DT12
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Robert Begarion
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Deck Of Cards :: Hors Jeu :: Fictions
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DT12 – chapitre sixième
Cadeau de Noël, avec un peu de retard. J'étais censé le poster à Houston, mais voilà : je n'en avais écrit que la moitié. Pas bien grave, me direz-vous ?
Soit dit en passant, j'ai enfin trouvé une réponse qui me satisfasse quant au problème que me soumettait Jack deux pages plus haut. Je peux vous la communiquer comme vous la laisser apprécier par la suite.
Commentez, critiquez, démolissez. Bref, amusez-vous.
Soit dit en passant, j'ai enfin trouvé une réponse qui me satisfasse quant au problème que me soumettait Jack deux pages plus haut. Je peux vous la communiquer comme vous la laisser apprécier par la suite.
- Spoiler:
- DT12 – chapitre sixième – Pêche au gros
-Sillage à onze heures !
Le cri avait retenti tel un coup de feu, tirant avec brutalité l'équipage hors de la douce ivresse du départ. Aussitôt le quartier-maître en faction meuglait des ordres, trop heureux de prendre l'ascendant sur des marins somnolents (chose qu'il savourait à la mesure de sa rareté, étant doté d'un physique modeste compensé par un gosier spacieux)
-Prenez le cap droit dessus ! C'est certainement une grosse prise, pour oser s'aventurer si près de la côte ! Du nerf, moussaillons ! Mettez-moi plus de toile ! Allez, on se remue !
Depuis les hauteurs de la vigie, on apercevait effectivement deux traînées formées d'écume, très loin devant le deux-mâts. Il s'agissait vraisemblablement d'un gros animal marin, ce qui expliquait l'excitation présente à bord du navire de pêche. Déjà, le capitaine était sorti de sa cabine et avait pris le relais de son subordonné. Sa voix était encore plus retentissante et valait le double en autorité. Le pont prit progressivement une allure de fourmilière grouillante que le vieux loup de mer s'acharnait à diriger.
-Hissez le grand cacatois ! Évacuez l'entrepont arrière, on a la proue qui émerge ! Allez plutôt me sortir le perroquet de beaupré, tas de moules ! J'en veux pas un collé au bastingage ! Si vous savez pas quoi faire, grimpez donc aux huniers et déroulez la brigantine !
Las et résigné, Jock lâcha la rambarde du parapet et chercha du regard où il pouvait apporter son aide. La tête toujours encapuchonnée, le voyageur le suivit jusqu'au pied du grand mat puis se joignit aux divers marins tirant sur une drisse quelconque.
-Dis-moi Jock, on a combien d'arpents de toile, là ?
-Pas assez, répondit Marion comme si elle venait subitement de se matérialiser derrière lui. Le boss veut nous faire décoller, et vu comme ça avance, il n'est pas dit qu'il n'y parvienne pas.
Le voyageur étudia cette réponse, entre perplexité et inquiétude.
-Tu blagues, là ?
-Bien sûr, rétorqua-t-elle avec un sourire malicieux. On aura perdu la moitié du brick avant de prendre un mètre en altitude, mais ce sera un bel effort, pas vrai ?
-La partie aérienne mise à part, c'est pas forcément infondé ce qu'elle dit.
-Jock, t'es mignon : tu ravales ton pessimisme grinçant et tu le laisses marcher cinq secondes. Sinon la prochaine fois, je te dis pas que t'as la jambe dans un tour de corde et tu discutes avec les mouettes si une risée nous affale le perroquet.
Avec un grommellement, Jock déplaça son pied. Le labeur soutenu au rythme des « Une ! Deux ! Une ! Deux ! » devint vite monotone et les plaisanteries de Marion se tarirent avec sa salive. Quant la voile fut entièrement déployée, les marins se déplacèrent à la proue afin de l'étarquer solidement.
-Dis, toi. « Ro », tu sors jamais ton nez ? Je t'ai vu que deux fois à bord et tu portes toujours cette bure crasseuse. Y'a vraiment quelque chose dessous ?
La voix était celle d'Helen, une équipière un brin plus âgée que lui, dont les boucles blondes s'échappaient de son bandeau. Plusieurs autres membres de l'équipage considéraient maintenant Ro avec attention. Contraint par les regards alentour, le jeune homme se découvrit avec soin. En ôtant sa capuche il révéla un visage assez fin, qui complétait sans trop de surprise son physique tout aussi mince. Comme partout ailleurs, sa musculature faciale était discrète, ses arcades bien marquées et son nez sans prétention. Sous une chevelure légèrement orangée qui tombait presque jusqu'au épaules se dissimulaient à demi des iris dont la noirceur dissimulait la teinte. Après un examen rapproché autant qu'approfondi, Helen fit un pas en arrière et décréta :
-Pas mal. Encore quelques efforts à faire mais c'est déjà regardable.
-Hé, protesta l'intéressé.
Ro paraissait contrit d'être ainsi jugé. En vérité, il n'aimait pas particulièrement qu'on lui prête attention, ce pourquoi la conclusion d'Helen lui inspirait un déplaisir certain. Mais il ne l'aurait pas admis à haute voix, alors que quelques murmures d'assentiment suivaient la conclusion de la demoiselle. Il préféra s'éloigner du groupe dans ce qu'il espérait être une retraite discrète. Après tout, un individu tel que lui devait rester à l'écart...
Une grande tape dans le dos l'extirpa instantanément de ses réflexions maussades.
-Souris un peu, Ro ! s'exclama Marion surgissant à nouveau dans son dos : elle t'a fait un compliment, là. T'es pas sensé l'accueillir avec cette tête d'enterrement.
-Une fois n'est pas coutume, je suis du même avis que cette peste, renchérit Jock. Tu serais presque ingrat, comme bonhomme. Y compris avec le sort. Moi, ça me ferait foutrement plaisir qu'une fille me fasse la même réflexion, tu sais ?
-Avec un pif et un blase pareil ? Aucun risque, railla la peste.
-Eh ? Quoi ? Qu'est-ce qu'il a, mon nom ? Et puis « Ro », c'est peut-être mieux ? Tu peux me dire à quoi ça ressemble, cette syllabe en guise de prénom ?
-Ce n'est pas une syllabe mais un diminutif, grogna Marion en posant ses mains sur les épaules du concerné, qui se sentait effectivement assez diminué. C'est affectueux, c'est gentil et c'est agréable à prononcer. En résumé, tout ce que n'est pas ton « Jock ».
Le grand escogriffe se renfrogna subitement.
-Et pourtant tu sais quoi, Marion ? C'est un diminutif aussi.
-Sans blague ? rétorqua-t-elle d'un ton hautement sceptique.
-Ouaip, persista Jock sans coup férir.
-Un diminutif pour quel prénom ? demanda poliment Ro.
À cette question, l'interrogé hésita quelques instants. Puis il annonça gravement :
-Pour Jocker.
Marion et Ro s'apprêtaient simultanément à poser une question lorsque le timbre retentissant du capitaine les rappela à la tâche. Le vieil homme gesticulait debout à la proue du navire, un pied sur le bastingage et l'autre sur le mat de beaupré. Plus d'une planche avait déjà été arrachée par les lames et de multiples voies d'eau mineures étaient apparues, mais la vitesse n'était pas encore satisfaisante à son goût.
-On se traîne comme un sac de nœuds alors qu'on en tire pas assez ! Remuez-vous ! Bordez-moi ces voiles, on dirait les chiffons de mon aïeule ! Le tout pour le tout, il nous faut cette prise ! Abattez les espars de voltige bâbord et tribord ! Paré à effleurer !
Aussitôt, les hommes et femmes sur le pont s'affairèrent autour du grand mat, dénouant les araignées de chaque côté et de haut en bas. Les drisses volaient de main en main, les cales se déchaussaient les unes après les autres et les poulies crissaient à l'agonie. Dans le tumulte ambiant, Ro cria de toutes ses forces à Jock :
-Pourquoi ?
-Hein ?
-Pourquoi tes parents t'ont-ils appelé comme ça, Jocker ?
Avant de répondre, il prit le soin de descendre la longue pièce de bois d'un palier, puis rendit la drisse au manœuvre suivant. Cela lui avait donné assez de temps pour mûrir sa réponse.
-Une sorte de superstition, je crois. J'étais né sous une combinaison astrale particulièrement maléfique et ils voulaient contrer le mauvais sort en me donnant le nom de Joker. Mais voilà, sur Ebluc le calendrier est tellement obscur et plein de signifiants ésotériques qu'on trouve des présages funestes pour n'importe quoi.
Jock marqua une pause, reprit son souffle et une autre drisse, puis continua :
-Il s'est trouvé un prêtre pour décréter qu'un tel nom était une hérésie et un crime de lèse-divinité, qui annonça de grands malheurs si le nom n'était pas changé dans les trois jours. Comme il exigeait un sacrifice de bétail par lettre et que le cheptel de la famille n'était pas particulièrement opulent, on me renomma Jocker, avec un « c ». Celui du coq que le prêtre a égorgé pour la sombre gloire de Maka, et dégusté goulûment en son nom.
Sur ces derniers mots, il cracha par terre.
-Jock, de corvée pour briquer le pont dès notre retour !
-Si d'aventure on ramène le bateau, chef ! rétorqua-t-il à pleins poumons avant de continuer son récit : et puis les années ont passé. J'ai eu ma crise d'adolescence, comme tous les petits eblucois. Sauf qu'en lieu et place des boutons j'avais des plumes qui me sortaient des tempes, alors on s'est posé des questions. Mon père surtout. Le même prêtre est revenu et a décrété que rien n'y faisait, j'étais un fléau pour le cercle familial, une tare pour la mère patrie et une abomination pour la création. En vertu de quoi ils m'ont collé dans une des pirogues où ils entassent les bâtards pendant que mes parents avaient une « discussion ». C'était ça ou la pyramide, mais l'excité du sacrifice ne m'estimait pas digne de cet honneur, ou bien il préférait le coq au vin à la chair humaine : va savoir.
À ce moment, les billots de bois positionnés contre le grand mat une minute à peine plus tôt s'abattirent sur les flancs du navire. Aussitôt, l'équipage s'empressa de les attacher solidement dans les rainures prévues à cet effet. Puis deux marins s'avancèrent : un grand gaillard brun, torse nu et pectoraux luisants, ainsi qu'une demoiselle effilée, habillée de toile écarlate et à la chevelure battante. Chacun monta sur un des espars latéraux et fit quelques pas vers l'extérieur du bâtiment, pour se retrouver directement au dessus des flots tumultueux, face tournée vers la poupe.
-C'est bien nécessaire d'en arriver là, capitaine ?
Une fois de plus, la voix titanesque du vieil homme tonna :
-Écoutez-moi, moussaillons ! Nous avons en ce moment même une flotte entière qui rentre à la cale. Je sais pas exactement combien ils sont, mais si Ombrenuit nous rapporte ne serait-ce que la moitié de ce qu'elle a emmené, on aura bien besoin de quatre ou cinq bestiaux comme celui-là ! Alors oui, on va faire ce qu'il faut ! Maintenant, en avant toute !
Et dans un même élan, les deux funambules s'étirèrent et rugirent face à l'océan. Leurs bras désarticulés partirent violemment en arrière tandis que les corps se penchaient en avant comme pour basculer dans la mer. Puis leurs membres s'étirèrent, prirent une texture différente tandis que le squelette de chacun paraissait enfler à l'intérieur de la peau. Enfin, dans un craquement terrifiant, l'apparence humaine humaine de la femme se désolidarisa pour laisser place à un monstre reptilien pourvu d'une gueule hérissée de crocs et d'immenses ailes incarnat. Entendant un second bruit d'éclatement, Ro se retourna subitement pour faire face à un deuxième dragon, plus trapu que le premier, doté d'un museau court et d'écailles cuivrées. Les reptiles déployèrent leurs voilures et le baleinier Mesuré emporté par le vent fit un bond de trente mètres au dessus de l'eau, avant de reprendre sa course folle vers le monstre marin qui n'était désormais plus qu'à quelques encablures de la proue.
Les premiers instants de saisissement passés, plusieurs hommes se rassemblèrent autour du capitaine. Ce dernier était particulièrement fier de sa manœuvre, permise grâce aux aménagements spéciaux installés selon ses directives lors de la dernière escale, et le montrait en arborant son plus grand sourire. Ro profita de ce moment favorable pour hasarder une question :
-C'est vrai ce que vous avez annoncé, capitaine ? L'armée Métissée rentre sur l'Île ?
-Vrai, mon petit, certifia le vieil homme. On m'a apporté la nouvelle ce matin.
-Je croyais, d'après mon cousin qui tenait l'information d'un éclaireur phénix, tenta d'expliquer Jock, que ces fripouilles de Piques avaient contraint nos navires à s'enfoncer dans les glaciers grâce à leurs submersibles démoniaques. Ils ont su trouver la sortie sans dommage, finalement ?
-À vrai dire non, ces amiraux pesdans étaient bien trop rusés pour le leur permettre. Ils ont fini dans une crique glaciaire sans espoir de fuite, là où les Piques pouvaient les aligner comme à la foire. Mais cette opération fastidieuse leur a pris trop de temps. La nouvelle est parvenue jusqu'aux ouïes de Jörmungand, qui a accouru au plus vite.
-Jörmungand ? demanda Ro, déboussolé.
Plusieurs marins l'examinèrent étrangement, comme stupéfaits de son ignorance. Néanmoins, le capitaine le renseigna bien volontiers.
-Il s'agit d'un vieil ermite vivant sur la côte nord de l'Île. D'un très vieil ermite. On prétend qu'il vit depuis plus d'un siècle. Et s'il reste la plupart de son temps à l'écart des autres, cet homme garde cependant une grande influence sur notre peuple, du fait de ses exploits passés.
-Ce n’est pas un homme, c’est une véritable légende vivante ! s'exclama un voisin de Ro, enthousiaste.
-C'est aussi un gigantesque serpent de mer, poursuivit le capitaine. On le dit long de cent brasses, et assez large pour engloutir le Mesuré sans mâcher. Dès le départ, il était contre le projet d'Ombrenuit. Mais malgré chacun de ses avertissements, la voix de la fureur l'a emporté sur celle de la sagesse. Ce vénérable n'a pourtant pas abandonné les siens puisqu'il est arrivé au secours des navires prisonniers. Il aurait fendu le glacier en deux dans un de ses anneaux pour ménager une sortie à la flottille, tandis que ses disciples se ruaient contre les sous-marins pour les empêcher de poursuivre les fuyards.
-Et les Piques ont fini broyés dans leurs engins crasseux ? supposa un autre marin.
-Non, car ils gardaient l'avantage du nombre et abattaient aisément les nôtres. Mais après un court et sanglant affrontement avec les serpents de mer, les Piques furent contraints à la retraite par Jörmungand, qui sut profiter de la mobilité inférieure de ses adversaires pour propulser des icebergs dans leurs rangs. Les submersibles étaient immobilisés par ses élèves, ce qui les rendait vulnérables aux projectiles du maître tandis que les blocs de glace géants et les tourbillons gênaient leur visée. Plutôt que d'encaisser trop de pertes pour gagner ce combat, chacun a préféré retourner dans son camp.
-Portée de tir imminente ! hurla soudain la vigie.
-Branle-bas de combat ! vociféra le capitaine en écho.
Dans les secondes qui suivirent, chacun se vit propulsé à son poste et tirait, poussait ou tordait un bout, une amarre ou un manche sans réfléchir. Le Mesuré gagnait lentement les derniers mètres fatidiques sur sa proie, probablement une baleine arctique de bonne taille ayant émigré plein sud pour fuir les combats.
-Harponneur en position ! beugla de nouveau le capitaine.
Jock se suspendit littéralement à l'écoute de foc pour l'empêcher de céder, avec trois équipiers à ses côtés aux phalanges aussi blanchies par l'effort que les siennes.. Comme de coutume, Marion surgit derrière lui par enchantement.
-Pourquoi ne laisse-t-on pas les dragons pêcher ce gros poisson au piqué ? cria-t-elle.
-L'ombre, rétorqua Jock entre ses dents.
-Quoi, l'ombre ?
