cette dernière idée me fit sourire intérieurement autant qu’elle m’exaspéra. Depuis combien de temps un homme n’avait-il pas franchi le seuil de cette maison ? Je n’avais pas besoin qu’on me donne la réponse : cela faisait trois ans – depuis que mon père, Mickaël, était parti, sans que mes parents n’aient jamais divorcés.
J’entrai dans la cuisine, sourire aux lèvres, avec l’impression que rien ne pourrait gâcher cette journée. Cette dernière journée d’été avant la rentrée. J’embrassai ma mère sur la joue avant de me saisir du jus de fruit dans le réfrigérateur que je bus directement au goulot. Ma mère ma lança un regard de reproche.
_ « Je ne suis pas contagieuse. Au pire, la prochaine personne qui se servira bénéficiera-t-elle de mon rouge à lèvre à la mandarine !... De toute façon, elle est vide ! » répondis-je en secouant la bouteille – effectivement vide - comme pour attester mes dires, avant de la jeter. C’est à ce moment que la chatte, surgie de nulle part, me sauta littéralement dans les bras en miaulant. J’eus juste le temps de l’attraper qu’elle s’installait déjà confortablement en ronronnant. Je levai cette boule de poils orange raillée, son museau au niveau de mon nez. Nouveau regard désapprobateur de ma mère. Je laissais donc ma chatte repartir promptement dehors. Je me rabattis sur un brunion dont la chair jaune et sucrée fut appréciée à sa juste valeur. Je léchai mes doigts pleins de jus.
_ « Tu as bien dormis ? » demandai-je, grappillant distraitement du raisin en guise de petit-déjeuner.
_ « Très bien, merci. », répondit-elle, avec un sourire. « Et pour une fois, je ne me suis pas tapée les doigts de pieds contre un pied de mon lit que je n’aurais pas vu. Mes pieds te remercient donc pour la lampe de chevet que tu as acheté. »
_ « Je t’en pris. Où est ma petite sœur adorée ? »
_ « Ta sœur dort encore. », chose qui n’était pas si étonnante venant d’elle. « Tu devrais aller la réveiller. »
Keiss aboya. Keiss Mars était notre chien - un boxer beige que mon père avait choisi deux jours avant de claquer la porte – et c’était ma sœur qui lui avait donné ce nom en disant qu’on aurait au moins un homme dans la famille.
_ « Laisses-nous encore une demi-heure de calme, le temps que je me refasse une beauté… », je fis un geste de la main pour me désigner toute dégoulinante, « et ensuite, j’irais la réveiller et on ira le long de la promenade jusqu’à la jetée avec Keiss. »
Ma mère accepta et elle se remit à ranger des choses dans le réfrigérateur. La bouilloire se mit à siffler et j’éteignis le feu. Je jetai un œil à ma mère en servant deux tasses de thé :
_ « Tu es ravissantes aujourd’hui. Tu as un rendez-vous ? » lançai-je avec un petit sourire.
_ « Oui. Avec mon banquier !"
_"Ouch !" grimaçais-je.
Sans vraiment de raison, je commençais à me demander ce qui se passerait si ma mère recommençait à sortir avec des hommes et, sans que je puisse me l’expliquer, cette perspective me déplu. Je devais pourtant bien savoir que Mickaël ne reviendrait plus, alors pourquoi cette réaction de rejet ?
La cuisine était une pièce très importante de la maison. Elle était bien agencée. Le mobilier était en bois clair, les murs d’un jaune pastel poudré. Cette association s’harmonisait parfaitement avec la lumière blanche de ce matin tranquille que filtraient les grandes fenêtres le long du mur. Une petite porte donnait sur le jardin de derrière. Une autre porte menait à la cave et à une autre pièce, autrefois aménagé en chambre noire pour Mickaël et que j’occupais maintenant. Le sous-sol était assez grand pour qu'on y descende aussi le piano afin de ne pas déranger la maison. La photo était en effet une passion que Mickaël et moi avions en communs. C’était une pièce claire et lumineuse. Tout y semblait calme.
Je jetai un nouveau coup d’œil à ma mère. Elle s’appelait Catheline – ou Cathe- et, à quarante-cinq ans, était plutôt belle pour son âge. L’éclairage de la pièce flattait son teint pâle et frais avec ses joues naturellement roses. La lumière chatoyait sur ses cheveux bouclés blonds comme les blés. Ses yeux bleus étaient souriants, et l’on y devinait un caractère astucieux et fort. Elle avait une bouche un peu trop grande pour son visage aux traits délicats mais ses lèvres étaient fines et bien dessinées. Elle avait de petites rides fines aux coins des yeux et de la bouche. Lorsqu'elle souriait des fossettes se creusaient. Ses mains étaient fines et agiles. Elle ne portait plus son alliance. Elle était habillée d’un petit pull de lainage bleu clair et d’une jupe de lin blanche. Autour de son cou brillait une petite croix d’or. Elle était professeur de littérature au collège et travaillait également dans un grand magasin, comme travail d'appoint.
Sitôt ma tasse finie, je montai quatre à quatre les marches de l'escalier de chêne jusqu'au premier où se trouvaient les trois chambres et une salle de bain - ou plus exactement une salle d'eau. L'unique baignoire de la maison se trouvait au rez-de-chaussée dans la deuxième salle de bain, côté escalier - à droite en entrant- tandis que la cuisine se trouvait à gauche en entrant. Le couloir de l'entrée menait, quand à lui, droit à la salle à manger, le salon à sa suite et enfin le passio. Au dernier étage se trouvait le grenier.
J'entrai dans la salle de bain et me regardai brièvement dans la glace. La sueur collait effectivement mes longs cheveux bruns chocolat attachés en queue de cheval haute. Mon top rose à bretelles me collait à la peau. Je portais un court short bleu marine. Ma peau avait prit une légère couleur dorée - ce qui était bien la première fois. On était la dernière semaine de l'été mais le temps était encore estivale. On avait d'ailleurs connu des records de chaleur cette année. Ordinairement ma peau s'obstinait à rester d'un blanc laiteux et je n'arrivais toujours pas à apprécier mon bronzage -pourtant timide.
Ma silhouette n'avait rien de celle d'un mannequin de magasine, avec ma silhouette en forme de poire et ma nature plutôt ronde.
Je me déshabillai vite et me glissai sous la douche. Je poussai un cri et reculai d'un bond, surprise. Je me cognai contre la porte de la douche. L'eau était encore glacée. Le chauffagiste avait promis de venir avant la fin de l'année réparer la chaudière. Autant dire qu'on pouvait attendre ! Ma douche fut donc plus courte que prévu.
Emmaillotée dans ma serviette, frigorifiée, je m'appuyai au lavabo et m'inspectai dans la glace.
La salle d'eau était plus petite - plus récente aussi - que la salle de bain d'en-bas. Mais j'étais pratiquement la seule à l'utiliser (hormis, ma sœur de temps à autre, mais c'était chez elle le signe qu'elle avait le cafard) car elle avait un quelque chose d'étouffant et donnait l'impression d'être dans un aquarium d'eau verte et glauque avec son carrelage vert bouteille et son unique et étroite fenêtre. Le néon qui l'éclairait ne faisait qu'accentuer cette impression et lorsqu'on levait les yeux sur le plafond rouge sang, celui de quelque innocent dévoré on était tenté de fuir cette pièce au plus vite.
Bizarrement j'appréciais cette ambiance et son éclairage étrange qui accentuer le rouge et l'orange de la peau et le noir des ombres. Cette pièce anodine me donnait le sentiment de me retrouver dans ces images d'attaque de grands requins blanc des documentaires de la télé. J'avais l'impression que dès que je me retournerais le squale plongerait sur moi, mâchoires ouvertes, prêt à me dévorer. Me préparer dans cette salle de bain me donnait ma dose d'adrénaline pour bien commencer la journée.
Mes lèvres fines s'étirèrent en un grand sourire lorsqu'un frisson me parcourut l'échine et les yeux amandes de mon reflet brillaient. Je me glissai dans une jupe noir évasée qui coulait avec légèreté jusqu'à mes pieds. Enfin, j'enfilai un petit haut noir aux motifs slaves colorés et brodés de fils d'or, rien de plus, en réalité, qu'un losange de tissus attaché dans le dos par des cordelettes noires autour du cou et de la poitrine.
J'entrai dans ma chambre. Je n'avais pas fini de me coiffer qu'une tornade, encore en pyjama, entra en trombe -et sans frapper - dans la pièce. Ma sœur, Ariel.
(Je suis désolée, je ne sais pas pourquoi mais les spoilers ne fonctionnent pas [et c'est pas faute d'avoir essayé])
Tu as été la première personne à me connaître (pauvre de toi !). Tu savais tout de moi et il m’arrivait de me demander
si je n’étais pas un livre ouvert pour toi ^^. Tu savais combien je pouvais détester ma façon d’écrire tellement impersonnelle et toujours brouillon à force de longueur et d’accumulations (qui sont beaucoup de maladresses chez moi), tout autant que j’admirais ceux qui arrivaient réellement à rendre leurs personnage vivants. Les auteurs qui réussissaient à réellement être leurs personnages sont un peu mes idôles. leurs personnages peuvent même diriger leurs créateurs (dixit quelques uns d’entre eux), ce que j’admire et comprend bien que la manière d'y arriver m'échappe... Leurs œuvres sont toujours vivantes, elles nous touchent d’une façon ou d’une autre. Certains auteurs arrivent à rendre des atmosphères, des tournures géniales, et leurs textes, leurs style, semblent, même courts, clairs et maitrisés et tellement intelligents.
Je suis sure que c’est pour ça que tu m’as demandé d’écrire une histoire – une belle histoire ! – plus personnelle et qui se termine bien (*sigh*) et (tu n’ignorais vraiment aucun de mes secrets !) que je la mette sur internet (à l’époque, je ne connaissais aucun forum). Or, la première idée que j’avais eu aurait finit – comme souvent- en mauvaise tragédie que tu aurais trouvé naïve et simpliste. Alors j’ai eu une autre idée – qui n’a rien avoir avec ce que j’écris ordinairement – que je vous soumets (et – qui sait ? – à toi aussi peut-être) :
Prologue
Le ciel. Le ciel d’un noir d’encre éblouissant, si profond qu’on avait l’impression qu’il nous aspirait.
Le ciel. Et le vent qui hurlait à la mort contre la tour.
Le ciel. Le vent. Et en bas, la terre qui s’ouvrait en un immense puits sans fond de lumière blanche. La plus belle lumière blanche que
l’on puisse imaginer, comme si tout devenait pur à l’intérieur. Comme un rayon de soleil éclatant.
Ça aurait pu être un cauchemar. Un cauchemar terrifiant dans lequel j’étais prise, piégée sans alternative. Je devais fuir, courir jusqu’à ce que mes poumons me brûlent comme s’ils étaient prêts à exploser. Mais je n’arrivais pas à courir assez vite et mes jambes paraissaient s’engourdir à mesure que je me frayais un chemin parmi la foule des gens inconscients, innocents tous autant qu’ils furent. Mais les aiguilles des horloges, elles, ne ralentissaient pas. Et le temps courait trop vite - trop vite pour moi. Et la menace des aiguilles qui continuaient à tourner vers ce moment que j’avais tellement redouté avançait toujours vers moi comme un torrent, m’écrasant de tout le poids de sa force implacable et calme, balayant tous les espoirs désespérés du petit insecte agité devant la fin imminente. Et les aiguilles allaient en finir. Elles allaient atteindre le moment fatidique. Elles approchaient de la fin - la fin de tout.
Ça aurait pu être un mauvais rêve, mais tout cela était d’une effrayante réalité. La réalité c’est que je ne courais plus. J’étais
incapable de bouger, comme vissée au toit de cette tour. Les fenêtres explosèrent. Le vent poussa un hurlement atrocement proche de celui d’une femme qu’on assassine. Le bâtiment trembla jusqu’aux tréfonds de ses sous-bassements. Des hurlements montèrent avec le même sentiment de catastrophe. Mes cheveux volaient, pris par la folie ambiante, se plaquant implacablement devant mes yeux comme pour m’empêcher de voir. Je les repoussais autant que je pouvais. Mon cœur battait à tout rompre dans ma poitrine. Je sentais des larmes me montaient aux yeux. Je savais ce qui allait arriver. Je ne pouvais pas l’empêcher. Tout était vain. Je dégageais lentement mes cheveux et enfin je vis. Mon cœur cessa de battre et je ne sentis même pas les larmes chaudes coulaient le long de mes joues.
C’était la fin du monde.
Chapitre I
Mon nom est Ella Mars. J’habitais une ville près de la mer, pas très éloignée de la frontière. Ici, les étés étaient très chauds et les hivers très rudes. Ici, avais-je ma vie.
A dix-huit ans, je venais d’entrer en fac. Je vivais avec ma mère et ma petite sœur de quinze ans. Nous habitions une belle maison avec un charmant jardin et une barrière blanche. C’était elle, en face, avec les géraniums rouges aux fenêtres, et le saule pleureur au fond à droite. Les cactus étaient magnifiques : Il faisait très chaud et le soleil dardait la terre de ses rayons. L’air tremblait doucement bien qu’il ne soit que dix heures et que nous soyons à la fin de l’été. Les murs blanchis à la chaux de la maison étaient éblouissant et le soleil dormait sur la porte en noisetier, d’un marron un peu plus prononcé que le miel. «324 » était accroché en chiffres de fer noir.
Je montai sur le perron d’un petit bond, ramassant le journal au passage. J’avais surpris ma mère dans la cuisine, derrière les rideaux de dentelles blanches, et savais donc que je n’avais pas besoin de chercher mes clefs dans mon sac. J’ouvris la porte, me délestai de ce-dernier sur le meuble de l’entrée, évitant de jeter un coup d’œil dans le miroir accroché au-dessus. L’acajou luisant du meuble me renvoyait la mosaïque de couleurs du vitrail de la porte d’entrée qui coulait sur le plancher et ma silhouette sombre transparaissait comme un fantôme au travers. La lumière joyeuse du soleil semblait baigner toute la maison.
_« C’est toi Ella ? » demanda la voix claire de ma mère depuis la pièce d’à côté.
Ça m’énervait toujours. Bien sûr que c’était moi ! Qui d’autre ? Un homme ?
Cette dernière idée me fit sourire intérieurement autant qu’elle m’exaspéra. Depuis combien de temps un homme n’avait-il pas franchi le seuil de cette maison ? Je n’avais pas besoin qu’on me donne la réponse : cela faisait trois ans – depuis que mon père, Mickaël, était parti, sans que mes parents n’aient jamais divorcés.
J’entrai dans la cuisine, sourire aux lèvres, avec l’impression que rien ne pourrait gâcher cette journée. Cette dernière journée d’été avant la rentrée. J’embrassai ma mère sur la joue avant de me saisir du jus de fruit dans le réfrigérateur que je bus directement au goulot. Ma mère ma lança un regard de reproche.
_ « Je ne suis pas contagieuse. Au pire, la prochaine personne qui se servira bénéficiera-t-elle de mon rouge à lèvre à la mandarine !... De toute façon, elle est vide ! » répondis-je en secouant la bouteille – effectivement vide - comme pour attester mes dires, avant de la jeter. C’est à ce moment que la chatte, surgie de nulle part, me sauta littéralement dans les bras en miaulant. J’eus juste le temps de l’attraper qu’elle s’installait déjà confortablement en ronronnant. Je levai cette boule de poils orange raillée, son museau au niveau de mon nez. Nouveau regard désapprobateur de ma mère. Je laissais donc ma chatte repartir promptement dehors. Je me rabattis sur un brunion dont la chair jaune et sucrée fut appréciée à sa juste valeur. Je léchai mes doigts pleins de jus.
_ « Tu as bien dormis ? » demandai-je, grappillant distraitement du raisin en guise de petit-déjeuner.
_ « Très bien, merci. », répondit-elle, avec un sourire. « Et pour une fois, je ne me suis pas tapée les doigts de pieds contre un pied de mon lit que je n’aurais pas vu. Mes pieds te remercient donc pour la lampe de chevet que tu as acheté. »
_ « Je t’en pris. Où est ma petite sœur adorée ? »
_ « Ta sœur dort encore. », chose qui n’était pas si étonnante venant d’elle. « Tu devrais aller la réveiller. »
Keiss aboya. Keiss Mars était notre chien - un boxer beige que mon père avait choisi deux jours avant de claquer la porte – et c’était ma sœur qui lui avait donné ce nom en disant qu’on aurait au moins un homme dans la famille.
_ « Laisses-nous encore une demi-heure de calme, le temps que je me refasse une beauté… », je fis un geste de la main pour me désigner toute dégoulinante, « et ensuite, j’irais la réveiller et on ira le long de la promenade jusqu’à la jetée avec Keiss. »
Ma mère accepta et elle se remit à ranger des choses dans le réfrigérateur. La bouilloire se mit à siffler et j’éteignis le feu. Je jetai un œil à ma mère en servant deux tasses de thé :
_ « Tu es ravissantes aujourd’hui. Tu as un rendez-vous ? » lançai-je avec un petit sourire.
_ « Oui. Avec mon banquier !"
_"Ouch !" grimaçais-je.
Sans vraiment de raison, je commençais à me demander ce qui se passerait si ma mère recommençait à sortir avec des hommes et, sans que je puisse me l’expliquer, cette perspective me déplu. Je devais pourtant bien savoir que Mickaël ne reviendrait plus, alors pourquoi cette réaction de rejet ?
La cuisine était une pièce très importante de la maison. Elle était bien agencée. Le mobilier était en bois clair, les murs d’un jaune pastel poudré. Cette association s’harmonisait parfaitement avec la lumière blanche de ce matin tranquille que filtraient les grandes fenêtres le long du mur. Une petite porte donnait sur le jardin de derrière. Une autre porte menait à la cave et à une autre pièce, autrefois aménagé en chambre noire pour Mickaël et que j’occupais maintenant. Le sous-sol était assez grand pour qu'on y descende aussi le piano afin de ne pas déranger la maison. La photo était en effet une passion que Mickaël et moi avions en communs. C’était une pièce claire et lumineuse. Tout y semblait calme.
Je jetai un nouveau coup d’œil à ma mère. Elle s’appelait Catheline – ou Cathe- et, à quarante-cinq ans, était plutôt belle pour son âge. L’éclairage de la pièce flattait son teint pâle et frais avec ses joues naturellement roses. La lumière chatoyait sur ses cheveux bouclés blonds comme les blés. Ses yeux bleus étaient souriants, et l’on y devinait un caractère astucieux et fort. Elle avait une bouche un peu trop grande pour son visage aux traits délicats mais ses lèvres étaient fines et bien dessinées. Elle avait de petites rides fines aux coins des yeux et de la bouche. Lorsqu'elle souriait des fossettes se creusaient. Ses mains étaient fines et agiles. Elle ne portait plus son alliance. Elle était habillée d’un petit pull de lainage bleu clair et d’une jupe de lin blanche. Autour de son cou brillait une petite croix d’or. Elle était professeur de littérature au collège et travaillait également dans un grand magasin, comme travail d'appoint.
Sitôt ma tasse finie, je montai quatre à quatre les marches de l'escalier de chêne jusqu'au premier où se trouvaient les trois chambres et une salle de bain - ou plus exactement une salle d'eau. L'unique baignoire de la maison se trouvait au rez-de-chaussée dans la deuxième salle de bain, côté escalier - à droite en entrant- tandis que la cuisine se trouvait à gauche en entrant. Le couloir de l'entrée menait, quand à lui, droit à la salle à manger, le salon à sa suite et enfin le passio. Au dernier étage se trouvait le grenier.
J'entrai dans la salle de bain et me regardai brièvement dans la glace. La sueur collait effectivement mes longs cheveux bruns chocolat attachés en queue de cheval haute. Mon top rose à bretelles me collait à la peau. Je portais un court short bleu marine. Ma peau avait prit une légère couleur dorée - ce qui était bien la première fois. On était la dernière semaine de l'été mais le temps était encore estivale. On avait d'ailleurs connu des records de chaleur cette année. Ordinairement ma peau s'obstinait à rester d'un blanc laiteux et je n'arrivais toujours pas à apprécier mon bronzage -pourtant timide.
Ma silhouette n'avait rien de celle d'un mannequin de magasine, avec ma silhouette en forme de poire et ma nature plutôt ronde.
Je me déshabillai vite et me glissai sous la douche. Je poussai un cri et reculai d'un bond, surprise. Je me cognai contre la porte de la douche. L'eau était encore glacée. Le chauffagiste avait promis de venir avant la fin de l'année réparer la chaudière. Autant dire qu'on pouvait attendre ! Ma douche fut donc plus courte que prévu.
Emmaillotée dans ma serviette, frigorifiée, je m'appuyai au lavabo et m'inspectai dans la glace.
La salle d'eau était plus petite - plus récente aussi - que la salle de bain d'en-bas. Mais j'étais pratiquement la seule à l'utiliser (hormis, ma sœur de temps à autre, mais c'était chez elle le signe qu'elle avait le cafard) car elle avait un quelque chose d'étouffant et donnait l'impression d'être dans un aquarium d'eau verte et glauque avec son carrelage vert bouteille et son unique et étroite fenêtre. Le néon qui l'éclairait ne faisait qu'accentuer cette impression et lorsqu'on levait les yeux sur le plafond rouge sang, celui de quelque innocent dévoré on était tenté de fuir cette pièce au plus vite.
Bizarrement j'appréciais cette ambiance et son éclairage étrange qui accentuer le rouge et l'orange de la peau et le noir des ombres. Cette pièce anodine me donnait le sentiment de me retrouver dans ces images d'attaque de grands requins blanc des documentaires de la télé. J'avais l'impression que dès que je me retournerais le squale plongerait sur moi, mâchoires ouvertes, prêt à me dévorer. Me préparer dans cette salle de bain me donnait ma dose d'adrénaline pour bien commencer la journée.
Mes lèvres fines s'étirèrent en un grand sourire lorsqu'un frisson me parcourut l'échine et les yeux amandes de mon reflet brillaient. Je me glissai dans une jupe noir évasée qui coulait avec légèreté jusqu'à mes pieds. Enfin, j'enfilai un petit haut noir aux motifs slaves colorés et brodés de fils d'or, rien de plus, en réalité, qu'un losange de tissus attaché dans le dos par des cordelettes noires autour du cou et de la poitrine.
J'entrai dans ma chambre. Je n'avais pas fini de me coiffer qu'une tornade, encore en pyjama, entra en trombe -et sans frapper - dans la pièce. Ma sœur, Ariel.
Dernière édition par Ely Julia le Mar 1 Sep 2009 - 14:43, édité 4 fois
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Localisation : trop loin de tes bras et rêvant à tous les moyens de te rendre heureux...
Date d'inscription : 27/10/2008
Re: [sans titre]
_"Hey ! Je te dérange pas ? Tu as deux minutes ?" demanda-t-elle en sautillant dans son t-shirt et son pantalon blanc à petits lutins rouges.
Je me pinçai les lèvres pour ne pas rire.
Ma sœur était très grande et fine. Elle avait de long cheveux blond miel comme ceux de maman, tandis que les miens bouclaient en soyeuses vagues brunes et souples, et de grands yeux si foncés qu'on les croirait noirs, entourés de longs cils, telle une biche. Le soleil donnait à sa peau de pêche un doré soutenue.
_"Tu ne crois pas que tu devrais t'habiller ?" répondis-je.
Elle fit une petite moue et se laissa choir sur mon lit.
_"Je me sens tellement nerveuse depuis ce matin, je ne sais pas pourquoi. Mais je me sens... Excitée et terrorisée. Comme si j'avais peur de ne pas être à la hauteur... de quelque chose. J'ai l'impression que quelque chose va m'arriver mais je ne sais pas quoi ! Ça ne peux pas être qu'à cause de la rentrée !"
L'anxiété se lisait dans sa voix. Elle n'avait pas le trac, elle était complètement terrorisée ! Ma sœur n'avait pas l'habitude de perdre confiance en elle. Elle n'était pas du genre à s'inquiéter de ce qu'on pouvait penser d'elle. Ariel était plutôt trop vive, ouverte, impulsive même. Elle était sure d'elle-même, qu'il s'agisse des bons comme des mauvais côtés. Elle avait aussi gardé son sourire. C'était un soleil qui chassait les nuages que pouvait amener la vie. Le manque de confiance en soi : voilà qui ne lui ressemblait pas.
_"D'habitude c'est moi qui manque de confiance en moi. Chérie, tu ne serais pas la première à stresser le jour de ta rentrée au lycée, mais ce n'est pas si terrible que ça." Tout ça pour le lycée ? Je soupirai. Mais après tout, certains adultes redoutaient parfois leurs années lycée des années plus tard. Elle me jeta un regard furibond.
_"Si j'avais su que tu ne trouverais que ça je serais aller voir maman. J'ai besoin de quelque chose de plus constructif, d'un avis expérimenté. Je ne peux pas croire que ce ne soit que la rentrée, ce n'est pas mon genre d'avoir le trac comme ça, tu le sais ! Pas juste pour une rentrée... "
C'était un appel anxieux. Je m'assis à côté d'elle, la gratifiant d'un sourire rassurant. Après tout, le lycée n'était pas encore aussi loin de moi. Je devais admettre que le lycée n'était pas aussi facile à passer que ce que l'on pouvait dire. Mais après l'avoir fini, on se rappelle surtout y avoir survécu : finalement, ce n'était pas si terrible. Comme toujours. On en verra d'autres...
_"Je ne te redirais pas que tu n'as aucune raison de stresser, ça me semble inutile. Mais tu es parfaite -exceptée pour ce pyjama ridicule ! Et il est encore trop tôt pour que tu es uneréelle raison de dénigrer ta capacité de jugement."
Je levai un doigt pour la faire taire alors qu'elle s'apprêtait à répliquer. "Je n'ai pas finit ! Tu sais, tout le monde adore la science-fiction, les histoires de héros, tout ça... Mais toi et moi on sait que pour l'instant le plus dur des combats tu le vivras tous les jours à partir de demain, à l'école. Et tu t'en sortiras très bien ! Tu es belle; et tu as suffisamment de caractère, pour que je ne m'inquiète pas que tu te fasse marcher sur les pieds !
Et si certains de tes camarades ne savent pas voir combien tu géniale alors envoie les promener. En plus, si tu perds confiance en toi maintenant tu risque de passer à côté de belles rencontres. Alors, aie des bonnes notes, reste toi-même autant que tu le pourras, et je sais que tu te feras des amis - de vrais amis - et eux comme moi seront là si un jour quelque chose ne va pas ou que tu te transforme en sorcière ! Se sentir aimer c'est important - surtout à ton âge - mais c'est différent d'être populaire."
_"Facile à dire pour une ex cheer leader !" railla ma sœur. Je me mordis les lèvres.
_"Ce n'est pas ce que je veux dire..."
_"Pourquoi ? Tu ne te sentais pas aimée quand tu étais cheer leader ? Tout le monde aime les filles populaires..."
_"Etre aimé ce n'est pas la même chose qu'être populaire. Mais, oui, je suppose qu'on se sent aimé quant on est populaire. Seulement se sentir aimé par quelqu'un et être réellement aimé par cette personne n'est pas toujours la même chose. En revanche, tu peux te sentir haï par quelqu'un et découvrir un beau jour que personne ne t'aime plus que lui... Tu en a même eu un exemple avec moi ! Certaines personne voudront profiter de toi. Ils te feront croire que tu comptes pour eux et ensuite ils se moqueront de toi (y compris les garçons). Tu n'en es pas à ta première année à l'école, tu le sais. Tu sais que les apparences y comptent beaucoup. Et, avec l'âge et les hormones ça ne va pas s'arranger. Tout le monde veut être accepter et tu les verras tous rejoindre leurs groupes. Mais crois-moi, il suffit parfois d'une seule personne pour que le lycée te semble moins terrible tout d'un coup. Et puis, tu pourras toujours compter sur ta grande sœur !"
Je lui remis une mèche derrière l'oreille d'un geste affectueux. Cette petite crise de confiance n'aurait pas durer de toute façon. Il aurait suffit qu'elle se retrouve avec quelqu'un pour que sa nature revienne. Ma sœur et moi avions toujours été complices, bien que diamétralement opposées. Toutes deux étions toute fois matures pour nos âges. Cela devait être important d'avoir quelqu'un à qui parlait, qui peut vous conseiller, vous rassurer, vous dire ce qui va ce passait et à quoi s'attendre. Quelqu'un qui - non comptant de vous aidez à trouver le vêtement qu'il faut - connait l'histoire de votre premier amour, les moqueries qu'on vous a asséné ou votre plus grande honte. Ma sœur n'aurait pas demander à n'importe qui !
D'un geste, je la relevai :
_"Allez, viens ! Allons passer au crible ta garde-robe !"
Elle me suivit d'un bond, preste et rapide comme une elfe. De toute évidence, elle n'avait pas hérité de ma maladresse (j'étais miss catastrophe !).
Effectivement, non comptant de l'amener à se changer, nous discutâmes garde-robe, une occasion de se donner nos avis. Ses longs cheveux fins et raides voletaient avec sa longue silhouette fine et légère. Elle s'habilla avec un t-shirt marron, un jean serré et des boots châtaignes. Nous êtions des filles et, naturellement, nous ne reniions pas le plaisir de se faire belle (et de se sentir belle) ou de renouveler nos gardes robes de temps à autres(pour notre plaisir mais aussi pour celui des autres). On s'échangeait nos avis, dérivant au fur et à mesure de la conversation et des private-jocks. Heureusement, le shopping bien fait n'entrainait pas nécessairement des dépenses rocambolesques et les renouvellement de gardes robes nécessitaient une excellente raison. De plus, Ariel s'était abonnée au recyclage de ma propre garde-robe.
Fin prêtes, nous descendîmes. Ma mère était déjà partie et Keiss aboya dans le jardin pour saluer notre arrivée. Je lui passais la laisse et nous quittâmes la maison. Nous nous baladâmes sur la plage. Des cerfs- volants volaient au-dessus de nos têtes. J'entrainai ma sœur dans un petite bijouterie de la promenade. Devant la surprise de ma compagne, je lui intimai de rester là, craignant son interrogatoire. Elle voulut protester mais un vendeur entra et je me dirigeais droit vers lui sous ses regards lourds de suspicion.
_"Que puis-je faire pour vous ?" demanda le vendeur à l'air gominé et trop brillant, tel une poupée de cire, un sourire poliment avenant, mécanique, sur son visage inexpressif.
_"Je viens chercher ma commande. Mademoiselle Mars." lui indiquais-je tandis qu'il feuilletait ses registres.
_"Un instant." s'excusa-t-il avant de disparaître.
Il revint une minute plus tard, un petit paquet carré emballé dans du papier rouge, un ruban doré accroché avec du scotch, qu'il mit dans un petit sac bleu nuit à l'enseigne d'or du magasin. Je le remerciais, pris le paquet et entrainais de nouveau ma sœur - dehors cette fois.
Je savais que je ne pouvais plus retenir sa curiosité et lui tendis le paquet. Elle le saisit, sourcil levé.
_"C'est pour toi." assurai-je.
Cette fois, c'est toute excitée qu'elle déballa l'emballage, découvrant un petit coffret de velour bleu marine, orné d'un ruban d'or. Retenant, son souffle, elle l'ouvrit. Découvrant son cadeau, elle se mit à s'agiter en balbutiant comme si cette petite boîte avait contenue la chose la plus admirable et merveilleuse du monde. C'était une paire de boucles d'oreilles en perles fines. Elle me sauta au cou avant même que mes yeux aient pu transmettre quoi que soit à mon cerveau.
_ "Respire, Ariel !" lui conseillais-je.
_"Il faut que je les essayes ! Tout se suite ! Je veux voir comment elles me vont !" et elle fonça vers le rétroviseur d'une voiture en stationnement. Ce devait bien être le bijoux le plus cher qu'on ne lui ait jamais offert, excepté peut-être la croix et la gourmette offerte à son bathème ! Elle suffoquait de plaisir devant son reflet, aux anges. Son visage à l'ovale doux, un peu trianguleux, rayonnait, les joues en feu. Ses yeux noirs et profonds paraissaient piqués d'étoiles et ses lèvres fines étaient étirées d'un sourire de félicité et de fierté. Ariel avait tiré ses longs cheveux fins et dorés , dévoilant les perles solitaires dans tout leurs éclats. C'est à contre cœur qu'elle les remit dans leur boîte.
La journée parut plus belle encore si cela fut possible. Il faisait un temps superbe et nombre de gens étaient dehors. La foule me sembla plus joyeuse et plus vivante sous l'effet de l'approche de la rentrée - imminente maintenant. La journée fila vite.
Je me pinçai les lèvres pour ne pas rire.
Ma sœur était très grande et fine. Elle avait de long cheveux blond miel comme ceux de maman, tandis que les miens bouclaient en soyeuses vagues brunes et souples, et de grands yeux si foncés qu'on les croirait noirs, entourés de longs cils, telle une biche. Le soleil donnait à sa peau de pêche un doré soutenue.
_"Tu ne crois pas que tu devrais t'habiller ?" répondis-je.
Elle fit une petite moue et se laissa choir sur mon lit.
_"Je me sens tellement nerveuse depuis ce matin, je ne sais pas pourquoi. Mais je me sens... Excitée et terrorisée. Comme si j'avais peur de ne pas être à la hauteur... de quelque chose. J'ai l'impression que quelque chose va m'arriver mais je ne sais pas quoi ! Ça ne peux pas être qu'à cause de la rentrée !"
L'anxiété se lisait dans sa voix. Elle n'avait pas le trac, elle était complètement terrorisée ! Ma sœur n'avait pas l'habitude de perdre confiance en elle. Elle n'était pas du genre à s'inquiéter de ce qu'on pouvait penser d'elle. Ariel était plutôt trop vive, ouverte, impulsive même. Elle était sure d'elle-même, qu'il s'agisse des bons comme des mauvais côtés. Elle avait aussi gardé son sourire. C'était un soleil qui chassait les nuages que pouvait amener la vie. Le manque de confiance en soi : voilà qui ne lui ressemblait pas.
_"D'habitude c'est moi qui manque de confiance en moi. Chérie, tu ne serais pas la première à stresser le jour de ta rentrée au lycée, mais ce n'est pas si terrible que ça." Tout ça pour le lycée ? Je soupirai. Mais après tout, certains adultes redoutaient parfois leurs années lycée des années plus tard. Elle me jeta un regard furibond.
_"Si j'avais su que tu ne trouverais que ça je serais aller voir maman. J'ai besoin de quelque chose de plus constructif, d'un avis expérimenté. Je ne peux pas croire que ce ne soit que la rentrée, ce n'est pas mon genre d'avoir le trac comme ça, tu le sais ! Pas juste pour une rentrée... "
C'était un appel anxieux. Je m'assis à côté d'elle, la gratifiant d'un sourire rassurant. Après tout, le lycée n'était pas encore aussi loin de moi. Je devais admettre que le lycée n'était pas aussi facile à passer que ce que l'on pouvait dire. Mais après l'avoir fini, on se rappelle surtout y avoir survécu : finalement, ce n'était pas si terrible. Comme toujours. On en verra d'autres...
_"Je ne te redirais pas que tu n'as aucune raison de stresser, ça me semble inutile. Mais tu es parfaite -exceptée pour ce pyjama ridicule ! Et il est encore trop tôt pour que tu es uneréelle raison de dénigrer ta capacité de jugement."
Je levai un doigt pour la faire taire alors qu'elle s'apprêtait à répliquer. "Je n'ai pas finit ! Tu sais, tout le monde adore la science-fiction, les histoires de héros, tout ça... Mais toi et moi on sait que pour l'instant le plus dur des combats tu le vivras tous les jours à partir de demain, à l'école. Et tu t'en sortiras très bien ! Tu es belle; et tu as suffisamment de caractère, pour que je ne m'inquiète pas que tu te fasse marcher sur les pieds !
Et si certains de tes camarades ne savent pas voir combien tu géniale alors envoie les promener. En plus, si tu perds confiance en toi maintenant tu risque de passer à côté de belles rencontres. Alors, aie des bonnes notes, reste toi-même autant que tu le pourras, et je sais que tu te feras des amis - de vrais amis - et eux comme moi seront là si un jour quelque chose ne va pas ou que tu te transforme en sorcière ! Se sentir aimer c'est important - surtout à ton âge - mais c'est différent d'être populaire."
_"Facile à dire pour une ex cheer leader !" railla ma sœur. Je me mordis les lèvres.
_"Ce n'est pas ce que je veux dire..."
_"Pourquoi ? Tu ne te sentais pas aimée quand tu étais cheer leader ? Tout le monde aime les filles populaires..."
_"Etre aimé ce n'est pas la même chose qu'être populaire. Mais, oui, je suppose qu'on se sent aimé quant on est populaire. Seulement se sentir aimé par quelqu'un et être réellement aimé par cette personne n'est pas toujours la même chose. En revanche, tu peux te sentir haï par quelqu'un et découvrir un beau jour que personne ne t'aime plus que lui... Tu en a même eu un exemple avec moi ! Certaines personne voudront profiter de toi. Ils te feront croire que tu comptes pour eux et ensuite ils se moqueront de toi (y compris les garçons). Tu n'en es pas à ta première année à l'école, tu le sais. Tu sais que les apparences y comptent beaucoup. Et, avec l'âge et les hormones ça ne va pas s'arranger. Tout le monde veut être accepter et tu les verras tous rejoindre leurs groupes. Mais crois-moi, il suffit parfois d'une seule personne pour que le lycée te semble moins terrible tout d'un coup. Et puis, tu pourras toujours compter sur ta grande sœur !"
Je lui remis une mèche derrière l'oreille d'un geste affectueux. Cette petite crise de confiance n'aurait pas durer de toute façon. Il aurait suffit qu'elle se retrouve avec quelqu'un pour que sa nature revienne. Ma sœur et moi avions toujours été complices, bien que diamétralement opposées. Toutes deux étions toute fois matures pour nos âges. Cela devait être important d'avoir quelqu'un à qui parlait, qui peut vous conseiller, vous rassurer, vous dire ce qui va ce passait et à quoi s'attendre. Quelqu'un qui - non comptant de vous aidez à trouver le vêtement qu'il faut - connait l'histoire de votre premier amour, les moqueries qu'on vous a asséné ou votre plus grande honte. Ma sœur n'aurait pas demander à n'importe qui !
D'un geste, je la relevai :
_"Allez, viens ! Allons passer au crible ta garde-robe !"
Elle me suivit d'un bond, preste et rapide comme une elfe. De toute évidence, elle n'avait pas hérité de ma maladresse (j'étais miss catastrophe !).
Effectivement, non comptant de l'amener à se changer, nous discutâmes garde-robe, une occasion de se donner nos avis. Ses longs cheveux fins et raides voletaient avec sa longue silhouette fine et légère. Elle s'habilla avec un t-shirt marron, un jean serré et des boots châtaignes. Nous êtions des filles et, naturellement, nous ne reniions pas le plaisir de se faire belle (et de se sentir belle) ou de renouveler nos gardes robes de temps à autres(pour notre plaisir mais aussi pour celui des autres). On s'échangeait nos avis, dérivant au fur et à mesure de la conversation et des private-jocks. Heureusement, le shopping bien fait n'entrainait pas nécessairement des dépenses rocambolesques et les renouvellement de gardes robes nécessitaient une excellente raison. De plus, Ariel s'était abonnée au recyclage de ma propre garde-robe.
Fin prêtes, nous descendîmes. Ma mère était déjà partie et Keiss aboya dans le jardin pour saluer notre arrivée. Je lui passais la laisse et nous quittâmes la maison. Nous nous baladâmes sur la plage. Des cerfs- volants volaient au-dessus de nos têtes. J'entrainai ma sœur dans un petite bijouterie de la promenade. Devant la surprise de ma compagne, je lui intimai de rester là, craignant son interrogatoire. Elle voulut protester mais un vendeur entra et je me dirigeais droit vers lui sous ses regards lourds de suspicion.
_"Que puis-je faire pour vous ?" demanda le vendeur à l'air gominé et trop brillant, tel une poupée de cire, un sourire poliment avenant, mécanique, sur son visage inexpressif.
_"Je viens chercher ma commande. Mademoiselle Mars." lui indiquais-je tandis qu'il feuilletait ses registres.
_"Un instant." s'excusa-t-il avant de disparaître.
Il revint une minute plus tard, un petit paquet carré emballé dans du papier rouge, un ruban doré accroché avec du scotch, qu'il mit dans un petit sac bleu nuit à l'enseigne d'or du magasin. Je le remerciais, pris le paquet et entrainais de nouveau ma sœur - dehors cette fois.
Je savais que je ne pouvais plus retenir sa curiosité et lui tendis le paquet. Elle le saisit, sourcil levé.
_"C'est pour toi." assurai-je.
Cette fois, c'est toute excitée qu'elle déballa l'emballage, découvrant un petit coffret de velour bleu marine, orné d'un ruban d'or. Retenant, son souffle, elle l'ouvrit. Découvrant son cadeau, elle se mit à s'agiter en balbutiant comme si cette petite boîte avait contenue la chose la plus admirable et merveilleuse du monde. C'était une paire de boucles d'oreilles en perles fines. Elle me sauta au cou avant même que mes yeux aient pu transmettre quoi que soit à mon cerveau.
_ "Respire, Ariel !" lui conseillais-je.
_"Il faut que je les essayes ! Tout se suite ! Je veux voir comment elles me vont !" et elle fonça vers le rétroviseur d'une voiture en stationnement. Ce devait bien être le bijoux le plus cher qu'on ne lui ait jamais offert, excepté peut-être la croix et la gourmette offerte à son bathème ! Elle suffoquait de plaisir devant son reflet, aux anges. Son visage à l'ovale doux, un peu trianguleux, rayonnait, les joues en feu. Ses yeux noirs et profonds paraissaient piqués d'étoiles et ses lèvres fines étaient étirées d'un sourire de félicité et de fierté. Ariel avait tiré ses longs cheveux fins et dorés , dévoilant les perles solitaires dans tout leurs éclats. C'est à contre cœur qu'elle les remit dans leur boîte.
La journée parut plus belle encore si cela fut possible. Il faisait un temps superbe et nombre de gens étaient dehors. La foule me sembla plus joyeuse et plus vivante sous l'effet de l'approche de la rentrée - imminente maintenant. La journée fila vite.
Dernière édition par Ely Julia le Mar 1 Sep 2009 - 17:34, édité 5 fois
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Localisation : trop loin de tes bras et rêvant à tous les moyens de te rendre heureux...
Date d'inscription : 27/10/2008
Re: [sans titre]
Le ciel s'assombrit d'un coup, d'épais nuages venant cacher le soleil, encore radieux une minute plus tôt. Un vent froid s'était levé. Un peu inquiètes de la suite, ma sœur et moi entrâmes dans une épicerie de brique rouge et à l'enseigne verte foncée. Nous avions quelques courses à faire pour la maison. Rester encore les céréales préférées d'Ariel.
_"Lesquelles tu veux ?" demandai-je.
Elle me les désigna du doigt:
_"Celles-là, tout en haut !"
Tout en haut, évidemment ! Peu rassurée, je tendis le bras, me hissant sur la pointe des pieds en grimaçant sous l'effort. Mais les céréales restaient impitoyablement trop hautes. Quand mes doigts arrivèrent enfin à en frôler un, je tentai de le faire tomber quand ce que j'avais tant redouté arriva. je manquai me renverser sur l'étagère, m'agrippai à un des barreaux pour me restabiliser, déséquilibrant les boîtes qui trônaient au sommet. Elles tombèrent à la renverse, de l'autre côté de l'étagère. On entendit un bruit sourd.
Je me précipitai en priant pour qu'il n'y ait eu personne en-dessous du déluge de cartons.
Et je tombais nez à nez (en manquant de lui rentrer dedans en freinant sur le sol glissant) avec un dieu plus beau que tout ce que l'on put imaginer. Il était d'une beauté saisissante et fascinante, bien qu'il semblait prêt à disparaitre plus vite et aussi facilement qu'un rêve. Il avait une peau fine et immaculée, plus blanche que le marbre. Ses cheveux bruns formaient de délicates boucles brunes qui encerclaient un visage terriblement beau. Ses yeux d'un noir étincelant me pétrifièrent, rendus plus impressionnants encore par de fines cernes violacées. Je ne pouvai plus détacher mes yeux des siens. Mon cœur s'accéléra. Je vis ses pommettes saillantes, son nez parfaitement dessiné, ses lèvres naturellement rouges. Mon cœur battait maintenant si fort que cela en était douloureux. Ma peau me brûla. Je titubai d'un pas en arrière, balbutiant je ne sais quoi - ce qui devaient ressemblaient le plus à des excuses. Mon cerveau semblait paralysé, bloqué sur lui, sur l'image de son visage. Il sourit, découvrant ses dents étonnamment blanche, me dit que ce n'était rien d'une voix de ténor qui éjecta mon cœur hors de ma poitrine. Il me tendit un paquet de céréales avec une grâce irréelle que je saisis sans même m'en rendre compte, avec l'impression que c'était quelqu'un d'autre qui avait bougé. Son geste, avec l'air brassé du dehors, apporta une once de son odeur jusqu'à moi. Mon cœur s'arrêta de battre tant cette odeur était sublime. Évidemment, il n'avait rien. Tout ceci ne dura que quelque seconde.
Déjà ma sœur apparut. Ses cheveux voltaient dans sa course. J'eu à peine le temps de retomber à la réalité que déjà l'inconnu partait, s'enfuyant presque. Son beau visage était contracté par la haine, ses yeux noirs de dégoût. Il serrait les poings si fort sa peau en était blanche et que ses fines veines seyaient à sa surface. Il se retint pour ne pas courir jusqu'à la sortie du magasin. Je le suivis désespérément des yeux, souhaitant de tout mon être qu'il s'arrête, qu'il revienne. Je ne comprenais plus rien.
_"Tu le connais ?"demanda Ariel, incrédule. Elle se retourna vers moi, se cru obligée d'ajouter qu'elle était désolée, ce que je ne compris pas et elle passa son bras autour de moi. On prit le chemin de la sortie. Je tendit les céréales à ma sœur. Elle n'avait pas comprit ce qui était arrivé. J'avais l'impression d'être ailleurs, de mettre arrêté à la fuite de l'inconnu. Je me sentais vide et les jambes flageolantes. Mon cœur battait la chamade et je manquai m'évanouir au souvenir - trop net - de l'expression de son visage quand il avait disparu.
Son regard plein de haine pour ma sœur !
Nous rentrâmes chez nous, serrées l'une contre l'autre à se frictionner tant le vent était fort et avait refroidit l'air. Voilà comment finissait l'été. La rentrée siégeait maintenant à l'ordre des priorités. Je ne dis rien de tout le trajet et ma sœur n'insista pas. J'avais vraiment du avoir l'air mal ! Le chien aussi semblait s'inquiété.
J'étais furieuse ! Furieuse, perplexe et anéantie !
Furieuse de la réaction de l'inconnu de l'épicerie, de sa haine et de son dégoût si évidents et injustifiés à l'égard de ma sœur. Il ne la connaissait même pas ! Qu'avait-elle donc fait qui l'a rende si repoussante ? Mais j'étais aussi furieuse contre moi-même, contre l'impression si forte qu'il m'avait fait - d'une aussi indescriptible splendeur fut-elle personne (encore moins inconnue) ne devrait avoir le droit de me "posséder" ainsi, car c'était le mot le plus proche de ce que je ressentais (bien qu'il sembla que j'avais été la seule victime) ! Perplexe, parce que je n'arrivais pas à comprendre, à trouver ce qui avait bien pu le mettre dans un état pareil. Qu'est-ce qui avait pu déclencher chez lui cette haine si forte, cette révulsion si cruelle ? Le pire était qu'elle m'atteignait moi-même, en sachant pourtant que je n'avais pas été visée. J'avais l'impression que c'est moi qui l'avais écœuré, moi qu'il avait évincée de ses yeux brûlants de haine, repoussée dans le noir immonde. Moi qu'il avait fui ! Je revivais son regard noir sur ma sœur, inconsciente, innocente. Et voilà que la fureur me reprenait. Pourquoi cet inconnu que je n'avais vu que quelques secondes me semblait-il si important, essentiel ? Pourquoi m'étais-je sentis si brûlante, happée par lui qui rayonnait ? Pourquoi mon cœur était-il prit de folie rien qu'à son souvenir dont je ne pouvais pas me défaire ? Et enfin, qu'était-il ? Il était plus qu'un être humain, j'en étais sure, bien que ce fut à peu près la seule chose que je savais à son propos. Aucun être humain ne pourrait avoir cette beauté parfaite, cette splendeur éclatante, la grâce qui émanait de lui, plus belle encore que le plus éblouissant rayon de soleil. Et déjà, je mourrais de l'idée de ne plus le revoir. Il fallait que je le revois ! Ne serait-ce que pour savoir ce qui n'allait pas chez ma sœur pour qu'il la haïsse à ce point. Mais aussi parce que je voulais savoir ce qu'il était. Je savais - malgré tout mes efforts pour me raisonner - je savais qu'il était plus qu'un humain ordinaire. Bien plus. Tellement plus ! Je savais que cela paraissait complètement fou et qu'il aurait de quoi me rire au nez s'il savait - et même de quoi me faire enfermer - mais c'était trop tard. j'étais sure de moi. Je soupirais: tout cela était tellement exagéré.
Lorsque nous rentrâmes, ma mère n'était pas encore là. J'en fus soulagée. J'avais retrouvé mon calme au fil du chemin et la soirée fut tranquille. La cuisine ne m'occupa guère longtemps malheureusement, car elle me permettait d'arrêter de trop penser. Après le dîner, je résistai à l'envie de prendre une douche chaude - glacée par l'humidité qui commençait à se lever, fait étrange dans cette ville - et montai directement dans ma chambre. Je me couvris d'un plaid et, assise en chien de fusil, m'abandonnai sur le lit,étrangement fatiguée. Ma sœur toqua à la porte, puis entra. Elle avait retrouvé son pyjama ridicule et tenait dans ses mains deux tasses.
-"Tiens !" me dit-elle en me tendant une tasse et en s'asseyant à côté de moi. La tasse était chaude et contenait un liquide doré. "C'est de la camomille ! Il parait que ça aide à se détendre."
_"Oui, je sais. Merci."
Il y eu un silence.
_" A quoi penses tu ?"
_"A papa."
Je me rétractais.
_"Pourquoi maintenant ?"
_"C'est son anniversaire aujourd'hui. Et Il a toujours pensé aux nôtres - au tien et au mien."
_"Il a une mémoire très sélective..."
_"J'ai voulu lui envoyé une carte mais... Je me suis rappelée qu'on n'avait même pas une adresse à laquelle l'envoyer. Je me demandais si tu l'aurais signée."
_"Pour papa, non merci, je veux pas."
_"Mais ça t'arrive qu'en même de penser à lui ?"
_"Ecoute, Mickaël a choisi de nous abandonner, et maintenant il ne fait plus parti de notre vie alors..."
_"C'est justement ça qui est triste. Il rate tellement de chose, comme ma rentrée, mon premier petit copain... l'anniversaire de tes dix-huit ans, la remise de ton diplôme..."
_"Je sais ! Mais apparemment, lui, il ne voit pas combien c'est grave; et combien même il n'a pas envie de les connaître."
_"Donc, ça t'arrive de penser à lui ?... Ella, tu ne parles jamais de lui. Je vais finir par croire que j'ai inventé avoir eu un père. Je veux juste savoir s'il arrive qu'il te manque."
_"C'est le père que j'aurais aimé avoir qui me manque, mais lui, non, il ne me manque pas."
_"A moi si. Je ne sais pas comment tu fais pour faire comme s'il n'existait pas, comme s'il n'avait jamais existé... Et je ne t'envie pas."
Ariel se leva, me laissant pantoise.
_"Bonne nuit. A demain."
_"Bonne nuit." balbutiai-je.
Je m'endormis bien plus tard.
Je dormis mal et lorsque j'ouvris ma fenêtre, la lumière du soleil avait disparu derrière d'épais nuage de coton blanc et gris. Le vent avait cessé mais l'humidité était toujours là. Je ne pus m'empêcher de frissonner. L'été nous avait quitté, chassé par l'automne qui était tombé sur nous soudainement. C'était comme ça ici. En une seconde les nuages avançaient sur le soleil, le recouvraient. Un vent froid apportait la pluie qui s'abattait en trombes sur la terre sèche; Puis le vent s'en allait en laissant la pluie pour ne revenir quand hiver. Et sous le ciel gris tout prenait soudain des couleurs d'or, de rouge sang et de brun. La forêt à l'orée de la ville était ce qui m'avait toujours le plus impressionné, bien qu'étrangement elle m'ait toujours un peu effrayée aussi, repoussée. Elle changeait si brusquement. A partir d'aujourd'hui, elle sera une éclatante mer rouge. Les feuilles tomberont dans un dernier éclat doré qui se sera éteint avant même qu'elles aient touché le sol comme si on pouvait voir la vie les quittaient, ne laissant derrière elle que des cadavres desséchés et ternes. Le bois craquant tombera dans un bruit de squelette que l'on brise et qui s'écroule au sol. La terre se regorgera en un cercueil brun et souple. Et il ne restera plus que les corps bruns des arbes, tendus vers le ciel, leurs squelettes implorants jusqu'à leurs longues mains décharnées l'immense horizon gris. Et l'hiver viendra alors, annoncé par le mugissement funèbre du vent traversant ce cimetière de bois. J'avais déjà hâte que l'automne passe. Cette saison me déprimait.
Je fis ma toilette, descendis, mon sac de cours sur l'épaule. J'avais enfilé un jean, un t-shirt vert foncé avec un arc en ciel dessus et une veste. Ma sœur faisait tourner un très beau stylo entre ses doigts pour mieux l'admirer - juste au-dessus de son bol de céréales baignant dans le lait. Ma mère lui avait donc offert son cadeau de rentrée. Elle était déjà partie et il ne restait que ma sœur et moi.
_"Ariel ! On s'en va !" lançais-je à l'intéressée, qui bondit sur ses pieds, attrapa son sac et me rejoignit dans la voiture.
C'était une vieille voiture noire et il y avait toujours quelque chose qui avait besoin d'être réparé mais je trouvais qu'elle avait du caractère. Je l'aimais bien.
_"Comment tu me trouves ?" me demanda ma sœur sur le chemin.
Je la détaillai. Elle avait attaché ses ravissants cheveux blonds en queue de cheval mi-haute, dégageant son beau visage en cœur aux pommettes hautes et son cou long et fin. Ses yeux, soulignés par un trait ultra-fin de crayon, pétillaient. Ses longs cils à la courbure naturellement fantastique ajoutaient à son air de poupée. Ses lèvres abricot dessinaient un sourire auquel je trouvais quelque chose de courageux. Ses joues avaient rougi d'excitation. Ariel portait un t-shirt uni bleu ciel (une couleur qui faisait plaisir à voir par ce temps), un jean noir, une veste de même matière et une jolie paire de ballerine. Je notai aussi qu'elle avait mis les boucles d'oreille que je lui avais offertes (et qui lui allaient effectivement à ravir). Elle n'était pas aussi nerveuse qu'hier, mais plutôt calme et assurée. Je tentai de me rappeler comment j'avais été lors de ma propre rentrée en première année de lycée mais en fus incapable.
En revanche, le lycée n'avait pas changé avec ses murs clairs, son toit de tuile, son parvis avec d'un côté l'emplacement des voitures et de l'autre, sur les terrasses, les tables de cantines et, surtout, le nom de l'école en grandes lettres bleues marines surmonté de l'emblème de l'école: un perroquet portant un bandeau noir de pirate. Le même perroquet qui flottait sur le drapeau bleu accroché en haut du mat de l'école. Dès les places réservées à l'emplacement des voitures on observaient la formation des groupes qui serraient les rangs. La ville était composée de toutes les classes sociales et le lycée en était un microcosme où tout semblait venir se cristallisait. Devant l'entrée - qui servait aussi de sortie - des voitures rutilantes s'alignaient. Les gosses de riches - les 9.3., du numéro de leur quartier - avaient conservé leurs places. Ils arrivaient toujours en même temps le jour de la rentrée, décontractés comme s'ils étaient chez eux, formant un groupe trépidant que tous les autres élèves regardaient passer - ne serait-ce que du coin de l'œil - avec admiration, avec jalousie, avec haine, avec dégout. Ils étaient arrivés, les rumeurs et les murmures pouvaient commencer. C'était le jour de la rentrée et déjà tout le monde savait qui ils étaient, savaient qu'ils se fichaient de tout un chacun parce que, de toute façon, la pire chose qui pouvait leur arriver c'était d'être répudié, de perdre leur place dans ce clan si spécial et, avec, tous leurs privilèges et leurs amis. Se retrouver seul et sans appui. C'était quelque chose qu'on ne pouvait souhaiter à personne ici.
Plus groupés encore arrivaient les motards, les hispaniques dont les parents travaillaient pour la plupart comme employés de ménage chez les parents des riches ou dans des garages. Ils vivaient dans les pourtours de la ville, tandis que les riches occupaient les hauts quartiers sur la colline qui dominait la ville à l'est. Puis, il y avait tous les autres: ceux de classes moyenne et ceux plus pauvres. Ceux qui devaient travailler après les cours pour pouvoir se payer leurs études. Ma mère nous élevait avec son salaire de professeur alors nous étions habituées à ne pas rouler sur l'or mais on arrivait quand même à payer les factures à l'heure. Je travaillais depuis mon entrée au lycée pour un magasine et ma sœur venait de trouver un boulot dans une petite supérette. Ici, comptait donc d'abord qui était employé et qui était employeur. Ensuite venait encore l'origine. Malgré toutes ces différences, le lycée de la ville était excellent.
Ma sœur jeta un coup d'œil autour d'elle, reconnu quelqu'un (un collègue de travail avec qui elle s'entendait bien), le hella, visiblement ravie, et sortit de la voiture. Par la vitre baissée, je la vis disparaitre dans la foule en rejoignant son ami. Voilà une bonne chose de faite.
_"Lesquelles tu veux ?" demandai-je.
Elle me les désigna du doigt:
_"Celles-là, tout en haut !"
Tout en haut, évidemment ! Peu rassurée, je tendis le bras, me hissant sur la pointe des pieds en grimaçant sous l'effort. Mais les céréales restaient impitoyablement trop hautes. Quand mes doigts arrivèrent enfin à en frôler un, je tentai de le faire tomber quand ce que j'avais tant redouté arriva. je manquai me renverser sur l'étagère, m'agrippai à un des barreaux pour me restabiliser, déséquilibrant les boîtes qui trônaient au sommet. Elles tombèrent à la renverse, de l'autre côté de l'étagère. On entendit un bruit sourd.
Je me précipitai en priant pour qu'il n'y ait eu personne en-dessous du déluge de cartons.
Et je tombais nez à nez (en manquant de lui rentrer dedans en freinant sur le sol glissant) avec un dieu plus beau que tout ce que l'on put imaginer. Il était d'une beauté saisissante et fascinante, bien qu'il semblait prêt à disparaitre plus vite et aussi facilement qu'un rêve. Il avait une peau fine et immaculée, plus blanche que le marbre. Ses cheveux bruns formaient de délicates boucles brunes qui encerclaient un visage terriblement beau. Ses yeux d'un noir étincelant me pétrifièrent, rendus plus impressionnants encore par de fines cernes violacées. Je ne pouvai plus détacher mes yeux des siens. Mon cœur s'accéléra. Je vis ses pommettes saillantes, son nez parfaitement dessiné, ses lèvres naturellement rouges. Mon cœur battait maintenant si fort que cela en était douloureux. Ma peau me brûla. Je titubai d'un pas en arrière, balbutiant je ne sais quoi - ce qui devaient ressemblaient le plus à des excuses. Mon cerveau semblait paralysé, bloqué sur lui, sur l'image de son visage. Il sourit, découvrant ses dents étonnamment blanche, me dit que ce n'était rien d'une voix de ténor qui éjecta mon cœur hors de ma poitrine. Il me tendit un paquet de céréales avec une grâce irréelle que je saisis sans même m'en rendre compte, avec l'impression que c'était quelqu'un d'autre qui avait bougé. Son geste, avec l'air brassé du dehors, apporta une once de son odeur jusqu'à moi. Mon cœur s'arrêta de battre tant cette odeur était sublime. Évidemment, il n'avait rien. Tout ceci ne dura que quelque seconde.
Déjà ma sœur apparut. Ses cheveux voltaient dans sa course. J'eu à peine le temps de retomber à la réalité que déjà l'inconnu partait, s'enfuyant presque. Son beau visage était contracté par la haine, ses yeux noirs de dégoût. Il serrait les poings si fort sa peau en était blanche et que ses fines veines seyaient à sa surface. Il se retint pour ne pas courir jusqu'à la sortie du magasin. Je le suivis désespérément des yeux, souhaitant de tout mon être qu'il s'arrête, qu'il revienne. Je ne comprenais plus rien.
_"Tu le connais ?"demanda Ariel, incrédule. Elle se retourna vers moi, se cru obligée d'ajouter qu'elle était désolée, ce que je ne compris pas et elle passa son bras autour de moi. On prit le chemin de la sortie. Je tendit les céréales à ma sœur. Elle n'avait pas comprit ce qui était arrivé. J'avais l'impression d'être ailleurs, de mettre arrêté à la fuite de l'inconnu. Je me sentais vide et les jambes flageolantes. Mon cœur battait la chamade et je manquai m'évanouir au souvenir - trop net - de l'expression de son visage quand il avait disparu.
Son regard plein de haine pour ma sœur !
Nous rentrâmes chez nous, serrées l'une contre l'autre à se frictionner tant le vent était fort et avait refroidit l'air. Voilà comment finissait l'été. La rentrée siégeait maintenant à l'ordre des priorités. Je ne dis rien de tout le trajet et ma sœur n'insista pas. J'avais vraiment du avoir l'air mal ! Le chien aussi semblait s'inquiété.
J'étais furieuse ! Furieuse, perplexe et anéantie !
Furieuse de la réaction de l'inconnu de l'épicerie, de sa haine et de son dégoût si évidents et injustifiés à l'égard de ma sœur. Il ne la connaissait même pas ! Qu'avait-elle donc fait qui l'a rende si repoussante ? Mais j'étais aussi furieuse contre moi-même, contre l'impression si forte qu'il m'avait fait - d'une aussi indescriptible splendeur fut-elle personne (encore moins inconnue) ne devrait avoir le droit de me "posséder" ainsi, car c'était le mot le plus proche de ce que je ressentais (bien qu'il sembla que j'avais été la seule victime) ! Perplexe, parce que je n'arrivais pas à comprendre, à trouver ce qui avait bien pu le mettre dans un état pareil. Qu'est-ce qui avait pu déclencher chez lui cette haine si forte, cette révulsion si cruelle ? Le pire était qu'elle m'atteignait moi-même, en sachant pourtant que je n'avais pas été visée. J'avais l'impression que c'est moi qui l'avais écœuré, moi qu'il avait évincée de ses yeux brûlants de haine, repoussée dans le noir immonde. Moi qu'il avait fui ! Je revivais son regard noir sur ma sœur, inconsciente, innocente. Et voilà que la fureur me reprenait. Pourquoi cet inconnu que je n'avais vu que quelques secondes me semblait-il si important, essentiel ? Pourquoi m'étais-je sentis si brûlante, happée par lui qui rayonnait ? Pourquoi mon cœur était-il prit de folie rien qu'à son souvenir dont je ne pouvais pas me défaire ? Et enfin, qu'était-il ? Il était plus qu'un être humain, j'en étais sure, bien que ce fut à peu près la seule chose que je savais à son propos. Aucun être humain ne pourrait avoir cette beauté parfaite, cette splendeur éclatante, la grâce qui émanait de lui, plus belle encore que le plus éblouissant rayon de soleil. Et déjà, je mourrais de l'idée de ne plus le revoir. Il fallait que je le revois ! Ne serait-ce que pour savoir ce qui n'allait pas chez ma sœur pour qu'il la haïsse à ce point. Mais aussi parce que je voulais savoir ce qu'il était. Je savais - malgré tout mes efforts pour me raisonner - je savais qu'il était plus qu'un humain ordinaire. Bien plus. Tellement plus ! Je savais que cela paraissait complètement fou et qu'il aurait de quoi me rire au nez s'il savait - et même de quoi me faire enfermer - mais c'était trop tard. j'étais sure de moi. Je soupirais: tout cela était tellement exagéré.
Lorsque nous rentrâmes, ma mère n'était pas encore là. J'en fus soulagée. J'avais retrouvé mon calme au fil du chemin et la soirée fut tranquille. La cuisine ne m'occupa guère longtemps malheureusement, car elle me permettait d'arrêter de trop penser. Après le dîner, je résistai à l'envie de prendre une douche chaude - glacée par l'humidité qui commençait à se lever, fait étrange dans cette ville - et montai directement dans ma chambre. Je me couvris d'un plaid et, assise en chien de fusil, m'abandonnai sur le lit,étrangement fatiguée. Ma sœur toqua à la porte, puis entra. Elle avait retrouvé son pyjama ridicule et tenait dans ses mains deux tasses.
-"Tiens !" me dit-elle en me tendant une tasse et en s'asseyant à côté de moi. La tasse était chaude et contenait un liquide doré. "C'est de la camomille ! Il parait que ça aide à se détendre."
_"Oui, je sais. Merci."
Il y eu un silence.
_" A quoi penses tu ?"
_"A papa."
Je me rétractais.
_"Pourquoi maintenant ?"
_"C'est son anniversaire aujourd'hui. Et Il a toujours pensé aux nôtres - au tien et au mien."
_"Il a une mémoire très sélective..."
_"J'ai voulu lui envoyé une carte mais... Je me suis rappelée qu'on n'avait même pas une adresse à laquelle l'envoyer. Je me demandais si tu l'aurais signée."
_"Pour papa, non merci, je veux pas."
_"Mais ça t'arrive qu'en même de penser à lui ?"
_"Ecoute, Mickaël a choisi de nous abandonner, et maintenant il ne fait plus parti de notre vie alors..."
_"C'est justement ça qui est triste. Il rate tellement de chose, comme ma rentrée, mon premier petit copain... l'anniversaire de tes dix-huit ans, la remise de ton diplôme..."
_"Je sais ! Mais apparemment, lui, il ne voit pas combien c'est grave; et combien même il n'a pas envie de les connaître."
_"Donc, ça t'arrive de penser à lui ?... Ella, tu ne parles jamais de lui. Je vais finir par croire que j'ai inventé avoir eu un père. Je veux juste savoir s'il arrive qu'il te manque."
_"C'est le père que j'aurais aimé avoir qui me manque, mais lui, non, il ne me manque pas."
_"A moi si. Je ne sais pas comment tu fais pour faire comme s'il n'existait pas, comme s'il n'avait jamais existé... Et je ne t'envie pas."
Ariel se leva, me laissant pantoise.
_"Bonne nuit. A demain."
_"Bonne nuit." balbutiai-je.
Je m'endormis bien plus tard.
Je dormis mal et lorsque j'ouvris ma fenêtre, la lumière du soleil avait disparu derrière d'épais nuage de coton blanc et gris. Le vent avait cessé mais l'humidité était toujours là. Je ne pus m'empêcher de frissonner. L'été nous avait quitté, chassé par l'automne qui était tombé sur nous soudainement. C'était comme ça ici. En une seconde les nuages avançaient sur le soleil, le recouvraient. Un vent froid apportait la pluie qui s'abattait en trombes sur la terre sèche; Puis le vent s'en allait en laissant la pluie pour ne revenir quand hiver. Et sous le ciel gris tout prenait soudain des couleurs d'or, de rouge sang et de brun. La forêt à l'orée de la ville était ce qui m'avait toujours le plus impressionné, bien qu'étrangement elle m'ait toujours un peu effrayée aussi, repoussée. Elle changeait si brusquement. A partir d'aujourd'hui, elle sera une éclatante mer rouge. Les feuilles tomberont dans un dernier éclat doré qui se sera éteint avant même qu'elles aient touché le sol comme si on pouvait voir la vie les quittaient, ne laissant derrière elle que des cadavres desséchés et ternes. Le bois craquant tombera dans un bruit de squelette que l'on brise et qui s'écroule au sol. La terre se regorgera en un cercueil brun et souple. Et il ne restera plus que les corps bruns des arbes, tendus vers le ciel, leurs squelettes implorants jusqu'à leurs longues mains décharnées l'immense horizon gris. Et l'hiver viendra alors, annoncé par le mugissement funèbre du vent traversant ce cimetière de bois. J'avais déjà hâte que l'automne passe. Cette saison me déprimait.
Je fis ma toilette, descendis, mon sac de cours sur l'épaule. J'avais enfilé un jean, un t-shirt vert foncé avec un arc en ciel dessus et une veste. Ma sœur faisait tourner un très beau stylo entre ses doigts pour mieux l'admirer - juste au-dessus de son bol de céréales baignant dans le lait. Ma mère lui avait donc offert son cadeau de rentrée. Elle était déjà partie et il ne restait que ma sœur et moi.
_"Ariel ! On s'en va !" lançais-je à l'intéressée, qui bondit sur ses pieds, attrapa son sac et me rejoignit dans la voiture.
C'était une vieille voiture noire et il y avait toujours quelque chose qui avait besoin d'être réparé mais je trouvais qu'elle avait du caractère. Je l'aimais bien.
_"Comment tu me trouves ?" me demanda ma sœur sur le chemin.
Je la détaillai. Elle avait attaché ses ravissants cheveux blonds en queue de cheval mi-haute, dégageant son beau visage en cœur aux pommettes hautes et son cou long et fin. Ses yeux, soulignés par un trait ultra-fin de crayon, pétillaient. Ses longs cils à la courbure naturellement fantastique ajoutaient à son air de poupée. Ses lèvres abricot dessinaient un sourire auquel je trouvais quelque chose de courageux. Ses joues avaient rougi d'excitation. Ariel portait un t-shirt uni bleu ciel (une couleur qui faisait plaisir à voir par ce temps), un jean noir, une veste de même matière et une jolie paire de ballerine. Je notai aussi qu'elle avait mis les boucles d'oreille que je lui avais offertes (et qui lui allaient effectivement à ravir). Elle n'était pas aussi nerveuse qu'hier, mais plutôt calme et assurée. Je tentai de me rappeler comment j'avais été lors de ma propre rentrée en première année de lycée mais en fus incapable.
En revanche, le lycée n'avait pas changé avec ses murs clairs, son toit de tuile, son parvis avec d'un côté l'emplacement des voitures et de l'autre, sur les terrasses, les tables de cantines et, surtout, le nom de l'école en grandes lettres bleues marines surmonté de l'emblème de l'école: un perroquet portant un bandeau noir de pirate. Le même perroquet qui flottait sur le drapeau bleu accroché en haut du mat de l'école. Dès les places réservées à l'emplacement des voitures on observaient la formation des groupes qui serraient les rangs. La ville était composée de toutes les classes sociales et le lycée en était un microcosme où tout semblait venir se cristallisait. Devant l'entrée - qui servait aussi de sortie - des voitures rutilantes s'alignaient. Les gosses de riches - les 9.3., du numéro de leur quartier - avaient conservé leurs places. Ils arrivaient toujours en même temps le jour de la rentrée, décontractés comme s'ils étaient chez eux, formant un groupe trépidant que tous les autres élèves regardaient passer - ne serait-ce que du coin de l'œil - avec admiration, avec jalousie, avec haine, avec dégout. Ils étaient arrivés, les rumeurs et les murmures pouvaient commencer. C'était le jour de la rentrée et déjà tout le monde savait qui ils étaient, savaient qu'ils se fichaient de tout un chacun parce que, de toute façon, la pire chose qui pouvait leur arriver c'était d'être répudié, de perdre leur place dans ce clan si spécial et, avec, tous leurs privilèges et leurs amis. Se retrouver seul et sans appui. C'était quelque chose qu'on ne pouvait souhaiter à personne ici.
Plus groupés encore arrivaient les motards, les hispaniques dont les parents travaillaient pour la plupart comme employés de ménage chez les parents des riches ou dans des garages. Ils vivaient dans les pourtours de la ville, tandis que les riches occupaient les hauts quartiers sur la colline qui dominait la ville à l'est. Puis, il y avait tous les autres: ceux de classes moyenne et ceux plus pauvres. Ceux qui devaient travailler après les cours pour pouvoir se payer leurs études. Ma mère nous élevait avec son salaire de professeur alors nous étions habituées à ne pas rouler sur l'or mais on arrivait quand même à payer les factures à l'heure. Je travaillais depuis mon entrée au lycée pour un magasine et ma sœur venait de trouver un boulot dans une petite supérette. Ici, comptait donc d'abord qui était employé et qui était employeur. Ensuite venait encore l'origine. Malgré toutes ces différences, le lycée de la ville était excellent.
Ma sœur jeta un coup d'œil autour d'elle, reconnu quelqu'un (un collègue de travail avec qui elle s'entendait bien), le hella, visiblement ravie, et sortit de la voiture. Par la vitre baissée, je la vis disparaitre dans la foule en rejoignant son ami. Voilà une bonne chose de faite.
Dernière édition par Ely Julia le Mer 2 Sep 2009 - 12:33, édité 7 fois
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Re: [sans titre]
Je redémarrais le moteur et pris le chemin de la fac... de la ville. Pourquoi cette fac ? D'abord parce que c'était une excellente fac et que je n'avais pas des ressources financières exceptionnelles, ensuite parce qu'il n'était pas question que je m'éloigne de ma famille - on me l'avait bien fait comprendre - même si j'y avais tout de même pris une chambre ne serait-ce que pour des raisons pratiques.
La fac était immense et je sentis une boule de stress me tombait dans l'estomac. Il y avait foule, bien sûr, et la rentrée se passa sans incident. Jusqu'à ce qu'il s'agisse de partager la chambre. Le problème des colocataires devaient souvent être un sujet houleux. Je n'échappais pas à la règle et me retrouvais avec une grande brune, dont je m'aperçus bien vite que lorsqu'elle serait là il me serait impossible de travailler. Je décidais de marcher un peu dans le campus après avoir ranger mes affaires. Ce que j'étais tranquillement en train de faire lorsque ma peau me picota sur mon bras gauche comme si mon bras était brûlé par le froid. Je tournais la tête dans cette direction et, soudainement, je me figeais. Mon cerveau cessa de fonctionner, ma peau me brûla et mon cœur s'emballa. C'était Lui. L'inconnu de l'épicerie. Et à nouveau, je fus prise au dépourvu par sa présence. Bien sûr, j'avais remarqué la première fois qu'il n'était pas beaucoup plus âgé que moi mais je n'avais pas imaginé une seconde le retrouver à la fac. J'avais les jambes en coton et, bien entendu, j'étais trop peureuse pour aller lui demander en face ce qui c'était passé avec ma sœur.