-Les dragons sont massifs, et les baleines pas si stupides. Elles plongent quand une ombre leur cache brusquement le soleil.
-Et l'artillerie ? Pourquoi Mâchoire ne les aligne-t-il pas avec son obusier ?
-Bon sang, Marion ! pesta-t-il, on veut les cueillir ces sardines, pas leur faire un trou dans la graisse de la taille d'une table de salon qui va les envoyer par trois cent mètres de fond en douze secondes ! Maintenant, tu veux bien tirer là-dessus avant que je m'envole ?
Regardant ailleurs, l'intéressée se saisit du cordage et le tendit mollement.
-Où est passé Ro ?
-Sur le mât de beaupré, pardjok !
-Hein !?
Marion loucha vers la proue et constata effectivement que celui qu'elle cherchait avait ôté sa cape et se tenait debout au milieu de l'espar, les yeux rivés sur son objectif.
-C'est... lui le harponneur ???
-Bon sang, Marion ! répéta Jock. De quoi as-tu discuté avec lui depuis le départ ?
Médusée, elle le fut encore davantage quand elle vit ce qu'il brandissait de la main droite. Le harpon était tout d'abord invisible à contre-jour, mais une fois compris que cet éclat qui brûlait les yeux ne provenait pas d'un quelconque reflet sur l'océan, on voyait l'objet. D'un feu époustouflant était l'arme : sa lame effilée ne semblait posséder aucune existence solide, et les ciselures sur son manche se mouvaient avec les flammes dansantes.
Ro saisit à pleines mains son projectile long de deux mètres, et se mit en position de lancer. Alors que le sillage de la proie semblait se maintenir à la limite de portée du bras armé, et que les dragons faiblissaient dans une posture figée, tiraillés par leurs ailes gonflées à mourir, il n'hésita pas. Avant même qu'on ne put voir ses membres entamer leur arc de cercle, le trait embrasé était parti. Instantanément, il perfora la surface des eaux avec celle de sa cible. La lueur à l'impact fut éblouissante. Lorsque le regard fut à nouveau supportable, on put voir une cohorte d'escarbilles fumantes retracer la trajectoire du tir jusqu'à un trou dans l'océan, dont émergeait une forme incandescente.
Une masse sombre vrillant les flots.
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Dernière édition par Robert Begarion le Dim 13 Nov 2011 - 20:24, édité 36 fois (Raison : Réglage de la voilure.)
Robert Begarion- Dix de Cœur
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Re: DT12
Hell ^^ J'aurais probablement pu, si j'étais doté d'une légère capacité de prescience, prévoir que tu allais caser le nom de Jocker avec un c comme une terrible malédiction doublée d'un mauvais présage. Mais Jörmungand, c'est diablement bien joué ^_^
Post approuvé ^^
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Jack- Joker Gris
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DT12 – chapitre septième
Le forum est bien silencieux, mais l'épopée se poursuit. À son propre rythme, certes.
Je lis toujours vos avis avec grande délectation. Soyez impitoyables.
- Spoiler:
- DT12 – chapitre septième – Cataplasmes et calfatages
En la massive sombreur du mégaptère mécanique, une certaine anarchie avait investi les lieux. Ce qui ne paraissait au premier abord n'être qu'un contretemps mineur n'exigeant qu'une poignée de kilowatts supplémentaires au niveau des turbines venait d'infliger une importante voie d'eau à la passerelle supérieure. Déformée et amplifiée par un écho aquatique, la voix à présent caverneuse du capitaine Ectasiltémoc se répercutait dans toutes les oreilles telle un tonnerre assourdissant.
-Compartiment torpilles avant, évacuez les lieux. Tout le personnel disponible aux pompes. Il nous faut impérativement colmater la brèche avant d'entamer la plongée. Madame Prosperi, à vous la logistique des travaux. Maître Johanes, vous superviserez les opérations de calfatage. Monsieur Smetek, les raccords de circuits...
À grands pas faisant trembler toute la coursive, le maître artilleur accourait au point de fuite. Il jouait machinalement avec sa barbe grisonnante tandis qu'il réfléchissait. Rien n'était jamais normal sur ce rafiot trop sophistiqué pour lui. Aucun baleinier n'était supposé surenchérir sur la double puissance des turbines MHD du Dichotomic. Et pour comble, voilà qu'une clique de pêcheurs galeux abordaient un sous-marin, à la pointe de la technologie pesdane qui plus est. Johanes s'empressa d'escalader l'échelle métallique face à lui. Il ruminait bruyamment. Son communicateur faisait de même.
Surpris et désarçonné par des rêveries qui lui avaient momentanément fait oublier sa position, il manqua de tomber à la renverse lorsqu'il chercha simultanément des deux mains l'appareil à sa ceinture. Une fois celui-ci trouvé, il lui fallut jongler avec tandis qu'à grands moulinets des bras il tentait à la fois de maintenir son équilibre et de se saisir d'un barreau métallique pour retrouver quelque stabilité. Au moyen d'un tour d'acrobate émérite, il parvint finalement à remettre bon ordre dans ce puzzle de gymnastique. Enfin, une fois le péril écarté, Johanes put enfoncer la touche de réception de son communicateur et lâcher un "Oui !" soulagé, s'adressant autant à son interlocuteur qu'à lui-même.
-Pas trop tôt ! Tu es occupé à torpiller quelqu'un ou tu peux me renseigner ?
Son interlocutrice, en vérité.
-Élice !?
-Réponse correcte, quoique tout juste audible. Quel est ce bruit de fond ? Auriez-vous omis de refermer les écoutilles avant de plonger ?
-Disons qu'on vient de nous gratifier d'une écoutille supplémentaire. Le genre de modèle sur lequel les charnières s'adaptent mal. On attend encore le vitrier.
-Sans rire ? Vous avez percuté de front un narval distrait ?
-Un narval croisé avec un exocet, la variété qui fait des bonds hors de l'eau puis pourfend sa proie par dessus. D'ailleurs, pardonne ma légitime curiosité, mais comment parviens-tu à nous joindre ? Tu es supposée être à terre, présentement.
-Et les communications à longue distance ne passent pas à travers l'eau, on sait. Je suppose que vous n'êtes pas bien bas sous la surface, voilà tout.
-Juste, grommela le maître artilleur.
Johanes continuait de courir un peu au hasard, faisant confiance au volume sonore pour lui indiquer qu'il se rapprochait de la brèche. Et il ne devait plus être bien loin.
-Écoute, le son devient complètement chaotique. Dis-moi juste comment le capitaine compte payer.
-Payer quoi ? beugla Johanes.
-Les honoraires exorbitants du rebouteux. Il vient de me facturer je ne sais combien de baumes et d'onguents miraculeux contre les brûlures dues aux dragons. À supposer qu'il accepte mes picaillons à un taux de change raisonnable, je ne pourrai même pas lui acheter les flacons vides.
-Qu'est-ce que tu racontes : des brûlures liées aux dragons !?
-Oui, parce que celles liées aux lasers à haute intensité, ça fait moins couleur locale.
Une nouvelle brèche se déclara et un violent jet d'écume fouetta Johanes de haut en bas, qui poussa quelques jurons en espérant que le communicateur n'avait pas trop souffert. Il s'abrita sur le flanc de la coursive pour le vérifier, puis hurla à Élice :
-Honnêtement, je n'en sais trop rien ! Excuse-moi, j'ai un problème plus urgent en ce moment. Je te promets de passer le mot au capitaine. On t'enverra de quoi faire sous peu, mais là je dois empêcher le sous-marin de couler. À plus tard.
Ce sur quoi il raccrocha, remit l'appareil à sa ceinture et empoigna un refroidisseur.
-Formidable.
Élice soupesa le communicateur dans sa main droite, partagée entre l'envie de composer successivement tous les numéros du répertoire jusqu'à obtenir une réponse valable et celle de fracasser le bidule contre une pierre. Bien entendu, ces deux options étaient aussi vaines l'une que l'autre. Aussi, la jeune femme s'adossa-t-elle avec lassitude contre le mur et réfléchit à ce qu'elle pourrait faire dans l'immédiat.
Plusieurs longues minutes de réflexion passèrent, et quand elle se releva, ce fut pour repasser la porte derrière elle, bien qu'avec un pas en apparence plus déterminé que la première fois. Précipitée par l'assurance qu'elle tenait à montrer, Élice faillit percuter (ou plutôt piétiner) le propriétaire des lieux. Elle trouva le minuscule bonhomme entre ses jambes alors qu'elle entrait dans la chambre de Christian.
-Attention ! pépia-t-il de sa voix grinçante.
Les deux mains plaquées sur le haut de son crâne, yeux plissés et membres pétrifiés, il s'attendait à être écrasé du talon d'un instant à l'autre. Toutefois, après mûre réflexion, Élice posa son pied un peu plus loin et enjamba le petit personnage pour rejoindre le chevet du lit. Christian était toujours inconscient, sous l'influence des multiples drogues qui lui avaient été administrées dans le but de soulager sa fièvre et prévenir d'éventuelles infections.
-Rien à craindre pour lui. Il ne se réveillera pas avant demain, tard dans la matinée. Et si tout se passe bien, nous pourrons entamer le traitement des cautères.
Élice se retourna. Le rebouteux était un nabot tout en replis, à la fois chauve et imberbe à l'exception d'une paire de favoris laineux. Sa fonction au sein du village pourvoyait amplement à sa subsistance, comme l'indiquait sa silhouette courte mais bien en chair sous tous les aspects. À commencer par ses doigts boudinés sur lesquels il ne cessait de compter et décompter les dosages d'ingrédients, les temps de convalescence, les quantités à administrer et... les tarifs. Élice abhorrait cette manie du nain qui lui donnait sans cesse le sentiment que la note était en train de grimper en flèche.
-C'est parfait Murillo, répondit Élice de la voix la plus enjouée dont elle était capable dans cette situation, je vais donc le laisser à vos bons soins quelques heures.
-Mes bons soins ? balbutia le rebouteux. Bien entendu ! Mais est-ce bien prudent de le laisser seul dans cet état ? C'est que je... qu'il pourrait avoir besoin de vous. Ainsi que de soins éventuels. Il est encore faible et alité. Vous pourriez rester jusqu'à demain, vous savez. Je n'y verrais vraiment aucun inconvénient.
Moi si, pensa furieusement Élice. Chaque seconde supplémentaire passée dans cette bâtisse me coûte davantage en remèdes que tu sors de ton armoire sans fond.
-Vous avez toute ma confiance pour veiller sur lui, rétorqua-t-elle sur un ton rassurant.
-Je vous assure que sur le moment, quelques onguents dispensés à temps pourraient avoir un impact bénéfique sur le malade, ce pourquoi vous auriez intérêt à...
La jeune femme l'interrompit en lui attrapant délicatement l'épaule, puis posa un genou à terre pour se mettre à sa hauteur. Ensuite, elle continua en prenant des accents enjôleurs et une articulation soignée, presque comme elle expliquerait les choses à un enfant.
-Murillo, vous l'avez dit vous-même : Christian est très faible en ce moment. Il ne vaudrait mieux pas surcharger son organisme de substances étrangères. Pour l'instant, laissons-le se reposer pendant que je vais prendre l'air. Je suis certaine que tant que vous serez auprès de lui, absolument rien ne pourra lui arriver.
-Mademoiselle, vous êtes charmante et votre confiance me touche beaucoup, toutefois en tant que médecin j'estime...
Élice éprouva le besoin soudain de refermer sa main sur la nuque du nain puis de le jeter par la fenêtre. Réprimant partiellement cette envie, elle resserra sa prise en pinçant la peau lâche de son interlocuteur, puis termina sa phrase :
-Que trop d'agitation dans cette pièce serait néfaste à tous points de vue.
La répartie du nain se mua en glapissement de douleur lorsque les doigts fins d'Élice s'approchèrent dangereusement de son cou replet.
-Vous n'êtes pas de cet avis ? demanda-t-elle avec un étonnement presque sincère.
Le sourire qu'arborait Élice lui indiqua que si.
Dix minutes plus tard, la jeune femme se trouvait affalée sur une chaise bancale devant une boisson bleue claire qui produisait des bulles du diamètre de son auriculaire. Les derniers évènements l'avaient exténuée, et c'est l'esprit vide qu'elle sirotait son cocktail sans même se demander d'où lui venait cette teinte et ce goût. Elle se souvenait indistinctement d'un aller-retour au milieu d'une salle bondée. Des gens plus flous les uns que les autres, ainsi qu'un gros volatile qui la dévisageait étrangement. Arrivée au comptoir, elle avait commandé "la même chose" que le client précédent, qui avait marmonné le nom alambiqué d'une mixture piscifructomachinchose. Et ça n'était pas mauvais, en définitive.
L'oreille en alerte, elle préférait se penser occupée à glaner des informations dans les conversations alentour. Dans les faits, elle ne percevait guère qu'un bruit de fond nébuleux dont la monotonie possédait quelque chose d'apaisant. À moins qu'il ne s'agisse d'un des effets secondaires de la boisson. Dans tous les cas, la plupart de ses vertèbres semblaient s'en satisfaire et cesser de la lanciner.
Les remous causés par l'arrivée impromptue d'une inconnue accompagnée d'un blessé étaient quasiment inexistants, signe que de tels drames faisaient partie du quotidien dans cette contrée sauvage. Néanmoins, des chatouillis épars persistaient à la suivre depuis sa première visite chez Murillo, le rebouteux et usurier du village. Sa présence avait été remarquée, mais sans mauvaises intentions. Du moins de ce côté-là.
Il y avait autre chose : un sentiment plus pointu, affûté. Une volonté précise et vaguement malveillante. Dont les intentions étaient imminentes. Soudain, une vibration intense secoua sa cuisse droite. Brusquement rappelée à la raison, elle chassa ce délire récurrent de ses pensées et porta discrètement le communicateur à son oreille. Accoudée à la table devant elle et sa chevelure blonde retombant par-dessus l'appareil, celui-ci était invisible aux yeux d'un observateur inattentif.
-Oui ? répondit-elle à voix basse.
-Élice. J'ai du nouveau pour toi, annonça la voix joyeuse de Johanes.
-Vous êtes tirés d'affaire ? demanda l'intéressée d'un ton las.
-Absolument. Notre adversaire a abandonné la poursuite, la coque est de nouveau étanche et la plupart des avaries ont été maîtrisées. Néanmoins, ce n'est pas pour autant que je comprends mieux le fonctionnement de certaines parties de ce rafiot.
-Ça, je veux bien le croire, confirma Élice.
-Concernant ton affaire, nous t'expédierons par "pigeon" de quoi satisfaire ton créancier d'ici quelques jours. Tâche de le tenir en haleine d'ici-là. En passant, as-tu des nouvelles de Tepotl et des autres ?
-Pas la moindre. Je ne les ai pas revus depuis que nous nous sommes séparés après avoir débarqué sur la plage. Et je n'ai pas la moindre idée de ce que notre cher capitaine a envoyé son gorille tramer par ici. Pas plus que je ne sais pourquoi il ne répond jamais lorsque je cherche à le joindre.
-Parce qu'il est le capitaine, expliqua patiemment Johanes, et que cette fonction l'autorise à conserver le silence quand on l'interroge, ainsi qu'à garder secrètes certaines informations en sa possession. J'ajouterai même qu'une telle pratique s'avère indispensable au succès de bon nombre de missions. Alors s'il-te-plait, cesse de te persuader qu'il complote dans le dos de son équipage. Tu t'es portée volontaire en toute confiance, n'est-ce pas ?
-Naturellement, grommela Élice. Et toi donc ?
-Moi ? La voix de Johanes trembla le temps d'une syllabe. Moi aussi, bien sûr.
-Toujours aussi optimiste. Je t' envierais presque.
-J'en suis flatté. À plus tard, conclut le maître artilleur.
Accoudée à une table rafistolée et la tête perdue entre ses mains, Élice se demanda distraitement où se trouvait exactement la limite entre optimisme et naïveté. Puis ses pensées dérivèrent à nouveau vers des considérations plus confuses, alors que son esprit était happé par la fatigue.