D'autant plus qu'il était debout, entouré par deux autres garçons et une fille, dont il semblait être le plus jeune. L'un des garçon était grand et musclé, les cheveux bruns et courts et portait un polo, un pantalon et des chaussures blancs de grandes marques. La fille était grande et mince, fluette. Elle avait de grands yeux noirs époustouflants, des cheveux noirs corbeau en anglaises jusqu'au deux tiers de son cou et un grand sourire, vraiment très beau, respirant le parfait bonheur et la félicité et découvrant des rangées de dents parfaites et d'une blancheur éclatante. Elle était habillée d'un long manteau blanc sous lequel je devinais une robe noire. Elle avait des jambes interminables et était chaussée de talons noirs. une longue et fine écharpe volait tranquillement autour de son cou long et fin bien qu'elle ne fisse aucun mouvement. Elle tenait la main à un jeune homme aux boucles blondes et aux yeux étrangement clairs. Lui aussi portait une veste blanche sous laquelle je pouvais voir une chemise blanche sous un gilet beige. Son pantalon était blanc et ses chaussures en cuir beige. Ils avaient tous la même peau d'ivoire, la même indescriptible beauté, la même grâce presque divine(éblouissante en tout cas). Ils rayonnaient. La brûlure de ma peau devint trop douloureuse et je m'éloignais en prenant garde à ne pas trébucher. J'aurais couru si j'avais pu. Étrangement, j'avais la nette impression qu'il m'avait vu.
Lorsque j'arrivais à ma chambre, deux jours plus tard, quelqu'un -une fille- attendait. Ou plutôt m'attendait, moi.Je reconnu son visage de lutin en cœur parsemé de taches de rousseur comme celui des poupées de porcelaine et ses yeux bleu pétrole et fus terriblement soulagée - bien que je ne pensais pas tant appréhender de retrouver ma nouvelle colocataire. Un grand sourire apparut sur mon visage, qu'elle me rendit dès qu'elle me vit. Laura avait été ma meilleure amie au lycée depuis que je l'avais rencontré en milieu de première année. Elle travaillait pour le journal du lycée et on avait travaillé ensemble au magasine lorsqu'elle avait eu besoin d'un nouveau travail. Et c'était une pro de l'informatique. Elle avait brillait en créant un site de tests de pureté et avait ainsi gagné pas mal d'argent.
Je demandais pourquoi elle était ici et elle me répondit qu'elle voulait voir comment ça se passait pour moi afin de pouvoir échapper à sa colocataire. Je lui demandais alors s'il elle m'attendait depuis longtemps et pourquoi elle était restée sur le palier. Elle répondit qu'elle ne voulait pas déranger ma colocataire qui semblait en bien bonne compagnie. Je gémis en levant les yeux au ciel. Laura me prit par le bras et nous discutâmes de la fac en marchant. Je lui demandais si elle avait remarqué le petit groupe que j'avais vu le jour de la rentrée - incluant l'inconnu de l'épicerie. Elle me répondit que ce même inconnu était avec elle en cours de littérature depuis cet après-midi, qu'il s'appelait Edouard Summers et qu'il était l'un des cinq enfants adoptifs de monsieur et madame Summers. Elle était médecin, lui professeur d'histoire à la fac. Je rougis malgré moi: j'avais cours d'histoire demain matin avec lui. Heureusement que Laura ne le vit pas dans l'obscurité ambiante, malgré les lampadaires ronds le long de la balustrade de bois.
_"Ils ne sont pas d'ici. Et ils ne se mêlent jamais aux autres. Ils sont tout le temps ensemble... Vraiment ensemble ! C'est bizarre. Tout le monde les évite ! Mais ça ne semble pas les déranger. Le blond qui est avec eux par exemple - celui qui semble toujours se cacher : apparemment, c'est le plus discret- et bien, il accompagne toujours la jolie brune. J'ai entendu dire qu'elle était... bizarre. Pour les deux autres, je ne sais pas. Mais je sais que le cinquième membre de la "fratrie" est une fille. Elle est à la fac, elle aussi, mais personne ne la encore vu. Seul Edouard est en première année." conclut-elle.
Ils étaient rentrés à la fac en même temps que moi et déjà tout le monde les avait remarqué et tergiversait à leur propos.
On entendait maintenant, au fur et à mesure qu'on avançait, un vacarme assourdissant de batterie, guitare électrique et d'un chanteur qui beuglait plus qu'il ne chantait. Laura s'arrêta devant la porte de la chambre d'où venait le bruit. Il était près d'une heure du matin.
_"Bon, ben, bonne nuit !" me souhaita-t-elle en grimaçant.
Je pensais tout d'un coup à la raison qui faisait que l'on était resté dehors à se geler plutôt que de parler tranquillement à l'intérieur de ma chambre. J'étais déjà désespérée.
_"Bonne nuit à toi aussi !" lui souhaitais-je, compatissante. Moi qui me plaignais de ma colocataire ! Nous allions très vite devenir adeptes de la bibliothèque. Nous rejoignîmes chacune notre enfer respectif. Je ne pus retenir un soupir quand je tournais la poignet de ma chambre. Il n'y avait plus de bruit, heureusement, juste la forme d'un corps sous les draps. Je me couchais le plus vite possible.
L'avantage de vivre à la fac, c'est que j'avais droit à l'eau chaude. Je filais bien vite à mon premier cours de la journée: l'histoire. J'avais tout fait pour éviter ma colocataire et arrivais parmi les premiers dans la salle. Je sentis à nouveau la brûlure de ma peau me piquait et je compris alors -instinctivement- que le père d'Edouard allait entrer. Effectivement, le professeur Summers entra juste derrière le dernier élève. Il avait l'air très jeune - une trentaine d'année - et étais très beau avec des cheveux fins et d'un blond vénitien étonnant, un visage fin dont l'ossature saillait avec élégance sous sa peau extraordinairement blanche, les mêmes dents blanches que j'avais vu chez sa fille adoptive, un nez fin, des yeux sombres perçants et intelligents, de petites rides à leurs coins qui donnaient à ses yeux un petit air rieur et des mains agiles aux doigts longs et fins. Il était grand et mince, portait un pull bleu qui illuminait son teint, une veste blanc cassé et un pantalon de la même couleur. Je ne m'expliquais pas la réaction que j'avais face aux Summers. On remarquait cependant qu'ils soient adoptés un air de ressemblance entre tous. Je m'appliquais à suivre le cours, ce qui ne fut guère difficile car il était passionnant. L'heure passa sans que l'on ne s'en rende compte.
Je suivis mes cours de la matinée ce qui m'amenait dans l'aile est de la fac où l'on pouvait y voir par les fenêtre donnant vers l'extérieur les maisons des différentes confréries qu'il était question de fermer. Je traversais le couloir d'un pas pressé à la fin du cours, rejoignant avec la foule la cantine. Je me servis et chercha désespérément une table qui ne soit pas déjà prise. Je mangeais seule et rapidement.
Je m'arrêtais à quelque mètres de la porte de sortie, les poils hérissés le long de mes bras sous la brûlure mordante de ma peau. de nouveau, je me retournais vers l'entrée de la cantine, à l'autre bout de la vaste pièce. Mes yeux venaient de rencontrer Edouard. Lui et ses frères et sœurs venaient d'entrer. Les gens les évitaient instinctivement, mais ils ne semblaient pas s'intéresser aux autres. Cette fois ils étaient cinq. Le grand brun massif entra le premier, suivis immédiatement par une jeune femme d'une beauté époustouflante, irradiant comme une reine. Elle était majestueuse sur ses talons d'un violet profond, avec ses courbes rondes et ses longs cheveux blond pâle qui volaient en reflets dorés. Elle avait un visage fier, une bouche sensuelle rose pâle, une peau immaculée comme ses frères et sœur, des yeux d'un noir flamboyant. Elle était éblouissante. Elle avait la même grâce fantastique que ses frères et sœurs. Elle était habillée d'un jean qui moulait ses formes généreuses, d'un haut de grand couturier blanc et d'une veste tout aussi bien coupée d'un violet sombre. Aucune femme ne pouvait être plus belle. Elle était très différente de la grande brune volatile qui suivait main dans la main avec l'ange blond, radieuse et légère tandis que sa sœur s'élançait avec une démarche féline dans l'assemblée, avec une assurance tranquille. Je palis malgré moi lorsque je vis qui l'accompagnait. La brûlure de ma poitrine dans laquelle mon cœur battait à tout rompre me monta des larmes aux yeux. Edouard. Edouard n'était plus seulement à son côté, avançant de sa démarche souple et pleine de grâce, mais elle lui avait prit la main maintenant.
La fac était immense et je sentis une boule de stress me tombait dans l'estomac. Il y avait foule, bien sûr, et la rentrée se passa sans incident. Jusqu'à ce qu'il s'agisse de partager la chambre. Le problème des colocataires devaient souvent être un sujet houleux. Je n'échappais pas à la règle et me retrouvais avec une grande brune, dont je m'aperçus bien vite que lorsqu'elle serait là il me serait impossible de travailler. Je décidais de marcher un peu dans le campus après avoir ranger mes affaires. Ce que j'étais tranquillement en train de faire lorsque ma peau me picota sur mon bras gauche comme si mon bras était brûlé par le froid. Je tournais la tête dans cette direction et, soudainement, je me figeais. Mon cerveau cessa de fonctionner, ma peau me brûla et mon cœur s'emballa. C'était Lui. L'inconnu de l'épicerie. Et à nouveau, je fus prise au dépourvu par sa présence. Bien sûr, j'avais remarqué la première fois qu'il n'était pas beaucoup plus âgé que moi mais je n'avais pas imaginé une seconde le retrouver à la fac. J'avais les jambes en coton et, bien entendu, j'étais trop peureuse pour aller lui demander en face ce qui c'était passé avec ma sœur.
D'autant plus qu'il était debout, entouré par deux autres garçons et une fille, dont il semblait être le plus jeune. L'un des garçon était grand et musclé, les cheveux bruns et courts et portait un polo, un pantalon et des chaussures blancs de grandes marques. La fille était grande et mince, fluette. Elle avait de grands yeux noirs époustouflants, des cheveux noirs corbeau en anglaises jusqu'au deux tiers de son cou et un grand sourire, vraiment très beau, respirant le parfait bonheur et la félicité et découvrant des rangées de dents parfaites et d'une blancheur éclatante. Elle était habillée d'un long manteau blanc sous lequel je devinais une robe noire. Elle avait des jambes interminables et était chaussée de talons noirs. une longue et fine écharpe volait tranquillement autour de son cou long et fin bien qu'elle ne fisse aucun mouvement. Elle tenait la main à un jeune homme aux boucles blondes et aux yeux étrangement clairs. Lui aussi portait une veste blanche sous laquelle je pouvais voir une chemise blanche sous un gilet beige. Son pantalon était blanc et ses chaussures en cuir beige. Ils avaient tous la même peau d'ivoire, la même indescriptible beauté, la même grâce presque divine(éblouissante en tout cas). Ils rayonnaient. La brûlure de ma peau devint trop douloureuse et je m'éloignais en prenant garde à ne pas trébucher. J'aurais couru si j'avais pu. Étrangement, j'avais la nette impression qu'il m'avait vu.
Lorsque j'arrivais à ma chambre, deux jours plus tard, quelqu'un -une fille- attendait. Ou plutôt m'attendait, moi.Je reconnu son visage de lutin en cœur parsemé de taches de rousseur comme celui des poupées de porcelaine et ses yeux bleu pétrole et fus terriblement soulagée - bien que je ne pensais pas tant appréhender de retrouver ma nouvelle colocataire. Un grand sourire apparut sur mon visage, qu'elle me rendit dès qu'elle me vit. Laura avait été ma meilleure amie au lycée depuis que je l'avais rencontré en milieu de première année. Elle travaillait pour le journal du lycée et on avait travaillé ensemble au magasine lorsqu'elle avait eu besoin d'un nouveau travail. Et c'était une pro de l'informatique. Elle avait brillait en créant un site de tests de pureté et avait ainsi gagné pas mal d'argent.
Je demandais pourquoi elle était ici et elle me répondit qu'elle voulait voir comment ça se passait pour moi afin de pouvoir échapper à sa colocataire. Je lui demandais alors s'il elle m'attendait depuis longtemps et pourquoi elle était restée sur le palier. Elle répondit qu'elle ne voulait pas déranger ma colocataire qui semblait en bien bonne compagnie. Je gémis en levant les yeux au ciel. Laura me prit par le bras et nous discutâmes de la fac en marchant. Je lui demandais si elle avait remarqué le petit groupe que j'avais vu le jour de la rentrée - incluant l'inconnu de l'épicerie. Elle me répondit que ce même inconnu était avec elle en cours de littérature depuis cet après-midi, qu'il s'appelait Edouard Summers et qu'il était l'un des cinq enfants adoptifs de monsieur et madame Summers. Elle était médecin, lui professeur d'histoire à la fac. Je rougis malgré moi: j'avais cours d'histoire demain matin avec lui. Heureusement que Laura ne le vit pas dans l'obscurité ambiante, malgré les lampadaires ronds le long de la balustrade de bois.
_"Ils ne sont pas d'ici. Et ils ne se mêlent jamais aux autres. Ils sont tout le temps ensemble... Vraiment ensemble ! C'est bizarre. Tout le monde les évite ! Mais ça ne semble pas les déranger. Le blond qui est avec eux par exemple - celui qui semble toujours se cacher : apparemment, c'est le plus discret- et bien, il accompagne toujours la jolie brune. J'ai entendu dire qu'elle était... bizarre. Pour les deux autres, je ne sais pas. Mais je sais que le cinquième membre de la "fratrie" est une fille. Elle est à la fac, elle aussi, mais personne ne la encore vu. Seul Edouard est en première année." conclut-elle.
Ils étaient rentrés à la fac en même temps que moi et déjà tout le monde les avait remarqué et tergiversait à leur propos.
On entendait maintenant, au fur et à mesure qu'on avançait, un vacarme assourdissant de batterie, guitare électrique et d'un chanteur qui beuglait plus qu'il ne chantait. Laura s'arrêta devant la porte de la chambre d'où venait le bruit. Il était près d'une heure du matin.
_"Bon, ben, bonne nuit !" me souhaita-t-elle en grimaçant.
Je pensais tout d'un coup à la raison qui faisait que l'on était resté dehors à se geler plutôt que de parler tranquillement à l'intérieur de ma chambre. J'étais déjà désespérée.
_"Bonne nuit à toi aussi !" lui souhaitais-je, compatissante. Moi qui me plaignais de ma colocataire ! Nous allions très vite devenir adeptes de la bibliothèque. Nous rejoignîmes chacune notre enfer respectif. Je ne pus retenir un soupir quand je tournais la poignet de ma chambre. Il n'y avait plus de bruit, heureusement, juste la forme d'un corps sous les draps. Je me couchais le plus vite possible.
L'avantage de vivre à la fac, c'est que j'avais droit à l'eau chaude. Je filais bien vite à mon premier cours de la journée: l'histoire. J'avais tout fait pour éviter ma colocataire et arrivais parmi les premiers dans la salle. Je sentis à nouveau la brûlure de ma peau me piquait et je compris alors -instinctivement- que le père d'Edouard allait entrer. Effectivement, le professeur Summers entra juste derrière le dernier élève. Il avait l'air très jeune - une trentaine d'année - et étais très beau avec des cheveux fins et d'un blond vénitien étonnant, un visage fin dont l'ossature saillait avec élégance sous sa peau extraordinairement blanche, les mêmes dents blanches que j'avais vu chez sa fille adoptive, un nez fin, des yeux sombres perçants et intelligents, de petites rides à leurs coins qui donnaient à ses yeux un petit air rieur et des mains agiles aux doigts longs et fins. Il était grand et mince, portait un pull bleu qui illuminait son teint, une veste blanc cassé et un pantalon de la même couleur. Je ne m'expliquais pas la réaction que j'avais face aux Summers. On remarquait cependant qu'ils soient adoptés un air de ressemblance entre tous. Je m'appliquais à suivre le cours, ce qui ne fut guère difficile car il était passionnant. L'heure passa sans que l'on ne s'en rende compte.
Je suivis mes cours de la matinée ce qui m'amenait dans l'aile est de la fac où l'on pouvait y voir par les fenêtre donnant vers l'extérieur les maisons des différentes confréries qu'il était question de fermer. Je traversais le couloir d'un pas pressé à la fin du cours, rejoignant avec la foule la cantine. Je me servis et chercha désespérément une table qui ne soit pas déjà prise. Je mangeais seule et rapidement.
Je m'arrêtais à quelque mètres de la porte de sortie, les poils hérissés le long de mes bras sous la brûlure mordante de ma peau. de nouveau, je me retournais vers l'entrée de la cantine, à l'autre bout de la vaste pièce. Mes yeux venaient de rencontrer Edouard. Lui et ses frères et sœurs venaient d'entrer. Les gens les évitaient instinctivement, mais ils ne semblaient pas s'intéresser aux autres. Cette fois ils étaient cinq. Le grand brun massif entra le premier, suivis immédiatement par une jeune femme d'une beauté époustouflante, irradiant comme une reine. Elle était majestueuse sur ses talons d'un violet profond, avec ses courbes rondes et ses longs cheveux blond pâle qui volaient en reflets dorés. Elle avait un visage fier, une bouche sensuelle rose pâle, une peau immaculée comme ses frères et sœur, des yeux d'un noir flamboyant. Elle était éblouissante. Elle avait la même grâce fantastique que ses frères et sœurs. Elle était habillée d'un jean qui moulait ses formes généreuses, d'un haut de grand couturier blanc et d'une veste tout aussi bien coupée d'un violet sombre. Aucune femme ne pouvait être plus belle. Elle était très différente de la grande brune volatile qui suivait main dans la main avec l'ange blond, radieuse et légère tandis que sa sœur s'élançait avec une démarche féline dans l'assemblée, avec une assurance tranquille. Je palis malgré moi lorsque je vis qui l'accompagnait. La brûlure de ma poitrine dans laquelle mon cœur battait à tout rompre me monta des larmes aux yeux. Edouard. Edouard n'était plus seulement à son côté, avançant de sa démarche souple et pleine de grâce, mais elle lui avait prit la main maintenant.
Dernière édition par Ely Julia le Dim 1 Nov 2009 - 13:32, édité 9 fois
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Re: [sans titre]
C'est à ce moment pénible que ma colocataire passa, main dans la main elle aussi avec quelqu'un que je n'eus pas le temps de voir car il me bouscula et mes jambes déjà flageolantes cédèrent. Je glissai, emportée par le mouvement que l'inconnu petit ami de ma colocataire avait insufflé à mon corps sans résistance qui se renversa, lâchant mon plateau qui s'envola. En un dixième de seconde, je sentis toute ma peau me brûlait férocement. Au dernier moment, un bras me saisit par en-dessous, empêchant ma tête de butter contre le carrelage, et me décala sur le côté juste à temps pour que mon plateau ne me tombe pas dessus. Heureusement, mon assiette était vide et aucun couvert ne se cassa. Je n'eus pas le temps de reprendre mon souffle que déjà je reconnus Son odeur.
Mon cœur fit un bond si brutalement qu'il manqua de m'arracher des larmes. Il me tenait dans ses bras pour me protéger, mon cœur battant la chamade contre mes côtes et ma peau en feu. cela dura certainement moins d'une seconde, mais déjà il s'écartait. J'aurais voulu le retenir mais j'avais perdu ma voix. Mes yeux s'accrochaient aux siens mais ne purent très vite plus les suivre, buttant sur un visage qui se tenait devant moi. Réalisant qu'Edouard avait disparu mon cerveau put revenir à ce qui se passait autour de moi. Je regardais, un peu hagarde, mes jambes étalées par terre, mon plateau à un millimètre de là où était ma tête, ses couverts répandus au sol. Mon couteau avait laissé une trace sur le carrelage lorsqu'il s'y était planté, lame en avant. Je me relevais un peu chancelante et je levais les yeux. Ma colocataire était plantée debout devant moi, l'air gêné, un peu en retrait, comme si elle attendait quelqu'un pour partir le plus vite possible. Son haut rose ne lui allait pas du tout. Mes yeux cherchèrent encore et retombèrent sur le visage que j'avais déjà rencontré tout à l'heure et cette fois je le reconnus.
Je ne pouvais pas le croire. Je sentis la colère montait. Je venais de m'étaler devant mon ex-petit copain, qui était encore avant mon meilleur ennemi. J'étais sortie deux ans avec lui mais on avait fini par se déchirer et il ne restait maintenant plus grand chose entre nous à part une fausse indifférence gênée que l'on cachait en donnant l'apparence - aux autres comme à l'autre - de se détester (comme c'était le cas avant que l'on ne tombe passionnément amoureux) et de temps à autre une bouffée de haine qui tentait de se rappeler à nous. Les souvenirs étaient trop frais et, heureusement, dès l'année scolaire finie on ne s'était plus revu.
_"Tu n'as pas changé on dirait." bougonna-t-il. Je le fusillai du regard et me relevais complètement afin de pouvoir le regarder en face - ne supportant pas de voir son visage me regardait de haut cependant qu'il était debout et moi par terre.
Il s'appelait Jack Erpharël. Il avait été le roi des 9.3. - son père était l'un des hommes les plus riches de la ville - et le bouffon du lycée. Tout établissement a son perturbateur numéro 1, il avait été le notre. Il ne craignait personne et faisait tout ce qu'il voulait avec une terrifiante désinvolture et arrogance. Il était plein de haine et de colère et sa tendance à tout détruire autour de lui - et même auto-destructrice - ne nous aura pas épargnée. Je n'avais aucune idée ce qu'il était devenu aujourd'hui.
_"Oui, heureusement qu'Edouard était là." répondis-je sans réfléchir, en le désignant d'un coup d'œil, alors qu'il était maintenant assis à une table autours des siens. Je me mordis la lèvre quand je vis son expression s'assombrir.
_"Pourquoi ? Tu sors avec lui maintenant ?" demanda-t-il sur un ton maussade, sans être sûr de comprendre.
J'ouvris des yeux ronds d'étonnement.
_"Non ! Non, je disais juste ça parce qu'il m'a rattrapé quand je suis tombée." balbutiais-je. Est-ce qu'il ne l'avait pas vu ? Etait-il possible qu'il ne l'ait pas vu ?
Cette fois c'était lui qui me regardait étonner.
_"Ella, personne ne t'a rattrapé !... Tu as du te cogner la tête plus fort qu'on ne la cru..."
Comment ça personne ne m'avait rattrapé ? Jack avait l'air d'être sincèrement étonné et il ait été impossible qu'il ne le vit pas si quelqu'un m'avait effectivement rattrapé. Malgré tout, j'étais sure d'avoir sentie ses bras me retenir juste avant que je n'atteigne le sol. Sure que mon plateau et ses couverts seraient tombés sur mon visage si personne ne m'avait écarté. Mais tout ça n'avait pas du prendre plus d'une seconde, alors comment avait-il pu arriver à temps ?
Je me forçais à me concentrer et à renvoyer mes questions à plus tard, ayant conscience que l'on attendait une réponse.
_"C'est ça ! Mais je vais bien ! Ce n'était rien. Je vais parfaitement bien !" m'enfonçais-je. Pourquoi avait-il fallu que ça m'arrive ? Je me fusillais moi-même mentalement.
Le visage de Jack avait perdu les quelques traces d'enfance qu'il avait eu. Ses cheveux blonds toujours en bataille s'étaient assombrient. Son nez fin - un peu aquilin - avait été cassé une fois. Ses lèvres fines étaient fendu en un sourire sarcastique mais je voyais dans ses yeux - entre vert et noisette - qu'il s'inquiétait. Je tentais un sourire pour lui montrer que j'allais bien. Il me le rendit et s'éloigna lentement, un peu hésitant, puis il se retourna pour prendre la main de ma colocataire et s'en alla, après m'avoir jeter un dernier coup d'œil, sans un mot. Je ramassai mon plateau et le rangeai.
Je ne pouvais pas m'empêcher de chercher les Summers du regard. Je notais que, bien qu'ils se soient servis, ils ne touchaient pas à la nourriture qui restait intacte sur leurs plateaux. Je me rappelai de la façon dont Il venait de me rattraper. Comment était-il arrivé si vite alors qu'il n'était encore qu'à l'entrée ? Si vite que personne ne l'avait vu faire ? Qu'était-il ? Je ne pouvais pas empêcher ma peau de me brûler lorsque l'un des Summers n'était pas loin. Qu'est-ce qu'il m'avait fait ? Pourquoi avait-il tant de haine pour ma petite soeur ? Je savais qu'il était plus qu'humain, qu'il était différent, et j'étais décidée à connaître la vérité. Il du sentir que je le regardais car il releva les yeux vers moi et me fixa de ses yeux noirs dont les iris si profonds semblaient chercher à m'englober à l'intérieur de leur ténèbres éclatantes. Mais cette fois, je ne rompis par l'échange la première.
Je faillis arriver en retard à mon cours suivant. Je sentai ma peau me brûlait en picotant et pourtant aucun Summers n'était là. Je m'assis tandis que ma peau brûlait de plus en plus vivement. Il s'assit derrière mois deux secondes après. Mon cœur se mit à battre plus difficilement et j'eus grand mal à me concentrer. Je me dépêchai de sortir à la fin de l'heure mais il fut prêt avant moi ce qui m'énerva de plus belle. Je me sentais coincée.
_"Ella, c'est ça ?" demanda-t-il en se rapprochant de moi - qui tentais d'accélérer sans que rien n'y fit - avec un sourire en coin devant lequel je fondis et qui fit accélérer les battements de mon cœur.
Je le regardais, étonnée. Pourquoi venait-il me parler ? Se méfiait-il de moi ?
_"Tu essais de me parler ?" demandais-je, soupçonneuse et étonnée.
_"Apparemment. Et tu as répondu !" dit-il. "Il est inutile que je me présente." ajouta-t-il de façon certaine comme si la chose était banale, mais toujours éblouissant.
Plutôt que d'affronter ma confusion, je me retournai vers lui:
_"Comment as-tu fait tout à l'heure ?"
Mon cœur cognait contre ma poitrine bien trop vite. J'eus soudain peur qu'il se mette en colère et qu'il s'en aille. Mais il semblait plutôt étonné.
_"Tout à l'heure ?"
_"A la cantine, quand je suis tombée, tu m'as rattrapé et tu m'as écarté juste à temps de mon plateau."
_"Ella, ta chute n'a du durer que quelques secondes..."
_"Je sais que c'était toi ! Je t'ai reconnu. Je t'ai vu. Tu étais à l'autre bout de la cantine et tu es arrivé une seconde plus tard pour me rattraper. Comment as-tu fait ?"
_"Mais, j'étais juste à côté de toi !" assura-t-il de sa voix de velour.
_"Non, c'est faux ! Tu allais rejoindre la queue. Tu venais à peine de rentrer dans la cantine, en tenant la main à ta sœur. Je t'ai vu !" J'étais catégorique, bien que le détail de sa soeur main dans la main avec lui n'aurait pas été nécessaire.
_"Tu t'es cogné la tête, tu dois confondre. Je t'assure que j'étais juste à côté de toi."
Pourquoi, est-ce que ça le dérangeait à ce point ? J'avais l'impression de cuire sous sa réticence et sa mauvaise foi.
_"Et moi, je t'assure que non !"
Je sentai qu'il commençait à être aggacé et qu'il était tendu.
_"Je veux juste connaître la vérité. Je ne dirais rien à personne." tentai-je de le rassurer.
_"Pourquoi t'entêtes-tu à ce point ?"
_"Parce que je tiens à connaître la vérité sur ton compte, sur ce que tu es..." Je regrettais immédiatement ses paroles, percevant l'absurdité de ce que je venais de dire.
_"Ce que je suis ? Intéressant ! des hypothèses ?" se moqua-t-il, sardonique.
_"Tu as une vitesse incroyable ? Ma sœur te répugne ?" proposai-je sans réfléchir en dernière chance, énervée. Je n'espérait plus de réaction, plus rien qui pourrait me permettre de trouver les réponses à me questions. Il ne répondit pas mais il se crispa, se tendit. Cette réaction inattendue m'ébranla.
_"Ta sœur et toi, vous ne vous ressemblez pas mais... vous êtes très proches ?" interrogea-t-il. Il y avait une trace de colère, de dégoût, mais aussi de tristesse dans sa voix. cette question ressemblait un reproche.
_"Comme toi et tes frères et sœurs." répondis-je. "Non ?" demandai-je car il tressaillit.
_"C'est... C'est une étrange comparaison, c'est tout. Mais oui, nous sommes très proches." finit-il par répondre.
Je voulais savoir. Je voulais qu'il soit honnête.
_"Qu'est-ce qui ne va pas... avec ma sœur ?" osai-je, fixant le sol devant moi pour échapper à sa réaction.
_"Je ne vois pas ce que tu veux dire." dit-il sur un ton qui me fit tressaillir à mon tour tant il semblait calme, comme s'il l'avait répété plusieurs fois pour s'entraîner. Je lui jetais un coup d'œil. j'avais vu sa mâchoire se contracter légèrement comme s'il déglutissait difficilement et maintenant ses yeux étaient plus sombres et cela me semblait menaçant. Comment pouvait-il nier la haine que j'avais vu dans ses yeux ?
_"Je n'ai rien contre ta sœur."
Il mentait.
_"Je t'ai vu. En un dixième de seconde tu avais disparu comme si tu venais de sentir une odeur épouvantable, le visage cripé. J'ai vu la haine et le dégoût dans tes yeux quand elle est arrivée... " murmurais-je, ravalant mes larmes.Je n'aurais pas cru qu'espérer la vérité soit si douloureux.
_"Oh ! Alors ça n'a durait qu'un dixième de seconde mais tu as vu tout ça ?..."
Nouveau coup. Je n'avais rien à redire, rien sur quoi m'appuyer. Il lui était tellement facile de démolir mes certitudes.
_"Tu ne renonceras pas, n'est-ce pas ?"
Tout ce que j'avais à dire sur lui était absurde mais il semblait tout de même le prendre au sérieux malgrès ses railleries. Il était sur la défensive, comme si j'étais une menace. Il me regardait fixement, entre colère, frustration et inquiétude, le regard sombre.
_"Non."
_"Ne comptes pas sur mon aide. Si tu tiens à ta sœur, tu éviteras de la mêler à cette histoire. Et toi aussi tu devrais m'éviter." avertit-il, plein d'animosité. Sûrement était-il terrifiant en cet instant. Puis, il s'en alla en me soufflant que je devrais me dépêcher si je ne voulais pas être en retard à mon prochain cour. J'obéis, mais je n'avais aucunement l'intention de l'éviter, peu importe ce que je découvrais. Peut importe ce qu'il était et les dangers qu'il sous-entendait. Mais, il avait raison sur un point: je ne mêlerais pas plus ma sœur à ça.
Mon cœur fit un bond si brutalement qu'il manqua de m'arracher des larmes. Il me tenait dans ses bras pour me protéger, mon cœur battant la chamade contre mes côtes et ma peau en feu. cela dura certainement moins d'une seconde, mais déjà il s'écartait. J'aurais voulu le retenir mais j'avais perdu ma voix. Mes yeux s'accrochaient aux siens mais ne purent très vite plus les suivre, buttant sur un visage qui se tenait devant moi. Réalisant qu'Edouard avait disparu mon cerveau put revenir à ce qui se passait autour de moi. Je regardais, un peu hagarde, mes jambes étalées par terre, mon plateau à un millimètre de là où était ma tête, ses couverts répandus au sol. Mon couteau avait laissé une trace sur le carrelage lorsqu'il s'y était planté, lame en avant. Je me relevais un peu chancelante et je levais les yeux. Ma colocataire était plantée debout devant moi, l'air gêné, un peu en retrait, comme si elle attendait quelqu'un pour partir le plus vite possible. Son haut rose ne lui allait pas du tout. Mes yeux cherchèrent encore et retombèrent sur le visage que j'avais déjà rencontré tout à l'heure et cette fois je le reconnus.
Je ne pouvais pas le croire. Je sentis la colère montait. Je venais de m'étaler devant mon ex-petit copain, qui était encore avant mon meilleur ennemi. J'étais sortie deux ans avec lui mais on avait fini par se déchirer et il ne restait maintenant plus grand chose entre nous à part une fausse indifférence gênée que l'on cachait en donnant l'apparence - aux autres comme à l'autre - de se détester (comme c'était le cas avant que l'on ne tombe passionnément amoureux) et de temps à autre une bouffée de haine qui tentait de se rappeler à nous. Les souvenirs étaient trop frais et, heureusement, dès l'année scolaire finie on ne s'était plus revu.
_"Tu n'as pas changé on dirait." bougonna-t-il. Je le fusillai du regard et me relevais complètement afin de pouvoir le regarder en face - ne supportant pas de voir son visage me regardait de haut cependant qu'il était debout et moi par terre.
Il s'appelait Jack Erpharël. Il avait été le roi des 9.3. - son père était l'un des hommes les plus riches de la ville - et le bouffon du lycée. Tout établissement a son perturbateur numéro 1, il avait été le notre. Il ne craignait personne et faisait tout ce qu'il voulait avec une terrifiante désinvolture et arrogance. Il était plein de haine et de colère et sa tendance à tout détruire autour de lui - et même auto-destructrice - ne nous aura pas épargnée. Je n'avais aucune idée ce qu'il était devenu aujourd'hui.
_"Oui, heureusement qu'Edouard était là." répondis-je sans réfléchir, en le désignant d'un coup d'œil, alors qu'il était maintenant assis à une table autours des siens. Je me mordis la lèvre quand je vis son expression s'assombrir.
_"Pourquoi ? Tu sors avec lui maintenant ?" demanda-t-il sur un ton maussade, sans être sûr de comprendre.
J'ouvris des yeux ronds d'étonnement.
_"Non ! Non, je disais juste ça parce qu'il m'a rattrapé quand je suis tombée." balbutiais-je. Est-ce qu'il ne l'avait pas vu ? Etait-il possible qu'il ne l'ait pas vu ?
Cette fois c'était lui qui me regardait étonner.
_"Ella, personne ne t'a rattrapé !... Tu as du te cogner la tête plus fort qu'on ne la cru..."
Comment ça personne ne m'avait rattrapé ? Jack avait l'air d'être sincèrement étonné et il ait été impossible qu'il ne le vit pas si quelqu'un m'avait effectivement rattrapé. Malgré tout, j'étais sure d'avoir sentie ses bras me retenir juste avant que je n'atteigne le sol. Sure que mon plateau et ses couverts seraient tombés sur mon visage si personne ne m'avait écarté. Mais tout ça n'avait pas du prendre plus d'une seconde, alors comment avait-il pu arriver à temps ?
Je me forçais à me concentrer et à renvoyer mes questions à plus tard, ayant conscience que l'on attendait une réponse.
_"C'est ça ! Mais je vais bien ! Ce n'était rien. Je vais parfaitement bien !" m'enfonçais-je. Pourquoi avait-il fallu que ça m'arrive ? Je me fusillais moi-même mentalement.
Le visage de Jack avait perdu les quelques traces d'enfance qu'il avait eu. Ses cheveux blonds toujours en bataille s'étaient assombrient. Son nez fin - un peu aquilin - avait été cassé une fois. Ses lèvres fines étaient fendu en un sourire sarcastique mais je voyais dans ses yeux - entre vert et noisette - qu'il s'inquiétait. Je tentais un sourire pour lui montrer que j'allais bien. Il me le rendit et s'éloigna lentement, un peu hésitant, puis il se retourna pour prendre la main de ma colocataire et s'en alla, après m'avoir jeter un dernier coup d'œil, sans un mot. Je ramassai mon plateau et le rangeai.
Je ne pouvais pas m'empêcher de chercher les Summers du regard. Je notais que, bien qu'ils se soient servis, ils ne touchaient pas à la nourriture qui restait intacte sur leurs plateaux. Je me rappelai de la façon dont Il venait de me rattraper. Comment était-il arrivé si vite alors qu'il n'était encore qu'à l'entrée ? Si vite que personne ne l'avait vu faire ? Qu'était-il ? Je ne pouvais pas empêcher ma peau de me brûler lorsque l'un des Summers n'était pas loin. Qu'est-ce qu'il m'avait fait ? Pourquoi avait-il tant de haine pour ma petite soeur ? Je savais qu'il était plus qu'humain, qu'il était différent, et j'étais décidée à connaître la vérité. Il du sentir que je le regardais car il releva les yeux vers moi et me fixa de ses yeux noirs dont les iris si profonds semblaient chercher à m'englober à l'intérieur de leur ténèbres éclatantes. Mais cette fois, je ne rompis par l'échange la première.
Je faillis arriver en retard à mon cours suivant. Je sentai ma peau me brûlait en picotant et pourtant aucun Summers n'était là. Je m'assis tandis que ma peau brûlait de plus en plus vivement. Il s'assit derrière mois deux secondes après. Mon cœur se mit à battre plus difficilement et j'eus grand mal à me concentrer. Je me dépêchai de sortir à la fin de l'heure mais il fut prêt avant moi ce qui m'énerva de plus belle. Je me sentais coincée.
_"Ella, c'est ça ?" demanda-t-il en se rapprochant de moi - qui tentais d'accélérer sans que rien n'y fit - avec un sourire en coin devant lequel je fondis et qui fit accélérer les battements de mon cœur.
Je le regardais, étonnée. Pourquoi venait-il me parler ? Se méfiait-il de moi ?
_"Tu essais de me parler ?" demandais-je, soupçonneuse et étonnée.
_"Apparemment. Et tu as répondu !" dit-il. "Il est inutile que je me présente." ajouta-t-il de façon certaine comme si la chose était banale, mais toujours éblouissant.
Plutôt que d'affronter ma confusion, je me retournai vers lui:
_"Comment as-tu fait tout à l'heure ?"
Mon cœur cognait contre ma poitrine bien trop vite. J'eus soudain peur qu'il se mette en colère et qu'il s'en aille. Mais il semblait plutôt étonné.
_"Tout à l'heure ?"
_"A la cantine, quand je suis tombée, tu m'as rattrapé et tu m'as écarté juste à temps de mon plateau."
_"Ella, ta chute n'a du durer que quelques secondes..."
_"Je sais que c'était toi ! Je t'ai reconnu. Je t'ai vu. Tu étais à l'autre bout de la cantine et tu es arrivé une seconde plus tard pour me rattraper. Comment as-tu fait ?"
_"Mais, j'étais juste à côté de toi !" assura-t-il de sa voix de velour.
_"Non, c'est faux ! Tu allais rejoindre la queue. Tu venais à peine de rentrer dans la cantine, en tenant la main à ta sœur. Je t'ai vu !" J'étais catégorique, bien que le détail de sa soeur main dans la main avec lui n'aurait pas été nécessaire.
_"Tu t'es cogné la tête, tu dois confondre. Je t'assure que j'étais juste à côté de toi."
Pourquoi, est-ce que ça le dérangeait à ce point ? J'avais l'impression de cuire sous sa réticence et sa mauvaise foi.
_"Et moi, je t'assure que non !"
Je sentai qu'il commençait à être aggacé et qu'il était tendu.
_"Je veux juste connaître la vérité. Je ne dirais rien à personne." tentai-je de le rassurer.
_"Pourquoi t'entêtes-tu à ce point ?"
_"Parce que je tiens à connaître la vérité sur ton compte, sur ce que tu es..." Je regrettais immédiatement ses paroles, percevant l'absurdité de ce que je venais de dire.
_"Ce que je suis ? Intéressant ! des hypothèses ?" se moqua-t-il, sardonique.
_"Tu as une vitesse incroyable ? Ma sœur te répugne ?" proposai-je sans réfléchir en dernière chance, énervée. Je n'espérait plus de réaction, plus rien qui pourrait me permettre de trouver les réponses à me questions. Il ne répondit pas mais il se crispa, se tendit. Cette réaction inattendue m'ébranla.
_"Ta sœur et toi, vous ne vous ressemblez pas mais... vous êtes très proches ?" interrogea-t-il. Il y avait une trace de colère, de dégoût, mais aussi de tristesse dans sa voix. cette question ressemblait un reproche.
_"Comme toi et tes frères et sœurs." répondis-je. "Non ?" demandai-je car il tressaillit.
_"C'est... C'est une étrange comparaison, c'est tout. Mais oui, nous sommes très proches." finit-il par répondre.
Je voulais savoir. Je voulais qu'il soit honnête.
_"Qu'est-ce qui ne va pas... avec ma sœur ?" osai-je, fixant le sol devant moi pour échapper à sa réaction.
_"Je ne vois pas ce que tu veux dire." dit-il sur un ton qui me fit tressaillir à mon tour tant il semblait calme, comme s'il l'avait répété plusieurs fois pour s'entraîner. Je lui jetais un coup d'œil. j'avais vu sa mâchoire se contracter légèrement comme s'il déglutissait difficilement et maintenant ses yeux étaient plus sombres et cela me semblait menaçant. Comment pouvait-il nier la haine que j'avais vu dans ses yeux ?
_"Je n'ai rien contre ta sœur."
Il mentait.
_"Je t'ai vu. En un dixième de seconde tu avais disparu comme si tu venais de sentir une odeur épouvantable, le visage cripé. J'ai vu la haine et le dégoût dans tes yeux quand elle est arrivée... " murmurais-je, ravalant mes larmes.Je n'aurais pas cru qu'espérer la vérité soit si douloureux.
_"Oh ! Alors ça n'a durait qu'un dixième de seconde mais tu as vu tout ça ?..."
Nouveau coup. Je n'avais rien à redire, rien sur quoi m'appuyer. Il lui était tellement facile de démolir mes certitudes.
_"Tu ne renonceras pas, n'est-ce pas ?"
Tout ce que j'avais à dire sur lui était absurde mais il semblait tout de même le prendre au sérieux malgrès ses railleries. Il était sur la défensive, comme si j'étais une menace. Il me regardait fixement, entre colère, frustration et inquiétude, le regard sombre.
_"Non."
_"Ne comptes pas sur mon aide. Si tu tiens à ta sœur, tu éviteras de la mêler à cette histoire. Et toi aussi tu devrais m'éviter." avertit-il, plein d'animosité. Sûrement était-il terrifiant en cet instant. Puis, il s'en alla en me soufflant que je devrais me dépêcher si je ne voulais pas être en retard à mon prochain cour. J'obéis, mais je n'avais aucunement l'intention de l'éviter, peu importe ce que je découvrais. Peut importe ce qu'il était et les dangers qu'il sous-entendait. Mais, il avait raison sur un point: je ne mêlerais pas plus ma sœur à ça.
Dernière édition par Ely Julia le Mar 1 Sep 2009 - 18:17, édité 3 fois
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Re: [sans titre]
Je sais que c'est les vacances et que c'est pas forcément votre genre de lecture et encore moins de ce que vous-même écrivez mais j'aimerais vraiment avoir votre avis (surtout quand me relisant je trouve ça horriblement niais, surtout les passages concernant le lycée, la rentrée, tout ça). C'est pas ce que j'écris habituellement -hors du forum s'entend- mais j'espère que vous accepterez de donner votre avis et vos critiques parce que j'aimerais bien progresser (et ce sera grâce à vous si j'y parviens). Merci d'avance.
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Re: [sans titre]
Ah moi je l'ai lu mais n'ai pas posté parce que tu avais écrit chapitre 1 et j'ai cru que tu allais continuer. Je commenterai en éditant.
Erreur de manip j'ai effacé tout ce que j'avais écrit ==" bon on s'y remet de mauvaise humeure cette fois désolé.
Je commencerai par ce qui m'a sauté aux yeux directement, une impression de déjà lu, voir plus qu'une impression.
Ensuite il faut bien avouer que les personnages et certains lieux sont vraiment extremement détaillés, physiquement s'entend, ça en devient même le leitmotiv de l'histoire (m'expliquerai).
C'est à la fois un bon et un mauvais point selon que l'on aime ou pas (moi je ne supporte pas Zola et ses descriptions sans fin) mais là au début de l'histoire qui contient les plus de descriptions il y a également des discours qui "rythment" le récit, ils arrivent à bien passer à mes yeux.
Le personnage a la premiere personne est interressant car on peut savoir en permanance ce qu'il pense et ressent, tous en permettant de raconter son passé sous forme de souvenirs, et surtout nous avançons toujours sous son point de vu, moi j'aime bien la premiere personne car elle permet de nous garder dans l'ignorance autant que le personnage et nous somme réduit à nous positioner exactement comme lui.
Certaines syntaxes me laissent dubitatif, il me semble que certaine phrases sont tournées de bien étrange façon, mais rien d'important, cela arrive forcemment lorsque l'on tape un long texte.
Pour en revenir aux descriptions, franchement j'aimerai bien savoir quelle est la ville où habite ta protagoniste pour ne rencontrer autour d'elle que des individus à l'égal d'Appolon ou d'Aphrodite, et il convient de dire que la moitié de l'histoire s'articule autour de l'apparence de tes personnages, même quand Ella à failli se fracasser le crâne par terre elle remarque que le gilet de sa colocataire ne lui convient pas du tout. Moi c'est surtout ça qui m'a marqué plus que tout le reste, ou même que le coté niais -comme tu dis- des pauvres filles qui se font une ennemies en deux secondes chronos pour un sourire.
Avec tout ça on pourrais croire que je n'ai pas aimé le texte, mais en réalité je ne le trouve pas mauvais, l'écriture est assez fluide à mon goût, les réflexions que peut se faire le personnage sonnent juste -mention au "c'est toi ? non c'est le voisin" auquel je pense assez souvent- mais peut être pourrais tu plus insister sur les sentiments de Ella plutôt que ses sensations.
Bien entendu tout cela n'est que mon point de vu, et je ne suis pas franchement passionné par l'étude des oeuvres, je me content d'habitude de dire j'aime ou j'aime pas, donc en fait tout ça pour dire que tu devrais demander l'avis à d'autres.
Ptite question avant que tu ne te lance dans les contre arguments, si ceci n'est pas ton style habituel pourquoi écrire quelque chose qui ne te correspond pas vraiment ?
Erreur de manip j'ai effacé tout ce que j'avais écrit ==" bon on s'y remet de mauvaise humeure cette fois désolé.
Je commencerai par ce qui m'a sauté aux yeux directement, une impression de déjà lu, voir plus qu'une impression.
Ensuite il faut bien avouer que les personnages et certains lieux sont vraiment extremement détaillés, physiquement s'entend, ça en devient même le leitmotiv de l'histoire (m'expliquerai).
C'est à la fois un bon et un mauvais point selon que l'on aime ou pas (moi je ne supporte pas Zola et ses descriptions sans fin) mais là au début de l'histoire qui contient les plus de descriptions il y a également des discours qui "rythment" le récit, ils arrivent à bien passer à mes yeux.
Le personnage a la premiere personne est interressant car on peut savoir en permanance ce qu'il pense et ressent, tous en permettant de raconter son passé sous forme de souvenirs, et surtout nous avançons toujours sous son point de vu, moi j'aime bien la premiere personne car elle permet de nous garder dans l'ignorance autant que le personnage et nous somme réduit à nous positioner exactement comme lui.
Certaines syntaxes me laissent dubitatif, il me semble que certaine phrases sont tournées de bien étrange façon, mais rien d'important, cela arrive forcemment lorsque l'on tape un long texte.
Pour en revenir aux descriptions, franchement j'aimerai bien savoir quelle est la ville où habite ta protagoniste pour ne rencontrer autour d'elle que des individus à l'égal d'Appolon ou d'Aphrodite, et il convient de dire que la moitié de l'histoire s'articule autour de l'apparence de tes personnages, même quand Ella à failli se fracasser le crâne par terre elle remarque que le gilet de sa colocataire ne lui convient pas du tout. Moi c'est surtout ça qui m'a marqué plus que tout le reste, ou même que le coté niais -comme tu dis- des pauvres filles qui se font une ennemies en deux secondes chronos pour un sourire.
Avec tout ça on pourrais croire que je n'ai pas aimé le texte, mais en réalité je ne le trouve pas mauvais, l'écriture est assez fluide à mon goût, les réflexions que peut se faire le personnage sonnent juste -mention au "c'est toi ? non c'est le voisin" auquel je pense assez souvent- mais peut être pourrais tu plus insister sur les sentiments de Ella plutôt que ses sensations.
Bien entendu tout cela n'est que mon point de vu, et je ne suis pas franchement passionné par l'étude des oeuvres, je me content d'habitude de dire j'aime ou j'aime pas, donc en fait tout ça pour dire que tu devrais demander l'avis à d'autres.
Ptite question avant que tu ne te lance dans les contre arguments, si ceci n'est pas ton style habituel pourquoi écrire quelque chose qui ne te correspond pas vraiment ?
Dernière édition par Lacrimae Orion le Jeu 13 Aoû 2009 - 18:12, édité 1 fois
Auradore de Montnoctes- Neuf de Cœur
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Re: [sans titre]
Oui, je devais mis vu mon emploi du temps ça va pas être possible. Enfin je vais peut-être essayer, ne serait-ce pas que j'aime pas ce premier chapitre, que je trouve que les autres sont qu'en même un peu mieux, moins rébarbatifs sur l'apparence par exemple, sauf peut-être pour la coloc mais comme elle va disparaître (niark !)... (les détails c'est ma petite faiblesse).
Pour ce qui est de beauté, certes la blonde et son appolon dans le magasin ajoutent aux Summers, mais la différence se fera plus tard.
Pour le déjà vu, je sais, ça ressemble horriblement à Twilligh, même si l'histoire en réalité n'est pas la même. Et non, je n'ai pompé sur rien et ce texte date de plus de deux ans maintenant, même si ça fait pa si longtemps que je l'ai fini -*un exploit*- comme d'habitude. Je jure que je n'avais ni lu, ni vu Twillight avant (dont l'histoire d'ailleur n'est pas vraiment nouvelle) et que je n'ai pas pompé.
Comme c'est expliqué au début (en italique), je n'ai pas totalement écri ce texte pour moi. D'abord l'histoire devait être non pas tant plus personnelle en fait que raisonnablement heureuse ce qui n'est déjà pas mon style (un jour peut-être mettrais-je les contes du homard pour comparer... Non, en fait plutôt mourir) et en plus c'est assez basé sur le monde réel, ce qui n'est pas mon avantage quand je dois faire une belle histoire. Mais bon, on me la demandait (plus ou moins comme un cadeau ) alors je répond aux exigences.
Voilà, je te remercie d'avoir répondu. J'espère que d'autres me donneront leurs avis et critiques aussi.
Pour ce qui est de beauté, certes la blonde et son appolon dans le magasin ajoutent aux Summers, mais la différence se fera plus tard.
Pour le déjà vu, je sais, ça ressemble horriblement à Twilligh, même si l'histoire en réalité n'est pas la même. Et non, je n'ai pompé sur rien et ce texte date de plus de deux ans maintenant, même si ça fait pa si longtemps que je l'ai fini -*un exploit*- comme d'habitude. Je jure que je n'avais ni lu, ni vu Twillight avant (dont l'histoire d'ailleur n'est pas vraiment nouvelle) et que je n'ai pas pompé.
Comme c'est expliqué au début (en italique), je n'ai pas totalement écri ce texte pour moi. D'abord l'histoire devait être non pas tant plus personnelle en fait que raisonnablement heureuse ce qui n'est déjà pas mon style (un jour peut-être mettrais-je les contes du homard pour comparer... Non, en fait plutôt mourir) et en plus c'est assez basé sur le monde réel, ce qui n'est pas mon avantage quand je dois faire une belle histoire. Mais bon, on me la demandait (plus ou moins comme un cadeau ) alors je répond aux exigences.
Voilà, je te remercie d'avoir répondu. J'espère que d'autres me donneront leurs avis et critiques aussi.
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Date d'inscription : 27/10/2008
Ok, on a eu un avis positif. Merci Lacri. Je peux à priori me lancer sans faire de mort.
Sans préambule, je tiens à préciser que je n'ai ni lu, ni vu, ni compris Twilight. Je sais juste ce qu'on m'en a dit et ce que j'ai déploré sur les affiches dans le RER, le bus et le métro. Soit que c'est une nana un peu cruche qui tombe raide dingue d'un beau et gentil vampire qui tue pas les gens, mais que des méchants vampires veulent les empêcher de vivre leur amour en paix, et puis que le bonhomme sauve tout le temps la fille comme dans un bon vieux Superman. C'est peut-être une vision erronée. Je m'en moque éperdument. Je n'ai pas l'intention de lire, voir ou comprendre ce truc. Ceci étant posé :
Dix secondes après avoir fini de lire ton histoire, j'ai pensé à Twilight.
Je me suis demandé si le vampire du bouquin avait des pouvoirs spéciaux type vitesse extrême et autre, puisant dans mon ignorance pour faire des hypothèses farfelues et certainement fausses. Cela ne m'a pas mené à grand chose mais j'en ai quand même déduit que le début de l'histoire était beaucoup, BEAUCOUP trop semblable. Le simple fait qu'une fille normale d'un univers normal croise un mec tellement beau que ça en devient surnaturel, et qu'en fait il est effectivement surnaturel nous fait penser à Twilight à cause de la pub monstrueuse qui a été faite autour. C'est comme si on te contait l'histoire d'un gamin lambda avec une marque bizarre, élevé dans une famille lambda et qui se découvre d'un coup des pouvoirs magiques le jour de son onzième anniversaire. On va te hurler "Plagiat !!!" et t'immoler au son de ce cri, peu importe ce que ton histoire a à dire. C'est aussi pour ça que je chante à qui veut l'entendre à quel point Eragon c'est de la mouise recyclée, pasteurisée et reliée format bibliothèque****.
Au moins, on peut dire à ton débit que le marketing actuel et son fidèle allié le Marteau-Pilon de la Communication sont plus en faute que toi. Il reste néanmoins de ta responsabilité d'auteur d'empêcher qu'on jette le discrédit sur ton œuvre en t'accusant de plagiat. Ne prends pas ça pour un truc formel, ok ? Tu vas pas te faire éditer, à priori, et tu ne risques pas d'être huée par les journaux. Mais même une fanfic est faite pour être lue par d'autres, et il vaut nettement mieux pour toi et ta satisfaction personnelle que ces gens-là n'aient pas l'impression de relire autre chose.
Voilà, ça c'était pour le pseudo-plagiat et c'était pas méchant. Maintenant j'attaque.
Non, non, restons entre gens sérieux, voyons. On va se livrer à de la critique con-struc-tive. Le hic c'est qu'un bon coup de balle de fer dans les fondations aide à mieux reconstruire, mais ça peut faire mal. Âmes sensibles, s'abstenir (j'ai trop vu cette phrase dans un contexte autrement plus niais que ton texte, cette semaine, alors je me fais plaisir à la replacer ><)
Passons maintenant à l'analyse du texte pour ce qu'il est, et non ce qu'il pourrait être. Contrairement à Lacri, j'éprouve pour ma part un profond dégout envers les avis simples et non-argumentés tels que "j'aime" ou "j'aime pas" et autres jugements sur la même échelle. Ils laissent selon moi trop de flou, d'imprécision sur ce qui est bon donc à travailler et utiliser au mieux, et sur ce qui au contraire mériterait d'être refondu parce que cela handicape l'histoire. D'une manière générale, un bon avis est pour moi un avis développé. On ne demande pas un avis pour obtenir une côte de popularité de son texte après cent, deux-cents avis mais pour recevoir des conseils, des critiques, bref de la matière humaine plutôt qu'une appréciation quantitative. Évidemment, ce point de vue n'est que le mien. Des lecteurs heureux suffisent à pas mal d'auteurs, et j'envie leur aptitude à se contenter de si peu. Il m'est tout autant possible de comprendre que certains ne se passionnent pas pour l'analyse de texte, et qu'ils ne cherchent surtout pas à décortiquer le plaisir de lecture pour en connaître les tenants et les aboutissants. Cela leur enlève la "magie" des livres. Une approche scientifique face à une œuvre littéraire leur est tout simplement ignoble, pour les plus acharnés du mythe.
Ok tout le monde. Moi, je suis un shadowrunner : science et magie, c'est indissociable.
J'aborderai pour l'essentiel les mêmes problèmes que ceux soulevés par Lacri, qui malgré ses prétentions de novice en la matière, a fait des relevés très pertinents. Ceci dit, il me serait inutile de remettre le doigt dans ce qu'il a déjà pointé. Mis à part pour l'enfoncer, mais je fais déjà ça très bien tout seul, parait-il. Ce serait même un défaut de ma part. Vous y croyez, vous ?
Les descriptions qui traînent en longueur fatiguent le lecteur, provoquent une sensation d'assoupissement, et en viennent à poser naturellement la question : ne ferais-tu pas mieux de lire quelque chose de plus palpitant, ou au contraire de retourner au lit ? Me concernant, le maître à penser en la matière auquel j'ai été confronté n'était pas Zola mais Balzac. Très descriptif, par souci de véracité littéraire et de reconstitution historique diront certains, parce qu'il était payé à la page diront les autres. En un mot c'est bien lourd mais faut trouver un point d'accroche, un truc qui justifie la description et ça intéressera des gens. Pas tous, mais il y a bien des types qui aiment Zola et Balzac, non ? Dans tes descriptions, que tu passes trois plombes sur le physique des persos, pourquoi pas. Après tout ce sont les protagonistes, on peut difficilement faire plus important dans le récit. Et puis quitte à en faire des canons de beauté, autant expliquer pourquoi et comment plutôt que de simplement poser "un physique à en faire baver n'importe quel homme de ce monde" comme j'en ai encore trop vu ces derniers temps.
Ceci ne veut pas dire que j'approuve l'épidémie de plubodumondite aigüe qui frappe ton histoire. Il y a décidément trop de personnages qui sont inoubliables par leur simple sex-appeal là-dedans. Certes, plusieurs d'entre eux ont une excuse : c'est surnaturel, ils sont tous comme ça dans cette famille. Si cela doit être le point d'orgue de ton histoire, une famille de surhommes, il faut alors marquer la différence avec le reste de la population. Là on ne sait plus qui est au top 10 mondial des concours de beauté, vu qu'ils sont tous plus extraordinaires les uns que les autres. Cela en devient carrément répugnant. Je suis aussi en mesure de concevoir que les moches ne t'intéressent guère, que ce que tu veux c'est une histoire avec des personnes désirables, parce qu'après tout la fiction c'est fait pour rêver, non ? Auquel cas il va falloir en emmener quelques uns à l'abattoir pour que le rêve prenne une consistance au milieu de la réalité et ne reste pas un monde à part. L'univers que tu as choisi est définitivement le nôtre. Pour être crédible, il convient de ne pas changer les règles au cours des évènements. Certains peuvent avoir droit à un physique qui ne soit pas inouï sans pour autant les condamner au célibat pour le restant de leurs jours. C'est un tas de conseils en vrac, rien n'est obligatoire, bien entendu, mais dans l'état actuel des choses je trouve les personnages indigestes.
Revenons-en aux descriptions. Moi, c'est la salle de bain qui m'a poignardé les neurones. J'ai vérifié, ta description depuis la douche jusqu'aux carreaux de six couleurs différentes en passant par les reflets qui s'invitent sur toutes les surfaces (rien n'est donc mat dans cette fichue pièce ???) fait plus d'une page sous word. C'est innommable. Et surtout c'est une pauvre salle de bain sans le moindre intérêt aucun pour le déroulement de l'histoire. OSEF (On S'En Fout) diront les plus hargneux. Avant de t'attaquer au détail d'un élément quelconque, tu devrais penser au rôle qu'il doit jouer. Ne décris pas en détail l'inutile tout comme tu n'ellipserais pas le nécessaire, voilà le conseil que je te donnerai à ce sujet. Je me trompe parfois : la salle de bain pourrait avoir un intérêt fondamental, peut-être même l'a-t-elle déjà eu et la discussion Ella/Ariel à elle seule est-elle si importante que ça en valait la peine. Je n'ai pas eu cette impression. Cette pièce carrelée sur les six côtés m'a donné envie de sortir au plus vite en claquant la porte, après avoir dégoupillé une grenade à l'intérieur.
(vous avez le droit de me traiter de dangereux déséquilibré, de mettre ma santé mentale en doute et de me suspecter de préméditer un attentat à la bombe. Cela dit Jackal vous en voudra de penser autant de bien de moi. Votre attitude risque de lui déplaire souverainement.)
Concernant la syntaxe douteuse, je n'ai rien noté qui relève du peloton d'exécution. Je m'abstiendrai donc de commentaires mesquins concernant telle ou telle formulation peu ou pas française. Au sujet de la pertinence de la narration à la première personne, je n'ai rien contre. Je soupire juste d'avance face à l'inconvénient majeur de ce mode d'écriture, à savoir l'obligation de passer par chaque état d'âme du personnage, de sans-cesse faire des allers-retours entre ses sentiments et le monde extérieur. Ce truc a tendance à me lasser (surtout depuis l'infâme Assassin Royal, chef d'œuvre d'indécision et d'incompétence héroïque) mais la troisième personne n'est pas exempte de lourdeurs non plus. Tu ne t'en sors pas si mal sur ce point, à mon humble avis (j'entends des rires mais je les méprise... JE NE SUIS PAS PARANO)
Les dialogues relèvent énormément le niveau, comme l'a souligné Lacri, notamment parce que tes personnages parlent avec naturel, et n'iront pas dire de "niaiseries" ("aucune femme ne pouvait être plus belle", rien que ça ?) quand ils parlent de quelqu'un d'autre. Ils s'autorégulent, contrôlent leurs envolées poétiques, et ne font pas de métaphores bizarres ("un regard profond de lionne éclatante", ouch ça doit faire mal une lionne qui éclate) Prends exemple sur eux ^^
Bah, ça doit être à peu près tout pour l'instant. Je prendrai exemple sur Lacri : si jamais je trouve vraiment un truc à dire, j'éditerai ce post pour faire un commentaire digne de ce nom.
Et puis comme d'hab', tout ce qui n'a pas été flagellé dans ce texte est sans doute bon. Merci d'avoir lu ce commentaire avec l'attention qu'il méritait (à vous de voir, héhéhé)
NB1 : pourquoi les "9.3." ? Chez nous, les "neuf-trois" c'est la prononciation péjorative du département 93 (Seine St-Denis, si je ne m'abuse) et de ses indigènes. Il ont davantage une réputation de vaste ZEP et de jungle urbaine que de banlieue chic pour fils de PDG. Je m'interroge quand à cette appellation, d'autant plus que tu n'expliques pas sa provenance dans ton récit.
NB2 : ah ouais, les noms de tes persos, Edouard et Ella, c'est quand même très très très similaire aux deux autres gusses, à un point dérangeant même pour un lecteur qui veut croire en ta bonne foi quand tu dis que tu as écrit ça avant, et que c'est complètement indépendant.
-------------------------------------------------------------
**** : Pour plus de détails à ce sujet, voyez ici
Dix secondes après avoir fini de lire ton histoire, j'ai pensé à Twilight.
Je me suis demandé si le vampire du bouquin avait des pouvoirs spéciaux type vitesse extrême et autre, puisant dans mon ignorance pour faire des hypothèses farfelues et certainement fausses. Cela ne m'a pas mené à grand chose mais j'en ai quand même déduit que le début de l'histoire était beaucoup, BEAUCOUP trop semblable. Le simple fait qu'une fille normale d'un univers normal croise un mec tellement beau que ça en devient surnaturel, et qu'en fait il est effectivement surnaturel nous fait penser à Twilight à cause de la pub monstrueuse qui a été faite autour. C'est comme si on te contait l'histoire d'un gamin lambda avec une marque bizarre, élevé dans une famille lambda et qui se découvre d'un coup des pouvoirs magiques le jour de son onzième anniversaire. On va te hurler "Plagiat !!!" et t'immoler au son de ce cri, peu importe ce que ton histoire a à dire. C'est aussi pour ça que je chante à qui veut l'entendre à quel point Eragon c'est de la mouise recyclée, pasteurisée et reliée format bibliothèque****.
Au moins, on peut dire à ton débit que le marketing actuel et son fidèle allié le Marteau-Pilon de la Communication sont plus en faute que toi. Il reste néanmoins de ta responsabilité d'auteur d'empêcher qu'on jette le discrédit sur ton œuvre en t'accusant de plagiat. Ne prends pas ça pour un truc formel, ok ? Tu vas pas te faire éditer, à priori, et tu ne risques pas d'être huée par les journaux. Mais même une fanfic est faite pour être lue par d'autres, et il vaut nettement mieux pour toi et ta satisfaction personnelle que ces gens-là n'aient pas l'impression de relire autre chose.
Voilà, ça c'était pour le pseudo-plagiat et c'était pas méchant. Maintenant j'attaque.
Non, non, restons entre gens sérieux, voyons. On va se livrer à de la critique con-struc-tive. Le hic c'est qu'un bon coup de balle de fer dans les fondations aide à mieux reconstruire, mais ça peut faire mal. Âmes sensibles, s'abstenir (j'ai trop vu cette phrase dans un contexte autrement plus niais que ton texte, cette semaine, alors je me fais plaisir à la replacer ><)
Passons maintenant à l'analyse du texte pour ce qu'il est, et non ce qu'il pourrait être. Contrairement à Lacri, j'éprouve pour ma part un profond dégout envers les avis simples et non-argumentés tels que "j'aime" ou "j'aime pas" et autres jugements sur la même échelle. Ils laissent selon moi trop de flou, d'imprécision sur ce qui est bon donc à travailler et utiliser au mieux, et sur ce qui au contraire mériterait d'être refondu parce que cela handicape l'histoire. D'une manière générale, un bon avis est pour moi un avis développé. On ne demande pas un avis pour obtenir une côte de popularité de son texte après cent, deux-cents avis mais pour recevoir des conseils, des critiques, bref de la matière humaine plutôt qu'une appréciation quantitative. Évidemment, ce point de vue n'est que le mien. Des lecteurs heureux suffisent à pas mal d'auteurs, et j'envie leur aptitude à se contenter de si peu. Il m'est tout autant possible de comprendre que certains ne se passionnent pas pour l'analyse de texte, et qu'ils ne cherchent surtout pas à décortiquer le plaisir de lecture pour en connaître les tenants et les aboutissants. Cela leur enlève la "magie" des livres. Une approche scientifique face à une œuvre littéraire leur est tout simplement ignoble, pour les plus acharnés du mythe.
Ok tout le monde. Moi, je suis un shadowrunner : science et magie, c'est indissociable.
J'aborderai pour l'essentiel les mêmes problèmes que ceux soulevés par Lacri, qui malgré ses prétentions de novice en la matière, a fait des relevés très pertinents. Ceci dit, il me serait inutile de remettre le doigt dans ce qu'il a déjà pointé. Mis à part pour l'enfoncer, mais je fais déjà ça très bien tout seul, parait-il. Ce serait même un défaut de ma part. Vous y croyez, vous ?
Les descriptions qui traînent en longueur fatiguent le lecteur, provoquent une sensation d'assoupissement, et en viennent à poser naturellement la question : ne ferais-tu pas mieux de lire quelque chose de plus palpitant, ou au contraire de retourner au lit ? Me concernant, le maître à penser en la matière auquel j'ai été confronté n'était pas Zola mais Balzac. Très descriptif, par souci de véracité littéraire et de reconstitution historique diront certains, parce qu'il était payé à la page diront les autres. En un mot c'est bien lourd mais faut trouver un point d'accroche, un truc qui justifie la description et ça intéressera des gens. Pas tous, mais il y a bien des types qui aiment Zola et Balzac, non ? Dans tes descriptions, que tu passes trois plombes sur le physique des persos, pourquoi pas. Après tout ce sont les protagonistes, on peut difficilement faire plus important dans le récit. Et puis quitte à en faire des canons de beauté, autant expliquer pourquoi et comment plutôt que de simplement poser "un physique à en faire baver n'importe quel homme de ce monde" comme j'en ai encore trop vu ces derniers temps.
Ceci ne veut pas dire que j'approuve l'épidémie de plubodumondite aigüe qui frappe ton histoire. Il y a décidément trop de personnages qui sont inoubliables par leur simple sex-appeal là-dedans. Certes, plusieurs d'entre eux ont une excuse : c'est surnaturel, ils sont tous comme ça dans cette famille. Si cela doit être le point d'orgue de ton histoire, une famille de surhommes, il faut alors marquer la différence avec le reste de la population. Là on ne sait plus qui est au top 10 mondial des concours de beauté, vu qu'ils sont tous plus extraordinaires les uns que les autres. Cela en devient carrément répugnant. Je suis aussi en mesure de concevoir que les moches ne t'intéressent guère, que ce que tu veux c'est une histoire avec des personnes désirables, parce qu'après tout la fiction c'est fait pour rêver, non ? Auquel cas il va falloir en emmener quelques uns à l'abattoir pour que le rêve prenne une consistance au milieu de la réalité et ne reste pas un monde à part. L'univers que tu as choisi est définitivement le nôtre. Pour être crédible, il convient de ne pas changer les règles au cours des évènements. Certains peuvent avoir droit à un physique qui ne soit pas inouï sans pour autant les condamner au célibat pour le restant de leurs jours. C'est un tas de conseils en vrac, rien n'est obligatoire, bien entendu, mais dans l'état actuel des choses je trouve les personnages indigestes.
Revenons-en aux descriptions. Moi, c'est la salle de bain qui m'a poignardé les neurones. J'ai vérifié, ta description depuis la douche jusqu'aux carreaux de six couleurs différentes en passant par les reflets qui s'invitent sur toutes les surfaces (rien n'est donc mat dans cette fichue pièce ???) fait plus d'une page sous word. C'est innommable. Et surtout c'est une pauvre salle de bain sans le moindre intérêt aucun pour le déroulement de l'histoire. OSEF (On S'En Fout) diront les plus hargneux. Avant de t'attaquer au détail d'un élément quelconque, tu devrais penser au rôle qu'il doit jouer. Ne décris pas en détail l'inutile tout comme tu n'ellipserais pas le nécessaire, voilà le conseil que je te donnerai à ce sujet. Je me trompe parfois : la salle de bain pourrait avoir un intérêt fondamental, peut-être même l'a-t-elle déjà eu et la discussion Ella/Ariel à elle seule est-elle si importante que ça en valait la peine. Je n'ai pas eu cette impression. Cette pièce carrelée sur les six côtés m'a donné envie de sortir au plus vite en claquant la porte, après avoir dégoupillé une grenade à l'intérieur.
(vous avez le droit de me traiter de dangereux déséquilibré, de mettre ma santé mentale en doute et de me suspecter de préméditer un attentat à la bombe. Cela dit Jackal vous en voudra de penser autant de bien de moi. Votre attitude risque de lui déplaire souverainement.)
Concernant la syntaxe douteuse, je n'ai rien noté qui relève du peloton d'exécution. Je m'abstiendrai donc de commentaires mesquins concernant telle ou telle formulation peu ou pas française. Au sujet de la pertinence de la narration à la première personne, je n'ai rien contre. Je soupire juste d'avance face à l'inconvénient majeur de ce mode d'écriture, à savoir l'obligation de passer par chaque état d'âme du personnage, de sans-cesse faire des allers-retours entre ses sentiments et le monde extérieur. Ce truc a tendance à me lasser (surtout depuis l'infâme Assassin Royal, chef d'œuvre d'indécision et d'incompétence héroïque) mais la troisième personne n'est pas exempte de lourdeurs non plus. Tu ne t'en sors pas si mal sur ce point, à mon humble avis (j'entends des rires mais je les méprise... JE NE SUIS PAS PARANO)
Les dialogues relèvent énormément le niveau, comme l'a souligné Lacri, notamment parce que tes personnages parlent avec naturel, et n'iront pas dire de "niaiseries" ("aucune femme ne pouvait être plus belle", rien que ça ?) quand ils parlent de quelqu'un d'autre. Ils s'autorégulent, contrôlent leurs envolées poétiques, et ne font pas de métaphores bizarres ("un regard profond de lionne éclatante", ouch ça doit faire mal une lionne qui éclate) Prends exemple sur eux ^^
Bah, ça doit être à peu près tout pour l'instant. Je prendrai exemple sur Lacri : si jamais je trouve vraiment un truc à dire, j'éditerai ce post pour faire un commentaire digne de ce nom.
Et puis comme d'hab', tout ce qui n'a pas été flagellé dans ce texte est sans doute bon. Merci d'avoir lu ce commentaire avec l'attention qu'il méritait (à vous de voir, héhéhé)
NB1 : pourquoi les "9.3." ? Chez nous, les "neuf-trois" c'est la prononciation péjorative du département 93 (Seine St-Denis, si je ne m'abuse) et de ses indigènes. Il ont davantage une réputation de vaste ZEP et de jungle urbaine que de banlieue chic pour fils de PDG. Je m'interroge quand à cette appellation, d'autant plus que tu n'expliques pas sa provenance dans ton récit.
NB2 : ah ouais, les noms de tes persos, Edouard et Ella, c'est quand même très très très similaire aux deux autres gusses, à un point dérangeant même pour un lecteur qui veut croire en ta bonne foi quand tu dis que tu as écrit ça avant, et que c'est complètement indépendant.
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**** : Pour plus de détails à ce sujet, voyez ici
Dernière édition par Robert Begarion le Mar 27 Oct 2009 - 22:30, édité 7 fois (Raison : Maintenance de routine, régulation de la population des fautes diverses ET ajout d'un lien didactique.)
Robert Begarion- Dix de Cœur
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Re: [sans titre]
Merci. Ne t'en fais pas, je ne te reprocherais jamais de me donner ton avis sur un texte (ou autre), les critiques servent toujours. Si personne ne veut juger et donner son avis on ne peut pas se corriger et donc progresser. C'est pourquoi je te remercie.
Pour ce qui est des descriptions trop longues, j'ai souvent peur d'enlever des choses parce que le(s) premiers chapitres j'ai du mal à trier sur ce qui est important à dire ou pas.
La description de la salle de bain est si longue et si pénible à suivre que ça ? (L'habitude des illustrations en parallèle déteindrait-elle trop ? T_T)
J'ai vraiment écrit un truc aussi ignoble qu'"un regard profond de lionne éclatante" ? Oui, il faut que je calme ma tendance à faire des canons de beauté. Je tiens juste à préciser que ce n'est pas parce qu'Ella les trouve beaux qu'ils le sont forcément, ou pour tout le monde.
Pour ce qui est de Twillight, l'histoire en elle-même n'est pas nouvelle. Une fille normale qui rencontre un être surnaturelle, nombre de gens ont déjà puisé dedans, et pour ce qui est de vampire aux pouvoirs de superman Twillight n'est pas le seul livre qui en profite même si c'est très très remanié et que l'auteur a fait des modifications.
Pour ce qui est des prénoms, Ella c'est pour le prénom Elle, non pas pour Bella. Et elle a déjà changer trois fois de prénoms.Pour ce qui est de lui, je trouve pas d'autre nom qui lui irait bien, j'adore celui-là !
maintenant, il me reste à tenter de corriger tout ça.
Pour ce qui est des descriptions trop longues, j'ai souvent peur d'enlever des choses parce que le(s) premiers chapitres j'ai du mal à trier sur ce qui est important à dire ou pas.
La description de la salle de bain est si longue et si pénible à suivre que ça ? (L'habitude des illustrations en parallèle déteindrait-elle trop ? T_T)
J'ai vraiment écrit un truc aussi ignoble qu'"un regard profond de lionne éclatante" ? Oui, il faut que je calme ma tendance à faire des canons de beauté. Je tiens juste à préciser que ce n'est pas parce qu'Ella les trouve beaux qu'ils le sont forcément, ou pour tout le monde.