Une fois son appel terminé, Johanes se rendit compte qu'il frissonnait. Un froid glacial avait envahi les salles supérieures du Dichotomic depuis peu. Pour empêcher l'eau de mer de se déverser dans l'habitacle, il avait fallu sceller la brèche par une couche de glace maintenue artificiellement. Et la meilleure manière d'y parvenir sans puiser outre mesure sur les capacités énergétiques du réacteur impliquait de couper le chauffage dans les parties sinistrées, ainsi que d'éviter toute navigation dans les courants chauds.
Du fait de ces deux paramètres, la majorité de l'équipage s'était réfugiée dans les niveaux inférieurs du submersible, là où les radiateurs fonctionnaient encore. Seul le personnel minimum était en poste dans la zone frigorifiée, et bien que Johanes n'en fasse normalement pas partie, il avait choisi de prendre un quart pour passer son appel en toute discrétion. Le capitaine avait en effet interdit de divulguer la moindre information à propos de l'incident des ballasts aux membres d'équipage. Pas avant d'en savoir plus. Il ne désirait bien évidemment à aucun prix que chacun y aille de sa petite théorie au sujet du mécanisme de défense derrière la porte, puis de sa petite expérience afin de la vérifier.
Johanes lui-même n'eut rien su de cette affaire si en qualité de maître artilleur il n'avait pas été inspecter les lance-torpilles hors-service à l'avant du submersible, et constaté fortuitement la présence d'une seconde porte blindée à la gâchette facile un niveau en dessous. Fort heureusement, le tir fut déclenché non par lui mais par une brusque émission de fluide pulseur au plafond alors qu'il effectuait une série de tests sur les systèmes hydrauliques. Entre la détonation caractéristique qu'il entendit d'en haut, la tâche noircie et fumante qu'il aperçut en allant voir ce qui s'était produit et ses connaissances en balistique, Johanes localisa rapidement la position du tireur cybernétique.
Peu après, il était allé rapporter les faits en haut lieu, et il avait reçu les consignes de rigueur concernant ce problème. Désormais, pour tout le monde exceptés le capitaine, Gros Bob, Élice, Christian, l'équipe médicale et lui, n'avait officiellement eu lieu qu'un accident dû à un chalumeau défectueux. Les zones incriminées étaient quant à elles mises en quarantaine et interdites d'accès "pour raisons techniques de sécurité".
Johanes jeta un coup d'œil à l'horloge électronique soudée au plafond. Il était temps de rentrer dans sa cabine. Le trajet lui parut ne durer qu'un instant et lorsqu'il referma la porte, il trouva un seul lit occupé sur les trois. Son propriétaire dormait profondément. Faire chambre commune était une des choses qu'il avait le plus de mal à réapprendre dans la vie à bord. Lentement, il s'approcha du coffre métallique à l'extrémité de son lit, composa la combinaison et regarda longuement à l'intérieur. Un petit rire lui vint aux lèvres en considérant le tricorne et le petit manuscrit jauni.
-Oui, murmura-t-il pour lui-même. Prendre part à cette mission était la bonne décision.
Je lis toujours vos avis avec grande délectation. Soyez impitoyables.
Dernière édition par Robert Begarion le Sam 29 Oct 2011 - 13:36, édité 12 fois (Raison : Pose d'écoutilles supplémentaires. Ne pas gêner les vitriers.)
Robert Begarion- Dix de Cœur
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DT12 – chapitre huitième
Petit supplément pour compenser le retard.
- Spoiler:
- DT12 – chapitre huitième – Incognito
Sous un entrelacs d'exhalaisons variées, arômes de cuisson et fumets ragoûtants comme effluves de sueur et relents de tabac, une table circulaire au doux parfum de cèdre trônait au sein d'un royaume capiteux. Entre six yeux, ses occupants partageaient bonne chère et breuvage corsé sous le prétexte glissant de faire le point sur leur situation. Le plus grand, un mâle de type nordique à la voix assurée, tentait de s'innocenter aux yeux des deux autres à l'aide d'une gestuelle animée qui faisait décrire des arabesques de fumée à son cigare.
-D'une part je ne pouvais pas savoir jusqu'où cette affaire nous mènerait, alors ne faites pas comme si j'avais tout manigancé depuis le début. D'autre part je n'ai jamais prétendu posséder un brevet du type "prise en chasse de submersible ultra furtif à bord d'un engin aérien beaucoup trop rapide pour cet usage, sous des conditions météorologiques des plus déplorables". Vous pourriez vous estimer heureux que nous soyons parvenus à le suivre jusqu'ici, ce qui nous donne une idée générale de sa destination.
-Tu oublies, Igor, que l'idée de départ consistait plutôt à le stopper manu militari, corrigea le plus petit, qui paradoxalement était un grand pingouin. Avec une charge explosive minutée et larguée à sa verticale, il n'était pas supposé aller aussi loin.
-Voyais-tu une autre solution ?
-Pas vraiment, concéda Xut. Nous n'avons jamais songé à l'éventualité de combattre nos propres sous-marins, en conséquence de quoi personne n'a développé d'armes adéquates.
-Il n'empêche que celle-ci aurait pu fonctionner, si du moins elle avait atteint sa cible.
Un lourd silence s'installa.
-Hé, protesta la demoiselle à gauche de l'oiseau de mer, ne me regardez pas comme ça. Ce n'est pas de ma faute si ta trouvaille n'a pas produit l'effet que tu aurais souhaité.
-C'est vite dit, nuança Igor. Tu es quand même celle qui as procédé au largage.
-Parce que j'étais la seule d'entre nous apte à piloter un zinc, rétorqua Clarisse. Et compte tenu du nombre de débris qui dérivaient dans ces eaux-là, c'est déjà miraculeux que la bombe artisanale concoctée par notre artificier amateur n'ait pas explosé en surface.
-D'accord, admit Igor. Ne te vexe pas : faisons une croix sur ce bombardement raté.
Les trois militaires pesdans en civil firent une pause, le temps pour chacun de vider sa chope d'un trait. Ensuite, Igor recommença d'un ton légèrement plus enjoué.
-La bonne nouvelle, même si nous ne sommes pas parvenus à couler le Dichotomic, c'est que nous savons où il est parti. Or, repérer cet engin au sonar dans un périmètre raisonnablement réduit va être un jeu d'enfant.
-Surtout maintenant que le gros de la flotte en a fini avec les derniers fuyards Métissés, renchérit Clarisse en vidant son verre.
-Ouais, confirma Igor. J'ai entendu parler en jonglant sur les fréquences radio. Que s'est-il passé exactement avec ces pleutres, en définitive ?
-D'après les autorités, commença Clarisse, ils ont été repoussés dans un coin assez sinistre du côté des Glaces Mouvantes. Puis on leur a envoyé quelques salves bien ajustées pour leur flanquer une frousse sévère, et ils se sont dispersés comme des lapins.
-Rien d'autre ? s'étonna Igor.
-Le communiqué s'arrêtait là, en tout cas.
-Je croyais qu'on était sensés les nuker, ces sales bâtards ! s'emporta Igor.
La chaise du pesdan bascula largement en arrière alors qu'un Métissé massif et mal rasé venait de l'empoigner. Deux petits yeux cruels pointaient sur Igor, lui signifiant clairement que la dernière réplique était parvenue à ses oreilles.
-Tu disais, mon gars ? demanda l'homme d'un ton menaçant.
-Crétin enfumé, marmonna Xut à l'adresse de son camarade.
Sans manifester le moins du monde d'inquiétude, celui-ci aspira distraitement une bouffée à travers l'orifice du cigare chromé, puis répondit au Métissé avec un grand sourire :
-Ne t'affoles pas si vite, je parlais seulement de la fin de Blast of Destruction VII à mes potes. Décevante comme pas permis.
Pour appuyer son propos, il avait dégainé à l'instant une console portable bleu fluo. Les yeux étrécis du belligérant devinrent subitement exorbités, tandis que d'autres individus s'approchaient du trio, intrigués par la musiquette répétitive que produisait l'appareil.
-...
-...
Igor était coi, le voisin béant et la tête de Clarisse venait de choir entre ses mains.
-Et bien quoi ? Qu'est-ce que j'ai dit ?
-Tu t'enfonces, mon pauvre, se lamenta la militaire.
Puis le grand Métissé patibulaire se reprit soudainement :
-Hé, c'est quoi ce bidule ? Et puis tu viens d'où, toi ? Mais d'abord qu'est-ce que c'est que cette bestiole à côté de toi ? C'est pas de chez nous, une volaille pareille.
-Tu n'as jamais vu de phénix polaire ? répondit Xut, agacé.
-Polaire, pygmée et albinos ! martela Igor, son poing sur la table appuyant ses propos.
-Oui, exactement... grinça Xut avec un regard assassin.
La pression dans la pièce chuta doucement alors que le crâne hirsute du colosse semblait digérer les informations, ou bien cherchait une place adéquate pour cette nouvelle créature dans sa vision sommaire de la classification des espèces. Peu désireuse de lui laisser reprendre ses esprits, Clarisse prit la console portable des mains d'Igor et improvisa la suite de l'explication à l'adresse de leur détracteur :
-Regarde bien cet objet. On l'a ramené de Pesda après le raid. Il s'agit d'une sorte de jouet que les Piques fabriquent pour leurs têtards. Tu as des marmots, mon grand ?
-Bin, deux... Plus mon neveu en attendant le retour de ses vieux.
-Alors tu leur offriras de notre part, et ils se souviendront longtemps de cette bataille.
Et de lui remettre l'appareil au creux de son énorme main. Igor tenta aussitôt de protester, mais sa voisine l'interrompit avant qu'un son ne sorte de sa bouche.
-De toute façon tu as déjà fini ce jeu vingt fois, et puis je t'ai dit au moins le double que c'était pour les mioches. Tu t'en remettras, va.
-Pas sûr, marmonna Xut avec un petit rire.
Le Métissé examinait l'objet sous toutes les coutures, essayait les divers boutons à la surface jusqu'à trouver celui pour augmenter et diminuer le volume sonore. Il poussa bien entendu le réglage au maximum, et chacun des spectateurs fut grandement impressionné par la puissance du bruit généré par un si petit engin. Pas peu fière de son effet, Clarisse se recula sur son siège, bras croisés et sourire aux lèvres.
-Dites voir, se lança un autre Métissé, comment se fait-il que vous soyez déjà de retour alors que la flotte ne doit pas accoster avant plusieurs jours ?
-C'est très simple, expliqua Clarisse. Nous sommes des éclaireurs : premiers à partir, premiers à revenir. Afin d'éviter au gros des troupes de tomber dans les mêmes pièges que nous... en principe.
-Mais cela ne fonctionne pas toujours, termina Xut d'un air sinistre.
Cette altercation se concluant sans heurts, les clients retournaient lentement à leurs occupations. La concentration d'air enfumé au dessus de la table se libérait progressivement dans toute la salle. Apaisé, le nouveau propriétaire de l'ex console d'Igor salua les trois compères en s'arrêtant à nouveau devant le... phénix ?
-Au fait, toi : l'oiseau rare. Tu as un nom ?
Igor répondit au quart de tour :
-Bien sûr ! Il s'appelle pigl...
Clac. Le canon d'un gros revolver à plasma enfoncé sous le menton lui cloua le bec.
-Il s'appelle Xut, et lui aussi a rapporté un souvenir de Pesda.
Sur ces entrefaites, leur nouvel ami opéra une retraite discrète, laissant ces messieurs-dames régler leurs différends en privé. Xut rengaina tranquillement sa pétoire et commanda une nouvelle chope, aussitôt imité par Clarisse et plus tardivement par Igor.
-T'a-t-on déjà signalé que tu étais parfois excessivement susceptible ? demanda Igor.
-Susceptible ? répéta innocemment Xut. Mais point du tout, je remplissais seulement mon devoir de supérieur. À savoir prévenir une gaffe supplémentaire de ta part, que je sentais venir de manière imminente si je te laissais ouvrir ton clapet une seconde de plus.
-Xut a raison sur ce coup, trancha Clarisse. Ton bagout idiot et ta console qui l'est à peine moins ont bien failli nous démasquer. Voire nous faire pendre. Une bonne raison supplémentaire de t'en débarrasser. Honnêtement, tu aurais pu trouver quelque chose de plus crédible.
-Pourtant je n'ai rien inventé : la première fois que j'ai fini ce jeu, le sentiment d'exaspération mêlée de déception qui m'a envahi était sans précédent. Certains développeurs sont tout simplement incapables d'imaginer un scénario vraiment concluant. Le politiquement correct tuera le jeu vidéo, je vous le prédis.
Et le prophète conclut son oracle dans une gorgée désaltérante du breuvage local.
-J'ai joué à ton jeu, protesta Xut. Et je ne le trouvais pas si mauvais, moi.
-Tu es un pigeon moyen, railla Igor. Tu manges ce qu'on te jette sans le moindre esprit critique. Je préférais de loin HolyRampage : Winter is coming, où on purifie tous les continents par l'hiver nucléaire pour gagner. Ça, c'est un concept audacieux.
-Tu parles du jeu officiel de la branche nihiliste du clergé, je me trompe ? demanda Clarisse.
-N'empêche que ces types connaissent le sens du mot "fun".
Subitement, l'attention de Clarisse fut retenue par un mouvement en face d'elle, au fond de son champ de vision. Elle se leva lentement en adressant un signe de tête à ses compagnons. Ceux-ci, d'abord intrigués, se doutèrent vite de quoi il s'agissait.
-C'est l'espion qu'on nous a indiqué, pas vrai ? interrogea Igor.
Clarisse ne pipa pas mot, mais Xut hocha la tête en acquiescement.
-Le contact nous a bien spécifié : une seule personne, qui ne doit rien laisser paraître.
-Ce sera long, à ton avis ?
-Aucune idée.
Le regard du pingouin vadrouilla à travers la salle et au travers des effluves émises par le cigare d'Igor. Il suivit quelques instants une chevelure blonde jusqu'au bar, puis revint sur le fond de sa chope. Xut étudia l'éventualité d'en commander une autre, mais y renonça. L'alcool lui montait amplement assez à la tête et compte tenu de l'olibrius à côté de qui il était assis, toute sa concentration n'était déjà pas suffisante.
-Une partie de cartes, en attendant son retour ? proposa Igor.
-Avec joie. Tu as retiré les rouges et les noires, pour qu'on ne se fasse pas remarquer ?
L'homme était encapuchonné, portait des gants et sa cape descendait plus bas que ne montaient ses bottes. Seuls quelques cheveux descendant sur son col offraient une garantie de son humanité. Quoiqu'il aurait aussi bien pu s'agir d'une perruque pour ce que pouvait en apercevoir Clarisse. Distraitement, elle se demanda si l'odeur dégagée par l'espion était également un stratagème pour masquer son identité. Une toux légère interrompit là cette réflexion.
-Vous cherchez un groupe d'individus en particulier.
-Oui. En revanche, je ne sais pas exactement ce que je peux vous dire à leur sujet.
-C'est inutile. Je suis celui qui doit vous délivrer des renseignements.
-Ah... Très bien.
-Certains d'entre eux ont pris pied non loin d'ici. Ils sont venus rencontrer quelqu'un.
-Qui est-ce ?
-Navré. Je suis dans l'incapacité de vous donner un nom.
-C'est bien dommage. Comment puis-je trouver cette personne ?
-Plus au sud, il y a de grandes bâtisses à la lisière de la jungle. Vous les trouverez facilement, ce sont les seules faites en pierres à plusieurs lieues à la ronde. Celle avec qui ils traitent habite là-bas. Soyez-y dans quatre jours à la tombée de la nuit, et vous pourrez lui parler. Si vous venez seule et désarmée, elle ne se méfiera pas.
-Je suppose que vous ne me direz pas d'où vous tenez ces informations.
-Ce serait difficile, en effet.
Intriguée, Clarisse tenta de capter un regard sous l'habit de son interlocuteur. Celui-ci rabaissa son capuchon et reprit la parole :
-Vous faut-il trouver autre chose ?
-Si je le savais.
-Navré, je ne peux pas vous apporter le savoir.
-Et eux, ces gens que nous poursuivons : que cherchent-ils ?
-Je crois qu'à l'heure actuelle ils l'ignorent encore.