Pour ce qui est de Twillight, l'histoire en elle-même n'est pas nouvelle. Une fille normale qui rencontre un être surnaturelle, nombre de gens ont déjà puisé dedans, et pour ce qui est de vampire aux pouvoirs de superman Twillight n'est pas le seul livre qui en profite même si c'est très très remanié et que l'auteur a fait des modifications.
Pour ce qui est des prénoms, Ella c'est pour le prénom Elle, non pas pour Bella. Et elle a déjà changer trois fois de prénoms.Pour ce qui est de lui, je trouve pas d'autre nom qui lui irait bien, j'adore celui-là !
maintenant, il me reste à tenter de corriger tout ça.
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Date d'inscription : 27/10/2008
Re: [sans titre]
EEEeeeeerf... *halète, s'éponge le front* BooOOooon... Et bien les gars félicitez-moi, je viens de lire tout ce topic d'un trait \o/ (=p)
Alors moi j'ai la flemme d'argumenter, mais vu que j'ai promis un avis je vais faire un effort...
Déjà, je suis d'accord avec les deux autres gus sur les commentaires autres que leur goût personnel ^^
Ensuite, je dois dire qu'à la lecture j'ai effectivement trouvé les descriptions... pas forcément trop longues -encore que la salle de bain !-, mais surtout omniprésentes. Certes, on aime ou pas, mais je pense que parfois ça tient trop du tir en rafales ! Notamment la description successive de tous les membres du groupe dans le magasin de disques, ça fait énumération : aligner dans la même phrase les couleur-des-yeux couleur-et-forme-des-cheveux teinte-de-peau forme-du-visage allure-des-fringues de cinq persos, je pense que même un Balzacophile pourrait avoir du mal à tout intégrer x)
Sinon, j'ai repéré pas mal de fautes de type probable inattention à la relecture, mais je n'ai pas souvenir de phrases vraiment bancales. Ah, si, dans le message d'Ariel à sa sœur, il doit manquer une ligne...
La narration à la première personne passe bien. Ç'a une allure maîtrisée ^^
Et euh maintenant le commentaire goût personnel... C'est exactement le genre de texte qui me fait me demander pourquoi diantre une fille qui va à la fac est sensée m'intéresser =.=" Et la perspective annoncée d'histoire(s) d'amour comme intérêt principal du récit me fait refermer aussi sec le bouquin pour en prendre un autre... D'accord y a du fantastique dans l'air, m'enfin moi j'ai surtout l'impression qu'il est là pour décorer, et non comme véritable partie prenante du récit... (mais je peux me planter) En somme, tu as mis dans le mille. Exactement le style de roman que je peux pas encadrer x) Mais bon c'est une coïncidence malheureuse, aucunement une critique... ^^"""
En conclusion, je dirais que le texte n'est certes pas parfait, mais présente des bons points qui permettent potentiellement de prendre appui pour progresser ^^
Alors moi j'ai la flemme d'argumenter, mais vu que j'ai promis un avis je vais faire un effort...
Déjà, je suis d'accord avec les deux autres gus sur les commentaires autres que leur goût personnel ^^
Ensuite, je dois dire qu'à la lecture j'ai effectivement trouvé les descriptions... pas forcément trop longues -encore que la salle de bain !-, mais surtout omniprésentes. Certes, on aime ou pas, mais je pense que parfois ça tient trop du tir en rafales ! Notamment la description successive de tous les membres du groupe dans le magasin de disques, ça fait énumération : aligner dans la même phrase les couleur-des-yeux couleur-et-forme-des-cheveux teinte-de-peau forme-du-visage allure-des-fringues de cinq persos, je pense que même un Balzacophile pourrait avoir du mal à tout intégrer x)
Sinon, j'ai repéré pas mal de fautes de type probable inattention à la relecture, mais je n'ai pas souvenir de phrases vraiment bancales. Ah, si, dans le message d'Ariel à sa sœur, il doit manquer une ligne...
La narration à la première personne passe bien. Ç'a une allure maîtrisée ^^
Et euh maintenant le commentaire goût personnel... C'est exactement le genre de texte qui me fait me demander pourquoi diantre une fille qui va à la fac est sensée m'intéresser =.=" Et la perspective annoncée d'histoire(s) d'amour comme intérêt principal du récit me fait refermer aussi sec le bouquin pour en prendre un autre... D'accord y a du fantastique dans l'air, m'enfin moi j'ai surtout l'impression qu'il est là pour décorer, et non comme véritable partie prenante du récit... (mais je peux me planter) En somme, tu as mis dans le mille. Exactement le style de roman que je peux pas encadrer x) Mais bon c'est une coïncidence malheureuse, aucunement une critique... ^^"""
En conclusion, je dirais que le texte n'est certes pas parfait, mais présente des bons points qui permettent potentiellement de prendre appui pour progresser ^^
Parthénis [PNJs]-
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Re: [sans titre]
Je me doutais un peu que c'était exactement ce que tu ne lirais pas ordinairement.
En réalité, c'est plutôt l'histoire d'amour qui amènera au fantastique, j'essaierais de mettre au moins le deuxième chapitre si j'ai le temps de le taper entre mes cours (aujourd'hui je vais en profiter vu que j'ai plus de cours à bosser jusqu'à demain), et en espérant que cette fois j'arrive à mettre correctement les spoilers, comme ça vous pourrez le comparer au premier et me dire ce que vous en pensez. En tout cas, je vous remercies d'avoir répondu et maintenant je vais corriger.
En tout cas j'ai du soucis à me faire au vu de vos critiques quand on me dit que j'écris comme je pense... ^^"
En réalité, c'est plutôt l'histoire d'amour qui amènera au fantastique, j'essaierais de mettre au moins le deuxième chapitre si j'ai le temps de le taper entre mes cours (aujourd'hui je vais en profiter vu que j'ai plus de cours à bosser jusqu'à demain), et en espérant que cette fois j'arrive à mettre correctement les spoilers, comme ça vous pourrez le comparer au premier et me dire ce que vous en pensez. En tout cas, je vous remercies d'avoir répondu et maintenant je vais corriger.
En tout cas j'ai du soucis à me faire au vu de vos critiques quand on me dit que j'écris comme je pense... ^^"
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Localisation : trop loin de tes bras et rêvant à tous les moyens de te rendre heureux...
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Re: [sans titre]
Bon, j'ai tenté de corriger. En enlevant des choses a.ussi, comme ça je peux modifier un bout de mon roman que je n'aimais pas.
@Robert : J'ai expliqué dans le récit ce que signifiait 9.3., quand au pourquoi ce numéro là plutôt qu'un autre, c'est précisément pour la raison que tu as rappelé (surtout pour ça, mais il y a un peu de privat-jock aussi, désolée).
@Robert : J'ai expliqué dans le récit ce que signifiait 9.3., quand au pourquoi ce numéro là plutôt qu'un autre, c'est précisément pour la raison que tu as rappelé (surtout pour ça, mais il y a un peu de privat-jock aussi, désolée).
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Re: [sans titre]
"Private joke"...
Deux trucs qui me sont revenus après coup :
- Je comprends pas pourquoi la mère a des copies à corriger la veille de la rentrée...
- Franchement, le discours pour rassurer la sœur à propos de son entrée au lycée, moi ça me rassure pas ça me pousse au suicide x) Mais tes persos ont sans doute pas la même psychologie que moi =p
Deux trucs qui me sont revenus après coup :
- Je comprends pas pourquoi la mère a des copies à corriger la veille de la rentrée...
- Franchement, le discours pour rassurer la sœur à propos de son entrée au lycée, moi ça me rassure pas ça me pousse au suicide x) Mais tes persos ont sans doute pas la même psychologie que moi =p
Parthénis [PNJs]-
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Re: [sans titre]
Ca te pousse au suicide ?
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Re: [sans titre]
Ce que je veux dire c'est qu'à la place de la sœur ça me ficherait encore plus la trouille...
Parthénis [PNJs]-
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Re: [sans titre]
Alors c'est moi qui doit être bizarre...
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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chapitre 2
- Spoiler:
- _ « Maman, descend ! Tout le monde t’attend ! »
Aurélia appela encore une fois au pied de l’escalier, se débattant avec ses cheveux cuivre, tandis que son frère sortait de la pièce voisine, flanquée d’Ariel et de moi-même.
_ « Pourquoi ta mère a-t-elle si peur d’aller à cette fête ? »
_ « Le lycée n’a pas été une époque facile pour elle, surtout après sa sœur… »
_ « Sa sœur ? »
_ « Sa grande sœur ! Elle réussissait tout ce qu’elle entreprenait. Elle était pom-pom girl, populaire, douée… » expliqua l’adolescent blond.
_ « Et elle ne manquait pas de succès auprès des garçons ! » ajouta sa sœur avec une moue aguicheuse.
_ « Ca au moins ça n’a pas changé. » répliqua une gazelle à la crinière noire, les yeux verts pétillants et un sourire très explicite sur son visage.
_ « Rose ! » réprimandèrent le frère et la sœur de concert.
_ « Ben, quoi ? C'est la vérité, non ? C'est vrai qu'elle est devenue un peu difficile, qu'elle travaille tout le temps... et que par conséquent, elle perd souvent la notion du temps et de la réalité -et ses rendez-vous amoureux avec- mais il faut lui reconnaître qu'elle a du succès ! » défendit la petite brune.
_ « Je vais devoir y aller. » annonça un adolescent dégingandé, long et mince, les cheveux châtains en bataille et les yeux noirs soulignés par des cils interminables.
_ « Oh, déjà ? » minauda la prénommée Rose, sa main dans la sienne.
_ « Ne t’inquiète pas. Je reviens te chercher quand tu voudras rentrée… » promit-il tout bas. Il l’embrassa langoureusement avant de la lâcher et de s’en aller. La jeune fille soupira.
_ « Rose, tu as vu les clefs de la voiture ? Maman ne les a pas remis au crochet... » demanda le dernier garçon qui restait.
_ « Pour changer. » grommela Aurélia, dont les gestes et le visage étaient vraiment très expressifs.
_ « Elles doivent être dans son sac, mais je ne le retrouve pas...» continua Ely sans prêter attention à la plainte de sa soeur, car la tension n’avait pas céder durant les quelques secondes d’adieux des deux amoureux. Sortant de sa rêverie, Rose fila chercher l’introuvable trousseau.
Ely reprit la parole :
_ « Sa soeur aînée était une Reine du bal. Et puis, à cela est vite venue s'ajouter sa petite soeur, Scarlett. Ca a été très difficile pour maman de se retrouver entre les deux. »
_ « Ta mère est brillante. » argumentait ma sœur.
_ « Je sais ! Mais elle ne voit pas combien elle a changé depuis le lycée. Elle se sent encore inférieur à tous ses anciens camarades de classe. »
_ « Je les ai ! » lança Rose, sortant avec un air victorieux un trousseau de clefs de sous le coussin d’un fauteuil.
Nous étions samedi et il était 18h15. Aurélia et Ely étaient des amis d’Ariel, ma petite sœur. Ils étaient dans la même classe. Ma sœur avait passé la journée avec eux et m’avait appelé pour que je vienne la chercher. Et nous étions maintenant prises dans l’agitation de la maison. En effet, leur mère devait partir à 18h30 si elle voulait être à l’heure pour la soirée donnée au gymnase du lycée en l’honneur de l’ancienne promo de leur mère. Mais cette dernière montrait quelques réticences à se montrer.
Tout ce petit monde s'agitait donc au rez-de chaussée de la petite maison étriquée sur étage. C'était une maison qui devait sans cesse être en agitation. L'air était étouffant, si bien que l'on s'attendait à voir les murs et les poutres en bois fondre. Le rez de chaussé comportait une petite verrière, la cuisine qui débouchait sur la salle à manger - salon. Puis venait le vestibule. Il n'y avait aucune porte à cet étage, rien que des voilages colorés ou des rideaux de perles. Le parquet était recouvert de tapis orientaux et les canapés et fauteuils remplis de coussins. Des poufs trainaient par terre, et tout était encombré d'affaire.
_ « Très bien, je descends ! » finit enfin par céder la dite mère. « Mais ne vous moquez pas ! »
_ « Mais non ! On ne dira rien ! »la rassura son fils.
Apparut alors une femme aux longs cheveux bruns alourdis de laque, aux traits délicats que l’on retrouvait chez Ely. Ses iris noisettes s’agitaient, anxieux mais perspicaces, cherchant à déceler la moindre réaction, et ses lèvres minces et rouges étaient pincées. Elle avait un petit air de mammifère rongeur. Je savais qu'elle avait entre trente-cinq et quarante ans mais elle faisait plus jeune, comme ses enfants. Ses doigts fins et longs, allongées par des ongles manucurés, trituraient le bois de la rampe d’escalier avec nervosité tels que le feraient ceux d’Aurélia. Le fourreau rouge qu’elle portait était du plus mauvais goût, la boudinant et vulgarisant la douceur de sa personne.
_ « Ca te va très bien ! » mentit Ely.
_ « Oui ! Tu es très très très belle comme ça ! » ajouta sa soeur.
_ « Il y a un « très » en trop ! Deux auraient suffit. Je suis ridicule, hein ? »
_ « Oh non, non, non ! » répondirent les deux adolescents en coeur.
_ « Au moins tu seras remarquée ! » lâcha Aurélia en tentant de dissimuler une grimace. La petite brune à mon côté s’efforçait de ne pas rire, dissimulant ses lèvres pincées dans les manches de son haut en lamé argent. Ariel avait baissé les yeux, gênée.
_ « C’est si mauvais ? » gémit la femme vermeille, en pleine détresse. Elle s’assit sur les marches en soupirant, au comble du désespoir. « Si je vais à la réunion des anciens élèves habillés comme ça, non seulement on se moquera de moi mais, en plus, je ferais fuir tout le monde ! J’ai l’impression que je ne trouverais jamais quelque chose qui m’aille correctement, qui montre que j’ai réussis moi aussi ! »
_ « Mais tu n’as pas besoin d’une robe pour le montrer ! » lança son fils. « Tu n'as pas besoin de stresser ! Dis toi que tu vas passer une bonne soirée ! »
Sa mère et sa sœur lui jetèrent un regard peu amène. Le pâle adolescent leva les bras en signe de renonciation.
_ « Si je puis me permettre… euh... Je me mêle sûrement de ce qui ne me regarde pas, mais vous n’avez rien à leur prouver. Peu importe de ce que ces gens peuvent encore penser du moment que vous savez ce que vous valez, le chemin que vous avez parcouru... Est-ce que ce n'est pas ça le plus important ? Ce n'est pas pour ça qu'ont été crées ces soirée ? Pour que chacun se rende compte du chemin qu'il a parcourut... en retrouvant ses anciens copains de lycée ?»
Elle s’interrompit. Tout le monde la regardait, interloqué, comme si elle venait de dire la plus grande absurdité possible.
_ « Quoi ? Qu’est-ce que j’ai dit ? »
_ « Ariel, donnes-tu réellement, toi-même, si peu d’importance à ce qu’on pense de toi ? »
_ « Non, et tu sais très bien que je n'ai pas de problème de ce côté là. Mais là, il s'agit de ta mère. Cela fait longtemps maintenant qu’elle a quitté le lycée et qu’elle n’a plus revue ces personnes. Ce qu’ils pensent, ou ont pensé, d’elle ne devrait plus être si important. »
_ «Je suis d’accord, » m’avançais-je. « De l’eau a coulé sous les ponts. Vous n'êtes plus l'élève timide et complexée dont on se moquait au lycée ! Ca se voit... pas dans cette tenue mais... »
La jeune mère fronça les sourcils et ses deux enfants me fusillèrent du regard. Je venais, de toute évidence, de faire un impair. Je repris :
« Enfin, bref ! Ce que je veux dire c'est qu'aujourd’hui ce qui vous connaissent sachent que vous êtes quelqu'un de bien et que vous avez de quoi être fière, que vous avez réussi à faire de votre vie quelque chose. Et ça, ils ne peuvent pas vous l'enlevez !... Et puis, vous ne les reverraient même plus après cette soirée de toute façon ! »
La mère d’Aurélia se prit le visage dans les mains en gémissant. Aurélia vint la rejoindre sur les marches.
_ « Ils n’ont pas tout à fait tords, tu sais ?... En tout cas, on va devoir te changer, parce que là, c'est vraiment... trop ! » fit-elle avec une moue navrée. On approuva. Elle se releva d’un bond, avec un certain enthousiasme, et releva sa mère, qui manquait encore d’un peu de volonté.
_ « Je n'ai jamais aimé l'ambiance du lycée. J'étais nulle, une moins que rien... Ou, en tout cas, c'est comme ça que je le ressentais. Dire que j'ai eu la bêtise de croire qu'une dizaine d'années plus tard j'allais leur en mettre plein la vue alors que je suis monstrueuse habillée comme ça... et avec cette tignasse ! » grommela-t-elle, en tirant sur ses long cheveux bruns.
_ « Non, tu exagères. Tu n'es pas monstrueuse. Seulement, ça n'est pas toi ! »
_ « Ben, évidemment ! Si je pouvais y aller en étant moi-même ce serait plus simple ! »
_ « Ah bon ? Pourquoi ? C'est un bal costumé ? » demanda Rose en toute innocence.
Aurélia lui envoya une tape sur le bras, furieuse.
_ « Ce que je veux dire, c'est que rien qu'à l'idée de me retrouver avec tout ces gens je me sens comme si j'avais à nouveau seize ans: inférieure et invisible ! »
_ « Tu n'as rien à leur envié et tu vas leur prouver ! Tu étais propriétaire d’un club qui a réussi et tu as fini par réaliser tes rêves au lieu de ne plus seulement aider les autres à réaliser les leurs. Tu as réussis à ouvrir le restaurant dont tu rêvais. Tu es un modèle de réussite, maman, et on est fier de toi ! » approuva Aurélia.
_ « Et n’oublies pas que tu as élevé deux merveilleux enfants toute seule ! Tu es une mère géniale !» rappela Ely
_ « Même si parfois c'est à eux de me guider ? »
_ « Est-ce qu'au moins on réussit ? » interrogea Aurélia avec de petits yeux inquisiteurs.
_ « Très bien, bravo ! Maintenant, excusez-moi, mais il faut que je me change : cette tenue ne me va pas du tout. On dirait une adolescente revenue dans les années 80s, c'est atroce.»
_ « Bon, et bien, on va y aller ! J’ai demandé à ma sœur de venir me chercher et finalement on est encore là… » en profita Ariel, en se levant.
_ « Tu as raison. L’après-midi s’est trouvé un peu trop rallongé. Je vais y aller aussi. » admit Rose, sortant un petit téléphone rouge.
_ "Oui, vous vous êtes un peu retrouvées coincées avec tout ça, ma mère… Je suis désolée. Elle est un peu extravagante parfois et on dirait vraiment une adolescente, c'est... Enfin, c'était assez illustratif comme ça ! J'espère que vous ne vous êtes pas senties prises en otages, ou délaissées» s’excusa Aurélia, penaude. Remarquant le clapet rouge dans les mains de la petite brune métissée, elle soupira :
« Rose, tu ne vas qu’en même pas téléphoner à Nathan maintenant ? Il doit être en route. »
_ « Non, ne t’en fais pas. Il devait juste aller chez Véronica récupérer quelque chose. Ils vont sûrement arriver en même temps… enfin, si Véronica amène toujours Ely ce soir, pour l’exposition ? »
_ « Oui, toujours ! »répondit Aurélia, les dents grinçantes. Elle n’avait pas l’air ravie. Son frère, qui revenait de la pièce voisine, lui jeta un regard noir. Agacé, il monta à l’étage, bousculant sans s’excuser sa sœur toujours au pied de l’escalier. Ma propre sœur se mordit la lèvre, embarrassée, massacrant les petites peau de ses doigts. Apparemment, cette Véronica ne plaisait pas à tout le monde.
_ « Désolée, je croyais qu’il n’entendrait pas. » s'excusa Rose.
_ « Ca ne fait rien. Il sait ce que j’en pense. » clôtura Aurélia.
_ « L’exposition ? Tu parles de l’exposition d’Art qui a lieu à la Galerie Cruze ? » demandai-je, intéressée.
_ « Oui. Le père de Véronica dirige cette galerie. » expliqua Rose.
_ « Quoi ?... »
Une voiture klaxona dehors.
_ « Quand on parle du loup ! Je vais ouvrir ! » Et elle se précipita dehors dans un tourbillon de tissus vaporeux et multicolores.
_ « Je monte aider ma mère ! » décida Aurélia qui embrassa ma sœur, nous dit aurevoir et monta quatre à quatre les marches.
_ « Et nous, on va y aller ! » conseillais-je.
On quitta l’oppressante ambiance de la maison pour l’air humide et froid du dehors. Sur le trottoir, deux voitures étaient garées, leurs moteurs tournant toujours. L'une – la dernière arrivée - était un pick-up noir, au volant duquel je reconnus l'adolescent dégingandé dénommé Nathan. Rose vola retrouver son amoureux après nous avoir dit aurevoir, tandis qu'Ely sortait derrière nous. Je me tournais alors vers l'objet de son attention.
Une jeune femme blonde attendait, appuyée comme un mannequin sur une ferrari rouge. Sa voiture était toute aussi aguicheuse et chère que la robe -dont la couleur était assortie à la carrosserie- que l'adolescente portait. Il était des plus évident qu'elle avait parfaitement conscience qu'elle avait un corps parfait et elle le faisait naturellement bien voir. Elle était plus âgée qu'Ely mais dépraver ce jeune adolescent innocent ne semblait pas lui déplaire au vue du baiser qu'elle lui offrit lorsqu'il l'attira par la taille. J'avais soudain l'impression de tenir la chandelle.
Ely nous salua, adressant un sourire à ma soeur qui semblait aussi à l'aise qu'un poisson hors de l'eau.
A cette occasion, sa compagne s'offrit à mon champs de vision. Je l'avais déjà vu, sûrement dans un journal, quelque chose de ce goût là, entre un père millionnaire et collectionneur d'art et une mère mannequin, égérie de grandes marques et actrice à la télévision. Leur fille n'avait d'ailleurs pas eu à attendre longtemps pour faire ses débuts sur les écrans. L'adolescente n'accorda aucun regard à ma soeur, ses yeux vert glacés et méfiants me jaugeant brièvement avant de glisser derrière ses cils maquillés et le noir de l'eye-liner. Derrière l'image glamour qu'elle renvoyait et son arrogance, je ne pus empêcher l'image d'une anguille qui vous glisse entre les doigts s'imposait à mon esprit sans que j'en trouve la raison.
Cette belle blonde était pourtant ce que j'aurais pu appeler l'Archange des 9.3., entre égérie et ambassadrice. Elle devait sûrement être déléguée, superficielle et fière de sa beauté, sûre de toujours avoir ce qu'elle voulait. Son maquillage lui donnait des faux airs de poupée avec son apparence soignée et ses couleurs éclatantes. Cela lui donnait un côté instable, hystérique -peut-être même bien violante- mais dénoté aussi d'un certain franc parler. Il était flagrant que cette petite princesse avait du caractère. Elle devait être un véritable ouragan. En la regardant, j'avais l'impression de voir une photo en surexposition. Sans perdre de temps et sans même nous saluer, elle prit Ely par la main, monta dans la voiture, claqua la portière et fila.
Je démarrais. Ariel sursauta aux vrombissements du moteur. Elle enclencha la fermeture de sa ceinture de sécurité, soupira. Elle était renfermée, mordillant sa lèvre, et son mal aise rendait le silence plus pesant que reposant.
_ «Tes amis sont sympas... J'ai beaucoup aimé la blonde. Tu sais, la petite copine d'Ely ? Elle est très... chaleureuse ! » amorçai-je.
_ « Elle s'appelle Véronica. » rappela-t-elle machinalement, se massant les tempes, prise d'un mal de tête.
_ « c'est étonnant qu'elle ne soit pas allée chercher son petit copain chez les 9.3.. » notais-je, espérant la faire réagir.
_ « Que veux-tu que je te dise ? » grommela-t-elle.
_ « C'est plutôt que tu ne me dises rien qui m'inquiète. »
_ « ... »
_ « D'accord ! Tu préfère que l'on comble les silences avec des remarques d'une platitude à pleurer ? »
_ « Non, mais je ne vois pas très bien ce qu'on pourrait se dire !... »
_ « Qu'est-ce qu'Aurélia reproche à véronica ? Ca a un rapport avec toi... et le fait que la petite amie du frère de ta meilleure amie t'ait totalement ignorée tout à l'heure ? » demandai-je gentiment.
Ma soeur soupira.
_ « Véronica ne t'aime pas beaucoup n'est-ce pas ? C'est peut-être simplement épidermique ? Est-ce que tu refuse de me raconter parce que je ne suis pas venue à la maison récemment ?... J'ai téléphoné ! »
Elle fit mine de regarder par la fenêtre. J'étais donc sur la bonne voie.
_ « Allez, Ariel pardonne moi s'il te plaît ! J'étais vraiment occupée entre la fac et le boulot, on a pas arrêté. Je suis désolée de ne pas être venue plus souvent. Je suis passée au magasin la semaine dernière mais tu avais déjà fini. Je te promets que j'essaierais de venir plus souvent ! Ariel, chérie, parles moi ! Tu sais bien que tu peux me parler si quelque chose ne va pas ? Est-ce que tu sais pourquoi Véronica ne t'aime pas ?... Est-ce que ça a un rapport avec Ely ? » osai-je.
_« Pas que je sache. »
Je levais un sourcil :
_ « Tu ne sais pas pourquoi elle t'en veux ? »
_ « Personne n'a daigné m'expliquer. Elle encore moins. Elle m'ignore complètement, c'est comme si je n'existais pas. » expliqua-t-elle, une pointe d'agacement dans sa voix.
_ « Du coup, tu te sens piégée et tu as l'impression de jouer au chat et à la souris ? »
_ « C'est un peu ça. J'aimerais juste savoir pourquoi je suis punie. J'estime que j'ai droit à une explication ! Mais la seule réponse que j'ai eu c'est: « Ignore Véronica ! » ! . Mais c'est trop difficile à ignorer ! » avoua-t-elle tristement. « Je t'avouerais que je préfèrerais souvent partir quand Véronica est là... mais Aurélia veut que je reste. Je ne peux pas m'empêcher de m'en vouloir: Véronica était sa meilleure amie et maintenant elles s'opposent.»
_ « Je pensais qu'Aurélia était ta meilleure amie... Je veux dire, par rapport à son attitude envers toi. »
_ « C'est le cas. Elle m'a dit que Véronica était jalouse, qu'elle avait tord et que je n'avais qu'à l'ignorer...Comme si c'était le genre de fille qu'on pouvait ignorer ! »
Oui, en effet, ça ne devait pas être évident ! Véronica devait s'appliquer à bien faire sentir qu'Ariel n'était pas la bienvenue et être ignorer ainsi devait être pesant.
_ « … Oui, je me rappelle. Vous vous étiez laissés enfermer dans le magasin et lorsque maman t'avais retrouvé vous étiez en train de vous béquotter au milieu des peluches, sous-vêtements et de je ne sais quoi d'autres ! » me souvenais-je en riant tandis que l'on franchissait la porte de la maison. « Maman était folle ! Enfin, c'était pas la première fois et surtout pas la dernière... Et trois jours plus tard tu es partie à New-Yorck à la recherche de Michaël après qu'il nous ait quitté. »
Ma soeur ne répondit pas, mais elle avait une moue triste, déçue.
_ "Je suis désolée, je sais que pour toi ceux sont encore des mauvais souvenirs. Excuse moi, je n'ai pas fait attention ! Finalement, je crois que maman préférait encore quand tu sortais et que tu revenais à pas d'heure, comme tu l'as fait cette fois-là, plutôt que la période qui l'a précédé : au moins, elle était sure que tu étais bien vivante, même si tu souffrais. C'était plus facile pour elle à gérer que lorsque tu t'enfermais dans ton mutisme."
Ariel leva le nez de son écharpe et eu un sourire timide :
_ « Tu étais folle de rage que j'ai voulu le retrouver.
_ « Oui, je sais. » admis-je. « Mais c'était il y a longtemps. Et puis, à moi aussi les hommes m'ont valu de belles punitions ! »
_ « Ah bon ? Je m'en souviens pas. »
_ « C'est vrai ? Quand j'avais quinze ans ? Non ? En fait, c'est tout simple : je me suis enfuie avec un mec plus âgé, que j'avais rencontré quand je travaillais à l'accueil dans un hôtel. Lui devait avoir la trentaine mais il invitait toujours une fille d'environ mon âge quand il prenait une chambre. Tu te souviens pas ? »
_ « Je suis pas sure. »
_ « Michaël était furieux ! Il était tombé sur nous par hasard alors qu'il rentrait. Il était tard, mais il y avait de la lumière: on était arrêté à une station de service et j'étais restée dans la voiture. Il m'a reconnu à travers la vitre... »
_ « Je m'en rappelle pas bien. Est-ce que tu as... avec cet homme ? »
_ « Non, bien sûr que non. C'était un coup de folie, rien de plus. La prostitution, ça n'a jamais été mon truc... et prendre des risques non plus, tu le sais.»
_ « Les parents se sont certainement efforcés de me le cacher. Mais, en général, tu as plutôt été une fille modèle, sage et responsable. »
_ « Et en parlant de garçon... »
A nouveau, Ariel soupira.
_ « Oh ! Alors il y a bien quelqu'un ! »
_ «Comme d'habitude, tu avais raison ! Je sors avec Léo, ça va faire trois semaines ! Cela faisait un bon mois qu'on flirtait ensemble et il a fini par m'embrasser alors qu'on nettoyait les toilettes du magasin après le passage d'un couple en chaleur... »
_ «Comme c'est romantique ! »
_ « En fait, il aurait préféré attendre qu'on est fini, faire tomber des paquets « accidentellement » de leur étagère et profiter que je l'aide à ranger pour m'embrasser. Malheureusement, je lui ai un peu forcé la main ! » avoua-t-elle, navrée.
_ « Comment ça ? »
_ « J'étais sûre qu'il mijotait quelque chose. Je le sentais. Et je l'ai obligé à parler ! »
_ « En tout cas, c'est vrai qu'il est très mignon ! Je me rappelle quand tu le reluquais discrètement derrière ton comptoir. Et il a toujours été au petit soin pour toi ! »
_ « On était jeune ! Ca paraît toujours si évident et naturel quand tu vois les débuts en amour des personnages au cinéma ou à la télé. Mais c'est très loin de la réalité !» plaisanta Ariel.
_ «Heureusement qu'il a fini par atteindre l'autre rive du "no man's land" que tu as mis entre vous sans se prendre trop de mines en pleine figure. A force de faire trois pas en avant, deux pas en arrière, tu étais bien parti pour le perdre. Et reconnais que ça aurait été dommage ! Je t'ai toujours dit que vous étiez fait l'un pour l'autre. Mais rassure toi, on est est tous un peu maladroit au début, ce n'est jamais naturel pour personne. Heureusement, on ne naît pas avec le guide du savoir-faire amoureux. Ca s'apprend, ça s'acquiert plus exactement ! Et je t'assure que ça peut réserver de très belles surprises ! »
_ « Et comment fait-on lorsqu'on est une poule mouillée ? »
_ « Une poule mouillée ? Vraiment ? Ce n'était pourtant pas l'impression que Léo me faisait ! »
Ariel me frappa.
_ « Non, je parlais de moi ! »
_ « Tu n'es pas une poule mouillée. Ca ne te ressemble pas du tout : toi tu es plutôt du genre à prendre des initiatives. Tu dois bien être la seule de la famille à avoir hériter du gène « tenter sa chance ». Tu te rends compte... Si maman apprenait ça... »
_ « Elle m'enfermerait à double tours dans la plus haute tour du donjon, je sais !... ou plus modestement, me garderait-elle cloîtrer entre les quatre murs de ma chambre ?» demanda-t-elle, en plissant le nez, sourcils froncés.
cette question était quelque peu justifier. Ma mère pouvait très bien en faire une obsession: elle aurait trop à cœur de protéger sa fille.
_ « Je crois que pour maman, rien – pas même un donjon autrichien acheté à crédit sur 50 ans– ne serait de trop pour protéger sa fille ! » plaisantai-je. « Bien sûr qu'elle flipperait mais elle veut juste te protéger, t'éviter les mêmes erreurs... »
_ « Tu crois qu'elle considère papa comme une erreur ? »
_ « Non, je crois que non. Je ne crois pas qu'elle regrette : elle a dit oui à l'homme qu'elle aimait et elle a eu deux filles qu'elle adore... Mais l'amour a ses risques et souffrir en est un, comme d'en toute chose, et ce n'est pas négligeable.»
_ « Parfois tu n'es pas très rassurante, tu sais ? » me fit remarquer ma sœur.
_ « Désolée. »
_ « Ca ne fait rien ! C'est toi qui m'a montrée combien l'amour est essentiel. Tu es un modèle pour moi.»
_ « Pourtant, mon histoire avec Jack n'a pas vraiment été un conte de fée ! »
_ « Oui, mais ça ne t'empêche pas de croire toujours à Cendrillon !»
_ « Où est-ce que tu veux en venir ? »
_ « Tu es une romantique dans l'âme ! Tu m'as fait découvrir Roméo et Juliette. C'est grâce à toi, tes histoires, à tous les livres, les films et les chansons que tu dévorais que j'ai découvert l'amour. Ca a été ma première « positive » représentation de l'amour. C'est vrai que je n'ai pas beaucoup de références en expériences,... je n'ai que maman et toi en fait, et si je n'avais eu que maman j'aurais fais une croix sur l'amour sans même essayer. Aors que toi tu n'as cessé de me donné des raisons de croire en l'amour moi aussi...»
Elle divaguait totalement.
_ « Mais oui ! En attendant, avant de m'ériger une église, tu devrais surtout profiter du présent et de Léo autant que possible. Tout ce qui importe c'est ton bonheur. Et prend ton temps: Léo ne sera sûrement pas l'unique petit copain que tu auras, même si je te souhaite de connaître le grand amour un jour.»
_ « Et de pouvoir le garder.Ca me fait plaisir que tu me soutienne. »
_ « Léo est un type génial - et très mignon pour ne rien gâcher – alors je ne vois pas pourquoi je m'opposerais à ce que tu sortes avec lui. Et puis je sais que tu viendras me parler au cas où. Tant que j'ai le droit de m'inquiéter pour ma petite sœur au moins juste un petit peu, moi, ça me va ! »
_ « Surtout, n'arrête pas ! »
_ « Alors pourquoi tu dis ça ? Ce n'est pas le cas de tout le monde ? »
_ « C'est bizarre... Quand je l'ai raconté à Aurélia j'ai eu un moment l'impression que ça ne lui plaisait pas trop. Parfois, j'ai un peu l'impression que mes amis ont peur que je les oublie au profit de Léo et du coup quand ils se retrouvent par hasard ensemble -Léo et mes amis, j'entends- ils ne se parlent presque pas ou alors ils finissent par se disputer comme si je n'étais pas là. On dirait un match de ping-pong. Je déteste ça, j'ai l'impression d'être le premier prix d'une tombola. Je ne pensais pas que ça serait aussi dur d'accorder assez d'attention à chacun sans faire de favoritisme. Malheureusement, je ne peux pas non plus me couper en deux et je n'ai pas encore le don d'ubiquité.»
_ « Ca c'est un don qu'on aimerait tous avoir ! Ca et la téléportation. » admis-je en riant.
_ « Et toi ? Tu n'as rien à me raconter ? La fac, tes nouveaux amis, un petit copain en vue ? »
_ « Non, aucun ! » assurai-je.
Ce n'était pas un mensonge. La seule personne qui m'intéressait était Edouard Summers - le fils adoptif de Monsieur et Madame Summers. Ils venaient d'arriver en ville avec leur cinq « enfants », qui se trouvaient à la fac. Monsieur Summers était également mon professeur d'Histoire. Il semblait que cette étrange famille exerça une attirance sur moi que je ne m'expliquais pas et je doutais qu'elle puisse être rationnelle. Edouard, en particulier, m'intriguait au plus haut point depuis que je l'avais rencontré – accidentellement – dans une épicerie la veille de la rentrée, dans la soirée. En premier lieu ce n'était pas tant sa beauté marmoréenne qui m'avait alerté – bien au contraire – que la haine et le dégoût qu'avait, malgré lui, exprimé son être entier à l'apparition de ma soeur. Aujourd'hui, je me rendais compte que son irréelle et impossible beauté aurait du m'effrayer et non pas me semblait si naturelle et fascinante comme alors. Il m'était dès cet instant apparu comme évident qu'il était plus qu'un simple humain.
Etait ensuite survenu l'incident de la cantine une semaine plus tard, me donnant raison. Un être humain n'aurait pas été assez rapide pour traverser la cantine, me retenir dans ma chute – m'évitant au passage de me faire taillader le visage par mes couverts – et disparaître si vite que personne ne l'avait vu. Mais j'avais reconnu son odeur j'en étais certaine et l'impression de froid qui venait brûler ma peau tout les jours lorsque je croisais un Summers m'assurait que je ne me trompais pas.
De plus, l'attitude étrange d'Edouard envers moi, l'application qu'il mettait à essayer de me convaincre de renoncer me poussait d'avantage à trouver ce qu'il était. De la même façon que ses menaces qu'il finisse par m'arriver quelque chose si je m'obstinais alors que tout ce que j'avais contre lui lui aurait aisément permis de me prouver que j'étais folle et que ce que je racontais n'était rien de moins qu'impossible.
J'avais pourtant décider de l'écouter sur un point, de suivre son conseil. Il n'était pas question que je mêle ma soeur à ça. En tout cas pas plus qu'elle ne l'était déjà car j'avais le sentiment qu'elle était déjà impliquée, qu'une espèce de compte à rebours s'était déclenché malgré nous dès le moment où Edouard l'avait rencontré. La haine que j'avais vu dans les yeux d'Edouard avait fait naître dans mon inconscient un mauvais pressentiment que son avertissement n'avait fait que confirmer. Mais je n'arrivais pas à mettre le doigt dessus.
_ « En revanche j'ai revu Jack. » repris-je.
_ « Ouch ! » grimaça ma sœur.
_ « En réalité c'est plutôt mon égaux qui a souffert: il m'a bousculé dans la cafétéria et je suis tombée à la renverse, mon plateau dans les mains. J'ai atterrit pile à ses pieds. Heureusement, mon plateau était vide. »
_ « Je suis désolée ! »
_ « Je me dis que le ridicule ne tue pas. D'un côté, le déroulement de cette scène fut assez similaire au déroulement de notre histoire... », Edouard mis à part évidemment.
« Et puis, ça m'a permit d'apprendre qu'il sortait avec ma colocataire. Comme ça, je n'ai plus à me demander qui elle fait rentrer dans notre chambre cinq soirs sur sept... six sur sept, en fait ! »
_ « Tu plaisantes ? »
_ « Non ! »
_ « Ils ne font qu'en même pas « crac-crac » tous les jours ? » demanda Ariel, choquée.
_ « Non. Pas que je sache. Mais en général, je ne reste pas très longtemps ! Oh, et, chérie, sois gentille, ne réutilise plus jamais cette expression ! »
_ « Pfff... Et ça voulait habiter à la fac... » persiffla Ariel.
_ « Ariel, ne reviens pas là-dessus, j'ai quitté la maison mais pas ma famille. Tu pourras toujours tout me dire, rien ne changera ça. Mais, tu peux aussi comprendre qu'à la longue les listes pour la salle de bain, les matins où il n'y a plus de lait parce que quelqu'un a oublié de le mettre sur la liste des courses, les règles de vie à respecter à partir du moment où l'on commence à avoir un petit ami, avec l'impression que la maison commence à devenir trop petite pour tout le monde, le bruit, tout ça... on finit par s'en lasser ! J'ai plus d'intimité à la fac, ce petit territoire de quelques milliers d'étudiants et de professeurs, qu'à la maison. Finit les matins où je passe après vous et que je n'ai plus que de l'eau froide ou les soirées avec mon petit copain sans que tu m'espionne... »
_ « Je ne t'ai jamais espionné ! » se récria ma sœur.
_ « Ah non ? Et quand tu m'écoutais quand j'étais avec jack dans ma chambre par la bouche d'aération de la cuisine ? » rappelais-je, un peu trop cassante.
Ariel ne répondit rien, se contentant de se recroqueviller sur son lit.
_ « Je suis désolée... Ariel, tu es ma sœur et je t'adore. Et je suis ravie de revenir de temps en temps. J'avais envie de vous revoir parce que je m'ennuyais de vous, parce que j'ai besoin de te voir et d'être avec toi. Mais j'ai aussi besoin de mon indépendance. »
_ « D'accord ! Mais... s'il te plaît, Ella, ne me fais pas de cachotteries. Je ne le supporte déjà pas de la part de mes amis, alors de toi je ne le supporterais encore moins. »
Je reportais mon regard sur une petite peluche qui trainait sur le lit, promis d'un signe de tête. Malheureusement, j'avais déjà trahis ma promesse.
Dernière édition par Ely Julia le Lun 28 Déc 2009 - 17:04, édité 5 fois
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Localisation : trop loin de tes bras et rêvant à tous les moyens de te rendre heureux...
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Re: [sans titre]
Pitié, mets ton texte blanc en noir, là c'est illisible.
Robert Begarion- Dix de Cœur
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Re: [sans titre]
Mais je venais de le faire !!!
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Re: [sans titre]
Bon, c'est un peu moins illisible.Mais ça reste qu'en même un peu épars
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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chapitre 2 (suite)
je sens que mon ordi va passer par la fenêtre !
- Spoiler:
- _ « Chérie, tu veux bien m'aider à essuyer la vaisselle s'il te plaît ? » demanda ma mère.
_ « Ariel est ravie de te revoir tu sais ? » commença ma mère tandis que je commençais à essuyer les assiettes.
_ «Maman, ne t'y mets pas toi non plus, d'accord ? » la coupais-je tout de suite, agacée.
_ « Très bien, comme tu voudras ! »
_ « Maman ! S'il te plaît... »
_ « Non, ça va. Ce n'est rien. Tu as besoin de ton indépendance, je comprend...»
_ « Ah oui, tu es sûre ? Parce que là, j'ai plutôt l'impression que tu m'en veux, que quelque chose te dérange... Je sais bien que tu fulmines à l'intérieur, que tu me reproche d'être partis... »
_ « Mais non ! Ne sois pas ridicule !»
_ « Alors dis moi ce qui se passe ! Tu sais bien que je déteste quand tu tournes autour du pot. Et j'ai l'impression qu'il y a un énorme non-dit qui traîne et qui ne demande qu'à sortir, je me trompe ?... Maman, si tu ne me dis rien je ne peux pas deviner.»finis-je par céder.
Mais ma mère semblait sourde et muette.
_ « Très bien, comme tu voudras. » renonçais-je.
Je m'apprêtais à quitter la pièce quand ma mère retrouva miraculeusement sa voix :
_ « Attends ! »
J'hésitais, puis finis par me retourner.
_ « Tu sais, la maison semble de temps en temps bien vide sans toi et on se sent toutes les deux un peu démunies parfois quand tu n'es pas là. »
_ « Démunies ? »
_ « Oui ! J'ai toujours cru qu'Ariel partirait la première. Elle ressemble un peu à son père. Elle est insouciante, elle a souvent tendance à fuir ses responsabilités... Et elle a tellement peur d'être abandonnée qu'elle risque d'abandonner ceux qu'elle aime en premier, et ce serait du gâchis. Je ne t'apprend rien, tu as toujours très bien su cerner ta sœur. »
_ « Pas toujours, non. » marmottais-je. « J'adore Ariel, et j'ai besoin de rester en contact avec elle moi aussi. Je ne suis pas comme Michaël. Je n'abandonnerais pas ma famille. »
_ « Ne jette pas la pierre sur ton père. »
_ « Les gentils c'est ceux qui restent. »
_ « Ca n'est pas aussi simple. »
_ « Mais si, ça l'est. Il est parti. Rien ne justifie d'abandonner ceux qu'on aime. »
_ « Ce qu'on aime mais pas sa famille. » fit remarquer ma mère. Ca y est, on y était ! Je sentais la colère me montait. Je du me retenir de ne pas quitter la pièce sur le champs. Pourquoi fallait-il toujours en revenir à Michaël ?
_ « Et c'est beaucoup plus facile d'accepter qu'on a été abandonné par choix, c'est ça ? » raillai-je, espérant clore le sujet une bonne fois pour toute. Je savais qu'elle ne cherchait pas à jouer sur les mots. Si notre père avait cessé de nous aimer, il n'avait plus de raison de rester. Cette réalité ne rendait pas les choses moins douloureuses pour autant. Au contraire. Il aurait été plus facile de se dire que mon père était parti, non pas parce qu'il ne nous aimait plus, mais parce qu'il n'avait pas eu le choix. Qu'au contraire il soit parti pour nous protéger, parce qu'il nous aimer. Mais mon père n'était pas ce héros.
_ « Moi je ne fuirais jamais mes responsabilités. » me raccrochai-je. « Un coup de couteau reste un coup de couteau, qu'il soit porté au cœur ou dans le dos. » Je sentais les larmes de colère me montaient aux yeux. Je tentais de les ravaler mais c'était peine perdue.
_ « Chérie... » glapit ma mère, prise de remords, prenant mes larmes pour de la peine.
_ « Je n'attends plus rien de lui. Je n'attends pas qu'il revienne, encore moins qu'il redevienne un père. Aujourd'hui, je n'espère même plus de lui qu'il s'excuse ou qu'il regrette. Ceux sont des choses qui arrivent tous les jours, même si c'est malheureux.» conclus-je plus posément, essuyant ces foutus larmes.
Je finis la vaisselle et fermai le placard.
_ « Ariel n'a rien à craindre. J'adore ma sœur et je remercie le Ciel tous les jours pour ça, pour avoir la chance de l'avoir. Et même si la fac m'offre tout de même un certain « confort » de vie va-t-on dire, plus de liberté, d'indépendance, ça ne vous remplacera pas pour autant.»
_ « Oui... En tout cas, si tu décides à un moment de revenir à la maison... »
_ « Maman ! »
_ « Je te promets qu'on frappera aux portes, que ce soit celle de la salle de bain ou de la chambre et j'achèterais toujours une boîte de céréales de réserve à ta sœur au cas où ton petit copain resterait pour petit-déjeuner ici si ça devient plus sérieux entre vous, et tu pourras même prendre ma chambre. Tu as toujours eu la chambre la plus petite. » lista ma mère pendant que je pouffais.
_ « Oui, oui, oui ! Et il n'y aura plus jamais de cours qui disparaissent, ni de vêtements ou de bijoux, plus de bruits et de vas te viens partout dans la maison, plus de pannes d'électricité intempestives... »
_ « Ca me rappelle que je vais encore devoir me bagarrer avec le lustre du salon ! »
_ « Normalement, on a l'électricien pour ça. »
_ « je sais mais je n'ai pas pu quitter mon travail assez tôt pour être là pour le réparateur. En plus, il va encore falloir réparer la fuite de l'évier de la cuisine. »
_ « Plus de maison qui a besoin de travaux pour lesquels il faut attendre le réparateur toute la journée... » repris-je en écho à la liste de tout à l'heure.
_ « Ca, ça risque d'être plus compliqué ! »
_ « Tu pourrais te trouver un homme ? » suggérai-je.
_ « Très drôle ! »
_ « Les hommes bricoleurs savent se servirent de leurs mains... » minaudais-je.
_ « Je suis trop vieille pour ça ! »
_ « Alors prends un homme à tout faire ! Il y a des tas d'annonces pour ça, je suis sûre que tu en trouveras un bien. Et ça reviendra moins cher que d'appeler et le plombier, et l'électricien et le menuisier... »
_ « Tu as raison, je sais. Tu restes dormir ici cette nuit ? Ou tu a prévu autre chose pour ce soir ? Tu as toujours ta chambre tu sais. »
_ « Ben non, je n'ai aucun projet. Et j'accepterais l'invitation avec plaisir. »
_ « Bonne nuit. »
_ « Bonne nuit maman. »
« Créatures et rapidité surnaturelles »
Rechercher.
Le moteur de recherche se lança.
Devant mes yeux apparue une liste de sites internet: des jeux vidéos, dragon ballZ, un jeu de rôle, Blade, Supernatural (une série télévisée), Le dictionnaire féérique, Vampires et sorcières, Twillight (j'y avais déjà pensé), Vampire : La Mascarade, El Chupaccabra, « Entretien avec un Vampire », d'Anna Rice (très bon livre), Les Vampires et Leurs pouvoirs...
Je frissonnai, fermai la page et éteignis l'ordinateur. J'en devenais ridicule. C'était vraiment un acte désespérer ! Autant, d'ailleurs, que de s'imaginer des histoires de super-héros comme on peut en trouver dans n'importe quel comics. Cette hypothèse n'avait cependant pas durer plus d'une seconde car même mon imaginaire ne pouvait pas l'avaler. Que je tombe aussi bas montrait bien que je n'avançais pas. Tout ça ne servait à rien. Peut-être fallait-il que je me fasse une raison et qu'en effet il n'y ai de mystère que parce que mon imaginaire le voulait ? Finalement, Edouard allait peut-être obtenir satisfaction. Peut-être que j'allais finir par abandonner.
Je me demandais ce que je pouvais bien vouloir trouver en espérant découvrir le secret d'Edouard. Autant directement taper son nom sur google !, fulminais-je. Un instant, je fus saisis de l'envie d'essayer, hésitai et finis par repousser l'idée, me répétant que j'étais tout à fait ridicule. Mais il fallait bien avouer que je piétinais.
Je vidai le ballon d'eau chaude, puis me blottis en boule sur l'édredon de mon lit froid. On toqua à la porte. Ma sœur apparut effectivement à l'ouverture de la porte, ne passant que sa tête dans l'entrebâillement.
_ « Tu dors ? » demanda-t-elle.
_ « A ton avis ? »
Elle entra, se blottissant à mes côtés comme une petite fille.
_ « Qu'est-ce que tu faisais ? J'ai entendu du bruit dans ta chambre.» demandai-je.
_ « Oh, je regardais un épisode de Buffy contre les vampires à la télé. Et toi ? »
_ « Vider le ballon d'eau chaude. Et je m'apprêtais à réviser un peu. »
_ « Je crois que Keiss a un problème de vue... Il est bizarre en ce moment. Il s'agite pour rien certains soirs: il grogne ou il aboie en montrant les crocs alors qu'il n'y a personne.»
_ « Il avait pourtant l'air d'aller bien quand je l'ai vu. Tu t'inquiètes sûrement pour rien. »
_ « Je l'espère. »
_ « Ariel, je suis vraiment désolée... »
_ « Non, c'est moi. Je ne veux pas qu'on passe tout notre temps à revenir dessus chaque fois qu'on se revoit. Et soyons clair, je n'ai aucune envie de vivre toute ma vie avec vous deux, à partager la même maison, la même salle de bain, le même... chien ! Je m'excuse. Tant que tu reviens de temps en temps me voir, ou que je puisse venir te voir, il n'y a pas de mal ! »
_ « Euh... oui, je viendrais, bien sûr. »
Je me suis réveillée dans la nuit. Je n'étais plus habituée à mon lit alors même que j'y avais dormi pendant des années. Je descendis me chercher un verre d'eau car j'avais chaud. Mais lorsque je descendis les dernières marches de l'escalier je perçus les grondements de mon chien à l'entrée. Je le rejoignis, ouvris la porte pour vérifier qu'il n'y avait personne. Keiss se précipita dehors. Je l'y suivis. L'air était lourd, chargé d'humidité et j'avais froid. Un frisson me parcouru l'échine mais pas à cause de la température cette fois. Je me sentais observée, mal l'aise et les grondements plus appuyés et menaçants de mon chien n'avaient rien de rassurant. Mon chien fixé un point dans l'obscurité que je ne pouvais pas voir. Tout son corps était tendu, prêt à bondir si quelqu'un venait à s'approcher de trop près. Ou si ce quelqu'un ne s'en allait pas au plus vite. Mes yeux ne distinguaient rien dans l'opaque obscurité où tout semblait se confondre. Mais pourtant, j'avais peur. Mon cerveau me hurlait de renter et de fermer toutes les portes à clefs, mais mon corps était paralysé par la peur. Les battements de mon cœur s'affolaient. Keiss se dressa, se tendit encore, aboyant maintenant, découvrant ses crocs. Mes yeux cherchèrent avec plus de frénésie encore ce point que je ne pouvais voir. J'étais aveugle et impuissante.
Et puis, tout se calma. Keiss s'apaisa. Il cessa d'aboyer et ses grondements finir par s'éteindre. Le danger était passé. Un énorme poids sembla se soustraire à mon corps. Toute la tension qui avait tendu chaque partie de moi venait de s'évanouir en une seconde. Mon cœur se calma. Mes yeux cherchant encore une quelconque trace de l'intrus, je reprenais le chemin de la maison, mon chien marchant tranquillement à mes côtés, et je fermais la porte au verrou, laissant derrière moi l'air lourd de la nuit et son obscurité.
_ « Rentre bien, soit prudente ! » me souhaita ma mère le lendemain soir. Ma sœur vint m'embrasser et je lui promis pour la deuxième fois de venir la voir mardi après son travail.
Il était tard - sûrement vers les minuit, mais l'horloge de ma voiture ne fonctionnait plus – et j'étais fatiguée. J'avais peu dormi la nuit dernière. En fait, j'avais été incapable de me rendormir et j'avais plutôt somnolé, envahit par des rêves sans cohérence des Summers, d'Edouard, des passages de films et de livres. Cependant, lorsque je mettais lever le matin, j'avais passé une trop mauvaise nuit pour ne serait-ce qu'envisager qu'il s'agissait là de mon inconscient qui cherchait à remettre un peu d'ordre parmi les pistes que j'avais pu envisager à propos d'Edouard et de sa véritable nature. Toute la journée, j'avais été hantée par le souvenir de cette nuit, de ce danger qui avait été tout près mais que je n'avais pas su voir.
Je passais mon visage dans mes mains. J'avais besoin de dormir. Je me penchais une seconde pour allumer l'autoradio. Soudain, quelque chose traversa la route en une seconde, comme une ombre. Je pilais, effrayée, quand une deuxième ombre sortie de nulle part et arriva en une fraction de seconde face à ma voiture. Trop vite. L'ombre était trop proche pour que je l'évite. Elle eu a peine le temps de se tourner pour voir ma voiture que mon part-choc la percuta de plein fouet. Mais au lieu d'un corps qui aille voler sur mon pare-brise, ma voiture fut stopper brutalement comme si elle venait de percuter un mur, se soulevant sous le choc. L'air-bag s'ouvrit brusquement. J'étais surprise, paniquée, et à moitié assommée, la respiration coupée. Un liquide chaud coulait de mon front et ma tête me faisait mal. Mais mes yeux n'arrivaient pas à se détacher de la route. Lorsque je compris ce que je voyais, je ne pus retenir mon effroi, étouffant un cri.
Debout sur la route, se tenait Edouard Summers, indemne, me fixant de ses yeux noirs, le visage grave, tandis que l'avant de ma voiture, enfoncée, n'était plus que de la tolle froissée. Il semblait hésiter à partir. Je voulu sortir de la voiture, courir vers lui, le frapper, laisser une quelconque marque sur lui avant qu'il ne file et qu'il puisse encore nier ce dont je venais d'être témoin. Je me débattis avec rage contre l'air-bag.
Mais lorsque je relevais les yeux, Edouard avait déjà disparu.
_ « Mademoiselle Mars ? » demanda une voix douce et féminine. Je levai les yeux. Une très belle femme se tenait devant moi, en blouse blanche, que je reconnus comme étant le docteur Summers sans même avoir besoin de lire son badge. Elle avait la même pâleur angélique, les mêmes yeux noirs, la même parfaite grâce que tous les autres membres de la famille. Elle avait un visage doux, des cheveux châtains attachés distraitement mais sans un cheveux en désordre, et ses traits étaient très harmonieux. Ses beaux yeux en amandes m'interrogeaient, attendant que je réponde. Je savais que ce n'était pas qu'une coïncidence si c'était elle qui s'occupait de moi.
_ « Ella, Ella Mars. »
_ « Vous voulez prévenir quelqu'un ? » demanda-t-elle en obligeant mes pupilles à suivre le faisceau lumineux de sa petite lampe.
_ « Non, merci. »
_ « Vous êtes sûre ? Vous devez être encore un peu étourdie et l'on vous donnera quelques analgésiques pour faire passer la douleur. »
_ « Je rentrerais en transport. Et je n'ai pas besoin d'anti-douleurs. » En revanche, mon porte-monnaie risquait l'hémorragie vu l'état dans lequel Edouard avait laissé ma voiture. L'espace d'une seconde, je m'étonnais de ne pas être effrayée par ce qui venait de se passer, effrayée par Edouard. Elle avait raison, je me sentais encore étourdis, ma tête me pesait et la ceinture avait laissé une trace brûlante sur mon épaule. Je frottais l'endroit où je m'étais ouvert. On y avait appliqué des pansements, simplement. Rien de grave donc.
_ « Tout semble correcte. » confirma le médecin. « Il faudra qu'en même revenir me voir dans une semaine pour vérifier qu'il n'y a bien aucune commotion. »
J'aquiessais. S'il ne leur fallait que ça pour me laisser sortir.
_ « Je peux renter maintenant ? »
_ « Oui. En tout cas, heureusement que vous ne rouliez pas vite. Qu'est-ce qui vous est arrivé ? » interrogea-t-elle.
Je la scrutai, alertée. Edouard lui avait-il raconté ? Trouverait-elle une excuse elle aussi ? Quel mensonge défendraient-ils cette fois ? J'hésitai à tenter ma chance. Mais elle allait sûrement inventer une autre histoire, tout comme son fils s'y évertuait depuis deux mois et j'en avais assez. J'avais décidé de me taire, jusqu'à ce que je sache enfin la vérité de façon sûre et certaine. Aussi :
_ « Un chevreuil ! » mentis-je. « C'était un chevreuil. Ceux sont des animaux vraiment rapides. Heureusement qu'il n'a rien eu. »
Je ne pus regarder le médecin plus longtemps et mes yeux s'évertuaient à l'éviter lorsque je la remerciais d'(une voix plus tremblante que je ne l'aurais voulu. Lorsque je quittais le service, j'aperçus Edouard qui la rejoignait, son père le poussant par l'épaule. Je déglutis et je sentis des larmes de rage et de découragements me montaient aux yeux. Mais cette nuit m'avait fourni la preuve évidente que j'avais raison, qu'il n'était pas qu'un simple humain. Et j'étais décidée à savoir quoi, et pourquoi ma sœur lui était-elle si repoussante.
Il était deux heures du matin quand j'entrais enfin dans ma chambre d'étudiante car il pleuvait des trombes d'eau dehors et l'on n'y voyait rien sur la route. Sous les draps de ma colocataire, je distinguais deux formes endormies. Qui que cela puisse être – Jack ou autre- cela n'avait pas d'importance tant qu'ils dormaient. Les picotements abrasifs de froid qui prévenaient de la présence des Summers en temps ordinaire ne m'avaient pas quitté de tout le trajet, et même dans cette chambre. Je mis cela sur le compte de l'émotion. Pourtant, j'étais plus maîtresse de moi que je n'aurais imaginé. Je m'aurais cru plutôt prête à m'évanouir, ce genre de choses. J'étais fatiguée et l'effet des médicaments s'estompaient lentement, cependant je redoutais le sommeil. Aussi entrepris-je de défaire mon sac et de rangées mes affaires en silence. Malheureusement, j'eus beau faire durer les choses, ce ne fut pas assez long à mon goût. Sur les nerfs, je tournais encore en ronds quelques minutes, fus prise de l'envie de quitter cette chambre, de retrouver Edouard au plus vite et d'enfin lui faire dire la vérité. Je renonçais, main sur la poignée, y revins encore. Je dus alors me résoudre à me coucher. La brûlure du froid n'en démordait pas. Ma tête était lourde et j'étais en coton. La douleur se réveillant de plus belle, je décidai de dormir avant que l'effet des anti-douleur ne se dissipe complètement et définitivement. Je m'enfonçai dans un sommeil lourd et sans rêves où seul subsisté encore le bruit de la pluie battante contre le carreau.
Je me réveillais tremblante et dégoulinante dans le noir. Je suffoquais alors que ma peau brûlait de froid. La douleur s'éveillait, engourdissant mes membres et barrant mon front d'une barre de feu. Derrière mes paupières brûlantes des larmes inondaient mon visage en flots violents. J'enfouis mon visage dans mon oreiller pour étouffer mes sanglots. Je n'arrivais plus à respirer. Je gémis, serrant ma poitrine entre mes bras. Je m'efforçais de retrouver mon calme, de respirer. Je voulais surtout rester le plus silencieuse possible. Je ne voulais pas qu'on m'entende. Aussi, m'enfonçais-je encore plus profondément dans l'oreiller.
Lorsque je me levais j'avais les yeux rouges et gonflés et j'étais épuisée. Je me sentais vide. Je soupirais et, sans faire attention à ce qui m'entourait, ouvris la porte de la salle de bain.
_ « Ella ! »
_ « Oh ! Oh, je suis désolée ! » glapis-je, tout à fait réveillée cette fois, face à un Jack plus désemparé que jamais, nu (!) et encore ruisselant, attrapant une serviette à la va vite. Je sortis à l'aveuglette de la salle de bain.
_ « Jack ? » appela la voix claire de la grande brune longiligne qui venait de sortir du placard.
_ « Euh... Il s'habille. » dis-je, un peu embarrassée.
_ «Comment ça... ? »
_ « Je ne l'ai pas fait exprès, d'accord ? Je ne pensais pas qu'il serait encore là... »
_ « Oui, c'est ça ! C'est un accident ! » lança ma colocataire, les dents serrées.
_ « Évidemment ! Ne vas rien t'imaginer: il n'y a plus rien entre lui et moi. » assurais-je.
_ « Ça s'est sûr ! » siffla-t-elle.
_ « De quoi tu m'accuses, exactement ? J'aimerais bien savoir. Je t'ai dit que je n'en voulais plus. Je ne l'aime plus, alors tu peux le garder. De toute façon, il ne croira jamais que je puisse encore avoir des sentiments pour lui. »
_ « C'est le cas ? »
_ « Quoi ? »
_ « Tu as encore des sentiments pour lui ?»
_ « Mais tu es sourde ? Je viens de te dire que je ne l'aimais plus ! Pourquoi veux-tu à tout pris m'accuser de quelque chose ? Tu es un pitt-bull avec un collier étrangleur.
Mais si tu veux avoir une raison de me détester, il a déjà la montre que tu lui as offert il y a trois jours. Je lui ai offerte. Le coup de la fille cachée sur la banquette arrière, ses ex-copines l'ont fait bien avant toi. Et il ne leur a pas préféré une soirée avec ses copains. Alors, crois-moi, ce n'es pas par le sexe – même si je ne doute pas que tu sois très bonne dans ce domaine – que tu réussiras à le garder ! Je continue ? Quand tu lui as dit hier matin que les céréales sur la table étaient vraiment infectes, et que tu ne comprenais pas pourquoi j'en achetais, juste avant de les jeter sous les yeux de Jack ? Et bien c'était les siennes ! C'est lui qui les a acheté, parce que ceux sont ses céréales préférées ! Oh ! Et il ne te trompe pas lorsqu'il est occupé le week-end. Il va voir sa petite sœur. Elle est malade, et elle adore son grand-frère. Elle m'aimait beaucoup. Son père aussi. Apparemment j'étais la première qu'il est présenté à sa sœur. Et jusque là, l'unique ! Ca fait combien de temps que vous êtes ensemble ? Un peu plus de deux mois ? Oh oui, il m'avait déjà présenté à sa sœur à cette date !... Tu voulais que je sois méchante, et bien voilà ! J'ai même encore mieux, la prochaine fois que vous avez prévus de faire vos petites affaires, si vous alliez dans sa chambre pour changer ? »
Elle allait répliquer -ou se jeter sur moi pour me crêper le chignon- quand Jack sortit de la salle de bain.
_ « Je vous dérange ? »
_ « Non. J'attendais juste que tu es fini pour aller prendre ma douche. Et... J'étais en train de suggérer à ta petite copine l'idée de passer la nuit dans ta chambre la prochaine fois que vous voudriez coucher ensemble... Tu as bien une chambre, non ? » lançais-je, en lui décochant mon plus beau sourire.
_ « Oui, pas de problème ! Juste que Sandra disait que c'était plus pratique pour elle, que, comme ça, elle était tout près de ses cours. »
_ « Vraiment ? Pourtant, c'est drôle, j'étais sûre que tu avais cours dans le bâtiment B ! » lançai-je en me tournant vers ma colocataire, sans cacher pour autant mon petit plaisir. En effet, le bâtiment B était à l'autre bout du campus, bien plus proche du dortoir des garçon que celui des filles. Et, qui plus est, cela faisait deux mois qu'ils couchaient ensemble mais Jack ne savait toujours pas où elle avait cours ? Où le retrouvait-elle dans ce cas ? Dans les toilettes des filles, comme au lycée ?
_ « Je vais prendre ma douche !» annonçai-je, filant dans la salle de bain.
Dernière édition par Ely Julia le Dim 27 Déc 2009 - 21:30, édité 2 fois
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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chapitre 2 (re : suite)
- Spoiler:
- _ « Salut ! »
Je sursautais. Je n'avais pas vu Edouard depuis ma sortie de l'hôpital. Mais rien ne m'avait prévenu cette fois. Je me retournais.
_ « Jack ! Salut ! » balbutiais-je, gênée.
_ « Désolé, je t'ai fait peur. »
_ « Ce n'est pas grave, c'est bien mérité après ce matin. Je suis désolée. »
_ « Non, tu ne l'es pas vraiment. »
_ « Humm... Non. Non, je ne le suis pas. En tout cas, pas pour elle ! Jack, comment peux-tu sortir avec une fille pareille ? » lachai-je, interloquée.
_ « Je ne vois pas ce que tu veux dire. »
_ « Bien sûr que si ! Comment se fait-il que tu ne saches même pas où elle a cours ? Ou qu'il y est tellement de choses sur toi qu'elle ne sache pas ? Elle ne sait même pas que tu es allergique aux fruits de mer. Elle avait planifié une soirée avec toi, un dîner dans un restaurant de poisson ! Et c'est moi qui est du lui dire... »
_ « Tu n'y étais pas obligé. »
_ « Et qu'est-ce que j'étais censé faire ? La laisser tout préparer et se faire un plaisir à l'idée de passer cette soirée avec toi jusqu'à ce que tous ses plans tombent à l'eau ? Jack, je n'ai pas aimé faire ça. C'était comme souligner le fait que j'en saurais toujours plus qu'elle sur toi, qu'elle ne me vaudra jamais... »
_ « Mais, c'est bien ce que tu penses ? »
C'était surtout ce que je venais de faire ce matin sous le coup de la colère.
_ « Non. Ce n'est pas ce que je pense... c'est juste que... vous n'allez pas ensemble. Vous vous ressemblez trop...Tu ne l'as voit qu'en même pas que pour le sexe ? »
_ « ... »
_ « jack ! » grondai-je, furieuse.
Il me foudroya du regard.
_ « Quoi ? On est plus ensemble, non ? »
_ « Désolée. Je suis désolée ! Je n'étais pas à ma place, je sais. Seulement, je me sens... je me sens un peu offensée. Ne ris pas ! Je sais bien que c'est ridicule ! » m'excusai-je. « C'est juste que... Je ne peux pas croire que tu es recommencé comme avant ! Pas après ce qu'on avait vécu ensemble. »
_ « Si tu as l'intention de me juger... »
_ « Non, c'est pas ça. Mais... je suis juste un peu déçue. Je croyais que notre histoire avait eu un peu plus d'importance pour toi que ça, qu'elle t'avait donné envie de vivre autre chose que des relations de lycée surtout centrées sur le sexe et le plaisir... »
_ « Parce que nous deux, ce n'était pas une relation de lycée ? Ou est-ce que tu trouve qu'on ne pensait qu'au sexe ? » persifla_t-il, avec un sourire perfide, en me scrutant avec des yeux de fouine. Il se rapprochait de moi comme un vautour, et avant que j'ai pu me défendre de cette interprétation odieuse, il se souvint :
« C'est vrai qu'une fois que tu t'y es mise, tu es vite devenue intenable - une vrai petite cochonne ! Heureusement que je n'étais pas comme ça, que j'étais raisonnable, sinon... » Il avait l'air sérieux en plus !
_ « C'est pas drôle ! Arrête ! » le frappai-je.
_ « Tu es sûre ? »
_ « J'ai l'air de rire ? »
_ « Où tu voulais en venir tout à l'heure, alors ? Quand tu déblatérais sur le passé et que tu t'acharnais à me prouver combien notre histoire était belle et combien aujourd'hui je te décevais ? » relança le jeune homme avec un sourire en coin. Je souris à mon tour.
_ « Je disais juste que j'avais cru que tu aurais envie de te poser après qu'on se soit quitté et pas te jeter à nouveau dans des relations qui ne durent jamais. Que ça t'avait donné envie d'autre chose que de papillonner. » expliquai-je tant bien que mal. « Mais, je devais encore une fois me faire des idées. Ariel a raison, je suis bien trop romantique ! Et en plus, j'ai beaucoup trop d'imagination ! »
_ « C'est pas ta faute ! Tu as sûrement du tomber dans une marmite d'eau de rose quand tu étais petite. Tu sais, que tu pourrais porter plainte contre ta mère pour ça ? »
_ « Tu te défile ! »
_ « De quoi ? »
_ « J'en sais rien. Mais lorsque quelque chose t'embête je vois tes dents de sagesse ! »
_ « C'est exactement pour ça que je ne veux pas recommencer une histoire comme la notre ! » grogna-t-il, en colère.
_ « Quoi ? Pourquoi ? » demandai-je, perdue.
_ « Pour ça !... Écoute, j'ai eu beaucoup de mal à renoncer à toi, tu sais ? Ce qui c'est passé entre nous... J'ai adoré ! Ça a été la meilleure chose qui me soit arrivé depuis... Je ne suis même pas sûr d'avoir connu mieux ! » s'enthousiasma-t-il, se qui ne fit que me rendre plus perplexe encore.
« Mais je ne veux pas revivre ça. »
Là, ça devenait vraiment contradictoire !
« Plaquer une fille ne m'avait jamais posé de problème avant. C'était une de perdue pour dix de retrouvées: il n'y avait pas de quoi s'inquiéter ! J'étais un gamin. Et tu m'as changé. Tu as vu tout mes défauts. Tu as tout connu de moi, le bon comme le mauvais côté. Tu m'as redonné espoir. J'étais mort avant de te connaître et je suis né le jour où tu m'as aimé. C'est ça qui me fait peur. Je ne suis pas prêt à m'ouvrir encore à quelqu'un d'autre comme ça. Personne n'avait autant d'emprise sur moi que toi. On a été tellement heureux ensemble ! On s'aimait si fort au début. Je pensais que rien ne pourrait détruire notre amour. »
_ « Je ne comprend pas où est le mal... »
_ « Laisse-moi finir ! Lorsque ça n'a plus marché entre nous, j'ai refusé de l'accepter. Je t'aimais et j'étais persuadé que tu m'aimais aussi, que rien ne pourrait jamais nous séparer. Ça m'a rendu aveugle et possessif. Je n'ai pas vu que je ne faisais que t'éloigner d'avantage de moi. Je refusais tout bonnement de renoncer et j'ai tout fait pour te récupérer. Je t'ai fait des choses horrible. Mais, je ne voulais pas te faire souffrir ! »
_ « Je sais, Jack. Je l'ai toujours su. »
_ « Vraiment ? Pourtant, il y a eu un moment où tout ce que tu voulais c'était t'enfuir aussi vite et aussi loin que tu le pouvais, je me trompe ? Tu as voulu retrouver ta liberté parce que tu avais peur que je revienne et que tu ne puisse plus aller de l'avant, n'est-ce pas ? Et je suis revenue à l'assaut parce que je t'aimais et que je refusais de renoncer à toi. J'ai été égoïste. Je ne veux pas infliger ça à quelqu'un d'autre, tu comprend ? Je t'aime toujours, Ella. Rien ne t'effacera... »
_ « S'il te plaît, arrête là tes violons ! Je croyais que c'était clair maintenant ? Qu'il n'y avait plus rien entre nous ? »
_ « C'est le cas, rassure toi. Je ne t'ai pas dit tout ça dans l'espoir de te récupérer. J'essaie seulement de te faire comprendre. Je sais bien que c'est trop tard, maintenant, et qu'on ne peut plus se retrouver. Tout est fini entre nous. Mais je n'arrive pas à comprendre comment on a pu en arriver là. Qu'est-ce qui nous est arrivé ? Comment se fait-il que ça n'est pas marché ? Tout était parfait. On a vécu tellement de belles choses ensemble ! »
_ « Je ne sais pas. Je n'en sait rien du tout. On ne devait pas être fait l'un pour l'autre. Mais peu importe maintenant. J'ai repris ma vie, et maintenant tu dois faire de même toi aussi. »
_ « Mais peut-être que je ne suis pas fait pour ça ? »
_ « C'est ridicule ! »
_ « Je ne veux pas que ça recommence, Ella ! Je refuse de faire à nouveau souffrir ceux que j'aime. »
_ « Et c'est la preuve que tu as changé, qu'il y a du bon en toi. Et je suis sûre que tu trouveras quelqu'un qui saura te sauver de toi-même. Je suis sûre que l'amour le peut.
Je n'avais pas imaginé que ça avait été aussi difficile pour toi. Je comprend maintenant que tu ne veuilles payer que pour le plaisir. Mais, c'est si... réducteur ! Jack, j'ai peur que tu passes à côté de belles choses. Je sais, que c'est important de se protéger et je comprend que tu sois refroidi, mais... Si tu ne prends pas de risque en amour, alors pourquoi en prendre ? Tu ne crois pas que c'est ne pas prendre ce risque qui est encore plus risquer ?
Tu n'as gardé que les côtés négatifs de notre histoire, pourtant il y avait bien des côtés positifs pour qu'on ai été si heureux ensemble. Ils existent toujours, Jack. Pense à tout ce que tu peux perdre si tu laisse ta peur de souffrir gagner. Ne renonce pas à l'amour, Jack. Pas si vite, pas si facilement ! Tu n'es pas du genre à abandonner, tu t'es toujours battu. Et crois moi, ça vaut le coup de se battre pour ça. Tu dois reprendre confiance en toi. Sans même parler du Grand Amour - s'il était si facile à trouver on en rêverait pas autant ! J'ai sûrement vu et lu trop d'histoire romantique... mais je reste persuadée qu'on doit y croire, qu'il faut rechercher l'amour - et même le célébrer - chaque jour que Dieu nous donne. Peut-être bien qu'un jour, à force de souffrir, à force de ruptures, moi aussi j'en viendrais à ne plus croire en l'amour, à le fuir, mais ce serait une erreur. Et j'espère que quelqu'un sera là pour me le rappeler. »
_ « Woaw ! Tu sais que tu peux être vraiment très belle, quand tu t'enflammes ! » ricana Jack. Sa remarque eus le bon goût de m'arrêter et je pus reprendre mon souffle.