-Ils doivent pourtant bien posséder un objectif. En ont-ils après nous ?
-Pas directement, non. Pour le moment ils fuient, et ils pensent vous avoir semés.
-C'est une bonne nouvelle.
L'homme resta silencieux.
Les neurones de Clarisse s'agitaient intensément. Elle expliquait à ses deux acolytes le plan qui avait germé dans son esprit. D'ici quatre jours, elle irait seule à ce rendez-vous et obtiendrait des informations concernant les voleurs. Si par chance ils se trouvaient encore sur place, elle pourrait alors les prendre en filature. Il lui faudrait penser à emporter la combinaison de camouflage nocturne stockée dans la soute de leur appareil. Pendant ce temps, Igor et Xut rejoindraient les renforts demandés et commenceraient à quadriller la côte au sonar. L'idéal étant d'immobiliser le groupe à terre pendant que les troupes pesdanes donneraient l'assaut sur le Dichotomic. Cette fois-ci, une torpille au niveau des turbines permettrait de capturer l'équipage indemne au prix de quelques dommages superficiels. Et dans moins d'une semaine, on saurait enfin tout sur leurs motivations.
Curieusement et sans parvenir à l'expliquer, Clarisse se demandait jusqu'à quelle étape cette suite d'évènements se déroulerait-elle sans accroc.
Dernière édition par Robert Begarion le Ven 28 Oct 2011 - 19:45, édité 13 fois (Raison : Dissipation des effets éthyliques.)
Robert Begarion- Dix de Cœur
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Re: DT12
Hum...
J'exige que tu codes sur le champ une version de HolyRampage : Winter is Coming en Java =p
A part ça... Il faut que je refasse le tri dans le bordel qui me sert de pensées...
Je trouve que le petit extra avait plus de contenu que le premier texte ;) Nan, sérieusement, il y en a à peu près autant dans les deux. Et globalement, les deux présentent un rythme assez lent qui n'est pas sans rappeler les derniers tomes du trône de fer. D'où la question du lecteur : mais où est-ce que tu veux en venir à la fin ?
J'exige que tu codes sur le champ une version de HolyRampage : Winter is Coming en Java =p
A part ça... Il faut que je refasse le tri dans le bordel qui me sert de pensées...
- Spoiler:
- En gros Xut et sa bande sont une bande de Piques qui se font passer pour des Métissés pour tenter de faire couler un sous-marin pique kidnappé par des... Euh... On sait pas trop en fait, mais probablement des gens avec des pouvoirs en rapport avec l'eau puisqu'ils peuvent geler l'eau dans les ouvertures. Et ils ont des connaissances en rapport avec la technologie. Ça pourrait être des Piques, sauf qu'ils ont volé un sous-marin pique. Zarb.
La réussite n'a pas été au rendez-vous, le sous-marin a survécu et des membres du groupe ont manqué les faire griller auprès du groupe avec une game boy.
Et pendant ce temps, Elice coule des vacances paradisiaques sur une île déserte aux frais du patron, allonge de plus en plus la facture dudit patron pour s'en venger, et trouve encore le moyen de se plaindre.
Je trouve que le petit extra avait plus de contenu que le premier texte ;) Nan, sérieusement, il y en a à peu près autant dans les deux. Et globalement, les deux présentent un rythme assez lent qui n'est pas sans rappeler les derniers tomes du trône de fer. D'où la question du lecteur : mais où est-ce que tu veux en venir à la fin ?
Jack- Joker Gris
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Re: DT12
Je sais précisément où je veux en venir. Mais pour y aller, il me faut passer par plusieurs longs et fastidieux chapitres. Et comme je n'aime pas souffrir seul, ils vous seront infligés sans pitié.
Note au passage que l'auteur a été extrêmement brouillon puisque ces chapitres ont été postés au jour de finition, sans le crible de relecture rigoureux du lendemain.
Un saccage en règle est possible dans un avenir proche.
Note au passage que l'auteur a été extrêmement brouillon puisque ces chapitres ont été postés au jour de finition, sans le crible de relecture rigoureux du lendemain.
Un saccage en règle est possible dans un avenir proche.
- Spoiler:
- La moitié de tes conclusions sont dues à des erreurs de logique flagrantes de ta part, ou des insuffisances explicatives de la mienne. Ce sera vérifié.
Dernière édition par Robert Begarion le Mer 17 Mar 2010 - 13:07, édité 1 fois
Robert Begarion- Dix de Cœur
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Re: DT12
Je poste bientot mon analyse... ca fait deux fois que je la perds et j'en ai marre.
Wolfgang- Le Monde
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Re: DT12
Raaaaaah mais pourquoi est-ce que je n'avais pas lu le chapitre de noël ??????? J'ai du retard pour le DT TT_TT tout triste Parthé u_u
*Plus qu'à lire les trois chapitres... ^^"*
*Plus qu'à lire les trois chapitres... ^^"*
Parthénis [PNJs]-
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Re: DT12
Ok voilà:
- Spoiler:
- L'équipe du sous-marin ne sont pas nécessairement des Piques. Il ne faut qu'un seul ayant le pouvoir de la glace pour créer une couche de glace. Celui-ci peut être soit rebelle soit banni de Pesda. Et pour savoir manœuvrer le submersible et avoir quelque connaissances ne veut pas expressément dire que tu vis parmi. Je n'ai ni d'auto ni mon permis de conduire, mais je sais parfaitement comment un moteur fonctionne. Ensuite, prenons l'exemple du 11 septembre. Les terroristes n'avaient jamais pris un manche dans leurs mains et ils ont réussi à atteindre leur cible (cette exemple ne fonctionne pas si vous croyez à la théorie du complot). Donc je me doute que l'ensemble de l'équipage est un ramassis de rebelles.
J'adore l'idée du phénix polaire. Je l'ai trouvé vraiment drôle. Ensuite, Xut et compagnie sont à la poursuite du capitaine et de son équipage présent sur le continent Métissé. Ils savent donc plus ou moins vers où se diriger sans savoir leur objectif final (ça vaut pour les deux groupes).
Élice ne coule certainement pas des vacances paradisiaques car elle aimerait plus être dans le feu de l’action que de surveiller Christian. Ensuite, je trouve étrange que le capitaine veuille bien payer une forte somme pour la bonne convalescence du blessé. Habituellement, lorsqu'un membre d'équipage à plus ou moins de la valeur, le capitaine ne dépenserait pas de l'argent pour le voir se remettre sur pieds. De plus je crois qu'il préfère éloigner Élice pour une raison que je n'ai pas encore trouvée.
Wolfgang- Le Monde
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Re: DT12
robert reste bien muet à mon analyse... aurais-je eu raison?
Wolfgang- Le Monde
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Re: DT12
C'est une provocation ? ^^
Robert Begarion- Dix de Cœur
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Re: DT12
Non, mais tu as répondu à Jack suite à son analyse qui sort d'on-ne-sait-où, et a la mienne rien. Je vais commencer à croire que mes idées ne sont point lues
Wolfgang- Le Monde
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Re: DT12
À mon grand dam, je ne puis lire tes idées (pas de sort de télépathie dans le répertoire du paladin, va te plaindre à Wizards of the Coast) J'apprécie néanmoins ta fine appréciation de l'analyse de Jack, qui est effectivement brouillonne, maladroite et inconsistante. Honte à lui.
Quant à ce que j'en pense, de tes fines déductions :
Quant à ce que j'en pense, de tes fines déductions :
- Spoiler:
- La constitution de l'équipage t'intrigue manifestement, et c'est très aimable à toi de comparer mes personnages à une poignée d'islamistes fous furieux. Je crois qu'ils apprécieraient beaucoup (faites un effort, que diable. Je veux un Godwin pour la prochaine fois) Soit dit en passant même dans la version officielle les terroristes avaient déjà piloté en aéroclub. Tu as néanmoins raison sur un point : il faut bien que certains d'entre eux aient pêché leurs compétences quelque part. Mais l'océan est vaste.
Les motivations du capitaine Ectasiltémoc n'appartiennent qu'au capitaine Ectasiltémoc, et je serais bien en peine de te dire pourquoi il veut se débarrasser d'Élice mais s'assurer que Christian reste en vie. De mon propre avis, je ferais plutôt l'inverse ;p
Ravi enfin que les pitreries de mes trois clowns pesdans suscitent quelque amusement chez toi (quelqu'un ici a-t-il vraiment cru que ces guignols allaient avoir un rôle utile dans le scénario ?)
Robert, le Maléficieux
PS : le mode Parthé est VRAIMENT pratique pour les justifications : je ne sais rien, je découvre en même temps que vous. C'est tout bonnement génial, comme approche ^^
Dernière édition par Robert Begarion le Ven 28 Oct 2011 - 16:29, édité 1 fois
Robert Begarion- Dix de Cœur
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DT12 – chapitre neuvième
Bien qu'il m'en coûte, je vais devoir en venir au fait un jour, et laisser de côté mes velléités de paraître mystérieux. Or il se pourrait qu'aujourd'hui soit ce jour.
(surtout Wolfy :p)
- Spoiler:
- DT12 – chapitre neuvième – Les abysses silencieuses
-Six cent cinquante mètres.
La voix laconique et préprogrammée du calculateur de trajectoire semblait elle-même rechigner à briser le lourd silence qui enveloppait la passerelle. Chaque homme d'équipage avait reçu pour consigne stricte de rester à son poste jusqu'à nouvel ordre et d'obéir aux directives qui apparaîtraient sur son écran, sans communiquer de vive voix. En outre, l'usage des hauts-parleurs disséminés dans l'ensemble du bâtiment était réduit au strict minimum : annonces de profondeur, de turbulences et d'avaries. Et encore ces dernières avait-elles été depuis longtemps réduites aux seules avaries non-signalées jusqu'alors, sans quoi la sirène de bord ne se taisait jamais.
Muni d'une expression faciale aussi opaque qu'à son habitude, le capitaine explorait les possibilités qui s'offraient à lui compte tenu de la situation actuelle. Cent cinquante mètres plus bas se trouvaient quelque part les restes mutilés d'une cité d'un autre temps. Le sonar ne repérait encore rien qui s'approche d'une construction, néanmoins plusieurs raisons expliquaient aisément ce phénomène. Tout d'abord, les émetteurs étaient actuellement réglés au minimum de puissance. Ensuite, si leur profondeur avait été déterminée avec exactitude, les coordonnées cartographiques de ces ruines n'étaient pas connues précisément. Enfin, le relief sous-marin de cette région était colossalement accidenté, comme si les lieux avaient été témoins d'un cataclysme dépassant l'entendement. Le Dichotomic avait à plusieurs reprises frôlé des morceaux de roche déchiquetés assez gros pour contenir une dizaine de submersibles du même tonnage. On pouvait aussi voir par endroits les silhouettes indistinctes d'imposantes arches de pierres, suggérant que des colonnes aient pu sortir verticalement du sol marin jusqu'à des hauteurs impressionnantes avant de basculer dans l'océan. Éventuels vestiges toujours debout de tels évènements, de formidables pics rocheux reliaient encore le fond de l'océan et la surface des flots, contraignant le Dichotomic à plusieurs écarts de trajectoire.
Par ailleurs, les images prises par les caméras intégrées dans la coque étaient transmises sur grand écran dans chaque compartiment. Or la vision apocalyptique de ces titanesques formations rocheuses, figées au milieu des eaux par le temps et les courants marins n'était pas non plus pour rien dans le mutisme presque complet qui régnait à bord.
-Nous avons peut-être repéré quelque chose, murmura une voix derrière Ectasiltémoc.
Celui-ci ouvrit les yeux, mais ne se retourna pas. Ses dix doigts en suspension au dessus de son pupitre, il attendait silencieusement que Johanes poursuive. Néanmoins, son esprit bouillonnait déjà au son de ce "peut-être" qu'il n'appréciait guère. De nouveaux impondérables viendraient perturber ses prévisions. Les évènements de ces jours-ci avaient pourtant été planifiés par lui jusqu'aux détails les plus insignifiants. Seulement, la réalité a ceci de terrifiant qu'une certitude n'y est jamais absolument acquise.
-Les irrégularités du relief se font plus... régulières à trois heures. On aperçoit également des formes singulières sur les relevés. Il pourrait s'agir d'habitations.
Toutes ces incertitudes fâchaient considérablement Ectasiltémoc.
-Il "pourrait", dites-vous ? demanda-t-il d'un ton courroucé.
-Les images sont extrêmement floues. Il est déjà formidable qu'on aperçoive quoi que ce soit à une telle profondeur. Ces senseurs Piques sont hors du commun, mais atteignent en ce moment leurs limites. De plus, il demeure possible que nous ne possédions pas d'autres appareils permettant une amélioration des prises de vue.
En réalité, plusieurs personnes à bord s'étaient étonnés qu'on puisse simplement accomplir ce voyage au regard du nombre d'équipements déclarés absents. Outre les lance-torpilles et quelques pans de tuyauterie, il s'agissait pour l'essentiel de capteurs, d'indicateurs et de commandes manuelles théoriquement indispensables qui semblaient avoir été retirés du Dichotomic. Après mure réflexion, Ectasiltémoc avait émis l'hypothèse vraisemblable que les ingénieurs pesdans, dont la prévoyance confinait notoirement à la paranoïa, avaient prévu un grand nombre de systèmes auxiliaires afin de parer à toutes les pannes possibles et imaginables. Les fonctions remplies par les appareils de bords manquants avaient donc sans doute étaient déplacées sur d'autres systèmes par un processus automatisé.
Cette théorie expliquait également deux autres problèmes majeurs : tout d'abord les équipements de secours étant déjà en action, le Dichotomic devenait désormais beaucoup plus vulnérable à toute nouvelle avarie ; d'autre part les automatismes ayant pris le relais, l'équipage avait beaucoup moins de contrôle sur le sous-marin.
-Sept cents mètres.
La coque grinça. Les dents de Johanes l'imitèrent. Les dernières réparations effectuées avant la plongée paraissaient de premier abord impeccables. La trouée infligée à la coque supérieure avait été proprement comblée et aucun problème d'étanchéité n'avait plus été déclaré depuis lors. Toutefois, jamais encore cet équipage-ci n'avait conduit le submersible à une telle profondeur. Ses spécifications l'y autorisaient, avec un plancher théorique de neuf cents mètres, mais cette théorie incluait un bâtiment entièrement fonctionnel et muni de tous ses équipements. La documentation, si riche en indications farfelues, ne précisait en revanche rien concernant d'éventuels grincements de la coque lors des plongées à grande profondeur. Et il faudrait descendre encore davantage pour atteindre cette supposée cité engloutie.
Un nouveau relevé du sonar chassa les angoisses de Johanes, pour les remplacer par d'autres. Cet écho indistinct à l'arrière du bâtiment était toujours le même, il n'avait désormais plus de doute à ce sujet. Mais son orientation changeait, ainsi et surtout que la distance qui le séparait du Dichotomic, indépendamment du cap et de l'allure tenus par celui-ci. Il fit donc part de ses soupçons au capitaine, qui entretemps avait de nouveau sombré dans son étrange méditation, tel un pianiste savourant la mélodie de son instrument sans même que ses mains ne se posent sur le clavier.
-Vous dites que nous sommes poursuivis par... quoi donc ?
Le ton était plus curieux qu'inquiet, et cette fois-ci il n'avait pas ouvert les yeux.
-Une... Perturbation. Je ne peux rien affirmer de plus précis. Cette anomalie est apparue peu après notre arrivée dans cette région accidentée. Cela coïncidait à peu de chose près avec votre ordre d'adopter l'allure furtive, j'estimais donc jusqu'ici qu'il s'agissait d'une conséquence involontaire du régime particulier auxquels nous soumettons les turbines MHD. Néanmoins après réflexion, je doute sincèrement que nos propulseurs puissent générer un tel mouvement d'eau, sans compter que celui-ci ne parait pas se mouvoir en corrélation directe avec notre trajectoire.
-À ceci près que cela nous suit.
-Si on veut. Il n'y a pas à proprement parler de poursuivant, mais une singularité aquatique semble nous prendre en filature. Ou en chasse, ajouta-t-il sinistrement.
Le maître artilleur ne s'était pas seulement étonné de ne pas avoir repéré de masse physique de leur hypothétique antagoniste, mais de ne plus avoir repéré la moindre forme mouvante quelconque dans les environs depuis un temps certain. Cela faisait plusieurs heures qu'aucun poisson n'avait perturbé les échos radars du Dichotomic. La netteté des relevés qu'il épluchait devenait de plus en plus effrayante.
-Rassurez-vous, énonça posément Ectasiltémoc, il est tout à fait probable qu'une créature de taille monstrueuse et disposant d'une totale capacité d'occultation nous observe actuellement avec des intentions malveillantes.
Cette fois-ci, chaque personne présente sur la passerelle avait pu entendre la réplique du capitaine, ce sur quoi ses retombées brisèrent quelque peu l'ambiance silencieuse présente jusqu'alors. Après quelques interactions chaotiques, les embryons de discussions houleuses s'achevèrent en autant de questions formulées ou non à l'adresse de l'homme juché sur le siège en promontoire au centre de la pièce.
-J'avais exigé un silence complet, commença le capitaine Ectasiltémoc.
Les regards le fustigeant de toutes parts comme les murmures dans les rangs n'avaient toutefois que peu l'air disposés à le lui accorder.
-Précisément pour éviter d'attirer ce genre de problème sur nous, continua-t-il sans se démonter. Cet espoir était assurément naïf, je vous l'accorde volontiers. Néanmoins, je vous demande aussi de conserver le silence ainsi que cette allure furtive afin de ne pas indiquer que nous l'avons repéré à notre... (il hésita quant à quelle dénomination choisir) opposant. Sans quoi il pourrait décider de passer à l'attaque.
-Et saura-t-on de quel genre de monstre il peut s'agir ? demanda poliment l'homme des renseignements, qui semblait toujours en recevoir plus qu'en fournir au capitaine.
-Nous nous trouvons sur le site d'un cataclysme ayant jadis conduit à engloutir une cité entière, peut-être même une civilisation, éluda Ectasiltémoc.
-Vous parlez d'un peuple autre que les Trèfles, les Piques, les Cœurs et les Carreaux ? reprit Gavilan avec scepticisme.
-Je n'en sais fichtre rien, voyez-vous. Je sais seulement qu'il y a là une gigantesque tombe anonyme, et qu'il n'existe en ce monde qu'une poignée d'êtres capables de faire de la charpie avec ce qui pourrait être un continent entier, puis d'en envoyer les restes par huit cent mètres de fond au milieu de nulle part.
Un moment d'incertitude suivit cette affirmation.
-Donc selon vous, un Joker serait responsable de la destruction de ce lieu.
-Qui d'autre ? Cependant je ne m'arrête pas là. Un seul d'entre vous a-t-il jamais entendu une rumeur, une légende ou même un conte de grand-mère concernant le déclin puis la chute au fond des océans d'une quelconque ville autrefois florissante, qui aurait par malheur provoqué le courroux divin ?
-Ma foi...
-On dirait une histoire de prêtre pour faire peur aux enfants, jugea le timonier.
-Mais aucune à ma connaissance ne fait mention d'un tel désastre, conclut Gavilan.
-Et pourtant une cité, peut-être même une métropole, a ici existé. Puis fut ravagée par la fureur d'un ou de plusieurs Jokers. Or personne n'en sait rien. Pourquoi ? Ce n'est pas uniquement une question de temps ou de mémoire collective, mais de volonté. Tout a été fait pour que personne ne se souvienne de cet évènement, comme si les Jokers eux-mêmes voulaient oublier ce qui s'est passé ici... Ce qui soulève un paradoxe.
-Sept cent cinquante mètres.
Glissant entre les noires eaux des profondeurs dans un bourdonnement feutré, le Dichotomic était plus silencieux que jamais. Il survolait maintenant les restes en piteux état de l'objectif de sa quête. Il y avait là des constructions éparpillées en tous sens, à la façon dont un enfant aurait empilé des cubes avant de les renverser sur le tapis. À ceci près que chaque édifice était grandeur nature. Les caméras enregistraient des images de tours allongées au milieu des rues et de ponts distordus qui n'étaient plus rattachés au sol que d'un bord. D'innombrables petits détails agrémentaient ce tableau, sous forme de véhicules écrasés et jetés en tous sens, de clôtures arrachées et de câbles dérivants. En revanche, aucun être vivant -végétaux compris- n'avait laissé ici de restes visibles. Ceci dit, les eaux avaient disposé d'une éternité pour pourrir le bois et dépouiller la chair pour ensuite fertiliser d'autres régions au gré des courants marins.
Ou bien de nourrir des créatures telles que celle qui continuait inlassablement à suivre le submersible. Selon les théories du capitaine Ectasiltémoc, de telles choses pouvaient entre autres causes être responsables de l'absence totale de vie en ces lieux, chargées de dévorer tout être ayant le malheur de s'y trouver. Cette idée hantait pour l'heure les individus sur la passerelle, observant autour d'eux l'immense charnier au sein duquel on avait enterré à jamais une ville dont ils ne savaient rien. Une ville dont les Jokers eux-mêmes avaient peut-être oublié l'existence. S'ils le voulaient bien. Mais comment bannir de sa mémoire un souvenir pénible tout en ayant la certitude que nul n'est occupé à la faire ressurgir des abysses ? L'inconscient d'un mortel le protégerait de l'aliénation, en le faisant vivre dans l'illusion que sa cachette est sûre. L'inconscient d'un Joker s'en assurerait.
Présentement, cet inconscient était tapis à l'angle d'un pan de boulevard disloqué et d'un clocher éventré, quelque part dans le sillage du Dichotomic.
-Huit cents mètres.
Comme pour ponctuer le timbre monotone de l'annonce, la paroi supérieure de la coque émit un gémissement des plus inquiétants. Le submersible naviguait désormais au cœur des édifices engloutis, et n'aurait plus besoin de descendre davantage. Les tubes à torpilles non fonctionnels avaient été reconvertis en lanceurs d'engins, et plusieurs capsules monoplaces en sortiraient pour explorer l'intérieur des bâtisses dès que le bon plaisir du capitaine aurait jugé qu'un site de fouilles particulier était digne d'intérêt.
Quant au monstre invisible, plus une trace de lui sur les relevés. Soit il avait perdu de vue ses visiteurs grâce à une habile manœuvre d'esquive du timonier entre les ruelles...
-Soit il s'est finalement aperçu que nous l'avions repéré, et a remédié au problème en se déplaçant de manière plus furtive, supposa le timonier.
-Et comment procéderait-il ? l'interrogea Zloth en délaissant ses instruments.
Un nouveau grincement secoua le sous-marin, plus violent que le précédent.
-De la même manière que nous, en circulant au ras du sol dans les avenues.
-Mordjok, tu as raison ! jura Zloth entre ses dents, avant de reprendre ses senseurs en main et de les diriger chacun sur l'angle d'une rue adjacente.
Un autre et terrible crissement parcourut le Dichotomic, le faisant vibrer de part en part, suivi d'un net craquement qui se répercuta à travers toute la coque. Tandis que ses instruments s'affolaient, le timonier annonça d'une voix blanche :
-Trop tard, je le crains. Je viens de perdre les commandes du bâtiment.
À cet instant, les uns basculèrent contre le dossier de leur siège tandis que les autres furent catapultés par dessus. Les images sur les écrans pivotèrent d'environ cent quatre-vingts degrés, puis une nouvelle secousse ébranla la coque alors que le submersible se retournait entre les mâchoires de l'assaillant.
-Il nous tient, capitaine ! hurla Gavilan.
-Ne paniquez pas, commanda Ectasiltémoc d'une voix forte, bien que le choc ait manqué de l'écraser contre son pupitre de commande.
Johanes s'empressa de l'aider à se redresser, notant après-coup que suite à ses propres acrobaties, il se trouvait à présent de l'autre côté du fauteuil de commandement. Aussitôt relevé, Ectasiltémoc donna promptement ses instructions.
Johanes s'épongea le front, alors que son cœur battait encore la chamade. Les indicateurs devant lui étaient revenus au bleu pour une bonne partie et d'après ses derniers relevés, la structure cabossée mais intacte du Dichotomic reposait maintenant au milieu d'un hall de gare dévasté, après une traversée violente du mur frontal. L'ennemi était quant à lui reparti hors de portée du sonar après avoir tourné un moment autour du bâtiment, sans doute pour s'assurer que sa proie avait réellement eu son compte.
-Sérieusement, capitaine : vous avez dupé ce monstre avec un jet d'huile ? haleta-t-il.
-C'est prévu pour faire croire à un navire ennemi qu'il nous a bien coulé, certes, enchaîna une Gavilan en état de choc, mais cette créature nous repérait à la fois au bruit, au mouvement, peut-être même à la chaleur ou encore avec je ne sais quoi...
-L'huile pour lui indiquer qu'il avait ouvert une brèche, répondit placidement le capitaine Ectasiltémoc, la congélation instantanée des parois simulant l'emplissage fatal de l'habitacle tout en cachant nos présences encore bien chaudes, et... le silence. Il n'existe pas de meilleur allié.
Johanes ne savait quoi penser, pas plus qu'un seul de ses compagnons. Ne venaient-ils pas à l'instant de tromper une manifestation divine à l'aide d'une ruse de contrebandier ?
-Gardez toujours à l'esprit que si dans leur grande sagesse, les Jokers nous ont donné le pouvoir de comprendre leurs actes, ils nous ont dans leur grande insouciance fourni par là même le moyen de confondre leur jugement.
(surtout Wolfy :p)
Dernière édition par Robert Begarion le Sam 27 Oct 2012 - 20:12, édité 13 fois (Raison : Adaptation d'impédance propre)
Robert Begarion- Dix de Cœur
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Re: DT12
... Euh, Tepotl, il était pas sur le continent ?... Ou alors j'ai perdu le fil quelque part...
Rien d'autre à redire. C'est palpitant.
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Parthénis [PNJs]-
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Re: DT12
OO mince alors.
C'est le genre de truc que je repère à la correction, d'habitude (d'autant qu'il est puissamment inutile ici, cette phrase va passer à la trappe direct ><) Dorénavant, mes persos auront des puces GPS neuro-implantées.
Merci d'avoir démasqué cet imposteur, donc.
C'est le genre de truc que je repère à la correction, d'habitude (d'autant qu'il est puissamment inutile ici, cette phrase va passer à la trappe direct ><) Dorénavant, mes persos auront des puces GPS neuro-implantées.
Merci d'avoir démasqué cet imposteur, donc.
Robert Begarion- Dix de Cœur
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DT12 – chapitre dixième
Un mois, jour pour jour. Si seulement j'étais toujours dans mes temps impartis. La rédaction demeure un peu instable (au sens chimique du terme) donc à vous de voir.
Mon premier chapitre à deux chiffres (ému)
- Spoiler:
- DT12 – chapitre dixième – Archéologie
Lorsque le bourdonnement terne du traîneau amphibie se tut, les trois plongeurs furent à nouveau enfermés dans un univers silencieux. Plusieurs minutes leur furent nécessaires pour parvenir à déterminer que l'antichambre monumentale au centre de laquelle ils flottaient s'était affaissée sur son flanc droit. Un craquement assourdi fit se lever les trois têtes vers le mur qui officiait désormais de plafond à la pièce. Le bruit paraissait provenir d'un objet lourd dégringolant du sommet de l'édifice, probablement une flèche ou une sculpture qui avait cédé face aux assauts des courants. Ou ceux de la créature.
Un frisson traversa Gros Bob à la seule pensée de se trouver à nouveau confronté au gardien des lieux. D'après les dires du capitaine, il était vraisemblablement reparti rôder dans un périmètre plus large autour des ruines, en quête d'autres intrus puisqu'il croyait ceux-ci morts. Explication qui ne l'avait qu'à moitié persuadé de l'absence de danger. Étrangement, le concept d'explorer des décombres obscurs et parcourus de bruits inquiétants sous huit cents mètres d'eau ne l'enchantait guère.
Il rumina à nouveau dans son respirateur. Un appareil ne produisant ni bulles ni feulements saugrenus, bricolé à partir des échangeurs embarqués qui renouvelaient l'air du Dichotomic. En se dirigeant vers la statue effondrée qui occupait autrefois le centre de l'antichambre, Gros Bob songeait qu'Élice était bien plus qualifiée que lui pour effectuer ce genre de reconnaissance. C'est sûr, depuis qu'il n'était plus sous ses ordres, le petit Christian y gagnait au change. Il n'était pas en train de patauger dans les gravats pour dégager une porte récalcitrante, lui. Un autre point en faveur des respirateurs autonomes était la possibilité de s'énerver et de proférer des injures autant qu'on le souhaitait sans gaspiller ses réserves d'air.
Une fois le passage dégagé, les plongeurs firent avancer le traîneau à l'intérieur puis s'engagèrent à sa suite. Aucun d'eux n'avait encore compris la fonction du bâtiment, mais qu'elle soit politique, économique ou culturelle, ce qui importait était la présence (indiquée sur les panneaux muraux) d'une salle des archives. La pièce en question était bien plus petite que la précédente. Les projecteurs du traîneau y révélèrent un grand nombre d'appareils électroniques cabossés, troués et dont les composants internes dérivaient librement du sol au plafond. Tandis que Gros Bob cherchait désespérément un exemplaire encore intact, ses acolytes s'intéressaient davantage aux niches dans les murs. Des sortes de tubes vitrifiés s'y encastraient, mais eux aussi étaient pour la plupart éventrés et ne renfermaient qu'une bouillie orangeâtre présentant peu de valeur historique. Toutefois les tubes les plus éloignés de la porte étaient encore intacts, et des feuillets roulés semblaient y résider.
-Bob, Faren : je pense qu'on a trouvé des documents exploitables.
-Rangeons tout ça dans le traîneau, renchérit la seconde plongeuse.
-Bob ?
L'intéressé fouillait méthodiquement chaque carcasse d'ordinateur.
-Laisse-moi chercher encore un peu, Cyrina. Il doit bien y avoir une mémoire intacte dans tout ce bazar.
-Même si tu parvenais à en trouver, lui rétorqua-t-elle, ces vieux formats informatiques ne seraient probablement pas compatibles avec les nôtres. Cela prendrait des mois pour en extraire la plus petite information.
-Un avantage du langage decentan sur le jargon des machines, s'esbaudit Faren.
-Ouaip, grommela Gros Bob. La faute à toute cette brochette d'informaticiens incapables qui ont inventé ces appareils. Le monde entier parle un seul et même langage, mais il faut que dans leurs petites bulles, ils aient chacun le leur.
Bien vrai, ça. Pourquoi était-ce si compliqué ? Il lui faudrait poser la question à Christian. Sauf que Christian était actuellement très occupé à bronzer en bord de mer avec sa blonde attitrée pour changer ses bandages deux fois par jour. Sale gamin. Il n'y avait rien à faire : depuis l'incident de la porte, Gros Bob ne parvenait plus à détacher ses pensées de ce minus très longtemps. Même s'il refoulait en bloc toute impression de culpabilité, trouver le sommeil lui était plus difficile de jour en jour...
-Sérieusement, tu exagères Bob, répondit Cyrina. Aujourd'hui, tout est en standard PGF. Nos chers amis Piques ont fait là un effort remarquable pour uniformiser tous les standards préexistants.
-Mouais : ils sont très forts, c'est sûr, marmonna-t-il en reprenant le fil de la conversation. Trop forts même, parce que pendant qu'ils se pavanent avec leur nouveau format si parfait et dont ils nous font profiter au compte-gouttes, nous devons encore supporter les vieux calculateurs à vapeur qu'eux n'utilisent plus depuis cinquante ans.
-C'est vrai que ces antiquités pèsent leurs poids, déclara Faren. Mais personnellement, j'adore toujours autant le sifflement de théière qui précède l'obtention d'un résultat.
Gros Bob leva les yeux au plafond, puis les trois plongeurs prirent le chemin du retour, suivis par un traîneau chargé de tous les tubes intacts qu'ils avaient pu trouver.
-La dernière équipe est rentrée, grésilla le haut-parleur de la passerelle.