Il m'offrit son sourire le plus angélique mais je ne trouvais rien d'autre à dire que de lever les yeux au ciel.
_ « Tu risque encore de t'attirer des ennuis à parler comme ça ! » observa-t-il.
_ « Il faut que j'y aille. »
Lorsque je me détournais de lui, mon sourire disparut et le doute s'installa de nouveau, en vieil ami. C'était une bonne chose qu'il voit enfin tout le mal qui avait été fait. Mais savoir ne suffit pas. Pourrait-il réellement changer ? Je comprenais qu'il ai peur que notre histoire se répète. Et je le craignais aussi. Aussi loin que je m'en souvienne, Jack avait toujours eu une tendance destructrice. Au début, j'avais cru pouvoir le sauver. Mais à force de trahir ma confiance, à force de souffrir, j'avais préféré arrêter les frais. Malgré notre amour toujours vivant, j'avais du me faire une raison et accepter qu'on ne pouvait plus se retrouver. Mais lui, n'avais pas renoncé. Et la blessure de notre amour n'avait fait que s'infecter d'avantage, jusqu'à ce qu'il n'en reste plus rien. Je savais qu'il ne ferait rien d'autre que nous détruire et j'avais repris ma liberté, reconstruis ma vie. J'avais chassé mes démons. Et malgré tout ses efforts pour me prouver que j'avais tord, il ne fit que me donner raison.
Le plus tragique était qu'il voulait réellement prouver qu'il pouvait changer. Il avait essayé de corriger sa nature. J'aurais voulu avoir tord moi aussi – pas pour nous, car de « nous » il n'y en avait déjà plus, mais pour lui. Et j'espérais ne pas me tromper aujourd'hui. Peut-être trouverait-il quelqu'un qui l'aimerait assez pour le sauver de lui-même, pour l'aider à changer, et faire taire le cri alarmé dans ma tête. Quelque part, j'espérais que quelqu'un me prouve que mon intuition était juste, que je ne me trompais pas.
_ « Pitié ! Dis moi que ça ne va pas me coûter encore plus cher que mes études universitaires ! » suppliai-je.
_ « Désolé ! » annonça le jeune hispanique qui sortit du capot – ou de ce qu'il en restait – de ma pauvre voiture.
_ « C'est si mauvais ? » grimaçai-je.
_ « Sincèrement, tu devrais en racheter une autre. Tout l'avant de ta voiture est fichue et tout les amortisseurs ont sauté. »
_ « Oui, rien d'étonnant... » maugréai-je dans ma barbe pendant que je fulminai intérieurement contre Edouard.
Étrangement, la liste de tous les dégâts qu'il avait pu causer à ma voiture auraient du m'effrayer. Rapporté à ma fragile personne, le spectacle de ce qu'il avait fait de ma voiture n'avait rien de rassurant. Certes, ça ne me surprenait pas, comme si j'avais intégré le fait que, de toute façon, il était au-delà de toutes les limites humaines. Que cela faisait partit de sa nature.
Et j'avais le sentiment qu'il ne me ferait pas de mal, qu'il y avait du bon en lui. C'était un sentiment étrange, différent d'une évidence, qui infusait en chaque fibre de moi. Ce n'était pas cette émotion forte qui m'avait saisit devant sa beauté parfaite – j'irais même jusqu'à dire divine – mais plutôt comme un filin de lumière à travers le gaz sombre de la peur qu'il suscitait en moi comme en tout être humain. C'était cette lumière et cette grâce qui me calmait et m'attirait vers lui. C'était une intuition, un sentiment ténu qui m'échappait pour l'instant, car il y avait trop de mystère autour de lui, et la certitude qu'il y avait quelque chose à trouver, que j'avais raison de chercher. Je voulais découvrir ce qu'il était. Et j'étais pressée de le découvrir.
_ « Sérieusement, Ella, comment as-tu pu mettre ta voiture dans un tel état ? T'as foncé dans un mur ou quoi ? » me demanda mon ami.
_ « Dans du marbre, plutôt ! »
_ « Quoi ? »
_ « Laisse tomber ! Tu crois que tu pourrais m'aider à trouver une voiture pas trop chère ? » demandai-je.
_ « Tu peux déjà commencer à les regarder si tu veux ? »
_ « Quoi ? Tu en as déjà ? »
_ « Toi, ton passe-temps c'est la photo, et moi c'est de retapé des voitures. »
_ « Je croyais que c'était de terroriser les braves gens sur ton impétueuse bécane ? »
_ « Ca aussi ! »
Il m'emmena dans un garage de tôle parmi le cimetière de voitures entassées dans lequel était actuellement entreposées trois voitures. A côté de l'une d'elle des chiffons et des outils étaient dispersés, momentanément abandonné lorsque j'étais arrivée pour entendre le verdict quand à l'espérance de vie de ma chère voiture.
_ « Tu penses vraiment que tu réussiras à la retaper ? » interrogeai-je, sceptique.
_ « je l'ai bien fait pour celles-là ! » indiqua-t-il en désignant d'un ample geste des bras les deux autres voitures , aussi fier que s'il étalait un trésor.
_ « Elles devaient être en meilleur état, non ? Non ? Et elles roulent ? »
_ « Tu veux essayer ? » demanda-t-il, visiblement ravi que je lui donne une occasion de me faire une démonstration de ses petits bijoux.
« Choisis celle que tu veux ! » proposa-t-il.
J'inspectais avec soin les deux véhicules.
_ « Celle-ci ! » décidais-je en laissant trainer mes doigts le long de la ligne de la carrosserie d'une voiture noire. Une Chrysler Lebaron.
_ « C'est parti ! » clama-t-il.
Il m'ouvrit la portière côté conducteur, me tendant les clefs de contact. Lorsque je tournais les clefs dans le contact, le moteur se mit en route aussitôt et ronronna comme un félin, ce qui me changea des pétarades et vrombissements de feu mon pick-up.
_ « Fais toi, plaisir ! La pleine et entière satisfaction du client est ma seule publicité ! » plaisanta mon passager.
Le lendemain j'avais donc une nouvelle voiture quand je me rendis en cours. On était au milieu du cours lorsque je reçus un mail de mon patron qui m'intimait d'être dans son bureau à midi pile. Mr. Kelman était un patron exigent et qui savait ce qu'il voulait, sans se tracasser des formes et des usages avec ses employés qui se devaient d'être irréprochables, productifs et professionnels. Il n'attendait rien de moins que de l'excellent et, en général, être convoqué dans son bureau n'était pas une bonne nouvelle. Je suivis donc le reste de mes cours en me rongeant les sangs. Ce n'était pas le moment de me faire virer ! Je sortis en trombe de la fac et arrivée à mon bureau à midi trente secondes.
_ « Vous êtes en retard. » gronda Mr Kelman qui arrivait devant moi.
_ « J'ai fais aussi vite que j'ai pu, mais... » tentai-je de me justifier.
_ « Dans mon bureau, toute suite ! »
_ « Oui, Monsieur ! » glapis-je, en le suivant.
_ « Fermez la porte ! » ordonna—il. J'obéis sans attendre. Il ne me proposa pas de m'assoir. J'aurais voulu m'enfuir, me cacher à des profondeurs sous terre, pour échapper à sa colère et à la mauvaise nouvelle qui m'attendait.
_ « Vous avez du talent ! » _ « Non, ne me renvoyez pas, s'il vous plaît... »
J'avais amorcée mes supplications au moment même où il avait ouvert la bouche, et, de ce fait, je mis une seconde à comprendre ce qu'il venait de dire. Je n'étais pas virée ! Et mieux encore, j'avais... du talent !
_ « Je ne vais pas vous renvoyer Mars. En fait, je pensais vous promouvoir. »
_ « Me promouvoir ? »
_ « Je vous offre une chance de faire la ouverture de notre prochain numéro. Voyez ça comme une promotion. »
_ « La couverture ? » répétai-je, abasourdie.
_ « Oui. Si vous réussissez. Et par là, j'entend faire mieux que les autres : vous n'êtes pas la seule que j'ai mis sur ce coup. Ce sera à qui fera le meilleur travail. Bien sûr, vous gagnerez un peu plus... Fernando Cruze organise un grand festival sur l'histoire et sur les Arts. Un festival extrêmement important et qui aura des échos dans le monde entier. Il va se baser sur l'histoire et la richesse intellectuelle que renferme la Grande Bibliothèque de la ville. Commencez par là et montrez moi le Festival dans toute sa grandeur, son innovation et son universalité, compris ? Vous avez une journée, le Festival ouvre ce soir. Vous m'avez bien compris ?»
_ « Oui. Oui, parfaitement ! Merci beaucoup ! Je suis sûre que je ne vous décevrais pas ! »
_ « Je l'espère ! »
Folle de joie, trop impatiente de commencer, je ne retournais pas à la fac et roulais directement jusqu'à la Grande Bibliothèque Nationale. Il fallut débattre pour que j'obtienne l'autorisation de fouiller dans les réserves. Je pris tout de même le temps de visiter, sans oublier de prendre des photos.
C'était un très ancien chef d'œuvre de l'architecture qui avait autrefois été un musée et qui avait pu gardé une part de ce rôle. On aurait cru à une Cathédrale, une église entre vieux-russe et gothique. La bibliothèque s'étend ait tout en longueur et comptait deux étages, ainsi que la réserve en sous-soul. Un long et unique couloir la traversait en sa longueur. Quatre escaliers menaient à chaque étage. On comptait trois vastes salles de chaque côté de ce couloir central, soit six salles par étage. Les trois salles du même côté du couloir principal étaient chacune reliée par des portes communicantes. Des rangées ordonnées regorgeant de livres filaient du sol au plafond tout au long de chaque salle, dans laquelle la lumière se répandait par de grands vitraux colorés. Une enfilade de grandes tables de chêne coupée la selle en un couloir. Des murs étaient tapissés de livres, d'autres décoraient de tableaux, de photos ou de sculptures. Dans ses réserves se trouvaient également les archives de toute la ville. Cette bibliothèque avait beau être nationale, elle comptait des mécènes collectionneurs, chercheurs et passionnés d'histoire et de littérature.
J'allais prendre en photo un petit tableau, accroché à l'un des murs de l'escalier en fer qui menait à la réserve, affinant la netteté de l'image lorsque je restais interdite. Sur la toile figurait un personnage que j'aurais pu reconnaître entre mille. Je hoquetais de surprise, reculant en tanguant, les jambes sciées. Je manquais de tomber sur les fesses dans l'escalier. Je me relevais, m'accrochant par précaution à la rampe, et vérifiais la date de réalisation du tableau. Paris, 1789.
Je crus défaillir. L'une des filles des Summers se tenait là, dans son cadre de bois aux enluminures dorées, me regardant de ses beaux yeux clairs (!). C'était un tableau de famille réalisait il y avait deux cents vingt ans et pourtant la jeune femme aux long cheveux blonds n'y était pas plus vieille qu'aujourd'hui. Je ne pouvais pas le croire. Ca ne pouvait pas être vrai ! Même après toutes mes certitudes, tout ce dont j'avais été témoin, je ne pouvais pas digérer ça. Ca ne pouvait être qu'une erreur. Sur l'étiquette en bas du petit tableau était inscrit la date, le titre, le nom et les dates du peintre et une note explicative. Le nom de la famille immortalisée à jamais y figurait. Je me précipitais dans le réserve, fouillant frénétiquement le registre. Lorsqu'enfin je trouvai ce qu'il me fallait, je cherchai nerveusement dans les piles de document de l'étagère, en fis tombée maladroitement quelques uns. Et quand enfin, je trouvais ce que je cherchais, je fus pris d'hésitation. J'avais peur de ce que je pourrais trouver dedans. Si ce n'était pas une erreur, alors quel genre d'êtres pouvaient bien être les Summers ? Comment cette fille pouvait encore avoir l'air si jeune ? Et ses yeux ? Il y a deux siècles ils étaient bleus et voilà qu'aujourhui (si tentais que ce soit bien la même personne !), ils étaient noirs ! Quel âge avait réellement Edouard ? Je fini par ouvrir la pochette, le cœur battant. Je me débattis avec le fermoir. A l'intérieur de la pochette il y avait divers papiers jaunis et des représentations de tableaux tels que des portraits ou des tableaux de famille. Il n'y avait pas d'erreur ! Il s'agissait bien de la fille des Summers. Désiré Rose Lenôtre était inscrit sur l'acte de naissance de la baptisée. Apparemment, ses parents étaient de riches et grands voyageurs. Sa famille avait vécu en Inde, en Egypte, en Amérique et en divers pays d'Europe... il y avait de cela plus de deux siècles !
_ « Oh non ! » murmurai-je pour moi-même en découvrant un exemplaire d'un avis de disparition dans le journal parisien. Elle était âgée de dix-neuf ans. L'âge qu'elle avait officiellement à notre époque. Le tableau avait été peint l'année de sa disparition alors qu'ils venaient fêter les fêtes de Noël à Paris après deux ans aux Indes. Que lui était-il arrivée ? Que c'était-il passé pour qu'elle disparaisse ainsi ? L'article rapportait également qu'un prêtre, le précepteur de Désiré Rose, avait disparut quelque temps auparavant lorsqu'ils étaient encore en Inde. Je trouvait également l'extrait de décès de son mari. Il l'avait presque suivit dans la tombe. Un article de journal relatait même qu'on avait retrouvé son corps écharpé dans le bois alors qu'il participait à l'une des battues organisées pour retrouver sa femme. D'après ce même article, trois autres personnes venues aider pour les recherches avaient également été retrouvées mortes, assassinées avec une grande violence. Parmi eux un capitaine de police, laissant une femme et quatre enfants dont un bébé.
_ « Il est presque deux heures du matin, où est passée Ella ? J'ai besoin de ses photos maintenant ! Il faut que je boucle tout pour lancer les impressions ! Lauren ? » grondait M. Kelman, qui se dirigeait à grands pas vers son bureau, d'où il avait une vue parfaite de l'ensemble des bureaux.
_ « Mais, elle vient de vous les déposer, Monsieur ! Les voilà ! » La secrétaire tendit une enveloppe kraft.
_ « Elle est déjà repartie ? » demanda-t-il, étonné.
_ « Oui, elle m'a juste remis les photos. Elle n'avait pas l'air bien... »
_ « J'espère qu'elle ne va pas tomber malade. Ce ne serait vraiment pas le moment ! »
Et il referma la porte derrière lui, faisant claquer les stores de plastiques.
Je tournais à nouveau dans le couloir de droite, une tasse de café fumante dans les mains cette fois. Je poussais la porte de service et le froid humide me fit grelotter. Mes doigts n'étaient pas très assurés autour du gobelet en plastique marron, tremblant, pas tant de froid que parce que j'étais de plus en plus nerveuse.
Sous le coup de ma découverte dans la réserve, j'étais remontée à la lumière de l'étage dans un état apathique. Toute cette histoire m'effrayait soudain, et j'aurais voulu ne rien savoir. Cette dernière information sur les Summers était trop étrange, même pour Edouard et sa famille, et trop irrationnelle, même pour moi. Je refusais tout bonnement de le croire, fuyant l'évidence que j'avais moi-même mise à jour.
Après trois gobelets de café et plusieurs minutes à tourner en rond, tremblante comme une feuille et blanche comme un linge, je m'étais précipitée aux toilettes pour vomir et m'asperger le visage. Ensuite seulement, je me remis d'aplomb, me concentrant corps et âme sur mon travail, sur les photos qu'il me faudrait déposer cette nuit sur le bureau de mon patron. Une fois satisfaite de mon travail, je m'étais rendue au studio, musique à fond pour m'empêcher de revenir à cette vérité latente que j'avais fait sortir et qui, maintenant, allait continuer à m'attendre dans mon petit cerveau, refusant de me laisser revenir en arrière. Elle ne me laissait aucun répit, m'empêchait de me rétracter. Malgré tout mes efforts, je ne pouvais empêcher ma tête de récapituler chacune des fois où j'avais vu Edouard,où je lui avais parlé : en cours, la cafeteria, dans les couloirs. Et dehors, toujours dans les coins d'ombres bien qu'il n'y ai de toute façon plus de soleil depuis... depuis cette veille de rentrée, la première fois où j'ai rencontré Edouard. Quand ma soeur et moi étions sorties de l'épicerie, il n'y avait plus de soleil et il faisait aussi sombre que si la nuit était tombée. Depuis, le ciel restait toujours aussi gris et l'on finissait par se demander si le soleil existait vraiment. C'était une des caractéristiques naturelles de ce coin, été chaud et sec, et dès que l'automne arrivait le soleil disparaissait jusqu'au printemps. Mais c'était le climat, et les Summers n'avaient rien avoir là-dedans.
Soudain,mon pied dérapa, glissa sur une plaque d'égout que je n'avais pas vu et je tombais sur l'asphalte rugueux et mouillé. J'étais tombée sur les mains, qui saignaient maintenant, ainsi que mon genoux. Je me relevais péniblement, gémissant au vue de l'état de ma robe blanche, maintenant sale et mouillée. Ce ne fut qu'à cet instand que je ressentis à nouveau la brûlure du froid. Cette brûlure qui ne devait rien à la température mais à la présence des Summers. Cette fois, alors que mes yeux ne trouvaient aucune trace d'une quelconque présence humaine, j'eus vraiment peur. Depuis combien de temps était-il là à m'observer ? Lequel était-ce ? S'il n'était pas dangereux pourquoi se cachait-il ? De toute façon, que pouvais-je faire contre lui ? Il avait démolit ma voiture... Je me précipitai à l'intérieur de l'immeuble, montai quatre à quatre les escaliers et me dirigeais droit vers mon bureau, sans me soucier de Lauren, perplexe. Il me sembla que le moteur de recherche mis des heures mais quand enfin il répondit à ma recherche j'étais sûre de ne plus me tromper. Avant même de lire les résultats, avant même qu'ils ne s'affichent, je savais. J'avais lu des livres, vu des films sur eux, comme tout le monde. Je m'étais documentée sur eux pour mes cours ou pour mon plaisir. Des histoires... Mais pourtant il avait tous les indices : la peau blanche et froide comme les morts, une force et une vitesse incroyable, vivant depuis des centaines d'années sans vieillir et fuyant le soleil... ca ne pouvait pas être ça son secret ! Ca n'existe pas...
_ « Les Vampires ! »
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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Re: [sans titre]
Troisième chapitre :
- Spoiler:
- Je sursautai si fort que j'en bondis de ma chaise, jetant du café froid plein la chemise d'un illustre inconnu. Je regardais, hébétée, le gobelet en plastic marron tordu que je tenais toujours à la main, s'en m'en être aperçue. On ne peut pas penser à tout quand on est prise de panique. Je levais les yeux vers le propriétaire de la chemise autrefois immaculé. De toute évidence, il était fortuné : ce costume devait coûter une fortune au vue du tissu et de sa coupe impeccable. Et il avait d'adorables fossettes. C'était un homme d'environ trente ans, peut-être moins, le visage auréolé de soyeux cheveux châtains. Son visage, marqué par quelques rides inquiètes, était illuminé par des yeux très bleus. Il avait une légère cicatrice au coin de son oreille et de son oeil. Elégant. Et d'une netteté parfaite jusqu'à mon accident. J'avais l'impression qu'il venait tout juste de sortir d'un film romantique.
_ « Oh ! Euh... je suis désolée ! » balbutiai-je, en jetant prestement le gobelet à la poubelle.
_ « Moi aussi : je déteste ne pas être impeccable. Ca m'embête beaucoup d'avoir à renvoyer mon photographe préféré... » sourit-il.
_ « Me renvoyer ? » glapis-je.
_ « Sauf si vous acceptez que je vous offre un autre café en échange de celui-là ! »
_ « Quoi ?! »
_ « Je plaisante ! »
_ « Pour le café ? »
_ « Pour ça, et pour votre renvoi. » ria-t-il.
J'en restais pantoise ! J'avais un enfant en face de moi ! Et d'abord comment pouvait-il s'imaginer qu'il allait pouvoir me renvoyer ? La situation était complètement absurde !
_ « De toute façon, vous ne pourriez pas me renvoyer. Vous n'êtes pas mon patron et je ne travaille pas pour vous ! »
_ « Et le patron de votre patron ? »
_ « Vous... Vous êtes... Vous êtes notre nouveau patron ? » demandai-je, avec un rire nerveux, puis complètement horrifiée. « Oh ! Je suis vraiment désolée ! Mais euh... Qu'est-ce que vous faites ici à trois heures du matin ?!?» m'étranglai-je.
_ « Je viens juger de ce que j'ai racheté. »
_ « A cette heure-ci ? »
_ « Oui. Mais, en effet, je ne suis certainement pas venu au meilleur moment pour trouver mes employés affairés ! » plaisanta-t-il en désignant d'un coup d'oeil l'écran de mon ordinateur sur lequel apparaissait encore le résultat de ma dernière recherche sur le web : la confirmation de la véritable nature d'Edouard Summers.
_ « Non, non, non ! Ce n'est pas du tout ce que vous croyez ! »
_ « Vraiment ? Vous savez ce que je crois ? »
_ « Non, mais quoi que vous puissiez croire, vous vous trompez. D'ailleurs, je peux tout vous expliquer ! » Phrase que je regrettai aussitôt puisqu'inévitablement, mon patron , tout ouïe, leva un sourcil attentif à mon explication. Je fus donc obligée de trouver une excuse au plus tôt.
« Je... Je cherchais une idée de photos et... »
_ « Les vampires vous ont semblé les plus indiquer de par leur nature surnaturelle ? » finit-il pour moi. « Vous savez que les vampires n'existent pas ? » interrogea-t-il.
_ « Oui, bien sûr que je le sais ! Mais vous apparemment vous ne savez pas laisser les gens finir de parler ! Si j'ai pu faire des recherches sur les vampires c'est simplement parce qu'il fallait que je note quelque chose et... »
_ « Et les vampires sont la première idée que vous ayez eu ? » demanda-t-il sardonique.
Gagné ! Mon patron me prenait pour une folle et tout ce que je trouvais à dire pour le démentir c'était : « Je suis sûre que les vampires feraient un très bon sujet de photographies. On pourrait même en faire une exposition, qu'en pensez-vous ? »
_ « Je venais de finir de lire un livre avec des vampires. Ceux sont des êtres extra-ordinaires et l'actualité nous démontre encore qu'ils n'ont pas vieillis : il y a des tas d'histoires et de légendes sur eux, des livres, des films, etc, seulement, tout le monde a repris les même schémas. Mais je suis sûre qu'il y aurait des tas d'autres choses à montrer sur les vampires, des aspects que l'on ne traite pas ou plus... Et puis, on en trouve pas à tout les coins de rues...» me défendis-je maladroitement, bien que le dernier point de mon plaidoyer ne fut pas exact.
Mon patron sourit.
_ « Je m'appelle Ella... »
_ « Mars, je sais. J'adore ce que vous faites ! Je vous l'ai dit, vous êtes mon photographe préféré. » rappela-t-il sur un ton chaleureux.
_ « Merci. » lui rendis-je.
_ « Vous êtes aussi mon photographe préféré parce que vos clichés ont fait augmenté nos ventes. »
_ « Et vous vous appelez ? » insistai-je.
_ « Oh ! Navré ! Je m'appelle Joaquin Prince. » avoua-t-il avec une courbette.
_ « Prince ? » répétai-je. Normal qu'il n'était pas trop pressé de le révéler. Après un été avec Summer, une escapade dans les bois avec Wolf, ou une visite chez notre chère Paris, voilà notre Prince les filles !
_ « On s'y fait avec les années. » ajouta-t-il. « Vous savez, ça aurait été un bon sujet, s'ils avaient existé. Et si ils pouvaient apparaître sur les photos !Si vous en rencontrez un un jour, rappelez-vous ce projet, je serais ravi de voir vos photos ! » me lança-t-il, avant de s'éloigner lentement. Je le fusillais. C'était sincère mais je n'appréciais pas ce commentaire. Chaque allusion à eux était une pique que je n'appréciais pas. J'éteignis mon ordinateur, saisis à la volée veste et sac et quittai l'étouffant bureau.
A la sortie, je ne fus presque pas surprise d'apercevoir un des Summers. En revanche, ce n'était pas le membre de la famille auquel je m'attendais.
_ « Je peux faire quelque chose pour vous ? » demandais-je de la voix la plus détachée dont j'étais capable à la femme qui se tenait face de moi dans un trois-quart beige. Cependant, je continuais à avancer, sans accélérer, emmitouflée dans ma veste qui ne m'aidait en rien contre le froid humide qui me transperçait.
_ « Il fait froid ce soir. » dit seulement la voix lointaine de madame Summers.
Je frissonnais. Cette voix légère accentuait paradoxalement le fait qu'elle était effroyablement plus forte que moi.
_ « Que puis-je faire pour vous ? » répétai-je.
_ « Vous savez qui nous sommes, n'est-ce pas ? » interrogea la mère d'Edouard. Elle était calme, quoiqu'inquiète. Ou n'était-ce que l'impression que me donnaient ses yeux sombres vrillaient dans les miens ? Je me rappelais de respirer. Elle semblait tendue, pressée, comme si elle redoutait quelque chose. Son coeur aurait certainement battu trop vite s'il pouvait encore... je palis à cette idée. Je ne pouvais pas associer l'image de cette femme si belle, si saisissante, à l'idée d'un être mort – un corps mort tout du moins. Je la dépassais. Je frissonnais lorsqu'elle me suivit. Ne comprenait-elle pas que plus elle me poursuivait, plus elle m'effrayait et plus j'aurai voulu crier, dire la vérité !
Je pensais aux victimes, à ces innocents vidés de leur sang, arrachés brutalement à la vie, sucés jusqu'à la moelle. Etait-ce douloureux ? Très certainement. Je sentis la peur me saisir à la gorge. Les battements de mon coeur battaient maintenant de façon déraisonnée. Je savais qu'elle les entendait parfaitement mais elle ne ralentit pas. Elle continuait d'avancer à mesure que j'essayais de mettre le plus de distance possible entre elle et moi. Sans m'en rendre compte, j'avais pressé le pas. Mon corps avait prit le pas sur ma tête. M'enfuir ne servait à rien, elle pourrait toujours me rattraper. J'accélérais encore. Lorsqu'enfin je pus distinguer ma voiture, je m'obligeais à ne plus la quitter.
La mère d'Edouard n'en démordait pas. J'entendais son pas accéléré à la mesure du mien, son souffle pressant. Je la sentais dans mon dos, presque suppliante. Elle avait peur pour le secret de sa famille et voulait le protéger de moi. Elle aurait donné sa vie pour protéger sa famille. Mais comment pouvais-je à ce moment atteindre à sa vie alors qu'elle pouvait me rattraper d'un bond ? Qu'il lui faudrait moins d'une seconde pour me tuer et s'en aller ? Je sentais les larmes piqués mes yeux mais j'avais déjà l'impression d'être loin. Plus elle se rapprochait de moi, plus je me sentais engourdie de froid.
Je n'eus pas la force de me retourner, ni de dire quoique se soit. Je m'engouffrais dans ma voiture, et allumais immédiatement le moteur. Mes phares l'éclairèrent bientôt et le moteur vrombit lorsque j'appuyais sur la pédale. Ni mon coeur, ni le sang qui me battait les tempes ne se calmèrent. Les larmes brouillaient ma vue. Cependant, je vis distinctement son visage suppliant, torturé. Elle avait l'expression du supplicier sur le bûcher. Il aurait suffit d'une promesse de ma part pour apaiser son angoisse. Mais je ne pouvais pas la lui donner. Elle amorça un geste. J'appuyais sur la pédale en réflexe de survie. La voiture démarra en trombe et rejoignit la route sans perdre de temps.
Il faisait encore bien nuit lorsque je me garais sur le parking de la fac. Je m'affalais, la tête sur le volant, secouée de sanglot. Il m'avait parut évident qu'Edouard était plus qu'un être humain, au moment même où je l'avais rencontré. Mais je n'avais eu aucune idée de ce qu'il était, de ce à quoi je devais m'attendre. J'avais certes sentis une menace quand à ma soeur mais je n'avais pas pu imaginé Edouard comme un méchant. Je n'avais pas cherché à le fuir à la fac: je ne m'étais jamais sentie en danger avec lui. En dehors de ses menaces sans effet, il ne cherchait pas non plus à m'éviter. Il ne faisait rien pour me rencontrer mais, si cela arrivait, il ne m'évitait pas. Pas comme il avait pu le faire au début de l'année.
Je m'étais persuadée que si j'avais cherché son secret, que j'avais tant désiré connaître la vérité c'était pour protéger ma soeur. Savoir ce qui la menaçait, la raison pour laquelle Edouard avait été pris de cette haine violente lorsqu'elle était arrivée. Mais ce n'était qu'une excuse derrière laquelle m'abritait. Car ma réelle motivation était beaucoup moins noble... et complètement folle et inconsciente.
Je voulais connaître son secret parce que je voulais tout bonnement savoir qui il était. Je voulais le connaître. Et plus irrationnel encore - plus terrifiant aussi selon le point de vue – je voulais le connaître parce que je l'aimais. J'étais amoureuse d'Edouard. Je ne le voyais pas comme un vampire, mais comme une personne. Peut-être avais-je humanisé Edouard en lui attribuant des sentiments et une conscience morale qu'il n'avait finalement pas. Mais je ne pouvais pas le croire. Je n'avais pas inventé le Edouard dont j'étais amoureuse. J'étais sûre qu'il était là. J'avais beau ne pas savoir ce qu'il était, je savais qui il était. J'avais conscience de tout depuis le début. Je savais qu'il n'était pas humain mais quelque chose de plus grand et de plus beau, aussi parce qu'il était... mortel ! Je ne voulais pas m'arrêter à ça. Ce n'était qu'un crucial, minuscule, infime et tout petit détail ! Edouard était dangereux, ma première rencontre avait suffit pour que j'en ai la certitude. Il pouvait tuer. Me tuer. Cependant, je restais convaincue qu'il n'était pas qu'un vampire sanguinaire. Il ne me ferait pas de mal, pas après toutes les occasions que j'ai pu lui offrir sans le savoir et dont il n'avait même pas essayé de profiter.
J'avais plutôt dans l'idée, que c'était une autre Mars qui risquait d'être en danger. Il pourrait tuer ma soeur. Peut-être même le voulait-il et que c'était ça qui l'avait poussé à partir dans l'épicerie. On pouvait faire plus discret que de tuer une jeune fille en public. A cette pensée, une part de moi-même voulu avertir les gens – par n'importe quel moyen – afin qu'ils sachent que les Summers pouvaient s'avérer dangereux, qu'ils soient prévenus, qu'ils aient une chance d'en réchapper, de protéger leurs familles. Pourtant, ils étaient arrivé depuis la rentrée et personne n'avait parler de morts ou de disparitions étranges, dues à des animaux ou ce genre de chose. Même s'ils étaient partis plus loin, il était probable qu'on en est entendu parlé, par les médias par exemple.
En vérité, je n'avais pas l'intention de révéler à qui que ce soit la véritable nature des Summers. Je ne voulais pas leur attirer d'ennuis. Et, plus égoïste, je ne voulais pas qu'on me prive d'Edouard.
Je leur faisais confiance. Ou, tout du moins, je faisais confiance à Edouard. Je savais ce qu'ils étaient. J'avais la confirmation de ce qu'ils étaient capables de faire. Mais je savais aussi qu'ils ne me feraient rien. Edouard ne me ferait aucun mal. J'avais confiance en lui, d'une façon irrationnelle et inconditionnelle. Mais, pour autant, je devais savoir quel danger il représentait pour ma soeur. Qu'il ne veuille pas lui faire de mal, signifiait-il qu'il ne le ferait pas ? Jamais ?
Dernière édition par Ely Julia le Dim 27 Déc 2009 - 22:32, édité 1 fois
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Re: [sans titre]
Troisième chapitre (suite) :
- Spoiler:
- Lorsqu'arriva l'heure des cours, j'étais toujours trop frigorifiée pour sentir les picotements qui me traversaient. Cependant la sensation se fit plus glacée et les picotements plus brûlant. Mes yeux, devançant ma pensée, cherchèrent autour de moi l'un des Summers. Je l'ai vi à l'autre bout du parking. Enfin, je Le vis surtout. Il était toujours aussi beau, resplendissant. Son regard rencontra le mien et, pour la première fois, osa s'y arrêter. Toute la famille devait savoir que j'avais fini par arriver au bout de mes espérances. Le docteur Summers leur avait-elle aussi la scène de l'autre soir ? Une masse floue et piaillante mit grossièrement fin à cet espèce de dialogue muet. Au désespoir, je dus m'en retourner en direction du bâtiment des Sciences. Très vite, je me retrouvais happer par un petit lutin bleu marine aux longs cheveux bruns.
_ « Félicitation ! » pépia Laura.
_ « Pourquoi ? » demandai-je surprise.
_ « Quoi ? Tu n'es pas au courant ? »
_ « A ton avis, si je pose la question ? »
_ « Mais dans quel monde est-ce que tu vis ? » s'exclama-t-elle en me tendant un magasine.
_ « C'est exactement ce que je me demandais ! » répondis-je distraitement.
Je dépliais la revue. Opra ? C'était le journal dans lequel je travaillais. Il me fallut une seconde pour me rendre compte que je connaissais la photo de couverture. Je vérifiais le nom inscrit en bas de la photographie au moins deux fois. C'était bien mon nom. J'avais pris cette photo ! J'avais fait la couverture !
Le bâtiment des sciences était un grand cube de béton blanc dont les murs étaient de grandes baies vitrées. Maintenant, je savais pourquoi je n'avais jamais vu un Summers dans ce bâtiment. Toutes les salles laissaient entrer la lumière du jour. Pour autant, le soleil n'était jamais visible ici en automne. On se serait cru la nuit en plein jour pendant la moitié de l'année. Particulièrement aujourd'hui d'ailleurs. Le ciel n'était qu'une épaisse masse informe et basse, plus gris que les trottoirs. J'eus froid toute la journée. J'avais beau savoir que cette morsure n'avait rien avoir avec la température, je ne pus m'empêcher de me plaquer le plus possible contre le radiateur. J'avais besoin de chaleur, et c'est chez un vampire que j'allais la chercher.
Lorsqu'Edouard sortis de son cours de sémantique, il parut à peine surpris de me voir, seulement contrarié. Je ne lui laissais pas le temps de dire quoi que se soit. Je pris le chemin de la sortie, montais dans ma voiture et ouvris la portière côté passager. Je le voyais déjà ouvrir la portière de sa voiture. Je le vis hésiter, mais je n'eus pas besoin de klaxonner pour que ma portière se referme. Il n'avait jamais été aussi proche et je ne m'attendais pas à ce que le froid sur ma peau se fisse si brûlant. Cependant, je me doutais que mon coeur se mettrait à battre à tout rompre et cela n'y manqua pas. Le fait d'avoir conscience qu'il l'entendait, n'arrangea rien et je rougie jusqu'au blanc des yeux. Lui ne put retenir un sourire malgré son air embarrassé. Un sourire navré ! Il était en colère contre moi. Je le voyais à sa façon de se tenir parfaitement immobile, le plus loin possible de moi, le visage tendu en fixant un point droit devant lui travers le pare-brise. Il adoptait toujours cette posture quand je l'insupportais – c'est à dire quand j'essayais d'obtenir des réponses. Pour la première fois, je regrettais. Mettais-je – ou avais-je mis – ma relation naissante avec Edouard en danger ? Si j'avais renoncé, notre entente s'en serait-elle trouvée moins fragile ? Je me concentrais de plus belle sur la route. Il le vit et dut le prendre pour une quelconque peine car de nouveau je vis son air affligé, désolé. Il souffrait : il devait avoir peur que je ne les dénonce, lui et sa « famille ». Je me mordis la lèvre et réfrénai mon désir de m'arrêter tout de suite pour lui dire la vérité. Mais cette route était trop fréquentée pour cela et je préssentai que je ne pourrais pas l'affronter et me concentrer sur la route en même temps.
_ « Voudrais-tu bien rouler plus vite ? » demanda-t-il d'une voix pressante.
_ « On est bientôt arrivé. » indiquai-je, cherchant à le calmer.
Il serra les dents à son tourd, et je me sentis coupable. Je m'arrêtais soudain, sur le bas côté de la route. Je descendis. Il fit de même. Nous pénétrâmes dans la forêt. Je savais où j'allais. J'avais décidé de l'amener à l'endroit le plus isolé que je connaissais. Tout ce qui arriverait resterait secret. Je voulais qu'il voit que je lui faisais confiance et que je n'avais pas à avoir peur de lui. L'endroit était humide et la lumière ne pénétrait qu'à peine à travers les nuages bas et le brouillard. Le sol était glissant, boueux sous le lit des feuilles mortes et des branches. Les arbres étaient nombreux, serrés si bien qu'ils finissaient par se nouer les uns aux autres. La mousse y proliférait. Je connaissais bien le chemin mais je ne voyais pas bien, si bien qu'il nous fallu longtemps pour arriver à l'endroit voulu. Je sautais dans un vaste trou qui était autrefois un cratère d'obus, l'un des stigmates les plus visibles de la guerre dans cette grande ville. Le dénivelé qui m'entourait me sembla bien haut tout d'un coup, d'autant qu'il était glissant. On entendait un ruisseau pas très loin. Ca ne faisait pas tant film d'horreur que ce que j'avais craint. J'aurais bien préféré que l'on discute autour d'un chocolat chaud chez moi mais je m'étais dit que ce ne serait pas très judicieux.