-Qu'ont-ils rapporté ? demanda posément Ectasiltémoc.
-Plusieurs tablettes gravées faites d'un matériau inconnu, ainsi qu'une collection de roches phosphorescentes de couleurs variées.
-Apportez-les.
-Bien, capitaine.
Lesdites tablettes s'avérèrent être chacune un ouvrage de plusieurs centaines de pages, divisé en de multiples branches, que l'on parcourait suivant les divers itinéraires proposés par la page de garde. Les pierres s'encastraient dans les réceptacles prévus à cet effet au bas des tablettes, et permettaient d'effectuer une sélection des sujets ou de composer le code individuel d'une page précise. Chaque roche colorée avait la propriété d'altérer le matériau de la tablette lue, et lorsque sa structure cristalline se transformait, des inscriptions différentes apparaissaient à sa surface. Néanmoins, l'équipage ne disposait que de neuf pierres alors que les indications de lecture en mentionnaient au minimum une trentaine, ce qui limitait grandement l'accès aux textes.
-De toute façon, je crois que celle-là ne contient que des recettes de cuisine.
-Et ça a l'air bon ?
-Ma foi, on y trouve des concepts appétissants.
-Pour ma part, entre le poisson aux algues et les algues au poisson je m'étonne de ne pas avoir encore développé de réaction allergique au phosphore. Si on pouvait transmettre tout ça au cuistot et manger quelque chose de plus développé, je ne dirais pas non.
-Il y a toujours les conserves de la soute.
-Non merci, ça me rappelle vraiment trop les boites de granulés que je versais dans mon aquarium, chez moi. D'ailleurs ça ne doit pas être si nourrissant qu'on le prétend, puisque mes poissons préfèrent se bouffer entre eux.
-Tu crois que les Piques ont un entraînement spécial pour manger de ça chaque jour pendant plusieurs mois ?
-Et sans pratiquer le cannibalisme.
-Vous vous éloignez un peu du sujet de nos recherches, messieurs.
La voix glaciale du capitaine renvoya chacun dans l'étude comparative et silencieuse de sa tablette avec les autres formes d'écrits collectés jusqu'alors. Les quelques équipes avaient amassé une quantité étonnamment importante de documents, et Ectasiltémoc tenait absolument à reconstituer le plus précisément possible les évènements qui avaient conduit à l'indescriptible chaos environnant.
-Madame Gavilan ?
-Je suis navrée capitaine : nous n'avons absolument rien au sujet d'un glissement de terrain, d'une montée des eau, d'une expérience de forage qui aurait mal tourné, ou... Bref, rien qui puisse expliquer la présence d'un tel bataclan à notre profondeur.
Cette conclusion ne satisfaisait pas Ectasiltémoc. Il s'était passé ici quelque chose de terrible, et quelqu'un avait bien du avoir la présence d'esprit de le consigner quelque part.
-Cependant ce n'est pas tout. Nos documents sont pour la plupart très incohérents : il est anormalement rare que des archives distinctes mentionnent les mêmes évènements.
Le capitaine fronça les sourcils.
-Et quand bien même les datations sont alors très variables, comme si plusieurs calendriers possédant autant de points d'origines différents étaient utilisés.
-C'est une aberration, jugea Ectasiltémoc. Il ne saurait exister plusieurs fins des temps.
-Navrée, capitaine : je n'ai aucune autre explication. Sur la forme également, par ailleurs : nous avons trouvé plusieurs dizaines de procédés d'écriture dans une zone de quelques kilomètres carrés, et tout porte à croire que nous pourrions en croiser bien plus si nous élargissions le champ des recherches.
-Cela a-t-il seulement un sens ? marmonna Ectasiltémoc d'un ton songeur.
-En fait nous ne savons même pas à qui devoir ces bizarreries. Les pouvoirs et les formes animales mentionnées sont aussi éclectiques que le reste. On finirait par croire qu'il n'y avait pas de peuple dominant à cet endroit. C'est parfaitement incompréhensible.
Contre toute attente, c'est cette fois-ci un mince sourire qui apparut sur les lèvres du capitaine, tandis que les rides sur son front réapparaissaient.
-Au contraire : les choses semblent nettement se clarifier, madame Gavilan.
Celle-ci leva un sourcil interloqué, mais l'homme des renseignements prit la parole avant qu'elle ne puisse formuler son interrogation.
-Malgré une grande disparité de formes et de contenus, il existe plusieurs similitudes dans le déroulement des évènements. Sur les quelques archives historiques plus ou moins complètes, on peut remarquer que le climat politique est rarement au beau fixe durant la période récente. Le pays subit au mieux d'importantes tensions avec ses voisins, au pire une invasion en règle. Quand les derniers journaux ne parlent pas d'une pseudo arme absolue que l'ennemi aurait en sa possession.
-Quel genre d'arme ?
-Oh, jamais rien qui puisse transformer une terre en fond marin. Il s'agit dans la plupart des interprétations d'une sorte de bombe chimique ou bactériologique. Rien de bien original, je le crains. Et aucune source sérieuse ne parait attester qu'une telle arme ait été utilisée avec succès.
-D'un autre côté, si tel était le cas il n'y aurait plus personne pour l'écrire, non ?
-N'exagérons rien, il y a toujours des survivants : les Cartes sont des créatures vivaces.
-En effet, confirma Ectasiltémoc.
Chacun put remarquer sourire du capitaine avait disparu.
Ayant une fois de plus obtenu l'attention de ses officiers, Ectasiltémoc commença :
-De nombreux problèmes ébranlent manifestement notre hypothèse première, et reviennent tous à une question de diversité. Il est inconcevablement difficile de trouver dans ces ruines deux textes qui appartiennent à la même histoire. Ce pourquoi je pense qu'il y a ici davantage qu'une seule cité.
-Et il y en aurait combien, d'après vous ? demanda le timonier.
-Regardez autour de vous.
Depuis son fauteuil de commandement, le capitaine désignait les écrans répartis en demi-cercle autour de la passerelle, qui montraient chacun une image de l'extérieur telle que la filmait l'une des caméras du sous-marin.
-Il existe énormément d'architectures radicalement dissemblables tout autour de nous. Et tout autant de textes, de supports et de cultures sans aucun lien entre eux à l'intérieur. Or cet ensemble si hétéroclite se trouve pourtant agglutiné en un seul et même endroit.
-Et vous avez une explication, je présume ? demanda Gavilan, interloquée.
-Encore une fois, la forme nous en apprend bien plus que le fond. Observez mieux ce gigantesque chantier de démolition qui nous entoure. Ces bâtiments ne sont pas agencés comme les édifices d'une ville après un tremblement de terre... Mais plutôt comme les papiers froissés au fond d'une corbeille.
Un certain temps fut nécessaire pour que tout le monde digère la métaphore.
-Donc, tout cela à été "jeté" au fond de la mer, résuma Johanes.
-En effet.
-Et quelle en serait la raison ?
-Nous avons appris que chacun de ces peuples courait au désastre à courte échéance. Supposons que ce désastre ce soit produit, que la guerre ait été terminée, qu'il y ait eu un vainqueur et un vaincu. L'histoire devrait s'arrêter là. Or nous savons que celle de notre monde est parsemée d'innombrables guerres. Aux dernières nouvelles, quatre-vingt-sept d'entre elles ont été officialisées "Grandes Guerres". Ce nombre est sans doute inexact, et quand bien même il serait juste, ce qu'est exactement une Grande Guerre est sujet à controverse. Mettons toutefois qu'à la fin de l'une d'entre elles, un peuple soit battu, sans aucun espoir de retour. Que sa civilisation soit anéantie et que sa philosophie soit morte. Si son Joker ne voulait pas s'arrêter là ?
-Où voulez-vous en venir ? demanda Zloth.
-Le capitaine affirme que nous ne sommes pas les premiers Trèfles, déclara Gavilan.
-Certes, confirma Ectasiltémoc en retrouvant son mince sourire. Lorsque son peuple est définitivement détruit, le Joker se débarrasse de son jeu, tire d'autres Cartes, crée une nouvelle civilisation, un concept neuf avec lequel il pense pouvoir obtenir sa revanche, et la partie reprend de plus belle.
-Barre à tribord, toute ! Collez au fond tant que possible. Si nous devons être à nouveau poursuivis, prenons le plus d'avance possible tant que nous sommes invisibles.
Les ordres rugis par un capitaine revigoré résonnèrent dans l'habitacle. Chacun des membres d'équipage s'y conformait scrupuleusement, avec une ardeur qu'aucun ne se connaissait jusqu'alors. Les turbines MHD du Dichotomic grondèrent alors que le bâtiment se mettait en branle, puis s'apaisèrent lentement alors que la vitesse se stabilisait.
-Nous en avons fini ici ? s'inquiéta Johanes.
-Cela vous tourmente ? lui rétorqua Ectasiltémoc.
-Je songe seulement que nous quittons la défausse de Decenta Emdor.
-Et nous finirons par y retourner si nous ne faisons rien pour l'empêcher.
-Peut-être pas avant plusieurs siècles.
-Non, la guerre a déjà commencé. Et nous ne sommes pas en position de force, chacun d'entre nous le sait. C'est précisément la raison pour laquelle cette mission nous a été confiée. De surcroît, peu m'importe que notre chute advienne d'ici un siècle ou plusieurs millénaires, je ne crois pas qu'on puisse s'y prendre trop tôt pour nous épargner ce sort funeste.
Mon premier chapitre à deux chiffres (ému)
Dernière édition par Robert Begarion le Sam 27 Oct 2012 - 20:14, édité 19 fois (Raison : Imperfections dans les raccords.)
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DT12 – chapitre onzième
Si jamais les spoilers remarchent un jour, vous pourrez lire ceci :
Par ailleurs, j'ai remarqué que la diversité de points de vue ne vous laissait pas indifférents. Par curiosité, j'aimerais connaître vos préférences. Même si je sais déjà que Parthé aime beaucoup Élice, que Wolf adore Xut et que Jackal est un fan inconditionnel de Gros Bob, je réclame vos avis. Vous préférez les chapitres avec quels personnages ?
(notez qu'à défaut, vous pouvez aussi dire lesquels vous haïssez)
- Spoiler:
- DT12 – chapitre onzième – Combat naval
Alors que ses effets personnels s'entassaient machinalement au fond de sa besace, le voyageur contemplait songeusement le paysage au delà de sa fenêtre. Les masures rafistolées de ce village perdu sur la côte sauvage du Grand Continent, la poignée d'embarcations fatiguées au milieu du mouillage et ces quelques bonnes gens qui avaient eu le cœur de l'accepter parmi eux. Plusieurs mois de sa vie s'étaient écoulés ici, et d'aventure il avait rencontré certains des habitants voilà déjà plusieurs années. Le capitaine était de ceux-là. Aussi loin qu'il s'en souvienne, le vieil homme avait toujours fait partie de ces personnages tant transcendés par leur fonction qu'on ne les nommait plus qu'au travers de celle-ci. Il était le capitaine du Mesuré. Le voyageur ne connaissait pas son nom, et le capitaine ne savait du sien que deux lettres. C'était suffisant pour établir une relation de subordination.
La porte s'ouvrit en grand. Jock entra sans frapper.
-C'est pas vrai ce qu'on dit ?
-Que dit-on ? lui répondit Ro avec curiosité.
-"On", ou plutôt tout le monde, prétend que tu ne vas pas nous accompagner.
-Ah. Dans ce cas : si, c’est tout à fait exact. Je serai parti avant que vous n'appareillez de toute manière. Donc je ne pourrai pas être du voyage.
-Pourtant, on aurait bien besoin d'un harponneur tel que toi.
Ro se retourna brusquement, l'air inquiet.
-Quoi donc ? demanda Jock, surpris.
-Étant donné que tu as appris la nouvelle de mon départ, donc je m'attendais à...
-Tu t'étonnes que Marion ne soit pas déjà derrière toi à te harceler pour que tu restes ?
-Oui : c'est exactement ça, marmonna Ro.
Un rare sourire vint éclairer le visage de Jock.
-Alors tu m'en dois une. Si j'ai bien compté, tu auras le temps d'atteindre la sortie du patelin avec qu'elle ne te tombe littéralement dessus. Si tu cours vite. Mais tu ne m'as pas répondu : qu'est-ce qu'on va faire sans ton coup de harpon ardent ?
Ce disant, il inclina la tête en direction du long paquet adossé entre le pied du lit et la fenêtre. Ro considéra l'objet à son tour l'objet, résistant à l'envie persistante de s'en approcher pour l'ouvrir. Un coup d’œil vers Jock lui apprit qu'il faisait le même effort, mais ses yeux à lui pétillaient d'envie en fixant cette boîte terne.
-Vous ne chassez plus la baleine, donc vous n'avez plus besoin de harponneur.
-Pourtant, ton premier coup avait semblé plutôt efficace. Si la seule révélation d'un sous-marin Pique croisant dans nos eaux n'avait pas semé un vent de panique, je suis d'avis que nous l'aurions arraisonné.
-Ou bien coulé.
-Non, je ne pense pas. Ces enfoirés de Piques se cachent derrière leur technologie : ce sont des couards. Ils se seraient rendus à l'instant où ils auraient compris qu'on les tenait à notre merci grâce à ton arme de choc.
Ro sourit à son tour.
-Si c'est mon arme que vous voulez, je te la laisse volontiers.
-Pardon ? Articula Jock, éberlué.
-Je n'avais pas l'intention de l'emporter, et son feu s'est presque totalement consumé.
-Donc on ne pourra pas s'en servir ?
-Probablement pas, non. Avec ou sans moi, rien n'y changera. Par contre, ça pourra te faire un bon souvenir de cette journée de pêche.
-Si tu le dis, conclut Jock sans même tenter de cacher sa déception.
Le voyageur avait relevé sa capuche et s'éloignait de son ancienne demeure en évitant de trop songer à ce qui aller désormais arriver à l'équipage du Mesuré. Ils s'apprêtaient à affronter un ennemi, et lui ne tenait pas à avoir d'ennemi. De plus, les troupes d'Ombrenuit seraient arrivées d'ici deux jours, donc très certainement avant que le baleinier ne revienne de sa mission. Et une fois que l'armée entière des Métissés camperait dans les environs, la complicité d'une bande de flibustiers ne suffirait plus à assurer sa sécurité. Voilà pourquoi il devait mettre les voiles le premier.
Ses pas le guidèrent derrière la masure servant d'atelier au tanneur du coin, un endroit dont personne ne supportait l'odeur bien longtemps. On pouvait donc espérer y avoir un entretien en toute discrétion. Accoudé contre une clôture et plissant le nez de dégoût, son contact était là. Ro se découvrit et salua la vieille femme d'un signe de tête.
-Bonjour mon p'tiot. C'est bien vrai, ce qu'on raconte. Tu nous quittes ?
-Tout à fait, Odile. Dis-moi, as-tu transmis ma commande ?
-Pour sûr. Tiens, je te marque l'endroit là-dessus. Tu demanderas Shaellia.
Intrigué, Ro parut vouloir demander quelque chose, mais se ravisa.
-Ce fut un plaisir Odile.
-Pour moi aussi, p'tiot.
Ro empocha le papier et emprunta le chemin vers la sortie du village.
"Mettez à la cape !" beugla le capitaine.
Aussitôt, les hommes de manœuvre s'affairèrent aux cordages pendant que le timonier amenait le Mesuré face au vent. L'opération accomplie, tous reprirent leur souffle, le feulement du vent sifflant dans les huniers du baleinier immobile. Dérivant au large des côtes Métissées et pourvu d'un tirant d'eau minime, il resterait ainsi presque invisible aux détecteurs d'un éventuel agresseur sous-marin.
-Qu'est-ce qui vous fait croire que ce truc reviendra droit sur nous, capitaine ? lui cria Helen depuis le grand hunier.
-Il y venait lorsque nous l'avons mis en fuite, expliqua le capitaine, puis il a plongé droit vers les Mortes Eaux. Si jamais il a un tant soit peu d'esprit, il ne s'y aventurera pas davantage et cherchera à rallier la côte.
-Pourquoi pas Pesda ou Ebluc ? demanda à son tour Jock.