_ « Comment connais-tu cet endroit ? »
_ « J'aime bien me balader et ça m'amène parfois dans de drôles d'endroits. »
Je ne savais pas par où commencer. C'est alors que je remarquais l'étrange éclaircissement rouge de ses pupilles sombres. Edouard sembla comprendre ce que je voyais et avoir peur que je m'effraies. Il tenta bien de trouver une justification à cet autre étrange phénomène mais ne sembla rien trouver. J'attendis, sourcil levé, mais l'air peu surprise par l'embarra éloquent qui le torturait. Je le voyais dans toute sa beauté, respirant la lumière et la grâce. Un religieux ne verrait pas un ange plus resplendissant.
_ « Je n'ai pas peur de toi. »
Je ne compris pas la douleur ou la colère qui crispa son visage.
_ « Tu es un vampire, je le sais... »
_ « Et tu m'entraine dans les bois, là où personne ne peut nous voir ? » s'étrangla-t-il.
_ « Je n'ai pas peur de toi. » répétais-je, en commençant à comprendre la raison de sa colère.
_ « Mais tu devrais. » gronda-t-il avec autorité en mettant encore plus de distance entre nous. Cet avertissement avait une tonalité que je ne lui avait jamais entendu. « Tu as bien du te renseigner, non ? Tu es peut-être complètement folle mais tu n'es pas bête au point... Ou ignores-tu délibérément l'expression « buveur de sang » ? »
_ « Non, mais j'ai grandi avec Twillight. » tentai-je de plaisanter pour échapper à la boule d'angoisse qui me nouait la gorge et à l'envie de pleurer. J'évitais soigneusement de le regarder mais sa colère incendiaire me clouait au sol, m'écrasait sous la pression.
Il me fusilla du regard.
_ « Mais, enfin, n'as-tu pas assez été témoin de ce dont on est capable ? Pense un peu à ta soeur ! »
_ « Justement, j'y pense ! » répliquai-je. « Je sais que tu ne me feras rien. Mais je sais parfaitement que tu déteste ma soeur. Si je n'avais pas découvert ton secret tu ne me parlerais pas et je n'aurais eu aucun moyen de savoir quel danger menace Ariel. J'ignore pourquoi, mais je sais que tu n'as aucun mal à rester avec moi. Je te sens tout le temps autour de moi, à me suivre... »
_ « Tu le savais ? » me coupa-t-il, interloqué. De surprise, il était venu vers moi. On se retrouvait maintenant à un pas ou deux l'un de l'autre.
_ « Mon chien te sent. Il ne t'aime pas beaucoup. De manière générale, il n'aime pas qu'on rode trop autour de la maison. Enfin, j'en ai déduit que c'était toi – ou un autre vampire – parce que je sens votre présence. Ca vaut pour chacun des membres de ta famille. C'est une sensation de brûlure comme si ma peau était mordu par un froid intense... »
Il rit de cette nouvelle, les yeux brillants.
_ « Je suppose que ça n'est pas proprement habituel ? Tu aurais une explication ? »
_ « Non, aucune. Mais l'on cherchera. »
_ « De toute façon, j'ai toujours su que quelque chose clochait chez moi. » riai-je.
_ « Tu penses que tu as un problème parce que tu arrive à sentir notre approche, mais ne pas avoir peur de rester seul à seul avec un vampire ça te semble tout à fait normal et raisonnable ? » grogna-t-il, choqué.
_ « Ben, comme tu viens de le confirmer, je ne suis pas tout à fait normal. Et si je l'avais été, je pense que je n'aurais peut-être pas essayé de savoir qui vous étiez. Et puis, je n'ai jamais dit que c'était raisonnable. C'est même le truc le plus inconscient que je n'ai jamais fait de toute ma courte vie, et pas seulement parce que d'habitude je suis plutôt une fille sage et raisonnable. Mais... »
Evidemment, il allait encore essayer de couper court à cette autre tentative. Aussi, allai-je plus vite que lui :
_ « Si tu étais réellement dangereux pour moi tu ne resterais pas à deux pas « humains » de moi alors que tu as soif... »
_ « Comment sais-tu ? »
_ « Tes yeux. Ils sont noirs. Mais quand tu as faim ils deviennent rouges. Pas quelque chose de voyant ! Non, c'est discret, comme si tu avais une lentille sombre par-dessus. Et puis, tu es plus bougon quand tu as faim. Tu as toujours des sautes d'humeurs ! » dis-je, en grimaçant. Ce qui le fit rire.
_ « Tu m'as longuement observé... »
_ « Pas autant que toi !... Et pas autant que j'en aurais envie. » avouai-je.
Il ne me réprimanda pas cette fois. De toute évidence, il était obligé d'admettre que je pouvais m'appuyer sur des raisons rationnelles.
_ « Tu n'as pas d'odeur. » lâcha-t-il.
_ « Comment ça ? »
_ « Aucun des membres de ma famille ne sent ton odeur, moi y compris. C'est pour ça qu'il m'est si facile de ne pas vouloir goûter à ton sang. »
_ « Bien, dans ce cas, je prendrais ça comme une bonne nouvelle. J'avoue que cela ne faisait pas partie de mes hypothèses. J'ai donc vraiment un problème ! »
_ « Des hypothèses ? »
_ « Oui, comme votre régime alimentaire. Dis donc, tu pourrais arrêter de tourner autour de moi ! Est-ce que tu aurais été un vautour dans une autre vie ? Tu ne crois pas que j'ai assez couru après toi ? Arrête de m'éviter ! » Le rattrapai-je une énième fois alors qu'il serpentait autour de moi, si bien que j'avais peine à suivre. Lui, il pouvait sans peine se faufiler entre les troncs ! Je profitai qu'il ralentisse son petit jeu pour le retenir. Sauf que ce fut moi qui me retrouvais acculée.
_ « Qu'est-ce qu'il y a ? Tu n'aime pas être la souris ? Ce n'est pourtant qu'un juste retour des choses ! »
_ « Un juste retour des choses ? »
_ « Après ces deux longs mois où tu m'as poursuivis, j'ai bien le droit de te faire un peu tourner en rond à mon tour ! »
_ « Moi, je t'ai poursuivi ? Je croyais que c'était toi le monstre impitoyable et implacable ? Et puis, c'est plutôt toi qui m'a fais tourner en rond avec ton acharnement à protéger ton secret. »
_ « Je vais finir par croire que tu aimes cavaler après moi. »
_ « Tu préfèrerais peut-être que je me retrouve à cavaler avec toi, en tentant vainement de t'échapper ? » répliquai-je en me détachant de l'arbre contre lequel il me tenait coincée pour mieux me rapprocher de lui.
_ « Pourquoi es-tu si difficile à cerner ? »
_ « Moi ? Mais je n'ai pourtant aucun mystère pour toi. Au contraire, je suis très prévisible : tout ce que je souhaite c'est rester avec toi. »
_ « Pourquoi fais-tu cela ? »
_ « Parce qu'il n'y a aucune bonne raison pour que l'on ne puisse pas rester ensemble si c'est ce que nous voulons tous les deux. Et parce que ton petit numéro du grand méchant surnaturel est inutile avec moi. D'autant qu'il n'a été mentionné nul part que des gens avaient disparu ou avaient été assassinés – de façon inhabituelle, non humaine - dans la région depuis la rentrée. Rien, donc, qui pourrait attester de la menace que tu pourrais représenter pour moi et les pauvres quidams qui traîneraient dans les parages. »
_ « Tu as certainement trop lu de livre. Et n'oublie pas que dans toute grande ville comme celle-ci, des gens disparaissent sans qu'on en soit averti. Mais c'est le cas, en effet. Nous ne nous nourrissons que de sang animal. Cependant, ne vas pas nous idéaliser ou nous humaniser ma famille et moi. Nous sommes des tueurs. Nos instincts ne sont pas calmer par notre régime « végétarien », notre conscience est différente de la votre. Ce qui est Bien et ce qui est Mal est différent pour vous et pour nous. Nous n'avons pas les mêmes jugements de valeurs. Boire le sang animal nous permet de conserver nos forces sans jamais complètement satisfaire notre soif. Cela nous permet toutefois de moins éveiller l'attention. Des meurtres ou des disparitions étranges et des personnes qui ne vieillissent pas dans une même ville sont trop de flèches dans notre direction. C'est un des inconvénients lorsqu'on refuse de vouloir vivre caché ! Mais j'irais vider le sang d'un être humain sans remord si je le voulais. »
_ « Vous ne passez pas si inaperçus que ça. Vous êtes trop éblouissants pour être « normaux ». Ca rend les gens mal à l'aise à force d'être éclipsés, c'est pour ça que tout le monde vous évite. »
_ « Comme si nous avions besoin de ça pour vous tuer ! Mais je comprend ce que tu veux dire. Tout en nous est fait pour vous séduire afin que vous baissiez votre garde. C'est ce qu'on appelle « être sous le charme », je crois. Le pauvre agneau vient lui-même se jeter dans la gueule du loup. Et même s'il s'enfuyait, jamais il ne pourrait nous échapper ! » s'amusa-t-il. Il n'était qu'en même pas en train de se remémorer le plaisir de savourer un humain tout frais après ses misérables et inutiles efforts pour se débattre ?
_« En tout cas, j'avoue que cela me rassure, de me rendre compte que tu as réfléchis avant de te dire que tu voulais rester à mes côtés. »
_ « Tu n'as pas compris. C'est vrai, j'y ai réfléchi. Mais ce n'est pas pour ça que je te fais confiance. Aucun fait, aucune explication rationnelle n'y changerait rien : j'ai confiance en toi non parce que j'ai un problème, ou parce que vous ne tuaient d'humains - quelqu'en soit la raison - mais simplement parce que c'est là. Tout ce que je veux c'est être avec toi et ne plus jamais te quitter. Ca n'a rien de rationnel c'est vrai, mais c'est un fait tout aussi important et réel que le fait que tu es un assassin. Je n'ai pas choisi de tomber amoureuse de toi, mais c'est arrivé ! Après tout, j'ai toujours cru que l'amour était le fruit de la chance. Et il est inutile d'insister, je ne peux, ni ne veux y renoncer. Je m'y refuse catégoriquement ! Si tu t'en vas, tu me tueras. » Expliquai-je la voix tremblante. L'angoisse qu'il disparaisse m'était insupportable. C'était un poids énorme qui m'écrasait la poitrine comme une chape de plomb.
J'avais peur. Mais pas pour moi ou le mal qui pourrait m'arriver à rester auprès d'un vampire et de sa famille, mais des conséquences que cela pourrait avoir. S'il m'arrivait quelque chose, cela risquait d'exposer Edouard et sa famille. Aimer Edouard était une chose, c'était le considérer comme ma vie. Mais le faire entrer dans celle-ci était autre chose. C'était ouvrir la porte à ce qui pouvait menacer – et j'ignorais en quelle mesure – la vie de ma petite soeur. Mon égoïsme m'effrayait moi-même et pourtant je ne pouvais supporter de vivre sans lui. Je voulais qu'il reste et j'étais terrorisée à l'idée qu'il disparaisse. J'ignorais quels étaient les sentiments d' Edouard. Je n'avais aucune raison de croire qu'il m'aime, et cela n'avait aucune importance. Je voulais simplement qu'il reste. Chaque seconde avec lui comptait.
_ « Je ne le veux pas non plus. » murmura-t-il. « Je n'ai pas envi que tu t'en ailles. Je n'ai même plus la force de te quitter. C'est pour ça que je te suivais sans cesse. Je ne supportais pas de m'éloigner de toi. Et c'est pire encore sachant que je ne peux te sentir. Cela devient extrêmement frustrant. Lorsque je t'ai vue t'enfuir devant Jane... »
_ « Jane ? C'est comme ça que s'appelle ta mère ? »
_ « Oui. J'ai eu tellement peur que tu sois trop effrayée – à raison - ... »
Je soupirais - presque malgré moi. Mais j'aurais préféré qu'il n'assista pas à cette scène. Je me sentais coupable : je n'ignorais pas la souffrance que j'avais du infliger à cette femme.
« J'ai cru que je t'avais perdu pour toujours. Je me suis bien dit que c'était la meilleure chose qui puisse arriver pour toi, te laisser partir... Loin du danger. » Son visage eut un étrange sourire, à la fois sardonique et douloureux. « J'espérais que tu ne veuilles plus de moi. Je ne m'attendais pas... »
_ « Alors ne cherches pas à m'éloigner, parce que je ne m'en irais pas. Reste !» murmurai-je.
Mon coeur cessa de battre en me retrouvant à quelque centimètres de lui.
_ « Respire ! » me murmura-t-il.
J'obtempérais. Fermais les yeux.
_ « Pourquoi est-ce que vous avez choisi ce mode de vie ? » Nous étions allongés sur la mousse humide et le tapis des feuilles mortes. Nous nous contentions de nous regarder, de mémoriser chaque détail de l'autre comme un trésor. Cela valait mieux en vérité, car j'étais frigorifiée par notre proximité et la peau froide d'Edouard ne m'aurait pas aidée.
_ « Nous ne voulons pas être des monstres. Et puis nous avons été élevés comme cela. Tu sais, nous avons beau être inhumains, les vampires aussi ont des idéaux, même politiques ou religieux. Certains diront que nous sommes des « refoulés », des « frustrés » parce que nous refoulons notre désir de sang humain en espérant sauvegarder notre humanité. Nous n'accepterions pas notre nature de vampire. Ils pensent que nous nions notre nouvelle nature. Les changements physiques, nous ne pouvons les éviter tandis que ces instincts, nous pouvons, même si cela est extrêmement difficile, les refouler, parce que nous ne sommes pas d'accord avec les considérations de nos semblables sur la vie humaine. C'est un renie de notre nature même, quand on sait que nous sommes nés pour tuer. A partir du moment où nous refusons de tuer un être humain nous perdons notre utilité, notre raison d'exister. En réalité, nous ne voulons pas oublier qui nous sommes. Nous avons notre propre morale et conscience, différente de la votre mais sans suivre celle de nos semblables. Nous avons tous déjà tuer beaucoup d'humains, nous restons des tueurs. Mais nous pensons aussi que nous pouvons faire mieux que cela, que nous pouvons être au-dessus de nos instincts. Et j'avoue que c'est très éprouvant avec toi et ta soeur. »
_ « Avec moi ? Je croyais que le fait que je n'ai pas d'odeur rendait les choses plus faciles ? »
_ « Ton odeur ne me tente pas mais cette cécité te rend si inaccessible. Je n'ai pas l'habitude de rencontrer une telle inconnue dans mon appréhension des choses et des gens qui m'entourent. D'habitude, rien ne nous échappe, nous pouvons tout prévoir mais là... Je peux t'entendre bien sûr, te voir bien avant que tes yeux ne me distinguent. Mais si je n'entendais de toi que les battements de ton coeur et si tu es hors de mon champs de vision, je ne saurais même pas que c'est toi. C'est terriblement frustrant ! Devoir compter tous les coeurs qui battent autour de soi et ne savoir que tu es là seulement lorsqu'il y a un coeur battant de plus qu'il n'y a d'odeur. »
_ « C'est ça lorsqu'on prend pour acquis sa supériorité, il faut que quelqu'un arrive à vous mettre en déroute ! »
_ « Et quelle remise en question que vous deux ! »
_ « J'aurais une autre question mais elle est un peu personnelle. Alors, je te la pose qu'en même mais rien ne t'oblige à répondre un jour. Euh... Voilà, je voulais savoir - J'ignore comment bien le formuler ! - Qui t'a « engendré » ? »
_ « Je ne suis pas sûr d'avoir envie de raconter cela maintenant. »
_ « Comme tu voudras. Dis moi seulement quel âge tu as alors ? »
_ « Dix-huit ans ! Depuis le début des années trente. »
_ « Les années trente ? » hoquetai-je. « Je peux toujours relativiser en me disant que tu aurais pu vivre au dix-huitième siècle comme Désiré Rose. »
_ « Désiré. Comment es-tu au courant ? »
_ « Tu as vu la couverture d'opra ce matin ? » demandai-je, hésitante.
_ « Oui, bien sûr ! Comme tout le monde. Félicitations ! »
_ « Merci. Elle a été prise lors d'une exposition à la Bibliothèque Nationale. Il y avait un tableau de famille dans un des escaliers peu fréquentés par le public. C'était sa famille. J'ai vu l'avis de disparition, Edouard. C'est comme ça que j'ai su que vous étiez des Immortels. »
Il eu l'air désolé de la façon dont cela était arrivé. Sûrement aurait-il préféré me le dire lui-même, pensai-je ironiquement.
_ « Comment se fait-il que le jour ne vous tue pas ? » l'interrogeai-je, intriguée.
_ « La lumière du Soleil nous brûle, c'est la vérité. C'est pour ça que nous sommes venus ici. Le soleil est invisible quasiment jusqu'au printemps. Cependant, nous nous retrouvons comme de simples êtres humains, sans force ou vitesse extraordinaire. »
_ « Tu m'as rattrapé à la volée à l'autre bout de la cantine... ! »
_ « La cantine a un avantage : elle se trouve en sous-sol, sans aucune fenêtre, aucune ouverture sur l'extérieur. La lumière du jour ne peut y pénétrer. De même que les amphithéâtres ou les couloirs que nous fréquentons ne laissent pas entrer le jour. Nous sommes toute fois limités. »
_ « Tu ne m'as pas semblé limité lorsque tu m'as éviter d'être défigurée... »
_ « Tu n'aurais pas du avoir le temps de réaliser que je t'écartais. »
_ « Tu étais désavantagé : j'aurais senti ta présence de toute façon. Et puis, ta peau est toujours si froide ! »
_ « Navré ! » s'excusa-t-il avec un sourire en coin trop craquant. Une envie atrocement délicieuse, tendre et chaude m'envahit et je rêvais de pouvoir poser mes lèvres sur les siennes, de gouter ne serait-ce qu'une seule fois à son baiser, à sa proximité. Je repoussais cette envie le plus loin possible.
_ « Ne le sois pas. » marmonnai-je en rougissant.
_ « Peu importe tout cela. S'il n'avait pas fait jour tu ne m'aurais qu'à peine perçu et tu ne m'aurais pas reconnu. »
_ « Et nous n'en serions peut-être jamais là ? » Je me levais sur un coude pour mieux le voir. « Edouard, qu'avez-vous contre ma soeur ? Pourquoi vous rebute-t-elle autant ? Tu t'en es toi même servi comme d'un argument à la prudence, c'est donc qu'il y a bien quelque chose ? »
_ « Elle n'est pas comme toi. Elle est ton opposée. » tenta-t-il de s'expliquer.
_ « Mon opposée ? Comment cela ? Est-ce qu'elle a un problème aussi ? Est-ce que c'est son odeur qui vous révulse ?»
_ « Non, au contraire. Son odeur est atrocement... »
_ « Appétissante ? » finis-je, tandis qu'il déglutit difficilement. « Ca ne sera pas de sitôt que tu iras petit-déjeuner chez nous, hein ? » Evidemment, je ne compris que trop tard le double sens de ma phrase.
_ « Pourtant c'est bien de la haine que tu exprimais quand tu t'es enfui de l'épicerie. Tu la détestais. » notai-je.
_ « Je ne pensais pas que ça puisse arriver. Que quelqu'un puisse un jour dégager une odeur si attractive était impossible... Cette odeur est une drogue et une torture ! Je la désire tellement ! Elle déclenche en moi une telle soif de son sang ! » maugréa -t-il.
_ « Et l'idée que malgré tout tes efforts arrive soudain une petite humaine qui pourrait être plus forte que ta volonté t'a mis en colère ? Tu crois que l'odeur de cette humaine pourrait te pousser à commettre un acte irréparable ? Enfin, du moins, t'obliger à te soumettre à l'envie frénétique du sang humain et ainsi mettre en péril tout ce que tu as ? » continuai-je.
* Ta mère a du ressentir quelque chose comme ça aussi, hier soir... * pensai-je tristement.
_ « Pas l'instinct du sang humain, ce n'est que de son sang à elle ! A cette même humaine qui se trouve, par le plus affreux coup du sort, être la soeur de la fille sans laquelle je ne veux plus vivre. Comme quoi même les vampires n'échappent pas à la loi de Murphy ! » railla-t-il.
_ « Cette loi n'a jamais été prouvé. Nous avons donc des chances de la démentir. » rectifiai-je. « Le savais-tu déjà, dès cette première rencontre, que je serais la personne avec qui tu voudrais passer ta vie - enfin, façon de parler - ? »
_ « Tu ne peux pas savoir comme j'ai aimé te contempler cette petite minute. Comme j'aurais préféré ne pas avoir eu à m'enfuir. »
_ « Si, ça je crois que je peux l'imaginer. »
_ « N'y repense pas trop. » me conseilla-t-il avec un air triste.
_ « Pourquoi ? »
_ « Parce qu'il va falloir que je te raccompagne. Tu as déjà loupé les cours, tu ne peux pas manquer d'aller au travail, surtout alors que tu viens de faire la couverture. »
_ « Comment ça ? Il ne peut pas être déjà si tard ? » Je cherchais ma montre et vérifiais. « Woaw ! Le temps passe vraiment trop vite. » Bien sûr, je m'étais rendu compte que la nuit était venue mais cela ne m'avait pas plus inquiété que cela. Lorsque j'étais avec Edouard, j'avais l'impression d'être ailleurs, que le temps et le monde autour de nous n'existaient plus.
_ « Ne t'en fais pas. Je ne serais pas loin. Je n'ai pas envie de te dire aurevoir. »
L'inévitable sensation de brûlure glacée mit un terme au plus beau des rêves alors qu'Edouard venait à peine d'esquisser un geste vers ma main. Je soupirais, navrée.
_ « Cela ne fait rien. Je suis sûr qu'on y arrivera. » murmura-t-il.
_ « Les tiens ont-ils tous aussi soif d'Ariel ? »
_ « Malheureusement. Il est déjà arrivé qu'un vampire rencontre un jour une odeur qui lui donne envie plus que les autres. Mais c'est quelque chose de personnel, et ce n'est pas aussi fort. »
_ « Comment le sais-tu ? Est-ce une expérience personnelle ? »
_ « Non, mais Laurent en a déjà rencontré. Désiré également. »
_ « Tu te feras toi aussi à l'odeur de ma soeur. Et moi, tu pourras m'approcher et me toucher sans que plus rien ne vienne me perturber. Je suis sûre que tu y arrivera. C'est normal que l'on rencontre des obstacles, d'autant plus que ce n'est pas vraiment courant qu'un vampire et une humaine sortent ensemble. Mais on réussira à les surmonter ensemble. »
_ « Je l'espère. Mais ça risque d'être difficile. »
_ « Non, ne commence pas ! Je suis sûre que tu arriveras à te contrôler. Tu ne lui feras aucun mal, j'ai confiance en toi. Je ne perdrais ni ma soeur, ni toi. » promis -je.
« Quoi ? Qu'est-ce qui te fais sourire ? »
_ « Alors, on sort ensemble c'est bien ce que tu as dit ? » minauda-t-il.
Je rougie. Je n'avais pas eu l'intention de rendre les choses si concrètes. Les mots étaient sortis tous seuls et maintenant prononcés à haute voix ils devenaient tout de suite bien plus réels, officiels. Si bien que je ne trouvais rien à redire tandis que je sentais mes joues s'empourprer.
Edouard sourit, avec une moue amusée.
_« En attendant, il faut tout de même que je te ramène au bureau ! » lança-t-il, ravi.
_ « Oh non ! Pas déjà ! Encore un peu ! » suppliai-je avec des yeux mouillés.
_ « Allez, viens ! On a encore tout le trajet. »
J'obtempérais en soupirant.
Seulement, une fois sur mes pieds, Edouard resserra sa prise sur ma main sans me faire perdre de mon élan et je me retrouvais hissée en un rien de temps sur son dos. J'accrochais mes bras autour de son cou. J'étais très loin d'être rassurée et la morsure du froid sur ma peau me donna le tournis.
_ « Tout va bien. Tu as confiance en moi ? »
_ « En théorie, oui... »
_ « Alors, fermes les yeux ! »
Malheureusement, je n'en eus pas le temps. Je dus resserrer mon emprise autour de son cou pour ne pas m'envoler lorsqu'il s'élança. Le vent me fouettait le visage et les larmes qui me brûlaient les yeux m'empêchèrent de voir quoi que ce soit.
_ « Tout va bien ? » me demanda-t-il.
Sa voix sembla me sortir de ma torpeur. Apparemment nous étions arrivés mais mon corps refusait de bouger. Il était congelé et s'accrochait toujours à Edouard. Celui- ci m'aida à descendre.
_ « Tu ne respirais pas. » murmura-t-il, inquiet, tandis que je m'écartais de lui pour ne plus sentir ce froid douloureux. Il était incroyable de voir comment, dès que les vampires étaient à une distance, suffisamment raisonnable le froid me quittait aussi vite qu'il me saisissait. Lorsque je me concentrais pour enfin respirer et que la tête ne me tourna plus, je pus me rendre compte que j'étais assise sur un trottoir, cachée par une haie de buissons dans une petite allée.
_ « Ca va mieux ? » demanda-t-il.
_ « Oui. Je crois que mes organes reviennent à leurs places. » soufflai-je. « Tu ne m'as quand même pas amené jusqu'au journal comme ça ? »
_ « Personne n'a rien vu ne t'en fais pas. »
_ « Et ma voiture ? »
_ « Je te la ramènerais pendant que tu seras au travail. »
Je n'avais toujours pas l'air décidé.
_ « Tu dois y aller ! Tu me retrouveras toujours. A ce soir ! » Sur ce, il s'en alla sans me laisser le temps d'en gagner plus. Je dus donc me résigner à sortir de ma petite allée, frustrée, et à pousser la porte de l'immeuble de la rédaction.
_ « Ella ! » s'écria mon rédacteur en chef, M. Kelman, en m'entraînant avec lui. « Mais où étiez-vous donc passé ? Je n'ai pas réussis à vous joindre ! » gronda-t-il.
Parfois, il avait vraiment l'air d'un lion en colère avec ses yeux qui flamboyaient et sa mâchoire crispée comme s'il allait nous remettre en place d'un rugissement. Même la façon dont il relevait le menton avec autorité donnait l'impression d'un roi lion arborant fièrement son épaisse crinière flamboyante comme attribut .
M. Kelman était le rédacteur en chef d'Opra Magasine et lui avait donné sa grande réputation de qualité et de fiabilité. C'était un homme afro-américain d'âge mur, aux petits yeux noirs vifs et légèrement bridés. Il en imposait par son caractère et son autorité naturelle. Il était aussi mari et père bien qu'il ne se passe pas un jour sans que chaque employé de ce journal se demande quand il avait bien pu trouver le temps de fonder une famille et, qui plus est, de s'en occuper. Je n'avais jamais vu sa famille mais je savais que cet ancien journaliste très cultivé en avait une photo dans son porte-feuille.
_ « Oui, je sais. J'étais très très occupée et... Mais enfin qu'est-ce qui se passe ici ? »
Tout le monde était sur le pieds de guerre. La rédaction ne m'avait pas semblé si affairée depuis mon premier jour ici. La cause de toute cette frénésie m'apparut avant que M. Kelman n'est pu m'en dire un mot. La silhouette en costume de Joaquin Prince se dessina à l'embrasure de la porte de son bureau, laissant passer une petite femme brune à la longue veste de laine blanche tricotée. Je la reconnus aussitôt. C'était notre chroniqueuse du coeur, Lili Odckinns. Elle passa d'un pas pressé jusqu'à son bureau.
_ « J'ai appris que vous aviez fait connaissance avec notre nouvel employeur tôt ce matin. Il est donc inutile que je fasse les présentations. » amorça M. Kelman.
_ « Vous cherchez l'âme soeur ? » raillai-je à l'intention du nouvel arrivant.
_ « Tout le monde veut trouver l'amour. » répondit-il en souriant.
Je ne pus retenir un rire septique.
_ « Je vous attendais. J'ai besoin de vous parler à propos de votre travail. »
_ « Mon travail ? »
_ « Si nous allions dans mon bureau ? »
Je soupirais. Il m'agaçait.
_ « Très bien ! Puisque j'ai mérité cette couverture qu'avez vous à redire sur mon travail ? »
_ « Il n'est pas parfait ! Vous avez du talent mais il reste encore à travailler. »
_ « Je ne vois pas ce que vous venez faire là-dedans. Mon travail évolue de jour en jour. »
_ « C'est vrai, et cela se ressent dans vos clichés. Votre travail est honnête, expressif. Il nous fait ressentir des choses. Vos photos nous expose la vérité. Mais vous manquez d'expérience. Vous devez explorer d'avantage votre potentiel, d'autres horizons. Vous devriez vous essayer dans plusieurs genres. Vous travaillerez votre technique en même temps. Ce sera très bien pour vous car vous êtes précises. Par ailleurs, j'aimerais que vous veniez plus souvent au bureau. »
_ « Pourquoi faire ? M. Kelman m'a toujours laissé travailler comme je l'entendais, chez moi ou ailleurs. Tant que je rend mes photos à temps, je ne vois pas où est le problème. Et puis, je vous rappelle que j'ai aussi mes études. »
_ « Votre travail se remarque et votre carrière va s'envoler. Je veux qu'on parle de vous. Vous et Lili Odckinns avaient ce point commun. C'est pour ça j'ai voulu lui parler. »
_ « Parce que sa rubrique a fait énormément augmenter la vente du journal ? Vous voulez un coup de pub, en faire la promotion ? »
_ « Oui, et la votre par la même occasion. Je veux que vous travaillez avec Lili pour une séance photo. Il manque une photo d'elle à sa chronique. Je veux que vous la mettiez en valeur ! Que se soit aussi parlant qu'une interview. Et prévoyez une photo que l'on pourra sortir sur très grand format. Comme celui d'un panneau publicitaire du centre ville, par exemple. Elle vous attend. »
Puis, il me désigna la sortie d'un geste.
Mon portable vibra quelque minute après que je sois sortie du bureau. Je ne reconnu pas le numéro mais décrochais tout de même.
_ « Allo ? »
_ « C'est fou le stress que tu dégage rien qu'en prononçant quelques mots ! »
_ « Désolée. C'est rien, ce n'est que mon nouveau patron. Si j'étais méchante je dirais qu'il aurait besoin de la visite d'un vampire une de ces nuits, histoire que son extraordinaire confiance en lui retombe un peu ! Nous avons, disons, des divergences d'opinions. Il paraît que ça se règle en discutant. »
_ « On m'a dit ça. »
_ « Je suppose qu'il n'est pas nécessaire de te demander comment tu as eu mon numéro. »
_ « Inutile en effet. Je voulais juste que tu saches que ta voiture et moi étions là... »
_ « Je regrette, je ne vais pas pouvoir me libérer de sitôt. Mon patron m'a demandé de faire une séance photo avec l'une de nos chroniqueuse. Je suis désolée. »
_ « Ne t'en fais pas. Je t'attendrais à la sortie. »
_ « Tu n'es pas obligé. »
_ « J'en ai envie. Bon courage. »
_ « Merci. » Et il raccrocha.
Je souris en rangeant mon téléphone dans ma poche.
_ « Bien, allons y ! »
_ « Je suis contente de travailler avec toi. » me dit Lili Odckinns, alors qu'elle s'installait et que je préparais mon appareil. Elle avait un beau visage large, illuminé par un sourire charmant et entouré par des boucles brunes soyeuses. Elle avait un petit nez, des yeux en amandes, d'un chocolat noir brillant lui donnant un air audacieux. Elle avait de jolies lèvres pulpeuses et bien dessinées. C'était une jeune femme de vingt-six ans, petite et mince et j'aimais beaucoup son style. Elle était très perspicace et sensible aux autres. Amusante aussi. Elle avait tellement de succès que sa boîte mail était sans cesse pleine et que son bureau croulait sous les lettres.
_ « Ah oui ? Pourquoi ? »
_ « J'adore le rendu de tes photos. Je les trouve très personnelles. J'aime particulièrement le rendu des couleurs – y compris de tes noirs et blancs. »
_ « Merci. J'adore tes articles également. Ca ne te fait pas drôle de conseiller les gens sur des problèmes si personnels que ceux sur lesquels tu peux te pencher ? La plupart des gens sont mal à l'aise avec les émotions et les sentiments. En plus, tu dois choisir la meilleure lettre à traiter ! Je ne sais pas comment tu fais ce choix !
_ « Je peux te poser une question ? Comment tu trouve notre nouveau patron ? Est-ce qu'il t'intéresse ? » demanda Lili.
_ « Non ! Non, il ne m'intéresse pas. C'est vrai qu'il a beaucoup de charme, oui. Mais,je pense que ce ne serait pas constructif. Et puis je pense pas que sortir avec un collègue et encore moins un patron soit judicieux. Pourquoi ? »
_ « C'est à cause de cette tension entre vous. Et puis, j'aimerais bien sortir avec lui.»
Tout en discutant, je commençais à prendre les premiers clichés.
_ « Sérieusement ? Il a le don de m'énerver ! Je n'ai pas l'habitude de quelqu'un d'aussi... autoritaire. Je n'aime pas qu'il décide pour moi et me mette devant le fait accompli. Il dit qu'il veut discuter, mais en réalité tout ce qu'il fait c'est nous dicter ce qu'il veut pour nous ! Et moi, ça me fait regretter d'avoir fait de la photographie – qui est qu'en même ma passion – ma profession. Je ne dis pas que ça me déplaît d'avoir du succès : je suis ravie quand les gens aiment mon travail. Et quand ils ne l'aiment pas, je suis toujours prête à discuter. Mais j'ai peur qu'il joue trop sur le marketing, qu'il cherche d'avantage à faire des ventes et à faire parler de nous plutôt que de nous permettre de développer notre travail. »
_ « Je vois très bien ce que tu veux dire ! Je n'ai pas non plus envie qu'il se serve du succès qu'à ma chronique pour utiliser mon image. »
_ « Même si c'est un peu différent pour toi. Tu t'inspire de ta vie personnelle pour écrire tes articles. Et puis, s'il y a bien quelqu'un qui peut avoir peur que son image soit mise en avant et qu'on retrouve des photos d'elle - plus ou moins habillée – c'est bien toi ! »
_ « Ca c'est un compliment ! Dire qu'il y a un an, je pensais que je ne trouverais jamais ma voie ! J'ai beaucoup changé grâce à cette rubrique. J'adore mon travail ! C'est vraiment ce que je voulais faire : conseiller les gens. »
_ « Je t'admire. L'air de rien, se plonger dans la détresse des gens et leur redonner un peu d'espoir, les conseiller, ce n'est pas donner à tout le monde. »
_ « Il faut croire en ce que tu dis, en l'amour. Parce que si tu t'enferme dans ta peur d'aimer, tu ne pourras plus conseiller les gens. J'ai eu des histoires d'amour compliquées moi aussi, et douloureuses. J'ai eu peur d'aimer et ça m'a rendu confuse. Je ne pouvais plus parler d'amour en experte. Si je donne des conseils à mes lecteurs il faut d'abord que je les suive. J'ai commencé à me dire que pour pouvoir parler d'amour, il fallait peut-être que je le trouve moi-même. Ce n'était pas encore le bon mais j'ai retrouvé foi en l'amour. Et j'essaie d'être optimiste. Il ne faut pas seulement régler un problème posé, il faut aussi montrer que tu as de la compassion, que tu comprends ce que ressens le lecteur. Toi-même, tu es quelqu'un de très observateur, mais encore heureux pour un photographe. Tu comptes être photographe professionnel toute ta vie ? »
_ « J'en sais rien. Pourquoi ? »
_ « J'en sais rien. Je me dis que tu ferais sans doute un très bon psy. »
_ « Tu ne crains pas la concurrence ? »
_ « Non. Encore heureux avec Joaquin Prince. »
_ « Pourquoi ? »
_ « Il ne t'as pas dit pourquoi on faisait ces photos ? »
_ « Pour te faire de la pub ? Après tout, tu as déjà été invitée par d'autres journaux, passée à la télé... »
_ « Oui. Et il y a eu de l'animation. Un journaliste macho qui prône qu'une femme devrait être aux fourneaux, à élever ses enfants et à faire la lessive. Et il pense tout ce qu'il dit !C'est un idiot mais son attaque a eu du succès. Ces photos sont en réponse à son article. D'autant qu'il sera dans le même numéro. »
_ « Il ne m'avait pas parler de ça. Mais je comprend pourquoi il voulait que je te « mette en valeur » ! »
_ « Je peux te poser une question personnelle ? »
_ « Vas y ! »
_ « Tu as eu des histoires d'amour... difficiles ? »
_ « Oui. » admis-je. « C'est encore un peu frais. C'était mon premier amour. On est resté deux ans ensemble. Au départ, ça a été un peu difficile. Ca nous est vraiment tombé dessus. Et au final, ca ne devait effectivement pas se faire. C'en est allé à ce qu'il pense qu'il n'avait pas fait tout ça pour me perdre au final et que s'il tombait, je tombais avec lui. Je n'avais plus confiance en personne, plus confiance en moi. Ce n'était pas qu'on ne s'aimait pas assez, juste qu'on ne pouvais pas aller plus loin ensemble. Mais, maintenant, je me suis libérée. »
_ « Tu n'as pas été refroidis ? »
_ « Sur le moment, si, bien sûr. Mais maintenant, c'est loin derrière moi ! Je n'ai pas peur d'aimer et d'en souffrir. Ca fait parti des risques. La vie sans amour n'a pas de sens, je crois en ça. »
_ « Ca m'étonne que tu parle comme ça. Tu as l'air plus blessée que ça, plus effrayée. »
_ « Non. Je n'ai pas peur de l'amour. On a tous des ratés, on trouve rarement le grand amour du premier coup. Mais aujourd'hui, je suis sûre que je l'ai trouvé. Et je suis sûre qu'il est fait pour durer. »
_ « Y' a plus qu'à espérer ! »
Ely Julia- Cinq de Trèfle
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