-C'est certain qu'il y serait mieux accueilli. Et malgré ça, ce salopiaud voulait nous rendre visite. Donc que ce soit pour se ravitailler ou parce qu'il a une mission, il semblerait qu'il n'ait pas réellement le choix. Dans ces conditions, nous l'attendrons ici pour finir ce que nous avons commencé.
Un lourd grondement d'assentiment parcourut l'équipage à ces dernières paroles.
-Pas question d'avoir cette sardine dans nos filets.
-Surtout au moment où notre armée revient des combats.
-Sûr, on peut pas le laisser rôder dans le coin.
Le capitaine leva les bras pour mettre fin à ce tumulte et donna ses instructions.
-Très bien, on ne sait pas dans combien de temps notre client reviendra (si jamais il revient de ces eaux maudites) alors je suggère que chacun s'installe à son aise. Nous relaierons les éclaireurs toutes les deux heures. D'ici qu'ils repèrent quelque chose, rompez.
Cela survint moins de trois roulements plus tard, lorsqu'en plein vol la dragonne incarnat poussa un rugissement suraigu, puis commença à décrire de larges cercles au dessus d'un point invisible depuis le navire.
-Branle-bas de combat ! Le bâtiment ennemi a été repéré !
Les aboiements du capitaine eurent tôt fait de réveiller les marins assoupis, et bien vite le pont du Mesuré grouilla d'individus alertes et affairés.
-Rectifiez le cap. Un demi-degré à bâbord.
Si le pointillisme du capitaine Ectasiltémoc agaçait le moins du monde son équipage, celui-ci n'en laissait absolument rien paraître. Les corrections étaient toujours effectuées dans le silence le plus complet qu'affectionnait tant le maître à bord. Les instruments avaient été séparés de leurs fonctions bruyantes ou bien celles-ci avaient-elles été reléguées aux seuls casques audio des différents opérateurs. Le temps était calme en surface, aucun bâtiment ne croisait dans les environs et les côtes du Grand Continent n'étaient plus très loin. En somme, le retour du Dichotomic s'annonçait bien moins mouvementé que l'aller.
-Vingt mètres.
-Montez encore jusqu'à dix mètres.
Sur la commande du timonier, les ailerons du submersible s'infléchirent et celui-ci accentua son inclinaison. À mesure que la profondeur diminuait, le plafond de portée des sonars diminuait, tandis que les émetteurs radio gagnaient en puissance.
-Quinze mètres.
-Anomalie détectée à onze heures sur quatre cent mètres, déclara Zloth. Elle prend de la vitesse.
-Stoppez la remontée, ordonna Ectasiltémoc.
-Anomalie à trois cent cinquante mètres.
Précisément à cet instant, la structure du sous-marin fut violemment ébranlée. La secousse s'accompagna d'un bruit lourd et soudain. De nombreux autres bruits proches ou plus éloignés suivirent, chacun appairé avec une secousse consécutive.
-Coque endommagée sur les compartiments bâbord six et sept, annoncèrent mécaniquement les haut-parleurs.
-Manœuvre d'évitement, sans tarder, ordonna son capitaine au timonier.
-L'anomalie est à moins de trois cents mètres.
-Maître Johanes, débarrassez-nous de ce gêneur, gronda Ectasiltémoc.
-Réapprovisionnement du gaillard d'avant, plus vite que ça ! tonitrua le capitaine.
Une chaîne de marins s'affairaient à amener de gros paquets rebondis sur la proue du navire, que les trois dragons emportaient par poignées de trois ou quatre. Ils survolaient ensuite la silhouette du sous-marin, lâchaient leur lest et l'arrosaient copieusement de flammes avant qu'il ne percute la surface des eaux. La toile protectrice brûlée, les ballots s'échappaient et se décomposaient en sombrant, sans toutefois cesser de se consumer.
Au contraire, la violence des multiples détonations accompagnant la chute des objets paraissaient s'amplifier à mesure que ceux-ci sombraient plus profond. Les bombardiers animaux s'employaient quant à eux à positionner leurs largages le plus près possible de la verticale du sous-marin, opération rendue difficile par les changements de caps intempestifs opérés par celui-ci. Voyant une ombre s'échapper, bientôt suivie d'une traînée, le dragon cuivré poussa à son tour un cri perçant en direction du baleinier.
-Torpille ! relaya la vigie.
-Effleurez à mon signal !
La dragonne incarnat était revenue se percher sur l'espar de voltige tribord, et un quatrième reptile, tout de vert ailé, venait de faire son apparition à bâbord. La vigie scrutait toujours les flots en quête d'un sillage, jusqu'à ce que :
-Torpille en vue !
-Arquez et bordez ! répercuta le capitaine.
Les deux dragons plièrent leurs membres supérieurs dorsaux à l'horizontale pendant que les matelots tiraient à pleines mains sur les drisses et écoutes des huniers, perroquets et cacatois.
-À portée ! hurla la vigie au capitaine.
-Déployez ! rugit celui-ci.
Les quatre ailes et les neuf voiles se gonflèrent pleinement au même instant, ce sur quoi le Mesuré bondit une nouvelle fois hors de l'océan. Les membres de l'équipage penchés par-dessus le bastingage purent alors voir la torpille tracer un trait d'écume plusieurs mètres sous l'étrave du navire et poursuivre sa course loin derrière eux. Puis le baleinier atterrit à grand fracas dans des gerbes époustouflantes d'eau salée.
Exactement au dessus du Dichotomic.
-L'anomalie a disparu ! lança Zloth à la volée.
-Confirmez-vous la destruction de l'objectif, Maître Johanes ?
-Je ne crois pas, non, affirma celui-ci.
Le manque de rigueur de cette affirmation agaça Ectasiltémoc, et cet agacement fut à son comble lorsque Zloth rajouta à son adresse :
-La disparition s'est produite légèrement avant le moment prévu pour la collision, toutefois avec les retards, les parasites et le temps de déflagration, même en considérant une légère imprécision de calcul, elle aurait du se produire légèrement après. Par conséquent, on peut en déduire que l'impact...
Cette fois-ci, ce fut une terrible poussée verticale qui enfonça le Dichotomic. De multiples voyants rouges s'allumèrent sur la passerelle, tandis que tout un flanc du tableau de contrôle s'éteignit brusquement. Les hauts-parleurs signalèrent brièvement une perte d'alimentation dans une partie des compartiments, puis émirent quelques crépitements incompréhensibles et se turent brusquement.
-Barre à tribord toute ! hurla Johanes.
Immédiatement, une seconde poussée frappa la structure du submersible. Propulsé contre l'accoudoir droit du fauteuil de commandement, Johanes s'y cramponna et brailla à l'adresse du capitaine :
-Je pense que vous n'adoptez pas la bonne stratégie !
-Vous avez donc mieux à suggérer ?
-Effectivement. L'adversaire nous surpasse en mobilité, en célérité et dispose de la capacité de se placer hors de notre portée. De plus, notre immersion n'est semble-t-il d'aucun secours face à ses assauts. J'estime donc qu'il nous faut aller là où ces avantages seront les plus ténus. Si vous permettez que je dirige de la manœuvre ?
Ectasiltémoc observa son subordonné avec une stupéfaction grandissante, comprenant où il voulait en venir. Il examina rapidement ses autres possibilités, tout en sachant pertinemment que le désespoir le gagnait déjà lentement avant que Johanes n'ouvre la bouche. Le capitaine du Dichotomic n'avait plus guère le choix. Il indiqua donc silencieusement son assentiment au maître artilleur.
-Vitesse de montée maximale, annonça aussitôt Johanes. Je prends le commandement des opérations. Paré à l'émersion !
-Les turbines répondent très mal, diagnostiqua Gavilan : pas d'émersion avant au moins une minute. Peut-être moins si je parviens à reconnecter les circuits principaux.
Sans se démonter, Johanes enchaîna avec ses instructions suivantes :
-Armez les tubes trois et quatre. Torpilles mixtes. Pente finale à 200%. Guidages respectivement infrarouge autonome et optique manuel. Lancez dès que possible.
-Capitaine, l'ombre grossit ! s'exclama Mâchoire.
-Le sous-marin tente de faire surface, confirma la vigie.
-On change de trajectoire, ordonna le capitaine. Amenez-nous sur son flanc !
Mâchoire et ses comparses ôtèrent leurs pièces d'artillerie du garde-fou et se reculèrent en direction de la mâture. À peine le Mesuré s'était-il écarté du Dichotomic que derrière lui jaillirent simultanément deux projectiles longilignes. Les missiles s'élevèrent verticalement jusqu'à une hauteur d'approximativement trente mètres, puis fusèrent dans des directions opposées : chacun à la poursuite de l'un des dragons en vol.
Le cuivré plongea aussitôt en piqué tandis que son congénère optait pour une série d'acrobaties ayant pour but de désorienter son poursuivant. Le premier missile inclina paresseusement sa course en direction de l'étendue aquatique, laissant provisoirement sa cible gagner du terrain. En revanche, le second se montra beaucoup plus agressif et, au terme de périlleuses évolutions aériennes suivies par deux équipages muets, finit par déclencher son explosion dans une boucle trop resserrée, déchiquetant les ailes du dragon bleuté, l'aveuglant brutalement et carbonisant tout son épiderme dorsal. L'animal chuta dans l'océan en poussant une longue plainte déchirante.
Alors qu'il s'apprêtait à percuter à son tour la surface des flots, le dragon cuivré parvint à éviter le bain forcé en arc-boutant ses ailes, puis entama aussitôt un virage serré pour esquiver l'impact prochain du missile. L'extrémité de son aile gauche effleurant la surface, il vit avec stupéfaction que le projectile avait radicalement dévié sa course et plongeait désormais sur le Mesuré tel un oiseau de proie métallique. L'équipage avait également du s'en rendre compte puisque les voiles pivotaient dans un simulacre de manœuvre échappatoire.
Le missile, qui visait directement la superstructure du baleinier, percuta de plein fouet la grand-vergue lorsque celle-ci entra subitement dans son collimateur suite au virement de bord entrepris en désespoir de cause. L'explosion pulvérisa la voilure, balaya instantanément le pont supérieur de tous ses occupants, puis l'onde de choc acheva de démâter le navire.
La tête en sang, Jock releva le nez. Il avait été projeté dans l'entrepont par le souffle de la déflagration. Ses carreaux d'arbalète s'étaient répandus un peu partout, et il en avait sans doute deux ou trois plantés dans le corps. Le réceptacle oblong que lui avait confié Ro s'était cassé en deux, et un grand rouleau de parchemin en sortait, calciné par endroits. Jock n'avait pas compris pourquoi il s'était moqué de lui en lui confiant ce dessin de son harpon, très bien réalisé au demeurant si on exceptait les multiples marques de brûlures. Et au vu de sa situation actuelle, il ne le comprendrait probablement jamais.
Péniblement, il remonta l'escalier à quatre pattes. Le pont était embrasé en plusieurs endroits, jonché de cadavres ou de blessés agonisant un peu partout. Le corps du capitaine était allongé dans une posture distordue au pied de ce qui restait du mât d'artimon. Jock parvenait à reconnaître très peu de visages. Les flammes en avaient défiguré une grande partie. Alors que son regard se perdait dans le lointain au milieu des volutes ardentes, un frisson glacial le parcourut. Une forme sombre et bombée émergea en face du Mesuré.
-Excellente manœuvre tactique, Maître Johanes. Vous êtes digne de votre réputation.
-Je vous remercie, répondit celui-ci.
-Le tube un est-il à nouveau opérationnel ?
-Il l'est, confirma amèrement le maître artilleur en sachant ce que cette réponse impliquait.
-En ce cas, coulez-moi promptement ce contretemps, énonça la voix impassible du capitaine Ectasiltémoc.
Par ailleurs, j'ai remarqué que la diversité de points de vue ne vous laissait pas indifférents. Par curiosité, j'aimerais connaître vos préférences. Même si je sais déjà que Parthé aime beaucoup Élice, que Wolf adore Xut et que Jackal est un fan inconditionnel de Gros Bob, je réclame vos avis. Vous préférez les chapitres avec quels personnages ?
(notez qu'à défaut, vous pouvez aussi dire lesquels vous haïssez)
Dernière édition par Robert Begarion le Sam 27 Oct 2012 - 21:19, édité 10 fois (Raison : Veni, Vidi, Corrigi)
Robert Begarion- Dix de Cœur
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Re: DT12
J'aime beaucoup. Tu nous donnes des infos à petits morceaux et je me sens un peu nulle avec mon hypothèse d'un équipe disparate a bord du sous-marin.
Sincèrement j'ai hâte d'avoir de nouvelle d'Élice et Christian et de Xut et compagnie. C'est plus comique avec eux.
Sincèrement j'ai hâte d'avoir de nouvelle d'Élice et Christian et de Xut et compagnie. C'est plus comique avec eux.
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DT 12 – chapitre douzième
Plus de dix mois d'attente, vraiment ? Certes, j'ai eu des empêchements, j'ai écrit d'autres trucs entre temps (pas tant que ça non plus), et le forum a subi une légère baisse d'activité, aussi. Enfin, ça n'excuse rien. Le douzième chapitre de DT12. Je ne pense pas qu'il ai de signification particulière, non. Mais j'ose croire qu'il fut plus difficile à écrire que les autres. Et que le résultat en valait la peine. Fi de complaisance envers moi-même, le voici :
Et maintenant, il est temps de mettre à l'épreuve la vitesse de réaction de Wolfy.
- Spoiler:
- DT12 – chapitre douzième – Une nuit radieuse
Depuis le couvert touffu qu'offraient les arbres étranges du grand continent, le clair de lune semblait illuminer le paysage à perte de vue. Sous cette étrange lumière, la végétation étincelait d'un vert plus brillant qu'en plein jour. Plusieurs créatures nocturnes tentaient de se mouvoir furtivement, mais leurs formes sombres se détachaient nettement du paysage dès lors qu'elles quittaient les rares zones d'ombre. C'est en contemplant ce spectacle étonnant et magnifique alors qu'elle progressait précautionneusement, que Clarisse sut qu'elle avait été avisée de choisir l'itinéraire le moins voyant. Elle stoppa son avancée et ses réflexions sous la frondaison d'un immense gommier.
Les constructions mentionnées par l'informateur de la taverne se trouvaient à moins d'une centaine de mètres de sa position, sur une petite élévation de terrain. Si elle était venue par le sentier en contrebas, tout habitant local aurait pu observer son avancée depuis plusieurs dizaines de minutes. À supposer que ce bled soit habité. Parmi les quatre ou cinq grandes masures de pierre sèche que Clarisse pouvait apercevoir et à en croire les minces orifices qui leur servaient de fenêtres, aucune ne paraissait abriter de source lumineuse. Bien sûr, toutes n'étaient pas visibles depuis sa position : d'après ses différentes observations elle estimait le nombre total des habitations à neuf, plus ou moins circulairement disposées autour d'une sorte de large puits condamné.
Après avoir vérifié une dernière fois les cadrans de sa combinaison nocturne, et être ainsi rassurée quant à la furtivité du déplacement qu'elle s'apprêtait à exécuter, la militaire se lança en direction de la butte. Clarisse nota que cette étrange nuit étincelante semblait également amplifier le moindre des bruits de la forêt, à l'exception de ses propres pas. Assez curieusement, cette observation ne fit que renforcer sa nervosité.
Parvenue au pied de la première bâtisse et au terme de sa progression, elle s'aperçut subitement qui si cette dernière lui avait paru interminable, la faute en revenait aux proportions particulièrement trompeuses de la première. Les fenêtres n'avait rien d'étroit : ses deux coéquipiers et elle-même pourraient aisément s'engouffrer de front dans l'une d'entre elles. Mais seulement après avoir escaladé les six mètres qui la séparaient du sol. La construction d'édifices de cette taille avait assurément requis la collaboration de plusieurs dizaines de Métissés. À l'époque en question, plusieurs tribus devaient vivre de concert dans cet étrange village. Ou bien les groupes ethniques étaient-ils alors sensiblement plus importants qu'aujourd'hui sur le Grand Continent ? Partant de cette hypothèse, Clarisse frissonna en songeant à ce qui avait pu forcer une population si nombreuse de guerriers farouches à quitter la forêt pour s'installer sur cette éminence naturelle. Peut-être tout simplement la forêt elle-même ?
Mue par un instinct inconnu, Clarisse décida de s'éloigner de la première bâtisse pour s'intéresser plutôt celle qui se trouvait immédiatement sur sa droite. La plus avancée vers le centre du cercle, nota-t-elle. Et aussi la plus rassurante pour qui avait peut-être frôlé un danger mortel en s'aventurant seule dans un forêt hostile quelques minutes plus tôt. Cette nuit était si accueillante, radieuse et féérique... Tout comme l'atmosphère surchauffée était sinistre et oppressante, davantage à chaque minute.
Réfugiée à l'intérieur de l'édifice central, Clarisse sut enfin quelle activité requérait l'occupation d'aussi grandes habitations désaffectées. Une table branlante mais point de poussière à sa surface, à quelques mètres de l'entrée. Des planches brisées, des clous et de petites lattes de métal en pagaille un peu partout. Un amas de caisses éventrées dans un coin. Ajoutez à cela les cordages, pièces de bois et toiles usagées qui dépassaient ou pendaient d'une mezzanine récemment renforcée. Sous un aspect extérieur vétuste, le dépôt de marchandises abrité à l'intérieur paraissait fonctionnel, et à même de dépanner n'importe quel vaisseau marchand en difficulté qui accosterait à proximité.
Arrivée sur place plus tôt, Clarisse aurait sans doute pu surprendre les activités clandestines de l'équipage inconnu. Désormais, l'endroit était désert. En exceptant bien entendu la présence oppressante qui occupait la pièce. Toute pesdane aguerrie qu'elle était, les sueurs froides dans son dos devenaient impossibles à ignorer, n'estompant hélas en rien la touffeur environnante. Elle s'obligea néanmoins à effectuer un tour de reconnaissance dans la pièce, vérifia que chacune des caisses éventrées était bien vide, puis monta sur la mezzanine pour finaliser son inspection, bien qu'elle sût d'avance n'y trouver guère que des matériaux de seconde main en pagaille.
Ce furent les cheveux qu'elle vit en premier. Elle pataugeait pourtant dans le sang depuis plusieurs mètres, mais peut-être refusait-elle de l'admettre. Le pavement était sombre, ses semelles humides. Elle ne pouvait pourtant ignorer le bruit de succion que produisait chacun de ses pas, tout comme cette masse hirsute et gluante qui dégoulinait sur une chute de toile jadis blanche. En promenant son regard parmi les pièces de bois entassées autour d'elle, elle finit par distinguer chacun des autres morceaux. Son esprit reconstituait distraitement le puzzle, tandis que les élancements de ses jambes l'imploraient de courir le plus vite possible hors d'ici.
Pourtant, un espace dégagé au milieu de ce bazar sanguinolent attira inévitablement son regard. Des symboles tracés au charbon dans le sang, en passe d'être dissous dans le flot liquide. Lequel, par une conception curieuse du dallage, s'écoulait vers l'extérieur par une cavité murale sans qu'une goute ne dégouline au rez-de-chaussée. Moins d'un mètre plus loin, un tas d'ossements frais, et propres. Clarisse réalisait lentement qu'on avait sacrifié puis découpé quelqu'un, une femme, ou bien démembré puis utilisé ses morceaux en offrandes, tandis qu'un autre, impossible à caractériser, avait été... mangé ?
Partir d'ici en vie.
Tout la raison de la militaire ne s'accordait plus que sur une seule phrase. D'un seul mouvement, elle fut dehors, et son dernier espoir se démantibula sous ses yeux. Le paysage baignait dans la même clarté radieuse qu'auparavant, et le village était toujours aussi désert. Peut-être même davantage. Désert et immobile. Une étendue de terre spongieuse et inerte, parsemée de constructions intemporelles et immuables.
Mais tout autour d'elle, dans cette immobilité, se terraient des formes rampantes et tachetées. Elles ne bougeaient pas d'un poil, mais se rapprochaient tout de même. Ce n'étaient pas comme si des silhouettes changeaient subitement de place dès qu'elle détournait un peu le regard. Non, elles ne prenaient nullement la peine de se dissimuler aux yeux de Clarisse. Elles avançaient sans mouvement. Leur progression défiait ses perceptions. Leur apparence même dépassait tout ce qu'on lui avait appris à leur sujet. Elle avait pourtant su qu'ils étaient là à l'instant où elle découvrait le sang et les ossements. Simultanément, elle comprit pourquoi elle avait évité la première bâtisse, et se retrouva plongée dans les souvenirs plus vrais que nature de l'Evostim.
À Pesda, les entraînements en situation de conflit se déroulaient dans des machines de combat virtuel, véritables ogres électroniques qui officiaient à la fois d'appareils de musculation, d'émetteurs multisensoriels tridimensionnels, et de sergents instructeurs. Depuis la mise en place de l'Entraîneur Virtuel Offensif par Simulation Tactique d'Intervention Militaire, les résultats des recrues sur le terrain avaient connu une augmentation sans précédent. Chaque militaire de Pesda suivait désormais une formation intensive dans l'Evostim, le préparant à toutes les réalités de terrain imaginables, grâce à une gigantesque bibliothèque d'opérations virtuelles. Chacune de ces missions était soit historiquement recréée grâce à des enregistrements de batailles passées, soit extrapolée d'après des données informatiques incomplètes, des témoignages et des estimations de tacticiens, ou encore entièrement inventée par des instructeurs retors, profitant de l'accroissement de leur temps libre depuis l'arrivée des Evostim pour imaginer des scénarios de combat improbables.
Toutefois, parmi les innombrables escarmouches dans lesquelles l'Evostim pouvait vous jeter, une en particulier avait irrémédiablement marqué toutes les recrues. Une mission d'une difficulté absurde, qui vous prenait aux tripes à tout moment, dont la configuration changeait à chaque fois, qui tenait moins d'une série d'objectifs à atteindre que d'une épreuve de résistance à la terreur brute. Une opération qui se terminait immanquablement en boucherie à la moindre erreur, et dont aucune escouade n'était revenue au complet. La plus lourde contrepartie du réalisme de l'Evostim résidait dans les traumatismes qu'il pouvait engendrer chez les individus mal préparés. Cette opération en avait fait renoncer plus d'un à la carrière militaire. Il avait plusieurs fois été question de la retirer du programme, mais les instructeurs s'y étaient farouchement opposés. On murmurait dans les couloirs que c'était parce que la simulation avait été recréée par extraction mémorielle des quelques survivants d'une mission réelle, qui avait tourné au massacre ; et que si les données changeaient à chaque exécution, c'est que le simulateur devait jongler avec les souvenirs contradictoires et déformés par la peur qu'avaient pu fournir les rescapés. Par mémoire pour chaque soldat pesdan mort dans cette opération, et pour que les nouvelles troupes soient préparées aux tréfonds de l'horreur, il avait été décidé de ne rien changer au programme de l'Evostim.
La mission « Prototype recovery » vous fait endosser le rôle d'une escouade de reconnaissance peu entraînée et disposant d'un matériel minimal, venus récupérer un prototype d'aéronef tombé au cœur de la jungle eblucoise. Aucun des participants ne peut se douter qu'ils profanent ainsi la terre sacrée des Jaguars, en entrant dans le périmètre interdit autour de leur temple caché. Ce qui est annoncé par l'Evostim comme une simple mission de récupération « entrer, trouver, sortir, ne pas se faire repérer » se transforme alors beaucoup trop tôt en épreuve de survie. Les chanceux sont alors ceux qui ne découvrent pas la nature réelle de la simulation en butant sur le cadavre exsangue d'un de leurs équipiers, avant même de s'être rendus compte qu'il manque à l'appel. Il ne s'agit alors plus de mettre la main sur une quelconque épave, mais de rejoindre au plus vite le point d'extraction en survivant aux pièges mortels et embuscades incessantes sur le chemin, en comprenant rapidement qu'aucun itinéraire n'est sûr. Car l'opposant est constitué des forces spéciales les plus mystérieuses et les plus mortelles d'Ebluc, sur un terrain qu'elles peuvent pratiquer les yeux fermés. Le pire étant que pour survivre, il est impératif de garder à l'esprit – tout en s'interdisant de trop y penser – que chaque équipier ne répondant plus connait probablement déjà une mort sacrificielle atroce entre les mains de fanatiques à l'imagination morbide et à la soif de sang insatiable.
Clarisse réalisait parfaitement qu'elle n'était plus dans l'Evostim, et que les Jaguars autour d'elle n'avaient rien de virtuel. Un froid glacial engourdissait chacun de ses membres, tandis qu'elle se demandait si c'était cela qu'être paralysé par la peur. Peut-être que ses jambes pouvaient encore courir, si elle parvenait à rassembler ses forces pour leur demander. Mais prendre la fuite avait-il encore un sens ? Où pourrait-elle se cacher, s'abriter, se mettre en lieu sûr ? Tout ce qu'elle parviendrait à accomplir, si d'aventure elle passait au travers des rangs de ces guerriers d'élites et réalisait l'exploit de les distancer suffisamment longtemps pour rejoindre ses compagnons à plusieurs kilomètres de là, serait d'indiquer leur position à une troupe supérieure en nombre, en puissance et en expérience sur ce terrain. Plutôt que les entraîner dans sa tombe, elle pouvait également mourir ici, sans rien révéler de ses identité et objectif. Mais en aurait-elle le courage ?
Avant qu'elle ne puisse répondre à cette question, l'un d'eux fut sur sa droite. Clarisse n'avait aperçu aucun mouvement, n'avait senti aucun souffle. Le visage lugubre du fauve se trouvait pourtant à moins de trente centimètres d'elle, surplombant un visage dissimulé dans l'ombre, mais dont on pouvait apercevoir toute la sauvagerie dans le regard. Ses jambes pouvaient peut-être courir, ou non. Ce qu'elle sut à cet instant, avec la netteté d'un éclair dans le ciel nocturne, fut qu'elles étaient encore parfaitement capables de décocher un coup vif et percutant entre les dents d'un félin. Clarisse eut alors le temps d'observer la canine supérieure gauche se briser et voleter dans la nuit, avant que l'homme-bête ne soit projeté en arrière. Le corps fit un bruit étouffé en atterrissant sur la terre humide. Le premier son que produisait devant elle l'un de ces êtres irréels. Distraitement, elle tenta alors de se remémorer le son de son pied heurtant le visage animal. Peut-être la peur lui battait-elle tellement aux tempes qu'elle n'avait pu entendre l'impact ?
Son esprit se dispersait, mais l'adversaire suivant était déjà sur elle. Ses pieds et poings furent aussitôt au rendez-vous. Cependant, ce n'était pas un, mais des dizaines d'assaillants qui l'encerclaient soudain. Et son arme se trouvait à l'intérieur de sa combinaison, de sorte qu'elle ne pouvait pas l'atteindre sans baisser sa garde. Impuissante, elle distribua autant de coups qu'elle pouvait à la ronde, forçant ses opposants à reculer. Ceux-ci se montraient prudents : ils savaient la partie gagnée d'avance. Inlassablement, ils se rapprochaient, et des couteaux de pierres aux tranchants affûtés apparaissaient soudain dans leurs mains. Clarisse était maintenant acculée au pied d'une bâtisse qu'elle ne connaissait pas, sans avoir eu conscience de s'être autant déplacée. Ils formaient maintenant un demi-cercle ininterrompu, et avançaient toujours. Elle apercevait leurs rictus, les cicatrices à leurs bras, et les symboles étranges sur leurs poitrines. Elle les entendait maintenant murmurer, et cette lueur étrange qu'elle voyait au travers de leurs rangs ne cessait de s'intensifier. Elle s'attendait à mourir à tout instant.
C'est alors qu'un cri déchirant fragmenta la nuit, pourfendit les bêtes avides, et dans une incommensurable fulguration, restaura le jour.
La groupe autour d'elle se sépara dans les flammes, et Clarisse put voir au milieu de la trouée ardente un corps étendu et calciné. Une meute de molosses démoniaques déchirait les chairs de ses ennemis, incendiait leurs peaux de bêtes et les transformait en torches gesticulantes. Ils tombaient les uns après les autres, s'éparpillaient dans le village en tentant de rejoindre les bâtisses les plus proches. Là encore, d'autres créatures infernales leur bloquaient sardoniquement l'accès, puis plantaient leurs crocs ignescents dans leurs veines. Aucun n'en réchappait.
C'est en étant frappée de plein fouet par la vague de chaleur que Clarisse sut qu'elle était vivante. Vivante, mais à quel prix, si les portes de l'enfer devaient pour cela s'ouvrir devant ses yeux ? Et entre les battants, silhouette macabre et crépitante, leur gardien s'avançait droit sur elle.
Car au milieu de ce flamboyant carnage, il se tenait. L'épée à la main, chevauchant un étalon de flammes, il parcourait son champ de bataille en portant l'estocade aux victimes de ses séides ardents. Lorsqu'il parvint devant la pesdane transie d'un froid glacial et moite d'une chaleur bouillonnante, il démonta. Puis il fit un pas en avant. Clarisse esquissa un mouvement de recul, pour se rendre compte à nouveau qu'elle était adossée à un mur. Alors la silhouette rengaina sa lame ; sa monture se dissipa derrière lui, balayée par une brise invisible. Son souffle serein se propagea, et les monstres disparurent un à un. La nuit reprenait ses droits, mais restait parsemée de cadavres embrasés. La vision de Clarisse s'assombrit, et l'allure de son sauveur se précisa.
Impassibles, ils se toisèrent un long moment, séparés par trois mètres d'air surchauffé et le souvenir brûlant de la scène qui venait d'avoir lieu. Le cavalier était ganté et botté, tandis qu'une cape cachait le reste. L'inconnu parut se décider à repartir, mais ne put terminer son mouvement. La gorge sèche, Clarisse lança :
-Qui, ou quoi, dois-je remercier ?
-Je ne suis qu'un voyageur. Un étranger.
-Ça, après avoir vu ce que je viens de voir, un phoque l'aurait compris.
Elle haleta.
-Pourquoi venir à mon secours ? lança-t-elle à nouveau.
-Vous n'avez à me rendre grâces en rien. Après cinq années, je suis toujours incapable de me dérober, et cela causera ma perte, ici ou ailleurs.
Malgré toute l'incompréhension qu'il y lisait, le voyageur ne parvenait pas à détourner les yeux du vert profond et... lumineux ? de ceux de Clarisse. Celle-ci parla à nouveau, d'une voix plus calme.
-Et quel est votre nom ? demanda-t-elle.
La réponse se présenta d'elle-même à ses lèvres. Et cette fois, l'entière vérité les franchit. Il ôta sa capuche et laissa sa chevelure orangée s'ébrouer à l'air libre.
-On me nomme Ro... Roland. Roland de Fièrallure.
Les yeux de Clarisse se détournèrent, Roland respira.
-Moi, c'est Clarisse Sewyld. Ravie de te connaître, Roland.
Et maintenant, il est temps de mettre à l'épreuve la vitesse de réaction de Wolfy.
Dernière édition par Robert Begarion le Lun 14 Nov 2011 - 1:20, édité 18 fois (Raison : Restauration mémorielle en cours. Ne pas éteindre l'Evostim.)
Robert Begarion- Dix de Cœur
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Re: DT12
Pas longtemps
Wolfgang- Le Monde
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Re: DT12
Je suis soufflé.
(Étrangement, je m'y attendais aussi un peu, et je suis repassé une heure plus tard ^^)
...
J'espère que tu as apprécié la lecture !
(Étrangement, je m'y attendais aussi un peu, et je suis repassé une heure plus tard ^^)
...
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Robert Begarion- Dix de Cœur
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Age : 33
Localisation : En amont d'un pommeau et au tréfond d'un fourreau.
Date d'inscription : 24/09/2008
Re: DT12
J'adore comme toujours. Je suis seulement triste que DoC soit mort.
Wolfgang- Le Monde
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Re: DT12
Et je n'ai pris que 9 minutes pour prendre connaissance de ton merveilleux récit
Wolfgang- Le Monde
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